JOURNAL D'TPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. 3,890. Mercredi, 10 Janvier, 1855. 38me année. TFS.BS, 10 Janvier. Le Progrès se sent le besoin de repro duire, dit-il, le rapport de M. Tesch sur le projet de loi relatif aux fondations et legs charitables. C'est fort bien. L'âne se sent aussi le besoin de braire. Mais le journal ajoute: Nous appelons, sur ce document, l'at- tenlion de tous les hommes assez judi- deux pour comprendre que la liberté de la charité, si impérieusement réclamée par le parti clérical, n'est que la main- morte déguisée, ainsi que la liberté de Quant la main morte déguisée ou non déguisée, passons là dessus. Nous en par lerons en temps et lieu. On sait que pour les hommes judicieux du libéralisme des lo ges, la main morte est une chose affreuse, pire que la guerre et la peste: ils la pren nent pour une espèce d'ogre qui ravage la terre et dévore les hommes. Le seul bruit de l'apparition de ce monstre hideux suffit pour jeter l'épouvante dans les bureaux de toutes les gazettes libérales du pays. Maisceque nous ignorions, ce dont nous ne nous serions jamais doutés,c'est que la liberté de la charité, la liberté large, com plète, telle qu'elle a toujours été comprise et appliquée, ne constitue que la liberté de spolier la société laïque. A la bonne heure! Cela est clair du moins. Nous comprenons maintenant le système suivi par MM. De Haussy et Tesch en matière charitable; nous comprenons aussi pourquoi ce sys tème rencontre tant de sympathies dans le monde libéral il faut entraver les élans de la charité; il faut limiter, autant que possible, les fondations perpétuelles; il faut empêcher, par des moyens indirects mais efficaces, que le patrimoine destiné soulager la misère du pauvre, ne vienne s'accroître et s'arrondir: Parce que ces fondations, ce patrimoine, sont des biens de main-morte, enlevés au commerce Parce que soustraire ainsi des biens au commerce et la circulation, c'est spolier la société laïque; Parce qu'il vaut mieux ne rien faire pour le pauvre, que de lui constituer un tel pa trimoine pour subvenir ses besoins. Qu'importe que l'indigent meure de froid et de faim? L'essentiel, c'est que la société laïque se porte bien c'est que la charité ne vienne pas soustraire uneobolederichesse celte société laïque dont les malheureux apparemment ne font pas partie. Pas de biens amortis; tout pour la so ciété laïque; peu de chose ou rien pour le pauvre: Voilà la première maxime de votre code charitable; et périssent les colonies plutôt que ce principe. Non, jamais le pauvre n'eut d'accès votre cœur; jamais il ne fut l'objet de votre sollicitude; parler, écrire, crier comme si ses intérêts vous tenaient cœur, comme si vous vouliez les favoriser, voilà vos ac tes, dit le Vlaming, qui ne tendent qu'à gagner la faveur populaire, afin qu'elle vous permette de réaliser vos vues mal veillantes. Le Vlaming n'est pas juste ici; chacun ses œuvres et selon ses œuvres: c'est ainsi que le veut la justice distributive. Nous disons; nous, que plus d'une fois le libéra lisme s'est occupé des intérêts de l'indi gent; mais il l'a fait sa manière. Au nom de la philanthropie, il a spolié les couvents dont les richesses appartenaient comme de droit aux classes les plus pauvres; il a spolié les maisons de charité où les mal heureux trouvaient un asile et du pain. Le patrimoine du pauvre est devenu en grande partie la proie de quelques mem bres de la société laïque, et ce dernier s'est vu réduit trop souvent vivre de ses quêtes, de ses larcins et de ses vols. Nous ajoutons: ce que le libéralisme a fait autrefois, il est prêt le faire de nos jours: témoin ses déclamations contre tou tes les associa lionsreligieuses, même contre celles qui ont un but exclusivement chari table. i^— PROPAGATEUR, TÉBITt ET JUSTICE. Ou s'abonne Ypres, rue de Lille, 10, près la Grand Place, et chez les Percepteurs des Postes do Royaume. PRIT DE 1,'ABOMWEMEWT, par trimestre, Ypres fr. 3. Les autres localités fr. 3-5o. Uu n° 25 c. Le Propagateur parait le MERCREDI et le SAMEDI de chaque semaine. (Insertions centimes la ligne.) spolier la société laïque. Les mêmes instincts poussent les révolutionnaires de tous les pays et de tous les siècles. Se procla mant libéraux, amis du droit et de la liberté, ils agissent en spoliateurs et en despotes partout où ils ont la puissance eu mains. Le présent confirme cet égard l'expérience du passé. Le Piémont est en train de se guérir de la lèpre des couvents par l'emploi de la force, selon le vœu de notre maçonnerie militante. Ou y court sus aux religieux, on les expulse de leurs retraites, on les dépouille de leurs biens, on y abat révolutionnairement ceux qui ne veulent pas que la loi fondamentale soit changée leur détriment. Le spectacle que nous offre aujourd'hui cette malheureuse contrée nous indique le sort qui nous serait réservé si le paiti soi-disant libéral triomphait en Belgique comme il l'a emporté dans le royaume de Sardaigne. Nous ne pouvons conserver ce sujet le moindre doute lorsque nous voyons nos adversaires applau dir presque unanimement aux faits et gestes de leurs frères d'Italie. Ils n'ignorent pas que ceux-ci foulent aux pieds la liberté individuelle, le droit d'association et le droit de propriété, mais la haine qu'inspire la religion a ces aveugles volontaires, les égare au point qu'ils sacrifient leurs principes h leurs passions. Peu de temps avant les catastrophes de i848, M.l'aschereau s'écriait h la tribune française, avec l'assentiment de la gauche u Laissez les associa tions religieuses acquérir le plus de biens possible, plus tard nous mettrons la main dessus. Ces sinistres paroles eurent dans les niasses un déplo rable retentissement, et l'on alla plus loin en pratique que ne le désirait M. Taschereau. Le député libéral fut mis de côté avec toute l'opposi tion dynastique, et peu s'en fallut que le peuple ameuté ne commençât par dépouiller de ses richesses la bourgeoisie libérale. Les journées de mai et de juin 1848 ouvrirent les yeux un grand nombre de libéraux qui comprirent que l'ordre social lui-même était menacé par les progressistes. Le Piémont suivra la règle commune. Après les spoliations exercées contre le clergé, on consom mera la ruine de la noblesse, puis viendra le tour de la bourgeoisie, qui sera impitoyablement dé pouillée par ceux qui furent les instruments de ses rancunes. Nous ne disons pas avec les démagogues que ce sera justice, mais nous reconnaissons que ce sera logique. Aussi ne sommes-nous étonnés que d'une chose c'est que tant de gens travaillent sottemeut a leur propre déconfiture pour le plaisir équivoque de vexer les prêtres et d'humilier ce qu'on appelle les aristocrates. Pour l'ouvrier philosophe, l'atelier a encore moins de charmes que l'église, et le pire des aristocrates est sod maître et il le lui prouvera un jour. Nos lecteurs se rappellent que, il y a quelque temps, nous nous empressâmes de reproduire dans nos colonnes deux lettres écrites par un soldat faisant partie de l'armée française opérant contre Séhastopol. Ce mètne militaire vient d'adresser une nouvelle lettre son parrain qui a bien voulu nous la communiquer. La voici textuellement: Près de Sébastopol, le 19 Décembre 1854* Mon cher Parrain et ma chère Marraine, Je vous souhaite une bonne et heureuse année et une. parfaite santé. Quant la mienne elle est toujours bonne, et, je désire que la présente lettre vous trouve de même. Je vous ai écrit une lettre, voilà peu près deux mois. Je ne sais si vous l'avez reçuetoujours je n'ai pas eu de réponse. Fvus m'aviez marqué sur la dernière lettre que j'ai reçue de vous pour voir si j'ai reçu l'argent que vous m'aviez envoyé. Ouije l'ai reçu et je vous en remercie beaucoup. Mon cher Parrain, je vais vous donner quelques renseignements sur les affaires du siège qui nous occupe maintenant. Ce siège n'est pas facile du tout. Carvoilà deux et demi mois que nous avons commencé et l'on ne sait pas quand cela finira. Car, c'est une ville qui est fortifiée d'une force terrible. Maintenant nos tranchées sont environ cent mètres de la ville, et, nous attendons un renfort de troupes pour monter l'assaut. Nous avons vingt-sept batteries d'artillerie et les Anglais en ont autant qui vont faire feu sur les forts et sur la ville et une fois les forts qui achèveront d'être démolis, nous allons monter l'assaut de suite. Car, voilà deux mois et demi que nous lirons le canon, et, nous sommes encore aussi avancés que le premier jour. Excepté que nous avons beaucoup plus de tranchées et que nous sommes plus rapprochés. Nous sommes forcés de parta ger C armée en deux parties. Car, nous sommes attaqués, par derrière, par une troupe qui est

HISTORISCHE KRANTEN

Le Propagateur (1818-1871) | 1855 | | pagina 1