La Chambre des Représentants a encore continué
mardi la discussion sur l'amendement, présenté par
M. Frère, a l'art. 4o du projet de loi relatif aux
jurys pour la collation des grades académiques.
Aucun vote n'a été émis et la suite de la discussion
a été remise b jeudi, la Chambre devant assister
mercredi eu corps aux funérailles de M. le comte
F. de Mérode.
Nos prévisions se sont réalisées la Chambre n'a
pas voulu que les traditions révolutionnaires s'in
troduisissent dans nos lois, que rincamèration en
vigueur dans le Piémont et abolie en Espagne, vint
b détrôner le principe consacré par l'article m de
la Constitution dans sa séance d'hier, ellea d'abord
rejeté par 54 voix contre 44 la proposition de M.
Verhaegen tendant b ce que l'amendement de M.
Frère fut renvoyé b l'examen de la section centrale.
Le même amendement aensuite été rejelépar 58
voix; 58 membres se sont abstenus, b la demande
de M. Frère, qui en a fait de même.
L'Emancipation publie les lignes suivantes a
propos des funérailles du comte de Mérode
Le cortège s'est formé dans la rue aux Laines
et s'est dirigé vers l'église des Minimes, b travers
toute la garnison de la capitale, par les deux
Sablons, encombrés d'une population compacte et
recueillie. Toutes les fenêtres étaient garnies de
monde, et le peuple remplissait les tues comme au
jour b jamais mémorable des funérailles de la
Reine des BelgesLouise-Mariequi honorait
Félix de Mérode d'une affection particulière.
Sur le passage du convoi et dans l'église des
Minimes, litléralement inabordable b la masse du
public, les mêmes marques de douloureuse sympa
thie ont été prodiguées b la mémoire du grand
citoyen enlevé subitement b la patrie. On a vu
couler des larmes précieuses celles des pauvres,
qui n'étaient pas les moins abondantes, ont parti
culièrement touché le cœur de ceux qui connais
saient intimement le bon comte Félix.
v On ne peut lire sans émotion les éloquents
discours prononcés par MM. Delebaye, De Decker
et de Theux; nous avons été témoins de la vive
émotion qu'ils ont produite, mais, nous devons le
dire, la meilleure oraison funèbre de la journée a
été celleque nous avons entendu sortir de la bouche
d'uo pauvre bomme, b l'entrée de la rue des
Minimes, pendant que le convoi, arrêté par la
foule, ralentissait sa marcbe. Nous la reproduisons
littéralement Al die eer verdienl hy welhy
was eenen groolen heer, maer eenen braven
menscheen goed chris telyk man die met ont
deelde vele lieden gelyb hy zouden hel land
gelubkig maken. Il mérite Ions ces hon
neurs; c'était nu grand seigneur, mais un brave
bomme, on bon chrétien qui partageait avec nous;
beaucoup d'hommes comme lui rendraient le pays
heureux. Si nous rapportons ces mots dn cœur,
c'est parce qoe nous savons qu'ils exprimeot les
sentiments de tous les pauvres qui ont approché de
Félix de Mérode.
DISCOURS PRONONCÉ PAR M. DELEBAYE.
Messieurs,
La douleur vraie est sobre en plaintes, elle se
résigne et ne s'étale point.
La Patrie a perdu l'un de ses enfants les plus
nobles et les plus dévoués; la Chambre des Repré
sentants, en le proclamant devant une tombe où la
vérité seule est écoutée, la Chambre est l'organe
fidèle du seotiment national.
Dirai-je, messieurs, au nom de cette Chambre,
au nom de la Belgique, quels litres avait M. le
comte Félix de Mérode b la reconnaissance de tous?
A quoi bon et qui les ignore? Le peuple belge a la
mémuire du cœur. Il sait qu'aux jours du péril pour
la patiiemenacée,FélixdeMérode,avec un courage
dont le désiotéressemeot atteignait seul la hauteur,
exposa sa fortune et sa tète.
Il sait que ce regretté collègue, pendant une
carrière politique de vingt-sept armées, a voué au
bien de tous, son intelligenceses forces, ses con
victions, avec une inébranlable constance, une
franchise, une loyauté sans égales.
Héritier d'un nom illustre, Félix de Mérode en a
relevé l'éclat par ses services et ses vertus.
Pour lui, noblesse obligeait, son âme généreuse
l'avait compris si grande qoe fût l'illustration de
sa famille, l'obligation qu'elle imposait a été pa-
trioliquement et grandement acquittée.
Nous, ses collègues, qui l'avons aimé comme tous
l'estimaient, nous avons le droit aussi de rappeler
au moment de la séparation, ces qualités précieuses
du cœurqui nous iereodaientsi cher; mais pourquoi
insister sur les mérites de l'homme ptivé?
La foute reconnaissante, les malheureux que
Félix de Mérode soulageait avec une inépuisable
charité, attendent au seuil de cette demeure {tour
lui rendre un dernier et respectueux hommage de
gratitude. Les indigents le pleurent avec nous. Les
larmes du pauvre sont toutes puissantes sur la
miséricorde de Dieu, elles forment le plus beau
cortège que puisse avoir la pompe funèbre des
graodsdelà terre.
Ne retardons pas, Messieurs, les manifestations
de ces sentiments.
A notre excellent collègue, b l'homme de bien,
an citoyen dévoué, un dernier adieu, ou plutôt au
revoir dans ce moude meilleur où nul de nous
ne sait b quelle heure Dieu l'appellera.
Félix de Mérode, au nom du pays, merci pour ta
longue et honorable carrière; au nom de tes collè
gues, de tes amis, au nom de tous, adieu/
DISCOURS PRONONCÉ PAR M. DE DECKER.
Messieurs
Une double pensée de regrets personnels et
de reconnaissance publique, nous réunit autour
de ce cercueil qui renferme les restes mortels
d'un des principaux fondateurs de notre indé
pendance nationale.
Interprète des sentiments de la Belgique
entière, je voudrais dérouler le tableau de cette
existence toute consacrée C exercice des plus
éminentes vertus, toute dévouée au bonheur du
pays.
L'existence du comte Félix de Mérode se
confond avec l'histoire de la Belgique indé
pendante et libre.
Accourul'un des premiersVappel de la
patrie en armes, ensemble avec son frère, le
glorieux martyr de Berchem, il prêta au gou-
vernementimprovisé sous le Jeu des barricades,
l'appui d'un grand nom et d'un noble cœur.
Bientôt après, il contribua au sein de notre
immortel Congrès, fonder l'édifice de nos
libertés constitutionnellesque sa constante
préoccupation fut toujours de conserver intact
et respecté.
Dès ses premiers pas dans la carrière parle
mentaire qu'il parcourut avec un éclat soutenu,
il se révéla tout entier nature droiteintel
ligence prime- saulièrecaractère loyal. Tout
le pays connaît le programme de sa politique
essentiellement chrétienne par son esprit, essen
tiellement nationale par son but. A cette poli
tique, dont il avait puisé les éléments dans les
traditions de sa Jamille autant que dans les
inspirations de son cœuril se montra fidèle
jusqu'au bout.
Il aimait instinctivement et d'un amour égal
Fautorité et la liberté, mais il les voulait faites
son image l'autorité paternelle et dégagée
de tout abus de pouvoir la liberté honnête et
ennemie de tout excès. Passionné par la liberté
et la justice, il défendait ses convictions, tantôt
avec la puissance de l'autorité que donne un
beau caractère, tantôt avec le charme d'une
originalité pleine d'esprit et de bon sens.
Qui de nous ne se rappelle avec un bonheur
mêlé d'attendrissement, quelque épisode de ces
discussions dont les derniers échos semblent
résonner encore A nos oreilles
Sa haute position, sa longue expérience des
hommes et des affaires, son indépendance et
son désintéressement et, par-dessus tout, son
incontestable dévouement au pays, lui avaient
pour ainsi parler, donné le droit de dire tout
le monde et sans froisser personne, de coura
geuses vérités. Mais aussi, il savait payer de
sa personne, sans marchander son concours. Il
ne reculait devant aucun sacrifice pour assurer
le triomphe des principes dans lesquels il voyait
le triomphe des grands intérêts du pays. Son
bienfaisant patronage était acquis toute
œuvre utilea toute entreprise nationale.
Restauration de nos vieilles gloires historiques,
il embrassait tout dans t étreinte de son patrio
tisme éclairé.
Est-il étonnant que le décès inattendu de cet
homme de bien soit devenu le sujet d'un deuil
national?
C'est que chacun comprend quel vide laisse
au milieu de nous la disparition de ces hautes
influences, qu'assure la rare réunion de la
vertu, du talent et de la naissanceC est que
chacun comprend combien importent au salut
de la société, ces organisations privilégiées, dé
vouées au culte du devoir, du devoir noblement
compris et généreusement accompli. C'est que
chacun comprend combien il est nécessaire de
conserver notre patrie ces défenseurs naturels
de nos jeunes institutions, dont T esprit s'est
incarné en eux et dont ils sont d'autant plus
jaloux de maintenir l'honneur qu'elles furent
leur œuvre,les fruits de leurs luttes et de leurs
travaux, le couronnement de leurs patriotiques
espérances.
Heureusement, il est dans les vues de la
Providence que ces hommes d'élite soient utiles
encore par leur mort même. Le souvenir de leur
existence devient un enseignement fécond en
impressions salutaires.
A leur mort il s'opère comme a Finsu de tous
un travail mystérieux dans les esprits et dans
les cœurs. Les passions se taisent, et dans ce
silence, plein de recueillement, la conscience gé
nérale parle. Les instincts généreux se réveil
lent, les bons sentiments reprennent le dessus
un cri d'admiration et de respect s'élève de la
Joule. Les bons citoyens se rassurent en voyant
la place que la vertu occupe encore dans l'orga
nisation de notre société, et F influence irrésisti
ble qu'elle continue d'exercer sur ses destinées.
Que nos cœurs se relèvent donc! Qu'ils ne
s'affligent pas comme les cœurs de ceux qui
n'ont pas d'espérance; mais qu'ils se retrem
pent la source des grandes et divines con
solations.
Que l'ame du grand citoyen que nous venons
de perdre repose en paix, au sein de ce Dieu
qu'il a aimé et glorifié! Que sa mémoire soit
bénie travers les générations
Et nous, poursuivons courageusement F ac
complissement de la mission sociale que la
Nation nous a imposée. Que la Providence
perpétue au milieu de nous ta race des hommes
consciencieux et dévoués, et la Belgique vivra,
prospère, honorée, libre!
Quelle est au vrai la situation intérieure de
l'Angleterre? A cette question qu'il s'adresse, le
Télégraphe répond par les chiffres suivants
Nous avons dit déjà qu'à Londres seulement on
compte en ce moment i5o mille ouvriers sans