JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
LE
No 3,886.
38me année.
PROPAGATEUR,
VÉRITÉ ET JC8TICE.
On s'<slH>nue Ypres, rue de Lille, 10, près la Grand
Place,- et chéz les Percepteur» des Postes du Royaume.
PRII DE L'A ItOWFttKITpar trlmc*tre,
Ypres fr. 3. Les autres localités fr. 3-5o. Un u" a5 c.
Le Propagateur parait le MERCREDI et le MA M EDI
de chaque semaine, (limertlonN 19 centime* la ligne.)
Trr.SS, 27 Décembre.
AFFAIRES 1) ORIENT.
On dit que dans l'intérieur de Sébastopol le
inéconteotement et la démoralisation vont crois
sant parmi les soldats-el les habitants; les ravages
du chole'ra et de la dyssenterie y contribuent
beaucoup. Pour ces motifs, on a fait sortir récem
ment 5o,ooo hommes de la ville, qn'oo a logés
Simferopol. Les ouvrages avancés des Russes,
situés entre la forteresse, proprement dite, et les
tranchées des alliés, sont peu près rasés tous, et
no pense que l'assaut que donneront les alliés aura
le plus entier succès. Il y a quelques semaines, une
bombe, lancée par les alliés, tomba au milieu de
la ville, perça la voûte d'une mine disposée en cet
endroit et produisit une grande explosion.
Odessa est redevenue, depuis quelque temps, le
centre de grands mouvements militaires sous peu,
cette ville aura des troupes en grand nombre, car
ou a prépaie' les quartiers pour 20,000 hommes,et
on alteud, chaque jour, la 9* division d'infanterie
dont cinq bataillons sont déjà arrivés. On attend
aussi prochainement la 6* division du lieuteuant-
géuéral Bellegarde. Toutes ces troupes se rendroot
eo Crimée après un court délai. Le 26 novembre,
il y a eu, a Eupatoria, une rencontre assez chaude
entre un détachement turc et un régiment de
uhlaus russes. L'avaulage est resté aux Turcs, les
mouvements de la cavalerie ayant éprouvé beau
coup de difficultés par suite des dispositions du
terrain détrempé par des pluies continuelles.
On lit dans le fVandererde Vienne:
La crête de montagnes qui longe la route de
Sébastopol a Simferopol, et qui domine toute cette
route, a été fortement occupée par un détachement
auglais, qui s'y est retranché de la manière la plus
solide. On dit que celte position est si bien choisie,
que non seulement elle rend très difficile toute
communication entre Sébastopol et Sirnféropol,
mais encore qu'une batterie de canons de Lancastre
longue portée, qui y est établie, pourrait couler
bas chacun des vaisseaux russes mouillés dans le
port de Sébastopol. Ou dit que les généraux alliés
ont l'intention de faire jeter de là les nouvelles
fusées françaises sur la forteresse.
Il est arrivé beaucoup de vêtements de peau
pour l'armée; on les a distribués aux soldats, a
NOUVELLES DIVERSES.
Voici encore quelques détails sur l'écboue-
ment des deux chaloupes de pêche, Ostende,
dont nous avons parlé daBS un de nos derniers nu
méros
Mercredi soir, deux chaloupes de pêche, sorties
dans l'après-midi de notre port, ont été jetées la
côte par nne forte bourrasque du nord.
La première portant le ns 115 et le nom de Jus
tine et commandée par le patron Hindersen, est
venu s'échouer, vers 10 heures, deux eoclabures
de l'eslacade ouest, tout fait contre la digue de
mer, entre le Pavillon Royal et le Cercle du
Phare
M. Vandenbroecke, directeur du service de sau
vetage, se trouvait sur les lieux il s'empressa
aussitôt de porter secours l'équipage, aidé par le
sieur Hoesmau, sous directeur, et par quelques
maiius volontaires.
L équipage de la Justineavait peine quitté
la chaloupe, lorsqu'on aperçut un bâtiment en
détresse du côté Est du pori. C'était la chaloupe
n* 4, Clémence% p. De Graeve, qui faisait côte en
face du fort Napoléon. Le directeur du sauvetage,
qui se trouvait l'Ouest fit passer, en toute hâte,
son cauot de l'autre côté du port. Cette opération,
cause de la grosse mer, fut effectuée avec la plus
grande difficulté.
M. Vandenbroecke tenta alors le sauvetage et
le canot parvint deux fois assez près de la cha
loupe, mais il fut impossible de ramener l'équipage
qui se tenait cramponné dans les haubans, exténué,
transi (il pleuvait, il grêlait, il veutait avec vio
lence); et on dut revenir terre. Après deux ou
trois nouvelles tentatives infructueuses, on résolut
d'attendre sur la plage que la mer avait un peu
baissé. Ce ne fut qu'à trois heures du matin qu'on
put meure les malheureux pêelreurs demi morts
dans le canot et les conduire clans une maison au
quai où un hou grog et un bon feu, les ranima
bientôt suffisamment pour se rendre chez eux.
M. Vandenbroecke s'est de nouveau montré la
hauteur de la mission pénible et périlleuse qui lui
a été confiée. Sa conduite, dans celte circonstance,
est au dessus de tout éloge.
La chaloupe Clémence a été vendue publique
ment samedi matin. [Pairie.)
Ou éciil d'Ostende, 22 décembre
Les deux chaloupes échouées l'est et l'ouest
de notre port, se brisent coutre les dunes et ou ne
conserve plus aucun espoir de les renflouer.
Le veut est continuellement au nord ouest, ce
qui est défavorable au renflement de la Deniset
quoiqu'on y travaille avec toute l'activité voulue.
On écrit d'Heyst, 2 5 décembre
Ce midi est venu la côte peu de distance est
de la commune de lieyst le côté d'un grand navire
paraissant neuf. Les membrures ont une épaisseur
de 25 centimètres, et les poutres d'entrepont 3o
centimètres équarris. En considérant le grand nom
bre de fortes barres en fer encore neuves, qui sem
blent avoir lié en lous sens le navire, on est amené
croire que ce morceau de carcasse provient d'un
bateau vapeur de fort tonnage. Une autre partie
probablement du même navire flottait encore au
large. Ou a trouvé entre les membrures beaucoup
de menu de charbons. La nuit dernière le temps a
été affreux sur nos côtes; aujourd'hui le temps est
calme, mais la mer reste agitée.
Ou écrit de Louvain, le 23 Ce matiu, 9
heures précises, Jean François Bruylandts, âgé de
23 ans, né Huldenberg, condatnué la peine ca
pitale comme coupable de l'assassinat de la fille
Marie-Thérèse de Neck, âgée de 62 ans, servante
de Mllv Barbe de Bmyo, Louvain, a subi sa peine
sur la Place du Vieux-Marché Louvain en pré
sence d'une foule immense.
Le patient était arrivé d'Anvers 3 heures et
demi du matin. Il a montré beaucoup de fermeté
jusqu'au dernier moment et il s'est préparé pieuse
ment mourir, sans qu'il eut toutefois fait l'aveu
de son crime.
a Le respectable aumônier, vicaire de l'église
S* André, Anvers, reçut la coufession de Bruy-
lants.
Le condamné mangea encore avec appétit,
futna sa pipe et causa tranquillement avec les per
sonnes de la prison auxquelles il fil ses adieux, sans
témoigner le moindre abattement.
Le soir, avant 9 heures, il quittait la prisoo
d'Anvers, en compagnie d'un R. P. jésuite du col
lège d'Anvers, chargé de l'accompagner jusqu'à
Louvain. Le patient était eu voiture particulière
attelée de chevaux de poste et escortée par la gen
darmerie.
Le lugubre cortège a franchi les 3 fortes
lieues qui séparent Anvers de Louvain, par un
temps affreux. La nuit était extrêmement sombre
et un ouragan, mêlé de rafales de pluie et de neige,
ne cessait de faire entendre ses mugissements loin
tains.
Cependant Bruylands ne perdait point de son
assurance. Au contraire, il fut gai pendant cet af
freux voyage, le dernier pour lui, qui allait toucher
au seuil de l'éternité. Un instant il se montra ému,
ce fut lorsque le R. P. qui l'accompagnait lui eut
témoigné le bonheur qu'il éprouvait de le voir dis
posé se reconcilier avec Dieu.
A Malines le funèbre convoi fit halte. Bruy-
lants accepta un fragment de tablette de chocolat
et but environ une bouteille de vin.
Ce ne fut qu'à trois heures et demie du tnatio
que le condamné arriva la maison d'anêt de Lou
vain, où devaient se faire les derniers apprêts du
supplice. Avant d'y arriver, il avait désigné un
des gendarmes le quartier de la ville où, dit-il, on
pi étend que l'assassinat de la fille de Neck avait été
commis par lui. Il repoussait encore cette inculpa
tion, tout en se mettant son aise; fumant sa pipe,
eu disant que pour le temps qui lui restait vivre,
il ne devait poiul se gêner....
Dans la chapelle de la prison de Louvain, il
assista deux messes célébrées, l'une par le R. P.
jésuite d'Anvers, et L'autre par l'aumônier, AI,
l'abbé Joris, vicaire de l'église de N. D. des Fiè
vres Louvain. Le patient s'approcha pieusement
de la Sainte-Table. Il déjeuna ensuite en prenant
une tasse de café et des petits pains.
A 8 heures, il reçut la visite de son défenseur,
M* Bredael, de Bruxelles, auquel il sera cordiale
ment la main eu s'empressant d'aller lui.
Il supporta avec une grande fermeté les sinis
tres préparatifs appelés la toilette. Seulement, il se
plaignit d'être lié si fort et demauda qu'ou lui
laissât au moins une main libre.
Il était neuf heures moins un quart lorsque le
condamné quitta la prison pour être conduit au
lieu du supplice. Grand fut le désappointement de
la foule qui se pressait sur le passage du sinistre
cortège, en voyant que le patient était renfermé
dans une voiture cellulaire.
La place du Vieux Marché était couverte
d'uDe multitude de spectateurs, parmi lesquels,
faut-il l'ajouter, les femmes et surtout les jeunes
filles n'étaient point en minorité. Il y en avait
toutes les fenêtres. Les plus curieux étaient sur les
toits.