9
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
No 3749.
37me année
Le libéralisme n'a pu laisser passer les
fêtes de Bruxelles sans mettre en évidence
quelques uns de ses excentricités si fami
lières. M. Delfosse, quoique président de
la Chambre des représentants, (si tant est
qu'il le fût encore), n'a pas craint de déro
ger la dignité de sa position et de faire
hausser les épaules ses collègues, en
refusant le dîner royal parce qu'on n'avait
pu écouter sa grotesque prétention d'ob
tenir le pas sur le Cardinal-Archevêque
de Mali nés.
M. Verhaeghen de son coté n'aurait plus
eu de repos s'il n'avait trouvé quelque part
l'occasion d'accrocher son nom l'histoire
de ces mémorables journées. Il y a réussi
par une invention de son incomparable
génie, d'abord en louant devant la jeune
Archiduchesse son aïeule Marie Thérèse,
parce qu'elle s'est acquis un litre la re
connaissance des Belges par l'abolition de
l'inquisition qui n'y existait pas; et ensuite
en louant l'empereur Joseph 11 qui mit tout
sens dessus dessous dans nos provinces,
jusqu'à y susciter une révolution.
Certes les deux héros du libéralisme se
sont fait ici un renom impérissable: reste
savoir si c'est en mérite ou en ridicule.
La sloïque abstension de M. Delfosse, sa
résignation une frugalité d'isolement dé
daigneux, est d'une logique strictement li
bérale. Il a donné un camouflet brutal et
clubiste dont en loge il lui doit être tenu
éminemment compte. Des souterrains de
la maçonnerie est sorti par l'organe du
Congrès libéral le haro contre tout carac
tère d'autorité dans le clergé. Repoussant
lepiscopat litre d'autorité dans l'ensei
gnement, M. Delfosse veut que tout vestige
non seulement d'autorité, mais même de
dignité disparaisse, jusqu'à effacer le rang
du cardinal dans les préséances. Telle est
la règle du libéralisme, c'est-à-dire qu'elle
conduirait placer le cardinal-archevêque
primat après le garde champêtre, celui-ci
étant investi d'un pouvoir légalement re
connu. Mais alors que devient en pratique
le quatrième commandement de Dieu, qui
d'après la doctrine chrétienne non contes
tée, ordonne d'honorer l'autorité tant spiri
tuelle que temporelle avec un respect non
seulement intérieur, mais aussi extérieur?
La religion étant libre d'après la constitu
tion, nul ne peut empêcher que des hon
neurs convenables soient rendus aux chefs
de la religion, ensorte qu'il y a dans le
procédéinconvenanldu prétendu président
de la chambre un manquement grave en
vers les sentiments de la grande majorité
des Belges, autant une bouderie envers la
famille royale, que tout homme bien élevé
comprend.
Ce n'est pas l'endroit de l'urbanité et
du savoir-vivre que le libéralisme possède,
il est vrai, le tact. L'échappée de M. Ver
haeghen ne le démontre pas moins.
Quand M. Verhaeghen a harangué une
jeune princesse de dix-sept ans au jour de
ses noces, était-ce le moment de faire de
la politique, surtout de la politique torse,
sournoise, épigrammatique, rancunière?
M. Verhaeghen exhume la vieillerie de
l'inquisition proposdenôces.L'inquisition
et la torture! quelles idées évoquer dans
l'allégresse générale d'uue jeune mariée,
d'une famille et d'un peuple!
L'inquisition n'existait pas en Belgique,
et on glorifie Marie Thérèse de l'avoir abo
lie, et de nulle autre chose. Elle n'a donc
fait que cela pour la Belgique, c'est-à-dire
qu'elle n'a rien fait: c'est un démenti tous
les autres discours, au souvenir indélébile
de la nation.
Si, elle a encore aboli la torture. Veut-
on critiquer ainsi la grande impératrice de
ce qu'elle n'a pas aboli la dîme? 11 rentre
assez dans les idées du grand orient de lui
en faire un grief; mais des compliments
de mariage mêler ces méchâhcètés indi
rectes, c'est s'assurer visiblement fort peu
d'approbation des gens sensés et de sym
pathies populaires.
Dans la série des ancêtres de quelqu'un,
on cherchera, pour un discours d'apparat,
derappeler les plus illustres, lesplusdignes
d'éloges. M. Verhaeghen pour consacrer
un événement destiné cimenter le bon
heur et l'union en Belgique, morliûe la
Duchesse de Brabanlen lui mettant devant
les yeux la triste mémoire de Joseph IL
Seul parmi les souverains d'Autriche, il
méconnut et foula aux pieds les droits des
Belges, et c'est ce prince que M. Verhae-
gheu prend son recours pour célébrer le
libéralisme et la philosophie. Joseph II,
d'après Dewez, auteur non suspect, or
donna que les fils d'un protestant fussent
protestants bien que leur mère fût catho
lique, déchargea les ordres religieux de la
dépendance de leurs généraux et supé
rieurs étrangers, défendit de recourir
Rome pour obtenir des dispenses d'empê
chements diriinants du mariage, ordonna
aux évêques d'accorder eux-mêmes ces dis
penses, aux curés d'assister la célébration
des mariages mixtes; supprima plusieurs
couvents, soumit les mandements son ap
probation, ôta aux évêques la connaissance
desdifférends relalifsaux mariages,réforma
tous les établissements tenant plus on moins
l'ordre ecclésiastique, donna un règle
ment très minutieux de discipline aux cba-
noinesses, supprima leurs chants, changea
leur costume; ordonna une nouvelle dis
tribution des paroisses; prescrivit un nou
veau mode de pourvoi aux cures, abolit les
confréries, les processions et jusqu'aux
kermesses, établit un séminaire général
sa guise en dehors du pouvoir épiscopal,
changea l'ordre judiciaire et la procédure,
abolissant les chartes, coutumes et lois
quelconques y relatives, divisa la Belgique
en intendances, suscita des difficultés de ser
ment, annula les priviléges, déclara exercer
l'autorité comme conquérant, emprisonna,
cassa le tiers état, abolit la joyeuse entrée,
prononça la peine de mort sans forme de
procès contre tous ceux qui seraient pris
les armes la main dans une émeute,
multiplia les arrestations jusqu'à convertir
en cachots les caves de la cour des comptes,
força la fuite l'archevêque de Malines et
l'évêque d'Anvers, et répandit des alarmes
générales. Les suites en furent l'émigra
tion, le pillage, la persécution, l'oppression
et finalement une révolution. Évidemment
féliciter l'archiduchesse par une extase
affectée pour Joseph II et par une pointe
de mau vais goûtcônlre la grande Marie Thé
rèse, c'est heurter toutes les bienséances,
tout en mettant nu les instincts du libé
ralisme. Rien n'est plus naturel que de
conclure: ce qu'il regrette, c'est -qu'il le
désire. A ce point de vue, nous remercions
l'habile diplomate de la plume-Sue de son
originale naivité.
Le Journal de Bruxelles use son temps
prouver doctement que M. Delfosse n'était
pas président quand les Chambres ne sont
pas réunies, ce qui est évident. M. Ver
haeghen venait de même soi-disant au nom
de l'université libre en vacances» Peut-être
dans ses préoccupations oratoires le chef de
l'université libérale a-l-il cru qu'entre l'u
niversité dissoute et l'université réunie, il
n'y a quant l'exercice de son autorité au
cune différence, puisqu'elle se borne dans
les deux cas néant. Doit-on en induire
que les deux grands hommes ont majes
tueusement levé leur tête sans but et sans
qualité au dessus des flots de la foule? A
leur insu du moins leurs anguleuses bou
deries ont été la transition des fêtes l'é-
meuie de Liège. Si l'histoire s'occupe d'eux
cette occasion, c'est ce qu'elle retiendra
le mieux.
Sa Majesté vient de conférer la croix de
son ordre notre honorable concitoyen
Monsieur J.-B. Vandenpeereboom, président
de la chambre de commerce. En nommant
Monsieur Vandenpeéreboora chevalier, le
Roi a donné un juste témoignage d'estime
pour les services éminents que Mousieur
Vandenpeereboom n'a cessé de rendre
depuis longues années la ville et
l'arrondissement d'Yp res.
Nous apprenons avec plaisir que Mon
sieur Charles Vanacker, élève du Collège
Saint Vencent de Paul en celle ville, vient
de passer son examen d'élève universi
taire, avec satisfaction.
VERITE ET JUSTICE.
On s'abonne Yprès, rue de Lille, io, près la Graud
Place, et chez les Percepteurs des Postes du Royaume.
PRIX DE L'ABONNEMENT, par trimestre,
Ypres fr. 3. Les autres localités fr. 3-5o. Un n° a5 c.
Le Propagateur paraît le AIMEDI et le MERCREDI
de chaque semaine. (Insertions 19 centimes la ligne.)
7P^ES, 3 Septembre.
LE LIBÉRALISME A LA COUR.
Voici un épisode assez intéressant de la risile
que la famille royale a faite i la fabrique de MM*