Lhuys, Ministre des affaires étraogères, a adressée,
le 17 septembre, b M. Firmin Rogier, Ministre
belge a Paris. Ce document doit être soigneuse
ment comparé avec le rapport de notre Miuistre
des affaires étrangères. Les explications fournies
de part et d'autre sont déjà assez avancées pour
que les hommes impartiaux puissent prononcer un
jugement équitable.
Une observation curiense que chacun fera d'a
bord, c'est que M. le Ministre des affaires étran
gères de Belgique est complètement effacé dans nos
négociations, et qu'il n'est pas même nommé dans
la note de M. Drouyn de Lhuys. M. Charles Rogier
est seul en scène lui seul semble muni des pou
voirs nécessaires, lui seul a des entretiens avec M.
le duc de Bassano, lui seul propose, discute et dé
cide. Il tient la place du Miuistre des affaires
étrangères et du Ministre des finances. Si la vanité
a lieu d'être satisfaite de ce rôle, il n'en est pas de
même des intérêts du pays, qui sont visiblement et
gravement lésés. Non seulement le cabinet n'a pas
consulté les chambres de commerce, ni réuni en
temps opportun les Chambres législatives, dont
les voeux auraient éclairé et fortifié la marche du
gouvernement; mais le cabinet, se personnifiant
daos un seul de ses membres, s'avance étourdiment
dans les ténèbres, vers le fatal dénouement que
l'booneur et le bien-être du pays conseillaient
d'éviter.
M. Dronyn de Lhuys nous donne une étrange
idée du savoir-faire diplomatique de M. Ch. Ro
gier. Celui-ci aurait toujours affirmé que les négo
ciations ne pourraient aboutir avec la France, que
mieux valait ne pas en ouvrir, et il aurait défié le
gonvernement français d'élever les droits dédouané
sur les produits de nos mines Si les révélations du
Ministre français ne sont pas démeuties, elles en
gageront sérieusement la responsabilité dn Ministre
belge.
On voit combien les affirmations contradictoires
des deux gouvernements rendaient utiles, indis
pensables les débats parlementaires solennellement
promis. Si nos Chambres étaient réunies, elles
pourraient demander au cabinet compte de sa con
duite, découvrir la vérité, et faire entendre la
voix nationale au lien de celle d'une coterie am
bitieuse et rancunière. .Mais non, les Chambres
sont dispersées, pourquoi? parce qu'elles n'ont
pas voulu subir le joug des loges raaçooniques,
parce que l'une d'elles a renversé M. Verhaegen
et le ministère. La chute de M. Verhaegen était
pour la Chambre des Représentants une question
d'honneur; elle ne pouvait accepter pour prési
dent l'homme qui avait publiquement insulté la
moitié de ses membres. Mais pourquoi le miuistère
est-il tombé avec M. Verhaegen? Nous n'hésitons
pas a repondre: parce que le ministère l'a voulu
ainsi. En effet, sachant qu'il avait fait preuve d'é-
tourderie et d'incapacité dansle cours des dernières
négociations, il ne voulait s'expliquer que devant
une majorité amie, dont il n'eut pas redouter un
jugement sévère. Il désirait donc tâter le pouls b
la Chambre avant de vider les graves questions b
l'ordre du jour. La personne discréditée de M.
Verhaegen a servi b cette épreuve délicate. Si
M. Verhaegen est nommé président, s'est dit M.
Rogier, je puis être tranquille sur le résultat d'un
débat contradictoire, car cette élection sera la
preuve que la Chambre m'est inféodée. S'il n'est
pas élu, je me tiendrai pour averti qu'un échec,
qu'un blâme formel m'attendent, je me retirerai,
etj' échapperai par cette tactique b l'un et b l'autre.
Aiusi dit ainsi fait. M. Rogier sollicite (c'est
VIndépendance qui l'imprimej un arrêté royal
qui renvoie la Chambre avant la constitution de
son bureau; il donne sa démission, M. Liedts pré
tend qu'il n'a jamais été Ministre des finances,
qu'ayant été investi de ce poste b son insu, il a
refusé de prêter serment et de s'asseoir sur le banc
ministériel; M. Frère est parti pour l'Italie; deux
autres ministres, presque exclus des négociations
diplomatiques et des tripotages qui suivirent, s'ex
cusent en disant qu'ils savent si peu de chose et
qu'ils sont si peu responsables que cela ne vaut pas
la peine d'en parler. Quant b M. le Ministre de la
guerre, il s'en lave naturellement les mains. Per
sonne donc n'est plus Ib pour dire: Adsum qui
feci. Le gouvernement constitutionnel et repré
sentatif est faussé dans un de ses principes essen
tiels, qui est la responsabilité directe et permanente.
Les juges sont absents, les prévenus se cachent, qui
instruira le procès?
Les partisans du cabinet déchu assurent tous les
jours que nous n'avons pasa examiner qui du gou
vernement belge ou du gouvernement français a
raison de se plaindre; ils affirmeul que l'honneur
national fait un devoir b toutes les opinions d'ap
prouver la conduite de M. Rogier, quelle qu'elle
ait été. Nous n'entendons pas ainsi l'honneur na
tional nous le croyons inséparable de la vérité et
de la bonne foi, et nous pensons qu'on peut blâmer
un ministre sans être un mauvais citoyen. Telle
était aussi l'opinion des feuilles ministérielles d'au
jourd'hui, lorsqu'en 1844 elles prenaient parti
pour le gouvernement prussien contre le gouver
nement belge. Telle est encore l'opinion d'une
feuille libérale modérée, le Constitutionnel de
Moos qui s'exprime en ces termes:
Aujourd'hui que les organes officiels des gou-
veruemeos belges et français ont exposé la marche
et les incidents des négociations commerciales entre
les deux pays, il ne peut rester aucun doute que
la rupture des relations ne doive être attribuée an
cabinet belge; c'est lui, en effet, qui, après la
signature du traité du 32 août concernaut la con
vention littéraire, a décliné l'ouverture faite par le
gouveruemeul français pour arriver b la conclusion
d'un traité général et définitif c'est lui qui n'a pas
craint de compromettre les deux principales in
dustries du pays, celles des houilles et des fers, et
qui, plutôt que d'entrer daos un système raison
nable de concessions réciproques, n'aurait pas hé
sité b courir les chances d'une guerre de tarifs
désastreuses pour deux pays interressés b entretenir
entre eux de bons rapports commerciaux.
a La chute du cabinet amènera, nous l'espérons,
la reprise des négociations avec la France et aura
pour résultat, en attendant la conclusion d'un
traité général favorable aux deux nations, le re
trait de la mesure qui frappe nos houilles et nos
fers comme représailles du refus du traité pro
noncé par nos Ministres démissionnaires.
Il n'y a que des gens aveuglés par les passions
et ennemis de leur pays qui puissent donner b la
personnalité des Ministres déchus la préférence sur
ce grand intérêt oational I
Cette dernière observation mérite d'être méditée
dans le camp de nos adversaires. Qu'ils se montrent
Belges plutôt qu'hommes de parti; qu'ils ne défen
dent pas obstinément une administration incapable
et passionnée, qu'ils ne placent pas l'amour propre
de MM. Rogier et Verhaegen au-dessus du bien-
être général, enfin qu'ils aient assez de patriotisme
et de bon sens pour ne pas sacrifier b quelques in
dividus discrédités le présent et l'avenir de la Bel
gique. Journal de Bruxelles.)
Bruxelles. On nous signale de nouveaux
accidents causés par l'ouragan du 3 de ce mois.
Une maison du faubourg de Saint-Gilles a été
littéralement détruite de fond en comble.
Une charrette b un cheval a été reuversée sens
dessus dessous, près de la porte de Ninove.
Une partie de la toiture de l'Abattoir a été en
levée.
Vingt-sept arbres séculaires ont été déracinés
ou brisés dans la commune d'Auderiecht. On nous
assure qu'un individu, se trouvant au milieu des
champs, près de celte même commune, a été as
phyxié et rapporté mort b son domicile.
Nous n'osons garantir complètement l'authen
ticité de ce fait, toutefois nous avons vu de nos
yeux, dans une des rues de Bruxelles, un monsieur
tellement suffoqué par le souffle de la raffale que,
sans la précaution de se réfugier dans l'embrasure
d'une porte et de se faire un masque de l'intérieur
de son chapeau, il allait tomber évanoui.
Le vent s'est chargé de terminer le travail des
ouvriers occupés au déblayeraent des pièces de bois
et des décors avec lesquels on avait simulé, pour
les fêtes de Septembre, l'achèvement de la façade
de l'église Sainte-Marie de Schaerbeek.
La chute d'un pot de fleurs a failli écraser une
jeune fille, dans la rue Saint-Lazare, près la porte
de Cologne. Un Français a manqué également
d'être tué b l'entrée de la chaussée de Louvain, par
les débris d'une cheminée.
Eufin,une blanchisseuse, portant du linge dans
la rue de la Régence, a vu son panier tellement
ravagé par la bourrasque, que la plus grande partie
de son contenu a été dispersée et perdue. Une
demi-donzaine de faux-cols, rattrapés au vol par
des gamins, leur a servi b compléter, séance te
nante et sans le secours d'un miroir, leur toilette
de ville.
Une circulaire de M. le Ministre de la guerre
porte que les chefs des corps de troupes b cheval
doivent continuer comme par le passé b régler les
dépenses ordinaires pour i'entretien et le renou
vellement des ustensiles d'écurie. Uoe antre cir
culaire de M. le Ministre de la guerre porte que
les remplacements doivent être entretenus par les
remplacés, depuis leor arrivée au corps jusqu'à ce
qu'une décision définitive ait été prise b leur égard.
L'ordiualion des Quatre-Temps faite b Rome
dans la basilique de Latran, par S. Em. le car
dinal-vicaire de Sa Sainteté, comptait 11 prêtres,
6 diacres, 19 sous-diacres, i3 minorés, 4 tonsurés.
On écrit de Tournay Jeudi dernier, Mgr.
de Montpellier a quitté notre ville où il était venu
en sa qualité d'évêque nommé de Liège, saluer
notre digne prélat avec qui, ou le sait, il est lié
depuis longtemps d'une étroite amitié. Le chapitre
auquel Mgr. de Montpellier appartient par son
titre de chanoine honoraire de Tournay est allé,
en corps, lui présenter l'hommage de ses félicita
tions. Cette entrevue où les sentiments les plus
dignes et les plus affectoeux ont été échangés a
été des plus touchantes. Avant de nous quitter
Mgr. de Liège a voulu nous laisser un gage de sa
générosité bien connue et de l'attachent particu
lier qu'il daigne porter b la ville de Tournay. Il
a fait don d'une verrerie pour le haut-choeur de la
cathédrale. Ce magnifique cadeau rendra le nom
de Mgr. de Montpellier plus cher encore aux tour-
naisieris; c'est un nouveau titre que le digne évê-
que de Liège ajoute b notre vénération, b notre
amour et a notre inaltérable reconnaissance. Ces
sentiments qui lui sont b jamais acquis le suivrout
sur l'illustre siège de St-Lambert qu'il est appelé
b occuper bientôt, avec nos voeux les plus ardents
pour le succès de sa grande et sainte mission.
On écrit de Valenciennes, le 1" octobre:
On ne peut guère se faire une idée du mou
vement extraordinaire que le décret du i4 sep
tembre sur les droits d'entrée de la houille et de
la fonte belges a imprimé au commerce de ces
matières jusque aujourd'hui 1" octobre, jour fatal
désigné pour la perception de l'augmentation des
droits d'entrée. Tout le monde a voulu profiter b
la fois des quinze derniers jours pendant lesquels
il était permis d'entrer en France fer et charbon
suivant l'ancieu tarif.
On chargeait les bateaux nuit et jour, et l'on
mettait quelquefois quarante ouvriers sur le même
bateau, dont le chargement se complétait en deux
heures. Il y a eu ainsi jusqu'à cent bateaux expé
diés par jour de chacun des bassins de Mons et de