0 JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. No 3731. Samedi, 2 Juillet 1853. 36me année. 7PP.ES, 2 Juillet. L'émigration des ouvriers yprois conti nue dans une proportion qui donne lieu aux considérations les plus pénibles. Déjà en 1851 le nombre des personnes qui avaient quitté notre ville pour s'établir ailleurs s'élevait près de 500. Les chan gements de domicile constatés en 1852 ne sauraient être loin d'alleindre le chiffre de 1400. El aujourd'hui peu de semaines, peu de jours se passent, ce qu'on nous assure, sans que l'administration commu nale n'ait délivrer de nouveaux papiers de départ pour l'étranger. Ce mouvement si rapide de dépopulationindice certain de l'état de souffrance de la bourgeoisie, se fait ressentir dans les professions diver ses de la classe ouvrière. Tour tour, la France a vu affluer dans ses cilés limitro phes, dans sa capitale même nos ouvriers les plus valides et les plus capables. El des famijles entières se préparent encore passer les frontières dans le but de pour voir leur existence. Nous déplorons amè rement ce triste état des choses, et nous faisons les vœux les plus sincères pour que la physionomie de notre antique ville puisse devenir moins sombre. Apparte nant aussi celte classe de la société qui ne jouit guère des avantages de la fortune, nous pouvons avec d'autant plus de droit faire observer ses souffrances publiques, que nous la partageons avec la bourgeoi sie. Cesl dans le but d'alléger le poids de la commune misère que nous appellàmes hier encore, l'attention de l'autorité sur la cherté du beurre que les accapareurs maintiennent dans nos marchés. Une autre mesure que nous croyons propre faire un immense bien nos divers commerçants, c'est une défense de police que nous vou drions voir émettre contre cette nuée de marchands ambulants qui, la barbe de nos boutiquiers patentés sillonnent jour nellement nos rues faisant de nombreuses dupes et paralysent ainsi l'essor du com merce local. Convaincue des égards que mérite la bourgeoisie, en raison de l'état de gêne où elle se trouve, nous aimons croire que la Régence songera lui porter remède, et qu'elle ne tardera guère adop ter toutes les mesures propres augmenter l'espoir de consolation que nous attendons émettre de toutes parts. S'il faut s'en rapportera un bruit géné ralement répandu, parait-il, dans les rangs de l'armée, deux escadrons de cavalerie viendraient la levée de la seconde pé riode du camp tenir garnison dans nos murs en remplacement de l'école d'équi- talion dissoute. Depuis quelques jours un grand nombre de curieux et d'amateurs afflue vers l'Eglise de S1 Nicolas, en celte ville, désireux de contempler la nouvelle chaire de vérité qui vient d'y être placée. Due l'habile ciseau d'un artiste de conscience et de talent, M. Deprêlre, de Borgerhout, celle production remarquable complète la grande œuvre entreprise par feu M. le curé Van Oulrive, le fondateur de celle église, et poursuivie ou plutôt meuée bonne lin par son digne successeur. Au bas de la chaire, sur une assise de mar bre, S1 Michel terrassant le dragon figure l'esprit de vice et de mensonge que la pa role évangélique est appellée vaincre du haut de celte chaire. Les traits de l'Ar change sont expressifs; son attitude est belle et pleine de mouvement et de vie. La statue du Saint supporte la tribune de la chaire, terminée en cul de-lampe; mais telle est la légèreté des formes de celte tribune, telle est l'élégance de son dessin et de son ornementation, que l'on dirait qu'elle ne repose sur rien et que s'élançant d'un jet elle se soutient d'elle même dans l'espace. C'est ici, selon nous, la pièce ca pitale de cette œuvre de génie. Svelte et gracieuse, ciselée avec autant de goût que de magnificence, la pureté de ses linéa ments et la noblesse de ses proportions en font un tout harmonieux où éomine le sentiment du beau. Des médaillons repré sentant la symbolique histoire de la Sa maritaine, le bon Pasteur et les apôtres S1 Pierre et S' Paul décorent ses quatre faces, et les emblèmes des quatre évan- gelistes en ornent les angles. Un escalier a double montée termine cette partie de la chaire, dont il est le digne complément par le fini de son travail et l'élégance de ses formes. On y remarque la jonction des rampes postérieures de l'escalier de droite et de celui de gauche un beau mé daillon représentant S' Nicolas et les trois enfants dont tout le monde sait la pieuse légende. Vient enfin l'abat-voix...; mais ici s'ar rête notre admiration, ici tarissent nos éloges. C'est regret que nous avons constater ce qu'on est unanime recon naîtrel'abat-voix dépare par son aspect barroque, écrase sous sa masse informe le joyau artistique dont il devrait être le couronnement. Qu'on se figure un cône aigu, aux parois légèrement concave, ou plutôt qu'on se représente l'image triviale d'un énorme casque à-mèchè, et l'on se fera une idée de cette bizarre conception laquelle sans doute la plupart des curieux n'a rien compris. Façonner un bloc de bois de chêne en guise de tenture soutenue par des anges, telle fut la pensée de l'auteur, pensée impraticable où, malgré son rare talent, l'artiste devait échouer. Ceux qui l'ont vu pourront dire en effet si ce dais aux roides contours ressemble aux replis drapés d'une étoffe quelconque, et si (grâ ces la pesante niasse de cette prétendue draperie) les petits anges accrochés ses rebords ont bien l'air de la soutenir. Ce défau t de grâce dans les formes n'est pas l'u- nique désaccord que nous ayons signaler entre l'abat-voix et les autres parties de la nouvelle chaire; un défaut bien grave aussi, quoique moins saillant, ressort de la disparité de style qui règne entre les parties inférieures et la pièce qui les sur monte; car, tandis que cette dernière re présente le naturalisme artistique, celles-là appartiennent plutôt au style symbolique ou chrétien. Au reste, quelques paissent être les dé- fautsquenous parait renfermer celle partie assez secondaire de la nouvelle chaire de vérité, il n'en reste pas moins établi que celle ci est non-seulement une œuvre par faitement adaptée en toutes ses parties au caractère architectural de l'église qu'il dé core; mais aussi, que c'est une production de main de maître, une délicieuse création destinée établir et répandre de plus en plus le légitime renom d'un sculpteur si avantageusement connu déjà dans le monde artistique. VÉRITÉ ET JUSTICE. On s'abonne "Ypres, rue de Lille, io, près la Grand Place, et chez les Percepteurs drs Postes du Royaume. PRIX UK L'A BONNEMENT, par trimestre ïpres fr. 3. Les autres localités fr. 3-5o. Un n° 25 c. 1-e Propagateur paraît le ftt.VtlEIM »;t le IHCIfiCREIftl de charpie semaine (insertions 19 centimes la ligne.) Le Progrès a été acquitté le 25 Juin Bruges de la poursuite eu calomnie que lui avait intentée le ministère public sur la plainte de M. le curé de Locre. On sait que le Progrès avait avancé le 20 Février que M. l'abbé Pollet avait l'habitude de frauder des dentellesde Belgique en France, etqu'il venait d'être arrêté en flagrant délit. Le fait était énoncé d'une niauière si positive et si circonstanciée qu'il était difficile de l'envisager comme d'une fausseté com plète, jusqu'à plus ample information. Dans cette situation, le Propagateur publia quelques remar ques qui pouvaient avoir leur utilité tant que îa vérité n'était pas connue avec certitude, afin de prévenir des exagérations que la presse hostile la religiou ne manquerait pas d'exploiter. Mais l'imputation dont M. le curé de Locre avait été injustement l'objet ne tarda pas être coutron- vée. Le Progrès eut le tort grave de ne pas ac cueillir loyalement la réclamation de la personne lésée. Il l'accula eu caractères diamant aux annon ces, la fesant encore précéder d'un commentaire méprisant, et donnanr en tête du même numéro uc article où ses accusations étaient formellement maintenues. Ce ne fut que le to mars, ainsi dix- huit jours apiès la première insertion que débordé par une évidence devenue manifes te, et cédant l'indignation générale qui flé trissait une pareille couduite, l'honnête journal se décida reconnaître que sa religion avait été surprise, et que le fait de fraude imputé par lui un prêtre de cet arrondissement était erroné et inexact de tout point, que du reste il n'était a pas l'inventeur de ce méchant coule. Cependant la plainte, assurément très légitime du respectable ecclésiastique, fut accueillie par la justice la Chambre du conseil d'Ypres et la Chambre des mises en accusation de Gand trou vèrent qu'il y avait lieu un renvoi devant les Assises.

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Le Propagateur (1818-1871) | 1853 | | pagina 1