JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
3,841.
Samedi, 22 Juillet 1854.
38me année.
T??.SG, -- Juillet.
PROPAGATEUR,
VÉRITÉ ET JUSTICE.
On s'altonue Yprès, rue de Lille, io, près la Graud
Place, et chei les Percepteurs des Postes du Royaume.
PRIX ME L'ABONNEMENT, par trimestre,
Ypres fr. 3. Les autres localités fr. 3-5o. Uu n° a5 c.
Le Propagateur parait le SAMEDI et le Mt.ltCREni
de chaque .semaine. (Insertion* 15 centime* la ligne.)
Dansl'un de nos derniers N", nous avons
dit, en parlant des élections, que le vœu
du pays est de voir cesser le scandale des
fonctionnaires faussant,parleur influence,
la libre manifestation électorale. Nous
avons voulu constater un fait, et ce n'est
pas notre faute assurément si le pays com
mence se fatiguer de toutes ces allées et
venues d'hommes en place, qui, au lieu de
s'occuper des affaires de leurs administrés,
se permettent de courir pendant des se
maines entières les villes et les campagnes,
chantant le mérite ignoré et les gloires
futures de quelques clubistes obscurs, et
faisant au nom de ces grands hommes de
nouvelle fabrique des promesses fabuleu
ses qui ressemblent beaucoup aux mer
veilles que promettent les charlatans de
foire. Cependant ce simple fait que nous
avons constaté, met le Progrès en fureur.
C'est un prêtre, dit-il, qui a écrit cela
je m'y connais. Puis l'apparition de ce
fantôme de prêtre qu'il a évoqué, des va
peurs lui montent la tête; il est frappé
de stupeur la vue de ce spectre hideux,
et il en a l'imagination tellement troublée
qu'il se met crier comme un homme
furieux qui est pris de boisson. Le pauvre
journaliste aurait apprendre beaucoup
de choses au public; il grille de faire un
fameux article contre tous les prêtres pré
sents et venir; mais les mois lui manquent
pour exprimer ce qu'il voudrait dire:
peine se souvient il, au milieu de son trou
ble, d'avoir lu quelque part dans le Juif-
Errant d'Eugène Sue qu'il y a dans l'Église
llomaine le confessionnal et la prône.
Bon! c'est par là, dit-il, que les prêtres
interviennent dans le domaine de la po-
I i tiqueet qu'ils gouvernent leur gré
toutes les choses de ce monde de
sorte que d'après lui, les dimanches, dix
heures et un quart tous les curés du royau
me montent en chaire et se mettent dé
biter une longue philippique contre les
libéraux et le libéralisme. Certes nous ne
demanderons pas que le Progrès veuille
nous citer des exemples, ne fût-ce qu'un
seul mais nous demanderons quelle
classe de lecteurs il pense faire accroire
de telles platitudes? A coup sûr, ce ne
peut être ceux qui mettent quelquefois
le pied dans une église.
Quoiqu'il en soit, après avoir posé de
telles prémisses, le Progrès conclut 1" que
l'intervention des fonctionnaires dans les
élections doit être maintenue dans toute
sa vigueur et avec tous ses abus. 2° qu'un
jour on demandera un compte sévère aux
ministres du culte catholique... et le reste.
Quanta nous, nous dirons pour toute
conclusion qu'il faut être frappé de folie,
ou n'avoirplus lemoindresenlirpent d'hon
nêteté dans l'âme, pour oser travestir la
vérité d'une manière aussi odieuse que le
fait le Progrès.
La Kermesse d'Ypres aura cette année
un éclat extraordinaire, et tout fait espérer
qu'elle attirera dans nos murs un immense
concours d'étrangers.
Outre le magnifique tir l'are, dont les
seuls prix d'honneur auront une valeur de
plus de 1,500 fr. outre un festival de mu
sique qui promet d'être brillant; un tir
pigeons, et d'autres jeux et amusements
qui ne manqueront pas d'attirer une foule
d'amateurs et de curieux, nous aurons
celle fois une fêle toute particulière, toute
Yproise, qui effacera toutes les autres, et
qui, par l'éclat et la magnificence, est des
tinée rappeler ce qui s'est fait Malines,
Anvers, Bruges, Lille et dans d'autres
villes. Nous voulons parler de l'inaugura
tion de la statue de Notre Haine de Thuyne
qui aura lieu le 9 Août en même temps
que l'inauguration des statues des anciens
comtes de Flandre; et de la procession
religieuse et historique qui, en celte occa
sion, aura lieu en l'honneur de la patronne
de la ville d'Ypres.
Personne n'ignore que celte cérémonie
est destinée rappeler l'un des plus glo
rieux épisodes de notre .histoire locale, le
siège d'Ypres en 1583, l'héroïsme et ia foi
touchante de nos pères, la protection de
Marie, Mère de Dieu, la délivrance mira
culeuse de la ville, après des épreuves, des
combats, des travaux inouïs.
Nous souhaitons que cette fête du 9
Août soit digne de nos pères, digne de la
patronne de notre cité. De tous côtés on
fait des préparatifs immenses pour la dé
coration des rues, pour l'organisation du
cortège et des groupes historiques et reli
gieux;tous les habitants rivalisent de
zèle, et donnent leur concours empressé
et patriotiquePuisse nôtre fêle, par la
beauté et l'éclat, répondre la grandeur
et la majesté des choses dont elie évoque
le souvenir!
RENTE POLITIQUE.
Des évéuemenls graves s'accomplissent en Es
pagne. Ce malheureux pays, déjà tant de fuis
éprouve' par les déchirements iulérienrs, est de
nouveau en pleine anarchie et se trouve sur le
point d'être livré toutes les horreurs de la gtterre
civile. Le mouvement insurrectionnel a commencé
par une espèce de révolte militaire, peu impor
tante en apparence et sur les dangers de laquelle
ou s était d'abord aveuglé. Mais depuis quelques
jourB les choses out ebaogé de face. L'esprit de
rébellion a gagné de tous côtés les troupes de la
Reioe Isabelle, et de l'armée il s'est rapidement
communiqué aux populations. A Valladolid, Bur-
gos, Vittorîa, S' Sébastien, Pampelune, Girone,
Barcelone, Lérida, Tarragone, Saragosse etc., les
garnisons et le peuple se sont révoltés et ont ad
héré au mouvement. Toutes les provinces du Nord
se sont soulevées, et l'on dit que le royaume de Va
lence s'est également prononcé. Enfin, d'après des
nouvelles qui paraissent certaines, Madrid son
tour vient d'adhérer la cause de l'insurrection
le ministère est renversé; et le président du Con
seil Sartorius, comte de San Lues, est en fuite. On
dit que ia Reine a appelé le général Cordova, et
qu'un Douveau ministère, composé de trois mem
bres du parti modéré et de trois progressistes, a été
formé sous la présidence du Duc de Rivas. Mais
d'un autre côté on annonce comme certain qu'une
émeute populaire a éclaté Madrid et que le peu
ple en armes a nommé ses chefs, ce qui se concilie
assez mal avec les faits qui précèdent, an sujet de
la capitale.
Parmi les principaux chefs apparents de l'in
surrection on compte les généraux Dulce, Serrano,
O'Donnel, Esparlero.
Quant au caractère du mouvement espagnol, il
n'est pas encore nettement dessiné, pour qu'il soit
permis de se prononcer là-dessus d'une manière
positive. Tout ce qu'on peut dire ce sujet, c'est
qu'en Espagne, comme il arrive partout, la révo
lution se compose d'éie'merits hétérogènes, et qu'elle
arbore les drapeaux les plus opposés. On trouve
dans les rangs des rebelles des soldais et des chefs
de toutes les couleurs il y a parmi eux des consti
tutionnels modérés, des progressistes, des républi
cains, jusqu'à des socialistes. C'est l'anarchie sous
toutes ses formes: reste savoir ce qui sortira de
ces événements.
Il n'y a aucune nouvelle importante du théâtre
de la guerre, soit sur le Danube, soit dans la Bal
tique. Ori parle toujours d'une grande bataille que
les Turcs et les Russes seraient sur le point de se
livrer dans la direction de Giurgewo Bukaresl.
Mais jusqu'ici cette bataille ne se livre pas. Il paraît
qu'Oiuer-Pacha veut attendre, pour attaquer l'ar
mée russe, qu'il puisse être appuyé par des forces
alliées plus considérables. En attendant, les Turcs
se fortifient Giurgewo, de manière faire de cette
place uu point stratégique fort-important de leur
côté, les Russes se concentrent dans les environs
de Bukarest et de Frateschi: ils ont déjà 70,000
hommes autour de ce dernier village, avec de l'ar-
til 1er ie en proportion; et ils reçoivent encore des
renforts tous les jours. Tout ceci semble prouver
que la position de l'armée Russe est loin d'être
aussi critique qu'ou l'avait annoncé d'abord.
Mais ce qui dans ce moment préoccupe surtout
les esprits, en ce qui concerne les affaires d'O
rient, c'est le point de savoir quelle sera en der
nière analyse l'altitude des puissances allemandes,
notamment de la Prusse et de l'Autriche dans cette
importante question. Cette attitude, du moius pour
ce qui regarde la Prusse, est devenue depuis quel
ques jours un véritable mystère. On le sait, con
formément la teneur du traité du 20 août dernier
conclu entre la Prusse et l'Autriche, et en exécu
tion d'un arrangement postérieur pris entre cette
dernière puissance et la Porte-Ottomane, les trou
pes autrichiennes se dirigeaient vers la Valachie
pour occuper les Principautés. Mais le cabinet de
Berlia, prenant texte d'une note évasive de l'Eut-