JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
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No 3779.
37me année
VÉRITÉ KT JUSTICE.
On s'abonne Ypres, rue de Lille, 10, près la Graud
Place, et chez, les Percepteurs des Postes du Royaume.
PRIX DE L'ABOIIEIIRNT, par trimestre,
Ypres fr. 3. Les autres localités fr. 3-5o. Un n° 25 c.
Le Propagateur paraît le SAMEDI et le MERCREDI
de chaque semaine. (Insertions M 9 centimes la ligne.)
TF^ES, 17 Décembre.
La hausse nouvelle qui s'est déclarée
dans tous les marchés de grains, depuis le
vote récent émis par la chambre, confir
mant le système de la liberté du commerce,
défendu par le gouvernement contre la
proposition de M. Dumorlier, tendante
prohiber les grains la sortie, démontre
évidemment combien la mesure présentée
par l'honorable représentant de Roulers,
et si éloquemment appuyée par M. Jules
Malou, aurait été efficace procurer les
subsistances un meilleur marché et dans
la plus grande abondance.
La Belgique, ainsi que l'observa dans le
temps, la chambre de commerce d'Anvers,
dépend, pour son découvert, des ressour
ces des Etals-Unis et de la Mer Noire; le
défaut de renforts de la Turquie, de la
Valachie, de la Moldavie, de l'Egypte, de
la Russie du Nord, de la Haute Baltique
doit dès lors exercer une intluence fatale
sur l'état de notre approvisionnement en
grains étrangers. C'est assez dire, ce nous
semble, qu'à défaut de ces ressources étran
gères; qu'en présence surtout de notre in
suffisance intérieure résultant du manque
partiel de la moisson, il importait de faire
en sorte que d'autres pays voisins ne vins
sent fréquenter nos marchés, et réduire
ainsi nos ressources déjà si restreintes.
Si la prohibition la sortie des pommes
de terre, de leurs fécules, des lentilles, des
fèves, trouve sa justification dans le fait,
que des demandes considérables de pom
mes de terre étaient faites pour l'étranger,
queces achats étaient de natureà inquiéter
les populations qui comptent sur celle
denrée pour subvenir leurs subsistances
pendant le cours de l'hiver, les mêmes
raisons n'existent-elles pas pour le fro
ment et le seigle, cette nourriture princi
pale du peuple, cette denrée de première
nécessité dont le prix hausse de jour en
jour, et dont l'exportation augmente con
tinuellement et devient plus inquiétante?
Qu'on ne croie pas du reste que la pro
hibition des grains la sortie, si elle eût
été décrétée, aurait porté la moindre at
teinte au commerce: n'avons-nous pas vu
en 1847, des centaines de navires affluer
vers nos ports pour y importer des céréa
les? En France, où la prohibition existe,
les arrivages de céréales sont si nombreux
qu'à Marseille, il y a quelques jours, les
moyens de transport faisaient défaut pour
écouler les céréales l'intérieur du pays.
D'un autre côté, grâce au système prohi
bitif, la France voit réduire les prix des
céréales, tandis que l'Angleterre qui pro
clame la liberté du commerce constate des
hausses continuelles dans les prix des den
rées alimentaires.
Que dirait-on, s'est demandé un repré
sentant de Courtrai la Chambre, M.
Boulez, d'un père de famille qui. ayant
fait ses approvisionnements de subsistan
ces, les vend, au moment qu'il en a besoin,
des prix inférieurs ceux auxquels il
peut les remplacer, sous prétexte que plus
tard, il pourrait éventuellement se les pro
curer des prix plus avantageux? Sans
nul doute personne n'hésiterait répondre
que l'opération de ce père de famille est
très imprudente et qu'en attendant la
réalisation problématique de la spécula-
lion, il pourrait bien crever de faim.
Eh bien, c'est le rôle de cet imprudent
père de famille que joue la Belgique, selon
notre manière de juger: elle manque de
denrées, elle ne peut actuellement rem
placer ce qu'elle possède qu'à des prix
plus élévés que ceux auxquels elle les
vend. Et sous prétexte, qu'au printemps
prochain elle pourra éventuellement faire
venir, des prix plus avantageux, des
grains de la Mer Noire, elle vend l'étran
ger, ceux qu'elle possède atqourci'hui, toute"
incertaine qu'elle est sur la manière dont
ses nombreuses classes laborieuses, déjà
si cruellement éprouvées, passeront les
mois rigoureux de l'hiver.
La mesure sage que nous voyons dans
la prohibition des grains la sortie, bien
qu'elle ne paraisse guère telle aux yeux
de la majorité de la chambre, se fait sentir
ce nous semble, bien des familles. En
présence de la hausse qui se déclare, nous
attendons de tous côtés formuler des re
grets sur la décision contraire la prohi
bition des céréales que la Chambre prise.
A ce sujet nous sommes heureux de pou
voir constater, que deux de nos représen
tants, comprenant les vœux de leurs
commettants ont appuyé de leur parole et
de leur vote, la proposition de M. Dumor
lier, et ont contribué ainsi dans la mesure
de leurs forces prohiber le blé la sortie.
Indépendamment des observations très
sensées que l'honorable Bourgmestre de
Poperinghe, M. Van Renynghe a présen
tées dans le but de faire comprendre au
gouvernement et la Chambre combien
il était dangereux de laisser exporter nos
denrées alimentaires, sans assurance de
compensation, les annales parlementaires
contiennent des discours saisissants de
vérités et de raisons prononcées sur le
même sujet par M. Jules Malou.
Malgré l'opposition que la Chambre a
faite contre l'adoption du système prohi
bitif, les faits déjà viennent prouver com
bien il était juste, et combien M. J. Malou
a eu raison de dire qu'il est certain que
la prohibition des grains la sortie est
un moyen des plus efficaces d'appeler
sur le marché la quantité de grains
nécessaires l'alimentation du pays, et
qu'au contraire la libre exportation des
grains, est un moyen certain d'amener
immédiatement une hausse très grande,
et de la maintenir jusqu'à ce que le
résultat de la récolle prochaine sera
peu près acquis. Maintenant que celle
vérité se fait sentir, il est désirer sans
aucun doute que legouvernement revienne
de son erreur, afin qu'on n'ait pas aujour
d'hui, comme en 1816, ainsi que l'a dit M.
Malou, a la douleur d'y revenir pour ap
porter un remède qui serait d'une efficacité
douteuse parce qu'il serait trop tardif.
Voici les noms des membres de la Cham
bre des Représentants qui ont voté pour
la prohibition du blé la sortie
MM. Malou, Van Renynghe, Boulez, Clep,
de Haerne, de Man d'Altenrode, de Mérode
(Félix), de Mérode-Weslerloo, de Perceval,
de Portemont, de Buddere, Desmaizières,
de Woulers, Dumorlier, Jacques, Lande-
loos, Le Baiily de Tilleghem, Magherman,
Mathieu, Mercier, Orban, Rodenbach, Si-
nave,Thienpont, Vanderihrandende Reelh,
Vanderdonckl, et Vermeire.
Le service funèbre de-.M. le juge De Codl a
été célébré Mercredi VEglise de S' - Jacques
sa paroisse, au milieu d'un, grand concours de
monde. Le tribunal et le barreau y assistaient
en corps toutes les autorités et toutes les nota
bilités de la ville s'y trouvaient pour ainsi dire
réunis. Le convoi s'est rendu a pied au cime
tière, où M. De Codl a été inhumé au rond-
point. Deux membres du tribunal et deux
administrateurs du bureau de bienfaisance
dont M. De Codl était président, tenaient les
coins du poè'le. Le deuil était conduit par le
frère du défunt, ancien secrétaire de la ville.
Une abonlanle distribution de pain a eu lieu
S1-Jacques. Le temps était froid et sec les
voilures suivaient le cortège funèbre. La ma
gistrature perd dans M. De Codl un de ses
membres les plus distingués, c'était un esprit
pénétrant, exact, patient, assidu, laborieux,
sédentaire. Il était d'une intégrité inaltérable,
d'une attention que rien ne pouvait distraire et
inaccessibles aux influences de la passion. Sa
mémoire était vaste, sa conception vive il ne
connaissait ni l'ennui ni la fatigue. On eut dit
qu'il ne pouvait lui échapper dans ses occupa
tions que deux oublis, du repos et du repas. Il
appartenait une des familles patriciennes les
plus vieilles et les plus honorables de la ville.
Son ameublement était antiqueil consacrait
ses loisirs l'horticulture et aux sciences phy
siques. Son père était maire de la ville du
temps de l'Empire, et membre de la seconde
chambre des Etats Généraux sous le régime
neèrlandais. M. De Codl était absolument en
dehors de toute préoccupation politique. Sa
maladie a été courte mais cruelle. Elle consis
tait en une excroissance spongieuse considéra
ble dans la vessie. Il lègue 25,ooo fr. aux
pauvres dont il soignait les intérêts depuis
trente ans avec autant de zèle que de ponc