JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
No 3705.
36me année.
INCONSEQUENCE DU PROGRÈS.
L'étoile du Progrès, c'est de ne professer
que la contradiction avec lui-même, et de
ne répandre que discorde autour de lui.
Au dedans et au dehors il ne produit que
ce que les hommes tolèrent le moins l'in
conséquence et la zizanie. Son humeur
Suérelleuse est ce qui nous sépare le plus
e lui; mais nous ne parlerons aujourd'hui
que de quelques-unes de ses inconséquen
ces.
Le Progrès ne voit que la politique, il ne
veut point sortir de cet élément, loin de
lui d'offenser le culte et ses ministres: et
c'est cette hostilité permanente qui con
stitue sa seule sphère d'action.
Il nous reproche d'injurier des person
nes recommandables, lorsque nous sou
mettons leurs actes, tout en respectant
soit leur individualité, soit leurs titres, au
creuset d'une libre discussion; et quels
sont les moyens de réfutation que leur
prétendu défenseur oppose? On délaye
en plusieurs colonnes, en plusieurs nu
méros, que nous sommes des cléricaux,
des valets de sacristie, que nous sommes
tombés bien bas dans l'estime de nos con
citoyens. Nous serions tout cela, que la
vérité n'en serait pas moins la vérité, et
VÉRITÉ ET JUSTICE.
Ou s'abonne Ypres, rue de Lille, 10, |>rès la Grand
Place, et chez les Percepteurs des Postes du Royaume.
PRIX DE L'A BOISEMENT, par trimestre,
Ypres fr. 3. Les autres localités fr. 3-5o. Un n° 25 c.
Le Propagateur paraît le SAMEDI et le MERCREDI
de chaque semaine. (Insertions If centime» la ligne.)
7FRES, 2 Avril.
JEAN-BAPTISTE NALH,
par la miséricorde de dieu et la grace du saivt-siége
apostolique, éveque de bruges,
Au clergé et aux fidèles de notre diocèsesalut et bénédiction
No» très-cher» Frère»,
Le 9 du mois d'avril prochain, S. A. R. le Duc de Brabant,
notre prince héréditaire, accomplit sa dix* huitième a nuée, et
commence prendre part aux affaire» publiques.
Cet événement répand aujourd'hui dans le pays une joie
universelle, et réveille dans tous les cœurs les douces espé
rances que la Belgique a fondées sur sa jeune dynastie.
Plus qo.e personne, N. T. C. F., nous avons droit de prendre
part l'alégresse commune, nous qui avons appris dès l'en
fance que Dieu est le maître souveraiu des destinées humaines,
et qu'il élève ou abaisse son gré les peuples de la terre.
Lorsque nous lisons, dans les écrits des apôtres et les oracles
des prophètes, que tout pouvoir vient de Dieu (Rom. XII, I);
que Dieu suscite en leur temps les princes qui gouvernent utile-
ment les nations (Eccu. X, 4); qu'«7 place les Rois sur leur
trône (Job. XXXVI, 7); qu'i/ tient leur cœur dans ses mains et
l'incline oit il veut (Pro. XXI, I); que la vertu fait le bonheur
des peuples, comme le vice en fait le malheur (Prov. XIV, 34);
comment pouvons-nous ue pas adorer la main de Dieu dans
les événements qui se passent sous nos yeux, et ue pas y voir
un signe sensible de la protection divine sur notre chère patrie
Au sortir d'une révolution qui faillit un instant conduire
la Belgique sa perte. Dieu nous donna un Roi, qui depuis
plus de vingt ans fait notre bonheur, et qui a su, malgré la
difficulté des temps, élever bien haut dans l'estime de l'Eu»
rope notre petite mais généreuse nation. Aujourd'hui il nous
montre côté de ce Roi bien-aimé, un fils digne de lui, un
jeune prince accompli, en qui brillent déjà les nobles qualités
de son auguste père unies aux douces vertus de feu sou auguste
mère. Taudis que des nations puissantes entendent gronder
autour d'elles l'orage, et mugir l'esprit des tempêtes; tandis
que désolées de voir miner sous leurs pieds les bases «le l'ordre
social, par des hommes d'autant plus dangereux qu'ils versent
le sang et amoucèlent les ruines au nom de la fraternité
et du progrès, ces oations n'envisagent l'avenir qu'en trem
blant, comment se fait-il que nous, qui comptons des armées
moin3 nombreuses, un territoire moins éleudu, des alliés
moins puissants, nous contemplions cet avenir avec con
fiance, et nous ne tremblions pas
Ah! N. T. C. F., c'est que d'une part nous voyons notre
tête un Roi prudent et ferme, qui nous gouverne avec sagesse
et avec bonté; c'est que nous voyons autour de lui une jeune
famille qui captive comme lui et avec lui tous les cœurs;
c'est que nous voyons dans ces insignes bienfaits reçus de la
divine Providence, un gage des bienfaits que le Ciel nous
réserve l'avenir; c'est que le peuple belge, pourquoi ue pas
l'avouer? a su résister jusqu'ici au torrent d'incrédulité qui a
fait tant de ravages chez les nations qui lui sont voisines; c'est
qu'attaché du fond de ses entrailles cette Eglise catholique
qui lui apporta, il y a plus de quinze siècles, la civilisation avec
l'Évangile, ce peuple professe encore la foi de ses pères, et
pratique encore les vertus de ses aïeux.
Gardons-nous de croire, N. T. C. F., que l'esprit de foi qui
règne enoore parmi nous, que nos institutions charitables, que
la sainteté de nos ordres religieux, que les bonnes œuvres de
tout genre, multipliées l'ombre de la liberté dont nous
jouissons depuis i83o, ne soient pour rien dans les heureux
événements que nous célébrons' eu 'ces jours, et dan* les espé
rances si belles que nous nourrissons pour l'avenir. Soyez-en
bien convaincus, N. T. C. F., ces événements n'ont passeU-s
lement la valeur d'un présage mais encore celle d'une récom
pense et d'un encouragement.
Afin de voir réaliser tout ce que le Ciel nous promet, soyons
donc fidèles, N. T. C. F., aux devoirs que la Religion nous
impose, et servons Dieu tous les jours de notre vie, dans la
simplicité de notre cœur. N'attendons que de loi notre bonheur
terrestre, comme notre couronue céleste. Prions par nos œu
vres autant que par nos paroles, et ne cessons pas d'élever,
vers ce Dieu de boulé, des mains suppliantes, en faveur des
Princes qu'il nous a dourrés lui-même comme les instruments
de ses bienfaits.
Nous aurions trop peu songé, N. T. C. F., au bonheur de
ces Princes et au nôtre, si l'expansion de la joie publique
absorbait toutes nos pensées, et nous faisait oublier le devoir
sacré de la prière. Nous devons surtout en-ces jours de réjouis
sance publique, offrir Dieu de ferventes supplications pour
le Roi et pour la famille royale nous le devons pour obéir
la volonté de l'Apôtre, nous le devons encore pour nous cou»
fo; mer aux traditions du peuple chrétien, nous le devons enfin
pour acquitter une dette de justice.
Je recommande avant tout, écrivait St. Paul Timothée,
qu'on fasse des prières pour tous les hommes, mais surtout
pour les Rois et pour ceux qui sont en autorité (l xim. II, 3).
Priez pour les Rois, écrivait St. Policarpe aux fidèles de Phi-
lippes, et pour les princes et pour les magistrats (Epist. ad
Philip, n. 12). Nous ne cessons de prier le Seigneur pour vous
écrivait uu célèbre apologiste l'Empereur Marc-Aurele; nous
le conjurons de faire en sorte qne votre fils succède un jour au
trône de son père. (Athéragok. Lkgat pro Christ, n. 37).
Tous les joursécrivait Laotauce l'Empereur Constantin,
nous adressons des prières Dieuafin qu'il vous inspire la
volonté de persévérer dans Vamour de son saint nom ce qui
sera salutaire tousvous, en vous procurant le bonheur j
nous, en nous procurant le repos(De vit» beata. 1. VII, c. 26).
Que ces sentiments, ce langage et cette conduite soient
toujours les nôtres. N'en doutez pas, N. T. C. F., les prières
que nous adressous Dieu pour uotre Roi et pour nos princes,
ne sout qu'une dette que nous leur payons eu retour du bien
qu'ils nous font. Quoi de plus juste, s'écrie le grand Chrysos-
tôrae, que de prier pour nos souverains, qui exposent pour
nous leur vie la guerre, et qui portent - pour nous le fardeau
de 1'admiuistratrou publique Que poMvoue nous faire de moins
pour leur témoigner notre gratitude et itqtre amour, que d'in
voquer sur Uur tête l'abondance des béiiédictious célestes?
Nous leur devons aussi, N. T. C F., çe tribut de prières
raison des devoirs plus nombreux et des obligations plus
lourdes que le Ciel leur impose.
Non-seulemeut ils sont, comme chacun de vous, tes enfants
et les serviteurs de Dieu (t); mais ils sont encore, dans l'ordre
temporel, ses ministres Le prince, dit St. Paul, est le minisire
de Dieu pour le bien. Si vous faites le mal, craignez-le s car ce
n'est pas sans motif qu'il porte le glaive. (Rom. XIII, 4)» Aux
devoirs communs de la vie chrétienne, l'apôtre ajoute ici les
devoirs de U vie publique, qui ne demandent certes, ni moins
de constance, ni moins de dévouement.
Qui oserait contester, N. T. C. F., qu'il ne faille aux princes
qui gouvernent, une prudeuoe consommée pour discerner les
hommes et les choses, et pour démêler dans le cours des affaires
humaines les événements qui touchent l'intérêt public? De
quelle rectitude de jugement n'out-ils point betoiu pour se
décider toujours propos? pour estimer toutes choses leur
valeur? pour tenir compte des graudes et négliger les petites?
S'ils ne sout pas doués d'un grand amour de la justice, com
ment pourrout-ils rendre chacun ce qui lui revient, selon
ses droits ou selon ses mérites? Si leur coeur n'est pas rempli
de courage, comment résisteront-ils leurs ennemis, com
manderont-ils leurs armées, et défendrout-ils leur royaume
Saus force de caractère ue se laisseront-ils pas éblouir, avt-u»
gler, peut-être, par les prestiges du pouvoir, et égarer par la
voix des flatteurs? Sans magnanimité et sans générosité d'âme»
pourront-ils facilement pardouuer les injures et oublier les
torts? Sans uu grand fond de bonté et de douceur, se mon
treront-ils toujours les pères de leur peuple? passeront-ils
toujours pour les amis et les bienfaiteurs de leurs sujets? Les
priuoes, dit Bossuet (2), sout faits pour être aimés, et Dieu
lui même semble les rendre aimables mais les princes |our-
raieut-ils, N. T. C. F., réunir toutes ces vertus et faire briller
toutes ces qualités dans leur conduite, si ceux pour qui Dieu
les leur acooi de, ne conjurent jamais, ou rarement, le Ciel de
les leur conserver et de les accroître (3;?
C'est pour nous, N. T. C. F., un devoir sacré de prier pour
uotre Roi et pour nos princes et les grâces que nous avous
demander Dieu, pour eux et pour nous, sout si nombreuses,
que nous ue pouvons nous en acquitter ni trop souvent, ni avec
trop de ferveur.
Nous prions tous et toujours pour notre souverain, écrivait
(1) Bellarmin. De ojficio principis christianiI. I. Antv.
1617.
(2) Bossuet. Politique tirée des propres paroles de rautorité
royaleetc. lib. VU. Devoirs particuliers de la royauté, etc.
(3) a. A. Pellicia. De ckristianœ Ecclesiœ tum publica
tatn privata prece pro prindpibus. Neapoii 1778.
déjà Tertullien an troisième siècle de notre âge, et nous de
mandons pour lui une vie longueun royaume tranquilleune
demeure sureune armée valeureuse, un Sénat fidèle, un peuple
vertueux, la paix du monde, et ensuite tout ce qu'il peut désirer
comme homme et comme souverain (Apolog. c. 3o).
Voilà eu peu de mots, N. T. C. F., ce que nous devons
demander nous mêmes Dieu. Oui, l'exemple des premiers
fidèles, nous lui deraaudernns tous ces bienfaits pour notre Roi
bien-aimé et pour toute sa famille, et de plus, dans ces jours de
joie publique, nous adresserons au Ciel des prières spéciales,
afin que le prince, qu'il nous a donné, soit plus tard un Roi
selon le coeur de Dieu (Act. XIII, 22); que toujours il porte
dans son propre coeur, la loi et les commandements du Seigneur
(I Paral. XII, 12 que son exemple serve toujours d'encoura
gement aux bons et de reproche aux méchants (Eccli. X,
qu'il soit toujours aussi grand et aussi élevé par ses vertus et
ses belles qualités, qu'il l'est par son autorité et par son rang
qu'il commande habilement lui-même, afin de commander
heureusement aux autres; qu'il cousolide nos institutions
(Sap. VI, 16), et gagne tous les coeurs par sa bonté; enfiu, que
Dieu nous le conserve longtemps, et associe dans nos pensées
sou nom, au nom de ces princes chrétiens dont le souvenir est
encore populaire parmi nous, et dont les grandes actions occu
pent les plus belles pages de notre histoire!
Si le Ciel exauce ces voeux, et pourquoi ne les exauce
rait-il point il ue manquera rien note chère et catholique
Belgique pour devenir la nation la plus heureuse et U plus
florissante du moude.
ces causes, nous avons ordonné et ordonnons ce qui suit
I. Dimanche, 10 avril, jour où notre Prince héréditaire a
reçu le saint baptême, un Te Deum solennel d'actions de grâces
sera chanté dans toutes les églises paroissiales de notre diocèse,
immédiatement après la graud'messe. Toutes les autorités y
sont invitées.
II. Nous engageons les communautés religieuses et les pieux
fideles, offrir un jour la sainte communion, afin qu'à l'oc
casion de celte fête, Dieu accorde Sa Majesté et notre
Prince royal, et aux autres membres de la famille royale,
l'abondance de sec céleste» faveurs.
Sera uotre maudemcut lu dans toutes les paroisses et cha
pelles publiques de notre diocèse, le dimanche 3 avril, la
messe principale.
Douuéà Bruges, dans notre palais épiscopal,le 7 mars 1Ô53.
t JEAN-BAPTISTE, Évèque de Bruges.
Par Mandement de Monseigneur l'Évéque,
P. J. Tanche, Can. Secret.