JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
No 3629.
35me année.
TPSiSS, iO Juillet.
DE L'ÉDUCATION DE FAMILLE.
Plus que jamais on s'accorde de nos
jours reconnaître la grande importance
des questions relatives l'éducation du
jeune âge. Les bouleversements politiques
de ces derniers temps, les ravages plus
déplorables encore de l'immoralité et de
l'irréligion au sein des peuples ont enfin
éclairé d'une lueur sinistre mais bien tar
dive la profondeur du gouffre où une édu
cation acatholique menaçait de précipiter
lesgénéralions naissantes. Malgré les efforts
contraires de quelques théoriciens en qui
l'esprit de système étouffe la raison, et de
quelques hommes de parti plus préoccupés
de leurs intérêts propres que du bien-être
général, les hommes d'opinion quelconque
reconnaissent l'urgence de baser l'instruc
tion publique sur les principes et sur l'es
prit religieux. La prospérité toujours crois
sante des établissements que le clergé
dirige, le dépérissement des institutions
laïques dénotent eux seuls cette heureuse
disposition des esprits.
De pareils faits autorisent les plus ma
gnifiques espérances. Constatons toutefois
que l'éducation publique, l'éducation de
l'école, du collège et de l'université n'est
pas, tant s'en faut, l'éducation touteentière;
qu'il en est une autre, dont il faut tenir
compte, une éducation plus importante
encore, si c'est possible, que celle que nous
mentionnions plus haut; savoir, l'éduca
tion privée ou domestique.
A celle ci il appartient d'inculquer au
plus intime du cœur de l'enfant la foi et
la vertu du chrétien, que celle là est des
tinée développer. Or, que pourraient sur
l'esprit et le cœur de l'enfant en qui l'im
prévoyance paternelle a laissé dépérir faute
de culture les germes précieux de ses dis
positions vertueuses, que pourraient les
leçons du plus vertueux des précepteurs?
La rosée de quelques sages avis rendrait-
elle la sève et la verdeur celte plante
aride et desséchée? Heureux encore si les
vertus et le caractère du maître comman
dent le respect et si l'écolier voit en lui
autre chose qu'un spéculateur habile ou
un mercenaire s'acquitlant de sa tâche!
Nous le disons avec conviction, c'est de
la bouche d'un père et d'une mère qu'in
stinctivement l'enfant honore et chérit que
les premières notions religieuses doivent
découler dans son âme; l'autorité de la
parole paternelle asseyera sur une base
plus inébranlable les convictions de sa foi,
et sa jeune intelligence s'épanouira d'elle-
même aux plus sublimes inspirations de la
vertu quand les douces exhortatioqs d'une
mère chérie lui en dévoileront les délices
secrètes. Un écrivain moderne a mis en
ces termes la justesse de celte pensée en
évidence
Pour avoir, dit-il, une idée de la véri-
table méthode de l'enseignement, consi-
dérons un petit enfant sur les genoux
de sa mère. Le nom de Dieu est prononcé
au milieu des caresses; il est déposé dans
le cœur avec un baiser. Bientôt celte
fraîche intelligencecominence prendre
son élan au dessus du monde visible,
vers le Père céleste, auteur de la vie et
de toutes choses; l'enfant balbutie une
prière qui se mêle aux chansons nalio-
nales pendant qu'on l'endort. La mère
chrétienne ne s'arrête pas là. Elle dit
son enfant que les hommes s'élanlégarés,
le Père céleste nous a envoyé son Fils
bien-aimé sur la terre, pour nous rame-
ner lui et pour nous apprendre nous
aimer tous comme de bons frères, dans
l'espoir de nous retrouver tous dans un
monde meilleur. L'enfantécoule, il croit,
et son cœur se tourne vers Jésus-Christ,
qui nous a aimés au point de mourir sur
la croix pour nous. Et la mère se ré-
jouit, car ce n'était pas assez pour elle
d'avoir fait un homme de son enfant par
la piété envers le Père, elle a voulu aussi
en faire un chrétien par la piété envers
le Fils bien-aimé. Telle est la Genèse de
l'homme et la première révélation qui
lui est faite de la vérité.
Ainsi confondue avec ses premiers sou
venirs,cette initiation primitiveà lascience
du devoir formera pour lui dans la suite
les plus douces réminiscences de cet âge
de la vie, vers lequel l'homme aime tou
jours reporter sa pensée, parce qu'il ne
lui rappelle que des plaisirs sans amertume
et des joies innocentes.
Nous croyons avoir suffisamment établi
l'importance de l'éducation domestique,
distincte de l'éducation scolaire ou publi
que; Dieu a établi lui-même ce principe
en établissant les familles et les sociétés.
Il est bon que l'enfant qui a passé la
journée l'institution au milieu de ses
camarades qui représentent la société,
vienne le soir se retremper dans l'esprit
de famille. Les yeux d'une mère sage,
tendre et chrétienne, découvrent souvent
ce que les maîtres ne peuvent décou-
vrir....
Ainsi s'exprimeencorel'auteur que nous
citions plus haut. Toutefois nous oserons
nous demander ici si ce n'est pas se créer
une illusion plus vertueuse que conforme
la réalité que de supposer indistincte
ment tous les pères et mères ce zèle vigi
lant et dévoué que leur attribue M. Chavin?
Que de parents en effet, en qui le soin des
affaires ou la poursuite des plaisirs sem
blent étouffer toute sollicitude paternelle,
et qui abandonnent des serviteurs igno
rants et parfois indignes de confiance la
première éducation inlélectuelle et morale
de leurs enfants, jusqu'à ce qu'ils se dé
chargent totalement, entre les mains d'un
maître de pensionnat, de ces augustes pré
rogatives de père et de mère que Dieu ne
leur conféra pourtant pas en vain! Parle
rons-nous encore de ces chefs de famille,
incapables de décerner avec mesure et sa
gesse l'éloge non plus que le blâme? Leurs
réprimandes respirent la msuvaisehumeur;
leursencouragements, l'adulation. Nous ar
rêterons nous ces pères, ces mères dont
la conduite imprudente ou légère, les pro
pos au moins inconsidérés exercent une
influence si funeste sur l'esprit et le cœur
de l'enfance? Car l'enfance est logique et
se refuse croire aux plus sages remon
trances, alors que les actes désavouent les
conseils.
Ce fut pour obvier aux désordres, qui
la suite du grand cataclysme religieux
et politique du seizième siècle s'étaient
glissés cette époque au sein des familles,
que les jésuites, ces maîtres aussi habiles
que vertueux, se résolvèrent séquestrer
dans leurs collèges la jeunesse studieuse;
celte mesure extrême mais urgente valut
la France la forte et noble génération du
siècle de Louis XIV, génération un peu
froide, il est vrai, dans sa grandeur, un peu
artificielle dans son génie.
De nos jours ce fut pareillement afin
d'arracher l'enfant du pauvre et de l'ou
vrier l'influence délétère de la maison
paternelle, qu'une ingénieuse charité éta
blit les écoles du soir et du dimanche, les
crèches et les salles d'asile. La société s'est
substituée la famille, afin qu'elles se sau
vassent l'une et l'autre.
Arrêtons-nous ici et conslatonsavec plai
sir que de ce dépérissement fatal de la
société domestique, que nous signalons, a
fait dans nos contrées si religieuses com
parativement peu de ravages, au moins
parmi les classes aisées; en Flandre, le
foyer domestique n'a pas perdu toute sa
majesté et c'est encore un sanctuaire où le
jeune âge n'a pas désappris chercher
conseil et force, lumière et vertu.
VÉRI
On s'abonne Ypres, rue de Lille, 10, prés la Grande
Place, et cheï les Percepteurs des Postes du Royaume.
PRIX DR L'AROXIENRIT, par trimestre,
Yprès fr. 3. Les autres localités fr. 3-5o. Uu n° 25 c.
Rc Propagateur païaît le SAMEDI et le IVIRIICRRDI
de chaque semaine. insertions M 9 centime* la ligne.)
Emile Ch.iviu de Mal,>11 Education religieute et mo
rale.
■CE.
LISTE des jurés qui auront connaître des
causes comprises dans la première série de
la 5e session de la cour d'assises de la Flan
dre occidentale.
JURÉS TITULAIRES.
MM. 1. Tempelaere, conseiller communal Lich-
lervelde.
C. Façon, e'chevin a Avelghem.
C. Vuylsteke, Dolaire YVervicq.
H. Vanderbrugghen, ne'gociant Courtrai.
L. Frennelet, propriétaire Bruges.
A. Biebuyck, avocat 'a Courlrai.
F. Van den Herreweghe, pensionnaire de l'É
tat Bruges.
De Crombrtigge-De Looringbe, propriétaire
Ichteghem.
J. Huyghe-Van den Kerkhove, marchand en
vin Ostende.
J. Buyssens, négociant Bossuyt.