JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEIVIENT.
N° 3,934. Mercredi, 13 Juin, 1855. 38me année.
7P5.BS, 13 Juin.
La Belgique va revenir l'ancien régime:
le Progrès nous l'apprend. La haute aris
tocratie et le clergé se sont ligués, dit-il,
pour ressaisir leur influence d'autrefois.
L'ombre du cléricalisme est apparu sur le
sommet de sa tombe et demande en sacri
fice toutes les conquêtes faites par le libé
ralisme moderne. Les grands principes de
89 et 93 courent d'immenses dangers.
Et la preuve;
C'est l'avènement du ministère De Dec
ker;
C'est qu'ensuite la Belgique est lasse de
subir le joug des clubs et des loges;
C'est que partout, les électeurs veulent
avoir des mandataires qui,au lieu de faire
les affaires de la francmaçonnerie et de la
révolution, fassent les affaires du pays, et
que le cabinet ne s'y oppose pas. Indèirœ.
De là le Progrès prend texte pour débiter
une massede lourdes injures l'adresse du
nouveau ministère et de tout le parti con
servateur. Voilà, dit-il, cette modération
cette conciliation dont les adeptes du cléri
calisme ont fait tant de bruit elle consiste
provoquer l'éliminajLion de tous les
sénateurs qui ne veulent pas accepter la
domination des prêtres
C'est fâcheux.
Mais si, par exemple, les électeurs de
Gand ou de tel autre endroit, ne veulent
plus de leurs anciens mandataires pour le
Sénat, ils en sont bien les maîtres appa
remment; le ministère n'a absolument rien
voir là dedans. Du temps du 12 août, les
fonctionnaires se seraient jetés corps per
du dans la mêlée pour corrompre et pour
intimider les électeurs: aujourd'hui ordre
sévère leur est donné de se tenir l'écart:
il nQus semble qu'il n'y a pas grand mal
cela.
S02UÈMH ILllTT^lE
DU R. P. DE DAMAS,
I Ensuite la modération, la conciliation, ne
consistent pas, qu'on le sache,faireunpeu
les affaires de l'ordre, et un peu celles de
l'anarchie représentée par les loges. Non
entre les conservateurs et les hommes qui
renient les principes de notre révolution, il
n'y a point de transaction possible. Tout ce
qui n'est pas 1850 doit être impitoyablement
rejeté dans le camp ennemi et combattu
outrance. La Constitution et les traditions
glorieuses qui se rattachent l'époque de
notre émancipation politique, voilà le
terrain et l'unique terrain sur lequel une
transaction devient possible. Le parti con
servateur n'a et ne peut avoir rien de
I commun avec les adeptes du libéralisme
maçonnique qui, chez nous, se trouvent
la tête du parti anarchique et socialiste.
iQtQiiT-i»
Une série de lettres remarquables adres
sées un franc-maçon ont paru dans le
Bien public. Ces pièces d'un intérêt si
incontestable viennent d'être livrées la
publicité sous la forme d'une brochure.
Cet important ouvrage ne saurait manquer
de rencontrer dans le public l'accueil
sympathique dont il est digne. Ainsi que
TObserve fort sensément VEcho de Courtrai,
aucun sujet n'est mieux fait pour attirer
l'attention, que l'institution de la franc-
maçonnerie et son influence sur la marche
de la société. La franc-maçonnerie dans
toutes ses tendancesdans toutes ses
œuvres aitne se couvrir d'un masque et
s'entourer de mystère. Il n'est donc rien
de si utile pour quiconque a conservé
quelquesdoutes sur l'esprit de celte société
ténébreuse, que de voir mettre en lumière
ses véritables doctrines, ses actes, et le
but constant qu'elle se propose. La franc-
maçonnerie dans sa vraie signification ou
vrage du savant M. Eckerl, et traduit en
français par M. l'abbé Gyr, a rendu sous ce
rapport, un important service la religion
dont les franc-maçons sont les ennemis
implacables. Les lettres un franc-maçon
serviront d'un nouveau contrepoids aux
efforts secrets auxquels la franc-maçon
nerie ne cesse de se livrer, dans le but de
faire prévaloirses doctrines antireligieuses
et révolutionnaires.
L'auteur, en montrant du doigt les actes
et les ouvrages, établit dans son ouvrage
les points suivants
En religion la maçonnerie rejette et
combat outrance le christianisme et pro
fesse le culte de la nature.
En politique elle est essentiellement
révolutionnaire et s'attaque aux bases
mêmes de la société.
Comment se fait-il que tant de maçons
honnêtes travaillent activement une
œuvre dont ils abhorrent les consé
quences?
C'est que tous, les uns plus, les autres
moins, ont écarté ou voilé le flambeau de
la foi, qui seul peut éclai rer l'homme sur
ces rapports avec Dieu, sur ses devoirs
envers lui-même et envers ses semblables.
C'est qu'ils se sont fiés la lumière
incertaine de cette raison si faible et si
facilement abusée par les passions; de
cette raison qui a conduit les plus beaux
génies de la philosophie des absurdités
qui feraient rire un bon écolier de caté
chisme.
v Aveugles volontaires et d'autant plus
incurables que vous vous croyez plus
illuminés, que Dieu vous rende sa lumière,
vous qui siégez dans les ténèbres et
l'ombre de la mort.
Tel est le résumé de l'ouvrage dont nous
ne pouvons assez recommander la lecture.
Ajoutons, qu'au mérite du sujet, les lettres
LE PROPAGATEUR
VÉRITÉ ET JUSTICE.
AUMONIER DE L'ARMÉE D'ORIENT,
au directeur des Prédit historiques a Bruxelles.
(suite.)
Je ne finirais pas, si je vous disais tons les
lavages opérés dans un camp par la mauvaise saison.
Il n'est pas question, ici, de se récrier el de dire
Pourquoi l'autorité n'apporle-t-elle pas de re
mèdes a d'aussi grands tuanx? Que voulez-vous
qu'elle y fasse? En réalisant des prodiges, l'homme
ne se rendra jamais le maiire absolu des éléments,
et toujours la guerre traînera après elle des fléaux
sans nombre quelque chose qu'on fasse et quelque
chose qu on dise, il y aura toujours des guerres,
parce que toujours les gouvernements et les peu
ples auront besoin de sauvegarder leurs intérêts
contre les empiétements des puissances jalouses et
parce que la guerre, punition du péché, est, comme
•a peste el la famine, une des conditions nécessaires
de la triste humanité. Je dirai plus: les maux que
je déplore sont bien tristes et cependant je défie
l'homme impartial qui étudiera l'histoire de ne pas
reconnaître que jamais armée en campagne n'a été
soignée ni approvisionnée plus paternellement que
ne l'a été celle-ci.
Nos pauvres soldats, victimes nécessaires du
fléau, reconnaissent admirablement la sollicitude
doot on les entoure. Je l'ai déj'a dit el je le répète.
Au milieu de si ineffables misères, ils ne se plai
gnent poiut, et meute ils sentent le besoiu de
contribuer par leur énergie morale au maintien de
l'esprit de soumission. On se tromperait bien si l'on
se figurait une ambulance comme un séjour de cris
de désespoir el de gétuissemenls lamentables. Dans
le premier momeut on serait pardonnable de se la
représenter aiusi on concevrait des regrets el des
plaintes amères dans la poitrine el sur les lèvres de
cesjeunes hommes arrachés leur famille, renversés
sur la terre nue d'un pays inhospitalier, se voyant
mourir en détail, et sentant leurs membres se
détacher pièce h pièce sous le fer aigu du chirurgien.
Mais la réflexion et surtout l'expérience ne per-
mettent pas de juger ainsi le sanctuaire des douleurs
d'une armée française.
Voyez ce jeune tambour anquel un boulet vient
de fracasser les deux bras. Quelques lambeaux de
chairs soutiennent encore ses maios ses épaules
le saog coule, les os broyés sortent par morceaux
aigus b travers les chairs. Debout, il prie ses cama
rades de le débarrasser de son tambour; et comme
ou veut le soutenir et l'accompagner jusqu'il l'am
bulance Non, mes amis, dit-il, ne quittez pas
le champ de bataille. On a besoin de vous poor
résisler h l'ennemi. Seul, je trouverai mon chemin.
Et il va se mettre résolument entre les mains
des médecins. La blessure de ce jeune héros était
cependant bien grave, puisque deux heures après il
tombait sans vie. «Que faites-vous? crie au
médecin cet autre soldat renversé h terre par une
balle qui lui est entrée bien avant dans la jambe.
Voulez-vous couper mon pautaloo pour aller plus
vite et me faire souffrir moins longtemps Ce n'eat
pas de cela qu'il s'agit. Allez plus leutemeot, afin
que lorsque vous aurez extrait la balle et pansé ma
blessure, j'aie mon paulalou tout entier pour re-