JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
No 3625.
35me année.
7FB.SS, 26 Juin.
Tout le monde connaît et apprécie les
griefs nombreux articulés contre l'organi
sation actuelle de la Garde civique. Clas
sées en un ban unique, nos milices citoyen
nes, hommes d'un certain âge ou jeunes
gens, hommes mariés ou célibataires, pré
sentent un amalgame d'individus unifor
mément armés de mousquets, mais auquel
l'absence presque générale d'espritdecorps
et des liens d'une discipline suffisante, en
lève toute forced'initiativeou de résistance.
Les gages que doit offrir celle institution
nationale la sûreté et au bien-être publics
sont donc bien faibles et bien incertains.
En cas d'émeute ou d'invasion étrangère,
entravée dans ses opérations par les élé
ments si divers qu'elle renferme en son
sein, et malgré la valeur individuelle de
ses membres, chefs ou soldats, la Garde
civique ne pourrait prendre qu'une part
fort indirecte aux événements du jour.
Aussi, quoi de moins juste que de placer
sur la même ligne le père de famille, sur
qui repose souvent tout le poids desaffaires
et la gestion des intérêts domestiques, avec
le jeune homme libre de tout devoir iden
tique remplir? Quoi de plus irralionel
que d'exiger de l'homme touchant la
cinquantaine les mêmes services et, le cas
échéant, les mêmes travaux militaires que
du jeune garde de 25 50 ans?
Ajoutons qu'à la vérité on a eu généra
lement égard la position et aux légitimes
exigences de celle première catégorie de
soldats-citoyens. Mais en définitive l'insti
tution elle-même a dû y perdre sous le
rapport de l'ardeur au service et de l'apti
tude au maniement des armes. Les orga
nisateurs de la Garde civique ne paraissent
avoir cherché sa force que dans le nombre
et ne se sont guère aperçu qu'une compag
nie peu nombreuse d'hommes d'élite est
même de rendre des services plussignalés
la chose publique que les plus gros ba
taillons dépourvus d'une organisation soli
de et efficace.
C'est en cesensquedepuisquelque temps
de nombreuses pétitions toutes couvertes
de signatures provoquent une révision de
la loi de la part du ministère et du pouvoir
législatif. M. Rogier cependant n'en dé-
mordera pas; il déclare lui sa loi excellente;
et les pétitionnaires, quoiqu'ils fassent,
auront bien de la peine lui faire entendre
raison. Mais patience! la politique nouvelle
est bien décrépite déjà, et sous peu on en
sera probablement débarrassé pour tou
jours.
On lit dans la Gazette de Mons On
parle de détournements considérables qui
auraient eu lieu la station de S1 Ghisiain.
Le directeur de cette station et sa femme
ont été arrêtés samedi et écroués en la
prison de cette ville.
Il y quelque temps, un fermierd'Iver-
gny (Pas-de-Calais), s'apercevant que le
fourrage servant la nourriture de ses
chevaux diminuait d'une manière inusitée
s'embusqua avec son fils pendant la nuit.
Vers 2 heures du matin, au moment où le
fils du fermier se disposait donner man
ger ses chevaux, il aperçut un individu
qui jetait des bottes de foin hors desche-
nallières, dans l'intention évidente de les
emporter. Hé, dit-il flegmaliquemeul,
s'adressant au voleur, pendant que vous y
VÉRITÉ ET JUSTICE.
On s'abonne Ypres, rue de Lille, 10, près la Grande
Place, et chez, 'es Percepteurs des Postes du Royaume.
PRIX DE L'ABONNEMENT, par trimestre,
Ypres fr. 3. Les autres localités fr. 3-5o. Un n° 25 c.
Le Propagateur paraît le SAMEDI et le MERCREDI
de chaque semaine. (Insertions H centimes la ligne.)
Le Progrès désapprouvant comme d'habitude
nos appréciations sur l'industrie, le commerce,
l'agriculture ou la politique, car peu de nos élucu-
brations trouvent grâce ses yeux, s'écriait naguère
avec humeur Que le Propagateur se borne
déclamer contre le blasphème.
Nous sommes flattés de l'ingénuité du Progrès
qui nous abandonne un pareil thème comme hors
de sa sphère la défense des mœurs honnêtes et
civilisées contre un abus brutal et impie ne peut
appartenir en effet qu'a un journal iuvesti de quel
que considération.
Aussi n'hésitons nous pas provoquer, dans la
mesure de notre faible influence, l'extirpation et
la disparition des formules odieuses dont la gros
sièreté insultante s'attaque a la divinité.
Mais en même temps que du blasphème, nous
dirons aujourd'hui un mot des chiens enragés:
deux matières qui ont ceci de commun, que le
blasphémateur descend autant qu'il est en lui au
rang infime des brutes, résumé sous la forme du
chien enragé.
En ce qui concerne les jurons dont le premier
mot accuse la déchéance morale d'un individu,
comme une bave d'enragé, nous avançons avec défi
de nous contredire
Que ce méprisable résidu des dominations étran
gères doit être anéanti dafîs l'armée, dans les esta
minets, dans les marchés et partout
Que ce langage des mauvais lieux ne peut surtout
flétrir les rangs de la garde civique, où parfois
néanmoins il s'est fait jour
Que chaque fois qu'en des endroits publics, en
des réunions ou autrement, un outrage est lancé
contre Dieu, les assistants feraient bien de réprimer
le scandale par des observations convenables.
Rien n'empêcherait l'autorité communale de
prononcer par un règlement des peines de simple
police ce sujet, comme contre l'ivresse grave et
ostensible. Ces mesures, la fermeture des bâtiments
communaux de foire aux jours fériés, la diminution
graduelle du nombre des maisons de prostitution,
et l'obligation de museler les chiens en cette saison
de l'année, seraient généralement approuvés.
On sait les cas nombreux de rage que la France
déplore en ce moment. Beaucoup de villes ont cru
par une vigilance salutaire "devoir prévenir de
semblables malheurs. Les conseils de la prudence
ne sont pas dédaigner, et présent qu'il se mani
feste dans la société une aspiration irrécusable de
retour vers les idées d'ordre compromises en ce
dernier temps, nous sommes persuadé qu'il n'y a
rien dans ce qui précède dont l'exécution ait be
soin de délai. La rage du blasphème, de l'ivrognerie
et de la prostitution n'est pas inoins supceplible
d'être réfrénée, que les précautions ne sont utiles
contre l'hydrophobie.
V Émancipation apporte aujourd'hui uue nou
velle importante qui nous paraît très-exacte, et
qui s'accorde d'ailleurs avec nos renseignements
particuliers.
La situation tendue que le ministère fait au
pays depuis les élections, serait sur le point de
cesser: Le Roi aurait appelé Wiesbaden M. Van
de Weyer, qui est arrivé depuis quelques jours a
Bruxelles, et le cabinet serait sinon changé entiè
rement, au moins modifié.
D'après F Émancipation la modification dont
on s'entretient comme probable, porterait sur deux
portefeuilles: le ministère des finances et le minis
tère de la justice.
MM. Rogier et Van Hoorebeke seraient donc
conservés: reste savoir si M. Van de Weyer
voudrait s'associer un homme qne M. D'EI-
houngne déclarait usé il y a déjà cinq ans, et 'a un
ministre que les électeurs d'Eecloo ont repoussé
comme incapable.
Le ministère ressemble ravir ce grotesque
lord Kokbourg de Fra-Diavolo, qui tantôt vou
lait bien, tantôt ne voulait pas, mais enfin ne pou
vait pas. Le ministère veut bien conserver le
pouvoir, mais il ne veut pas convoquer la Cham
bre, et en définitive, il se trouve qu'il ne peut
pas conserver le pouvoir; et que sans être batto,
il ne peut se présenter devant le parlement. C'est
désolant pour des hommes qui aiment tant trô
ner dans la rue de la Loi, mais c'est ainsi que la
position leur a été faite par le corps électoral, et
moins de substituer l'autorité de celui-ci, la
majorité du pays inventée par C Observateur
l'usage des coupe-jarrets, il faudra bien que nos
petits hommes d'État la subissent.
S'ils voulaient, comme le poète de l'antiquité,
recevoir un bon conseil d'un adversaire, nous leur
indiquerions un moyen propre les tirer de la
perplexité où ils se trouvent. Ce moyen ne les
sauverait probablement pas, mais du moins il au
rait l'avantage de lever tous les scrupules qu'ils
éprouvent, d'écarter tous les embarras qui leur
semblent aujourd'hui insurmontables. Ce moyen,
c'est la dissolution de la Chambre, ou si l'on veut,
de la Chambre et du Sénat.
Le pays aurait ainsi une occasion propice de se
prononcer, de confirmer ou d'infirmer la sentence
qu'a deux différentes reprises, le 27 septembre et
le 8 juin, il a portée contre la politique ci devant
nouvelle. Les ministres auraient en outre l'avan
tage de pouvoir prolonger pendant deux mois
encore leur autorité. Nous les engageons donc vi
vement mettre notre conseil profit. [Patrie.)