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JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
No 3695.
36me année.
7PR3S, 26 Février.
ME ISOLE VERMOULUE.
VÉRITÉ ET JUSTICE.
On s'abonne Ypres, rue de Lille, 10, près la Grand
Place, et chez les Percepteurs des Postes du Royaume.
PRIX DE LMBOXlEHKiT, par «rlme*tre,
Ypres fr. 3. Les autres localités fr. 3-5o. Un n° 25 c.
Le Propagateur paraît le SAMEDI et le MERCREDI
de chaque seinaiue. (Insertions 19 centimes la ligne.)
Tout passe, tout cassetout lasse,
(FHOTEABE.)
Lorsque le temps eut graduellement «apaissé
l'effervescence patriotique que l'union Belge de
1828, la révolution qui la couronna et la guerre de
l'indépendance avaient si noblement fait éclore,
un groupe de mécontents inassouvis se détachant
du grand parti nationalvint s'enrôler sous la
bannière abhorée de l'orangisme. Les loges maçon
niques présidèrent celte fusion honteuse, et sous
leurs auspices s'organisa le pseudo-libéralisme tel
qu'il se trouve constitué aujourd'hui. L'orangisme
adopta les couleurs que ses nouveaux alliés dépo
saient a ses pieds et leur imposa en échange ses
principes et ses traditions.
Nulle part, ce phénomène ne se manifesta pins
ouvertement que dans nos mors; Dulie part le parti
orangiste n'endossa avec moins de vergogne la
livrée du soi disant libéralisme. C'est alors qu'on
vit sortir de terre un personnage, dout la chute de
Guillaume avait naguère cruellement trompé les
espérances, et qui réduit h une obscure ioactivilé
n'attendait qu'une occasion favorable pour renouer
sesanciennes intrigues. Trop compromis néanmoins
par ses antécédents oraugistes pour oser d'un seul
coup se produire au premier plan de la scène poli
tique, il jugea plus prudent et tout aussi avantageux
d'y porter ses proches ou ses affidés. On sait l'adres
se singulière qu'il apporta la coosolidation de son
pouvoir, et avec quel art il dirigea les siens par ses
conseils et par ses suggestions. On sait comment
tous ensemble ils alléchèrent les simples grand
1 eu fort de promesses, et comment ils surent fasci
ner la foule par le prestige de ce pouvoir même
qu'elle leur avait ménagé. A l'appui de leurs vues
ambitieuses uo journal fut fondé avec mission de
défendre la cause du pseudo-libéralisme identifiée
habilement avec leur propre cause. Cette feuille,
que redigeot sous leur haute direction quelques
hommes aux gages de l'État et de la commune, a
pour tactique, d'une part de passer systématique
ment sous silence les actes administratifs de ses
patrons, de l'autre de bafouer et de dénigrer qui
conque a la franchise d'en signaler les vices et les
errements. Au surplus, il est de règle au sein du
pseudo-libéralisme, parmi les scribes, comme par
mi les hâbleurs de cabaret, de transformer les gros
boooets du parti, quel que soit d'ailleurs leur insig
nifiance, en aigles parlementaires, en administra
teurs vigilants et habiles, en hommes de cabinet et
de finances. De la, cette réputation et celte popu
larité acquises, sans que l'on sache comment, l'un
d'entr'eux, a M. Alph. Vandenpeereboom, neveu
du patriarche de là aussi, cette confiance soutenue
que bien de gens ont jusqu'aujourd'hui accordée
l'administration financière du Conseil communal
dont cet échevin est regardé juste titre comme
)a cheville ouvrière.
Dès lors on conçoit quel a du être le désappoin
tement général, lorsque, après uu exercice dépour
vue de toute dépeuse extraordinaire, la gestion de
,M. Vaudenpeereboom est venu aboutir un déficit
que l'on peut évaluer 5o,ooo fr. sans compter une
dette de 60,000 fr. contractée envers les hospices
et les bureaux de bienfaisance.
Mais aussi que de dépenses inutiles, outrées ou
inintelligentes! Tantôt c'est une maison d'aliénés,
dont la construction coûte la ville des frais rui
neux, et qui, privée par esprit de parti du concours
de toute congrégation religieuse, se trouve con
damnée d'avance rester jamais déserte; tantôt,
c'est une école communale, organisée grands
frais et dépourvue de garanties morales que réclame
l'éducation delà jeunesse ouvrière; taniôt encore,
ce sont de prétendus travaux d'utilité publique,
tels qu'au vivier de Zilleheke, où trente-six mille
francs ont été enfouis, l'effet de convertir en une
aride bruyère dix hectares de terrain fertile; tels
aussi que pour les pavés de Cruys-Eeekeà Wervicq
et d'Ypres Neuve-Églisequi ayant coûté la
ville, l'un six mille, l'autre trente-huit mille
francs, ont eu pour résultat de favoriser ces com
munes au détriment de notre propre marché. Faut-
il que nous rappelions ici de rechef les sommes
exorbitantes, englouties d'année en année par un
collège communal, véritable vampire dont la soif
inextinguible épuise périodiquement le trésor
communal, et s'engraisse des sneurs du pauvre
peuple, en ces jours où la gêne sévit si générale
ment au seio dés classes bourgeoises et où déjà les
charges sont si lourdes porter?
Mais nous sommes vraiment bien mal avisés de'
prendre ainsi cœur les intérêts pécuniaires du
peuple, aujourd'hui que nos édiles pour faire face
au délabrement de leurs-finnoccs et'au débours
nombreux qu'il leur reste effectuer ont imaginé
la prélévation d'un nouvel impôt de 10 p. de
centimes additionnels pour les contributions fon
cières, aussi bieu que personnelles. Or, on
conçoit tout ce que cette méthode aussi leste
qu'ingénieuse de battre monnaie, renferme d'oné
reux pour la petite bourgeoisie, sur qui ces impo
sitions nouvelles retombent de tout leur poids.
Car d'une part, les grauds propriétaires possèdent
en général peu d'immeubles en ville; tandis que
la fortune de maint petit bourgeois consiste exclu
sivement en de semblables propriétés. Tantôt, la
maison même qu'il habite, toute grêvée qu'elle
soit de charges et de redevances, est le seul avoir
qu'il possède; tantôt, le revenu d'un certain nom
bre d'habitations urbaines lui assure grande peine
les moyens de faire honneur ses affaires. Au reste
les charges nouvelles dont la Régence communale
frappe la petite propriété, au moment même où
le défaut de garnison a sensiblement diminué les
ressources des locataires d'appartements garnis,
remplaceraient, assure-t-on, l'emprunt que pré
cédemment elle songeait contracter et qu'elle
abandonne en ce moment n'y trouvant aucun gage
de succès. Quoiqu'il en soit, l'argent des contri
buables trouvera son emploi désigné d'avance.
D'abord les travaux considérables d'appropriation
de la station et de ses abords en absorberont na
turellement une bonne part; le reste trouvera un
écoulement naturel et facile dans la translatiou de
l'atelier-modèle, dans l'établissement d'un grand
abattoir, entreprise décidée au moins en principe,
et de plus, dans le paiement des frais non minimes
d'appropriation aux bâtiments du collège com
munal; travaux qui datent de la séparation des
cours français d'avec les cours d'humanités latines,
Les centimes additionnels perçus au profit de la ville
jeront donc portés 17 p
et dout les comptes, parait-il, ne sont pas encore
soldés.
Mais soyons brefs, et sans nous arrêter longue
ment la carrière parlementaire de M. A. Vanden
peereboom, qu'aucun service rendu l'arrondisse
ment ue signale d'ailleurs l'attention publique,
nous nous demandons seulement quoi nous a
servi d'avoir pour mandataire un homme qnise van
tait pourtant de compter un ami de cœur sur les
bancs du ministère déchu, un homme dont l'inerte
docilité correspondit en toute rencontre aux exi
gences du libéralisme maçonnique, depuis le vote
liberticide qu'il émit lors de la discussion de la loi
sur l'enseignemeut moyen, jusqu'au vote antica
tholique dout il appuya les scandaleuses agressions
du voltairianisnte contre la liberté religieuse, la
voix d'un maître d'école de Gosselies? Au sein
de la Chambre, M. Vandenpeereboom, nous le di
sons en connaissance de cause, se trouve décidément
apprécié sa juste valeur. En débutant dans la
carrière parlemen taire, alors que des causes diverses
en eureDt écarté les Maloules d'Anethao, les
Raikem, les de Muelenaere, les Dubus, les Des-
maisières, les Nothomb, les d'Huart, et que sur les
banquettes du parlement, où ces hommes d'État
siégeaient naguère la gloire et l'avantage du
pays, eut pullulé tonte une génération de législa
teurs d'une incapacité notoire, pâles effigies dont
il serait trop long et d'ailleurs supeiflo d'énumérer
l'interminable et fade nomenclature; cette épo
que, disons-nous, M. Alpb. Vandenpeereboom
était presqu'uu personnage, et figurait avec quel
que avantage entre les Debreyne et les Liefmaos,
les Peers et les Van Cleemputte mais aujourd'hui
que les élections de i85o et de i852 ont rendu au
parlement bon nombre de ses premières illustra—
lions et notablement décimé l'obscure cohorte at
telée au char miuistériell'étoile de M. Alph.
Vandenpeereboom s'oblitère tristement et semble
plutôt un aérolilhe que son propre poids entraioe
fatalement terre.....
Qu'il y a loin de ces déceptions multiples aux
vanteries ampoulées, aux promesses hyperboliques
dont retentissaient, il y a cinq ans peine, les lieox
de réunions publiques et privées! Devant l'idole
populaire l'encens fumait grosses bouffées, et le
grand homme qu'elles idéalisaient en le couvrant
d'un voile discret, n'était connu de la foule que
par les éloges intéressés des raccoleurs Iibéralistes
et des laquais de plume du Moniteur de l'hôtel
de ville. Mais encens et phrases vantardes s'en
sont allés pareillement en fumée, et la vérité se
faisant jour enfinmesure que se dissipait le
nuage, les faits et gestes de l'échevin-représen-
tant, objet jadis de tant de coups anticipés d'eo-
ceusoir, n'ont plus offert en résumé l'attente
publique qu'un déficit creusé la longue par mille
dépenses inutiles et ruineuses, et quelqnes votes
antipathiques aux vœux et aux besoins des popu
lations qui lui commirent leurs intérêts. Le temps
a fait son office tempus edax rerum): désormais
le piédestal ambitieux où le pseudo-libéralisme
parvint un jour hucher son idole, ne supporte
plus qu'un fétiche vermoulu dont la foule n'attend
plus rien et que réclament titres égaux le musée
d'antiquités et la boutique du brocanteur.
C'est une chose singulière en vérité que cette
malheureuse réforme électorale fasse faire la mine
aux citoyens du parti progressif. Voyez les élec
teurs campagnards demandent que le législateur
veuille leur accorder la faculté de prendre part