FRANCE. Paris, 5 mars.
ALLEMAGNE.
Par arrêté royal de la même date est nommé
échevin de la commune de Langhemarck, arron
dissement d'Ypres, le sieur G. Van Eecke, en rem
placement du sieur S.Comyn, nommé bourgmestre.
CHItOSIQCK JUDICIAIRE.
La chambre des mises en accusation près la cour
d'appel de Gand, par arrêt du 26 février dernier,
a confirmé l'ordonnance de la chambre du conseil
près le tribunal de Bruges, rendue le 11 du même
mois, en cause de Philippe-Chrétien Popp, âgé
de 46 ans, imprimeur, natif d'Utrecht, et de Be
noît Beeciman, âgé de 63 nos, rédacteur-éditeur
du pamphlet het Brugsche Vrye, né Termonde
et domicilié Bruges, prévenus de calomnie par
la voie de la presse.
En conséquence, les nommés Popp et Beeckman
sont renvoyés devant la cour d'assises de la Flan-
bre-Occidentale, le premier, en qualité d'impri
meur, le second en qualité d'auteur ou éditeur,
pour avoir dans un article, inséré au dit phamplet,
portant le n° 86, du 25 octobre dernier, imputé
M. Verstraete-Iserbyt, fabricant Bruges, des faits
qui, s'ils existaient, l'exposeraient des peines cri
minelles ou correctionnelles, tout au moins au
mépris ou la haine de ses concitoyens.
On lit dans le Moniteur
Ce matin, le comte Camerata, fils de la prin
cesse Baciocchi, a mis fin h ses jours. On ne sait
comment expliquer cette fatale résolution qui
semble être le résultat d'une aliénation momenta-
tane'e. Le comte Camerata était maître des requêtes
au conseil d'Etal il s'y était fait remarquer par
son assiduité et son intelligence. L'avenir le plus
brillant s'annonçait pour lui. M. de Chassiron, son
collègue et son parent, ainsi que M. le préfet de
police, se sont rendus immédiatement sur le théâtre
de ce triste événement. Ils y ont bientôt été suivis
dumioistre d'État, du ministre de l'intérieur et du
garde des sceaux.
Mms la princesse Baciocchi était depuis la
veille la campagne, aux environs de Paris, S. A. I.
le prince Jérôme Bonaparte était allé lui annoncer
le douloureux événement qui venait de la frapper.
Le comte Camerata était le petit fils de la.
princesse Éiisa Bonaparte, duchesse de Piombino,
et tante de S. M. l'Empereur Napoléon III.
Voici, sur la fin déplorable du comte de Came
rata, quelques nouveaux renseignements dont nous
croyons, dit la Patrie, pouvoir garantir l'exacti
tude
C'est, dit-on, h la suite de contrariétés diverses
que son imagination de jeune homme lui avait
exagérées lui-même et que, dans cet esprit d'in-
dépeodance naturel h son caractère, il avait mal
heureusement cru ne devoir confier k personne,
que le comte Camerata a mis fin k ses jours hier,
d'une façon si tragique.
L'ordre qu'il a mis dans l'arrangement de ses
moindres affaires, et le soin minutieux qui a prési
dé la disposition de ses dernières volontés, prou
vent combien sa fatale résolution était irrévocable
ment prise.
Le comte Camerata a nommé S. A. I. le prince
Napoléon son exécuteur testamentaire.
Le prince français était son cousin et son
meilleur ami.
On lit encore k ce sujet les détails suivants dans
la correspondance particulière de l'Indépendance
Les plus tristes préoccupations de la journée
ont été encore aujourd'hui le suicide du jeune
prince Camerata-Baciocchicousin germain de
l'Empereurqui s'est tiré hier matincomme je
vous l'ai écrit, un coup de pistolet dans la tête. On
ne sait quoi attribuer ce funeste accident. M. le
comte Camerata était maître des requêtes au conseil
d'Etat; il avait 25 ans; il était gai, aimable, aimé,
riche. Il avait tout ce qui peut rendre la vie agréa
ble. Ses amis sont dans la consternation.
Deux causes sont mises en avant pour expli
quer la catassrophe qui frappe la famille impériale.
On dit que le prince avait perdu 200,000 fr. k la
Bourse mais il est évident qu'il ne se serait pas tué
pour cela, sa fortune étant des plus considérables.
La seconde cause supposée tiendrait k des chagrins
de cœur. Il est probable qu'il aura succombé k une
exaltation momentanée, un transport au cerveau.
Une personne que je connais, avait eu l'hon
neur, il y a trois jours, de dîner avec lui chez la
princesse Mnthilde et l'avait trouvé affecté et som
bre. Avant-hier soir, il avait recommandé k son
domestique de coucher dans son appartement,
comme s'il eût senti qu'il était sous la préoccupa
tion d'une idée k laquelle il craindrait de succom
ber. Le valet de chambre exécuta son ordre et ne
quitta l'appartement de son maître, qu'il laissa re
posant, que vers huit heures du matin. Deux heures
après, en y entrant, il le trouva qui râlait. Il venait
d'accomplir sa funeste résolution,
Soo parent M. de Chassiron, genre du prince
Mural, et le prince Jérôme-Napoléon, fils du ma
réchal, furent immédiatement prévenus et accou
rurent. La princesse Mathilde, qui quêtait k Saint—
Philippe-du-Roule pour une œuvre de charité, ne
sut qu'en sortant la fatale nouvelle. La princesse
Camerata dut eu être informée k sa campagne. Je
ne saurait vons peindre sa douleur. Elle adorait
son fils.
Le prince Murât fit immédiatement décom
mander le concert qu'il devait donner le soir même.
L'Empereur va, dit-on, prendre le deuil usité en
pareille circonstance. Toute la famille impériale
est dans on abattement facile k comprendre et l'in
térêt général s'attache a ce douloureux accident.
On me dit, de plus, que le jeune comte se
plaignait, depuis quelque temps, d'un commence
ment de surdité. Cette prédisposition a pu aider un
peu k la mélancolie qui le gagnait.
M. le Ministre des finances vient d'envoyer
l'ordre k tous les receveurs de deniers publics de
l'État, de recevoir en payement la monnaie an
cienne de cuivre, et de n'en rendre dans les ap
points que le moins possible. Le trésor, k qui cette
monnaie revient, la livre k l'hôtel monétaire, qui
la convertit en pièces nouvelles, frappées k l'ef
figie de l'Empereur.
L'affaire de Mm° la comtesse de Solms est
revenue hier devant le tribunal de la Seine (1"
chambre) présidé par M. Debelleyeme. On sait que
cette dame avait demandé l'autorisation d'assigner
M. le ministre de la police générale et son mari
devant le tribunal pour faire décider contradictoi-
rement avec eux, sa qualité de Française.
M. Lafoulotte, substitut du procureur impérial,
a combattu l'action intentée par Mm° de Solms, et
qui n'a, a-t-il dit, d'autre but que de se soustraire
k l'arrêté d'expulsion rendu contre elle. Par suite
des recherches de la police, M. de Solms qui était
resté k Paris a été découvert, et lorsqu'on lui a
notifié hier l'arrêté de l'expulsion prononcé aussi
contre lui, il a déclaré k M. Nusse, commissaire de
police, qu'il était sujet du grand-duché de Nassau,
qu'il était prêt k obtempérer k la sommation qui
lui était faite de quitter la France dans les 24
heures, et que son intention était de se rendre en
Amérique par le Hâvre. En même temps il a remis
une lettre sous enveloppe cachetée, avec prière k
ce magistrat de la faire parvenir k M. le procureur
impérial.
Dans cette lettre, M. de Solms déclare que la
qualité de Française n'appartient pas k sa femme
et qu'il s'oppose expressément k la demande de
celle-ci. M. de Solms ajoute que comme fils et
petit-fils d'étranger, il est étranger lui-même et
que son intention n'est pas de réclamer la qualité
de Français; qu'ainsi sa femme ne peut réclamer
d'autre nationalité que la sienne. Mm( de Solms est
née anglaise.
Après l'exposé de M. le procureur impérial, le
tribunal a rendu un jugement qui met hors de
cause le ministre de la police générale, et dit qu'il
n'y a lieu d'accorder l'autorisation demandée et
condamme M™* de Solms aux dépens.
Mms de Solms a publié une lettre dans laquelle
elle établit qu'elle n'a pas usurpé le nom de Bo
naparte. Une des conditions du mariage de la fille
k Lucien a été, dit cette lettre, que les enfants por
teraient le nom de leur père et de leur mère. Dans
tous les actes de l'état civil faits en France, M01*
de Solms est donc appelée Marie Studholmine
Letizia Bonaparte-Wyse. Ces noms figurent no
tamment sur son acte de mariage, que M. de Bas-
sano et M. le général Montholon ont signé eu
qualité de témoins.
Les journaux de l'Alsace annoncent ce qui
suit: Un comité vient de se former dans les dé
partements du Haut et du Bas-Rhin, sous la pré
sidence de Mgr. l'évêque de Strasbourg, dans le
but d'acquérir le domaine de Saint-Odille et d'en
assurer la propriété au diocèse. Le tombeau de saint
Odile est, de tous les monuments que possède l'Al
sace, le plus vénérable peut-être par son âge, par
les souvenirs historiques qui s'y rattachent, et par
le nombreux concours de pèlerins qu'il attire de-
pois plusienrs siècles.
Le frère Eustache (Roussel), né k Béthune,
et actuellement attaché, k Lille, a l'une des insti
tutions des frères de la doctrine chrétienne, a em
ployé les rares loisirs que lni laisse l'exercice de
ses saintes fonctions k la confection d'une machine
k faucher dont le mécanisme est tout entier de son
invention. Cette machine est assez ingénieuse pour
avoir mérité d'attirer l'attention de l'Académie des
sciences. Elle a été aussi présentée au prince Al
bert, époux de la Reine d'Angleterre, qui en a
fait témoigner tonte sa satisfaction k l'auteur, en
lui envoyant un diplôme et nn magnifique ouvrage
illustré.
EXÉCDTItV DE LIBEVV.
On écrit de Vienne, le 26 février
Le condamné a été conduit ce matin au lieu
d'exécutiondans une voiture découverte dans
laquelle se trouvaient uo prêtre, le sergent d'armes
et trois hommes de troupe. Il était environ huit
heures quand le sinistre cortège est arrivé au lieu
de destination. Les troupes s'étaient déjà rangées
en trois carrés sur la place d'exécution le premier
rang était occupé par le corps de la police, le second
par l'infanterie et le troisième par les cuirassiers
derrière lesquels se pressait une foule considérable.
Avant l'approche du condamné, le carré du
milieu avait été complètement évacué le bourreau
lui-même et ses aides s'étaient retirés de façon h
laisser toute la place au condamné, qui s'avança
lentement entre le sergent d'armes et le prêtre.
Libeny jeta un regard sur la potence et au même
instant un profond soupir s'échappa de sa poitrine.
II avait l'air épouvanté, sauvage. Ses cheveux
qui peu auparavant étaient noirs avaient blanchi eu
quarante-beures et s'étaient hérissés autour de sa
tête ses yeux sortaient de leur orbite, et le con
damné tremblait de tous ses membres.
A plusieurs reprises il regarda le prêtre en
répétant la prière que celui-ci récitait en langue
hongroise. Arrivé au milieu du carré, il fut délivré
de ses liens, et l'auditeur lui lut, pour la dernière
fois, k haute voixla sentence qui le condamnait
k la peine capitale. Pendant cette lecture, tous les
yeux s'étaient portés sur Libeny qui avait presque
perdu connaissance. Le sergent d'armes se tourna
ensuite vers l'officier commandant et lui demanda
grâce dans les termes usités.
L'officier répondit Qu'il trouve grâce de
vant Dieu. Sur ces mots s'avancèrent le bourreau
et ses aides qui jusque-là s'étaient tenus au premier
rang de soldats. Le prêtre continua k réciter ses
prières et lui prit le crucifix qu'il avait tenu jus-
que-lk, et le bourreau lui enleva la redingote et
lui découvrit le cou.
L'exécuteur monta ensuite l'échelle snivi du
condamné, et pendant que ce dernier balançait déjà
dans l'air, on lui entendit encore prononcer les
mots de Jésus-Christ qui sortaient en ralant
pour la dernière fois, de sa poitrine étouffée.
Au moment suprême de l'exécution, la cloche
de la tour de S'-Étienne annonça a la population
de la capitale que justice était faite.
Le corps du supplicié fut enlevé de la potence,
après le coucher du soleil, par le bourreau et ses
aides et enterré k trente pas de Ik où l'attendait une
fosse préparée d'avance. Un immense concours de
monde assista a ce dernier acte du terrible châti
ment.