REVUE POLITIQUE.
plus nombreuse que nous. Nous avons débarqué
une vingtaine de lieues de Sébaslopol et le
troisième jour de marchenous avons eu une
fameuse attaque et nous avons pris une petite
ville nommée l'Aima. Les troupes russes
étaient sur une colline qui avait au moins i5o
pieds de hauteur et dans le fonds de la cote, il y
avait une rivière où l'on avait de l'eau jusqu'au
cou. Le général commandant Varmée russe
avai+ dit ses troupes Quand bien même,
les Français Jussent cent mille hommes, il
leur jaut au moins trois semaines pour
monter ici, en disant nous sommes peu
près 5o,ooo hommes, nous avons 96 pièces
de canonnous pouvons les attendre sans
craindre.
Mais il s'est bien trompécar, au bout de 4 5
minutes la montre la mainnos braves
zouaves étaient en haut et une fois que nous
avons été tous en haut, nous leur avons donné
une retraite telle qu'ils sont retournés jusqu'à
Sébaslopol sans se retourner, et ils ont laissé
près de quatre mille hommes sur le terrain tant
en blessés qu'en tués. Depuis que nous les avons
assiégésils n'ont fait qu'une seule sortie et
c'était le 5 du mois d'octobre, il Jaisait un fort
brouillard, et le malin, comme d'habitude, ils
ont tiré de trois quatre cents coups de canon,
et puis ils sont descendus dans le ravin et sont
venus jusqu'auprès de nos tirailleurs qui
étaient en avant de nos tranchées, sans être
aperçus, et puis, nos tirailleurs aussitôt qu'ils
les ont aperçus ont commencé contre eux une
vive fusillade. Mais, les Russes se sont toujours
approchés sans tirer. ''Nos tirailleurs ont cru
qu'ils venaient se rendre, car, ils n'étaient
point nombreux. Mais ils étaient une dizaine
de mille au fonds du ravin. Ceux - ci sont
accourus au grand galop et sont entrés dans
nos tranchées. Car nous n'étions que très peu
de monde nous n'étions que trois ou quatre
cents hommes. Mais, il nous est venu du renfort
et nous sommes retournés dessus la baïon
nette. Si vous aviez vu cela, c'était une vérita
ble boucherie. Au bout de deux heures de com
bat, la terre était tout couverte de cadavres
tant Français que Russes, mais le nombre des
cadavres russes dépassait celui des Français.
Enfinpour finir, depuis le commencement du
siège jusqu'à maintenantdepuis le malin
jusqu'au soir ce n'est qu'une canonnade conti
nuelle. Enfin, mon cher Parrain, j'espère que
je reviendrai un jour pour vous raconter ces
affaires là en buvant un coup, car, maintenant,
nous en sommes assez privés. Car, le vin se
vend 3 Jr. la bouteille et l'eau-de-vie 4 jr. le
litre et les autres liqueurs proportion. Je
finis ma lettre en vous embrassant de tout mon
cœur et suis pour la vie votre attaché et dévoué
filleul. Berthe Léon.
P. S. Aussitôt que le siège sera fini je vous
en ferai parvenir la nouvelle.
La télégraphieapporle des nouvelles importantes
de Vienne. A la suite d'une confe'rence tenue au
ministère des affaires étrangères d'Autriche et
laquelle assistaient le comte Buolle baron Bour-
queney, le comte Westraoreland et le prince
(jortschakoff, les quatre plénipotentiaires seraient
tombés d'accord pour considérer les quatre garan
ties comme point de départ des négociations.
Inutile de faire ressortir toute l'importance de
cette nouvelle. Si elle se confirme, les espérances
de paix que les bruits de ces jours derniers avaient
presque étoufféespourrout renaître.
Cependant, quelle que peut être la boune
volonté des parties belligérantes, nous croyons
que toutes les tentatives de paix n'aboutiront h
rien. La guerre contre l'Europe, et en particulier
contre les puissances occidentales est tellement
populaire dans toutes les provinces slaves de l'Em
pire russe, qu'il est craindre que le Czar ne soit,
entraîné, et forcé de continuer la lutte avec une
énergie nouvelle. Un échec devant Sébaslopol ne
fera que redoubler les dispositions belliqueuses.
On annonce également de Vienne, qu'une con
vention par laquelle la Russie s'engage vis-à-vis
de la Prusse ne pas attaquer l'Autriche, a été
signée entre le prince Gortschakoff et le colonel
Mariteuffelchargé d'une mission extraordinaire.
Cette dépèche paraît évidemment incomplète ou
inexacte.
On a annoncé, et la chose paraît certaine, que
la Prusse a été invitée par l'Autriche mobiliser
100,000 hommes et se joindre elle pour faire
une proposition de même nature tous les États
de la Confédération, par l'organe de la Diète.
Des nouvelles de Francfort portent que, ven
dredi 5 janvier, la réponse du gouvernement prus
sien a cette demande faite par l'Autriche, est un
refus pour le moment. Telle sera aussi, dit-on, la
réponse de la Bavière, de la Saxe royale et du
Wurtemberg. La résolutiou du Hanovre est dou
teuse. C'est dans les États de troisième ordre que
l'Autriche trouvera de meilleures dispositions.
Les nouvelles du jour confirment tout ce qui
vieut d'être dit plus haut.
En dehors du bulletin diplomatique, il y a peu
de laits signaler. Quelques sorties Sébaslopol,
la concentration d'un corps russe sur i'Alina pour
empêcher une attaque du côté du Nord de la
forteresse, quelques scènes de brigandage Con-
stantiuople Voilà en résumé ce que nous appren
nent les correspondances.
Tout est toujours dans le même état sous les
murs de Sébaslopol. Depuis plus d'un mois les
canons des alliés sont silencieux; les batteries
russes ne fout également pas un feu bien vif. Les
travaux du siège se poursuivent, avec une pénible
lenteur. On attend que les Anglais aient terminé
leurs batteries pour rouvrir le feu et donner
l'assaut.
Mais si lesalliés fout de gigantesques préparatifs,
les Russes ne le leur cèdeut pas en activité.
L'éuonue puissance de leurs armements et toutes
les défenses accessoires imaginables sont cette
heure mises eu œuvre.
Les armées alliéesdit une correspondance du
Moniteur de l'armée, ont accomplir une tâche
complexe et laborieuse prendre la ville, et battre
ensuite l'armée russe de secours en la rejetant dans
l'intérieurou la battre d'abord et prendre la
ville ensuite, voilà le programme obligé.
Le même journal ajoute que quaol la ville,
tout ne sera pas dit lorsque les alliés seront par
venus s'introduire dans la place. Les Russes,
dit-il, se préparent une vigoureuse résistance; le
temps a été mis par eux profit; ils ont barricadé
les rues et multiplié partout les défenses accessoires.
La besogne sera rude et peut-être aurons-nous la
répétition du siège de Saragosse....
Toutefois on croit fermement que la place ne
pourra tenir longtemps.
ALLOCUTION DE NOTRE SAINT PÈRE LE
PAPE PIE IX,
dans le Consistoire secret du 9 décembre i854*
[Suite et fin.)
Nous avons appris avec douleur qu'une autre
erreur non moins funeste s'est introduite dans
certaines parties du monde catholique et s'est em
parée des âmes de beaucoup de catholiques. Eu-
tralués espérer le salut éternel de tous ceux qui
se trouvent hors de la véritable Église du Christ,
ils ne cessent de demander avec sollicitude quel
sera après la mort le sort et la condition des hom
mes qui ne sont pas soumis la foi catholique. Sé
duits par de vains raisonnements, ils font ces
questions des réponses conformes celle doctrine
perverse. Loin de nous, Vénérables Frères, de
prétendre mettre des bornes la miséricorde
divine, qui est infinie! Loin de nous de vou
loir scruter les conseils et les jugements mys
térieux de Dieu, abîme où la pensée humaine ne
peut pénétrer Mais il est du devoir de notre charge
apostolique d'exciter votre sollicitude et votre vi
gilance épiscopale faire tous les efforts possibles
pour écarter de l'esprit des hommes l'opinion aussi
simple que funeste, d'après laquelle on peut trou
ver dans toute religion la voie du salut éternel.
Employez toutes les ressources de votre esprit et
de votre science pour démontrer aux peuples
soumis vos soins que les dogmes de la foi ca
tholique ne sont en rien contraires la miséri^
corde et la justice divines.
La foi nous ordonne de tenir que hors de l'É
glise apostolique romaine personne ne peut être
sauvé, qu'elle est la seule arche de salut, et que
quiconque n'y sera pas entré, périra dans les eaux
du déluge. D'un autre côté, il faut également tenir
pour certain que l'ignorance de la véritable reli
gion, si cette ignorance est invincible, n'est pas
une faute aux yeux de Dieu. Mais qui osera s'ar
roger le droit de marquer les limites d'une telle
ignorance, eu tenant compte des conditions di
verses des peuples, des esprits, et de l'infinie
multiplicité des choses humaines? Lorsque dé
livrés des liens du corps, nous verrons Dieu
comme il est, nous comprendrons parfaitement
par quel admirable et indissoluble lieu sont unies
la miséricorde et la justice divines; mais tant que
nous sommes sur la terre, courbés sous le poids de
celte masse mortelle qui accable l'âme, tenons fer
mement ce que nous enseigne la doctrine catho
lique, qu'il n'y a qu'un Dieu, une foi, un baptême
chercher pénétrer plus avant n'est pas permis.
Du reste, comme la charité le demande, répan
dons devant Dieu d'incessantes prières, pour que
de toutes parts toutes les nations se convertissent
au Christ; travaillons autant qu'il est en nous au
salut commun des hommes. Le bras du Seigneur
n'est pas raccourci, et les dons de la grâce céleste
ne manqueront jamais ceux qui veulent sincère
ment et qui demandent le secours de cette lumière.
Ces vérités doivent être profondément gravées dans
l'esprit des fidèles, afin qu'ils ne se laissent pas
corrompre par les fausses doctrines dont le but
est de propager l'indifférence en matière de reli
gion, indifférence que nous voyons grandir et se
répandre de tous côtés pour la perte des âmes.
Opposez-vous avec force et constance, Véné
rables Frères, aux erreurs principales par lesquelles
l'Église est attaquée de nos jours et que Nous ve
nons d'exposer; pour les combattre et pour les
détruire, il est nécessaire que vous ayez des ecclé
siastiques qui vous aideut dans ce travail. Notre
joie est grande de voir le clergé catholique ne rien
négliger, ne reculer devant aucune fatigue pour
accomplir surabondamment ses devoirs. Ni la lon
gueur des voyages, ni leurs dangers, ni la crainte
des incommodités qui en sont inséparables ne peu
vent l'empêcher de traverser les continents et les
mers pour se rendre dans les régions les plus loin
taines, afin de procurer aux nations barbares qui
les habitent les bienfaits de l'humanité et de la loi
chrétienne. C'est aussi pour Nous un bonheur que
le clergé, dans l'affreuse calamité qui a ravagé tant
de lieux et tant de grandes villes, ait rempli tons