40me Année.
Samedi 30 Mai 1857.
No 4,139.
FOI CATHOLIQUE.
CONSTITUTION BELGE.
LE PROPAGATEUR
POUR LA VILLE 6 FR. PAR AN,
4 FR. POUR 6 MOIS, 2-50 POUR
TROIS MOIS.
POUR LE DEHORS FR. 7-50 PAR
AN, 5 FR. POUR 6 MOIS, 2-75
POUR 3 MOIS.
7FB.ES, 30 iMai.
BULLETIN POLITIQUE.
L'interminable affaire de Nencbàtel touche a sa
fio. Le Moniteur universel annonce la signature
d'un traité consacrant la rénoncialion du Roi de
Prusse ses droits sur la principauté-canton, en
retour d'engagements contractés par la Confédé
ration de nature répondre la haute sollicitude
du Roi pour les Neuchâteloia.
La Chambre des Lords a voté, aux termes d'un
amendement proposé par l'évêqoe d'Oxfordla
suppression au biil sur le divorce de la clause qui
donnait aux époux divorcés le droit de se remarier.
La Sainte-Ecriture, a dit le prélat, condamne en
termes clairs et formels ces mariages après
divorce. Une disppsijiqn, comme celle que l'on
proposeporterait atteinte l'honneur de la
nation anglaise, au bonheur des familles, la
pureté des mœurs.
A diverses reprises, les affaires du Mexique ont
attiré notre attention. Là dous avons vu les déten
teurs du pouvoir ébranler eux-mêmes de parti
pris les premières bases, les véritables assises de
l'ordre politique et social, spolier l'Eglise de ses
biens et persécuter ses ministres. L'exil de l'arche
vêque de Mexico couronne aujourd'hui ce système
de vexations brutales. Peut-être Comonfort, dont
la chute est tenue pour imminente, espère-t-il
contenir ses adversaires par la terreuret la violence.
La Chambre a volé mercredi les articles 71 et 78
de la loi sur la charité ces articles renferment
le principe de la loi et consacrent la liberté des
fondations. Ce vote est importantil est le résultat
d'un scrntin qui a donné quarante et une voix aux
amendements réunis de MM. Tesch et le baron de
Steenhault, et soixante voix au système de la loi.
La séance a commencé une heure et demie. Il
y avait dans les tribunes plus de monde encore que
les jours précédents. M. le ministre de la justice a
présenté des amendements dans le sens des modifi-
tions réclamées par M. Rousselle, et, spontanément,
il en a déposé trois antres qui tendent interdire,
sauf, résolution contraire du conseil communal,
l'entrée d'élèves payants dans les écoles de fon
dations, et l'application ces écoles du régime
d'iospection de la loi de i842 sur l'enseignement
primaire. Ces amendements de M. le ministre de la
justice constituaient une concession réelle, et M.
Rogier lui-même a dû reconnaître qu'ils attestaient
de la part du cabinet un désir sincère de conciliation,
ainsi qu'un grand pas dans cette voie.
M. Frère a pris la parole un peu après, pour
iosister sur ce qu'il appelle le manque des garanties
sérieuses dans la loi contre les abus possibles, et il
s'est plaint qu'on ne lui eût pas suffisamment
répondu sur ce point, ajoutant qu'on jouait une
indigne comédie. Bien que le mot soit peu
parlementaire, il est mainte fois arrivé qu'on en
prononçât de semblables la Chambre sans soule
ver autre chose qu'un mouvement d'hilarité. On
sait assez où le dépit des minorités les peut entraî
ner, pour comprendre que ces vivacités du débat
n'ont aucun sens, et sont en général désavouées
peu d'instants après qu'elles ont été dites. C'est ce
que M. Frère a fait lui-même aujourd'hui; il a
rappelé les précédents et il a fait entendre que ce
qu'il avait dit n'avait pas d'importance réelle.
Mais avant cette explication atténuante, un
grave incident s'est élevé. Sur les mots indigne
comédie il y a eu, dans les tribuues publiques,
des applaudissements très-vifs, mêlés d'injures et
de murmures l'adresse des membres de la majorité.
Aussitôt M. le président donné l'ordre de faire
évacuer les tribunes. Sur cet ordre, il y a eu de
nouveaux murmures. M. Dumortier a fait entendre
alors, au nom des libertés parlementaires violées,
les plus énergiques protestations, les tribunes ont
été évacuées avec lenteur, et la séance a été sus
pendue pendant une demi-heure.
A la reprise, la discussion a été calme. M. Frère-
Orban a fait des observations critiques au sujet de
la personnification civile, M. Rogier a engagé le
cabinet souscrire aux amendements de M. Tesch
ou retirer la loi, et MM. Malou et le ministre de là
justice ont pris la parole pour démontrer, comme
ils l'ont fait en effet, que les craintes et les critiques
de M. Frère n'étaient pas fondées, et que la loi
n'avait d'autre but que l'organisation d'une sage
liberté en matière de fondations.
La clôture a été demandée après cet échange
d'explications. Elle n'a poipt été combattue, bien
qu'il y eût encore des orateurs inscrits. M. Del fosse,
qui devait parler, a dit: J'avais quelques courtes
observations faire, mais si je combattais la clôture
il y a deux jours, je la crois nécessaire aujourd'hui;
je reooDce la parole.
Pendant ces débats, on a pu entendre diverses
reprises des cris sur la place du Palais; il y avait là
un rassemblement composé du public exclu des
tribunes, et c'est ce rassemblement considérable
dont les vives clameurs se faisaient entendre
l'intérieur.
Lorsque le vote a été décidé, M. le président, qui
a montré dans ces circonstances de la fermeté pour
soutenir les droits et la dignité de la Chambre,
a donné l'ordre, pour que le vote fût tout fait
poblic, que les portes fussent ouvertes. Il est bon de
dire que les tribunes de la presse, de la présideoce
et de la diplomatie n'avaient pas été comprises dans
la mesure prise lors de l'incident.
Les portes ouvertes, il n'est rentré que fort peu
de spectateurs le reste a continué former un
rassemblement la porte principale du palais
législatif. Après le vote, les représentants et les
membres du corps diplomatique sont descendus, et
dès que la foule les a aperçus, elle a commencé
huer les membres de là majorité et a saluer M. Frère-
Orbao de ses applaudissements et des cris de:
Vive Frère
Là s'est produit un nouvel et très-déplorable
incident. Mgr Gonella, archevêque de Néo-Césarée
et nonce de S. S. le Pape Pie IX, est sorti un des
premiers du palais, et la foule l'a accueilli par des
huées prolongées. Au lieu de monter dans sa voi
ture, Mgr Gonella est alors rentré au palais, où il a
rencontré, au grand escalier, M. le vicomte Vilain
XIIII, ministre des affaires étrangères. M. le vicomte
Vilain XIIII a pris alors le bras de Mgr le nonce, a
traversé avec lui le groupe même d'où étaient
parties les huées un instant auparavant, et l'a
reconduit pied.
Telle est l'affligeante manifestation dont nous
avons été les témoins la sortie de la Chambre. Il
est inutile que nous disions combien elle est grave
au fond, et combien elle va nuire, l'étranger, la
réputation si honorable que nous avait faite jus
qu'aujourd'hui la sagesse de nos mœurs politiques.
Les maximes du genre de celles que la gauche
professe au sujet du respect des droits que confère
l'élection, ont une funeste portée, et lorsqu'on
menace les majorités de les abattre révolutionnaire-
ment si l'on est légalement impuissant, on inspire
aux politiques de la rue le désir de traduire en fait
ces maximes.
Aucune manifestation turbulente n'a eu lieu
dans la soirée d'hier, la plus grande tranquillité a
régné dans toute la ville. La consigne des troupes
qui avait été ordonnée 4 heures a été levée a
6 heures.
A l'issue de la séance de la Chambre des Repré
sentants, tous les ministres se sont rendus au
château de Laeken, où il y a eu un conseil de
cabinet présidé par le Roi.
Jeudi, un grand nombre de personnes ont rendu
visite Mgr. Gonella ou se sont fait inscrire son
hôtel pour protester contre les indignes violences
dont l'honorable prélat a été l'objet au sortir du
palais de la Nation.
L'Indépendance annonce, qu'au moment où M.
Orts a quitté le palais législatif, il a été accueilli
par les acclamations de la foule, que M. Rogier
a été chaleureusement acclamé son tour, et
que la multitude s'est portée ensuite devant la
demeure de M. Frère, où telle a poussé quelques
vivats. Ce n'est pas Mgr. Gonella que nous
plaignons en cette circonstance.
Jeudiau moment du vote de l'art. 1" de
l'amendement de M. Tesch, 7 membres étaient
absents. Ce sont MM. de Sécus, de Liedekercke,
'de Wooters, Thienpont, Anspach, de Breyoe et
Lebeau. La majorité réelle pour le principe du
projet de loi est donc de 64 contre 44.
Des démonstrations de la nature la plus grave
ont encore eu lieu jeudi autour du palais de la
Nation des cris inconstitutionnels,desmeoàces cou
pables ont été proférés et une impunité complète a
enhardi les perturbateurs.
Dès midi, la foule assiégait la porte d'entrée des
tribunes publiquesdela Chambre des représentants.
Plusieurs ecclésiastiques ont été hués et même
frappés. Ils ont été repoussés des abords de la Cham
bre, quoiqu'ils fussent porteurs de cartes d'entrée.
Vers 2 heures la cour intérieure du palais de la
Nation, la rue de l'Orangerie, une partie de la rue
de Louvaro et tonte la place qui s'étend entre le
Parc et le péristyle du palais étaient occupées par
des masses turbulentes qui manifestaient hautement
l'intention de méconnaître l'inviolabilité des dépu
tés du pays.
De deux heures cinq, la foule a hué de toutes
ses forces les députés qui se montraient aux fenêtres
du palais. Quelques agents de police mêlés aux
groupes semblaient n'exercer aucune influence sur
leur attitude. On s'entretenait des manifestations
organiser contre la Chambre. On parlait de dépu-
tations provinciales, de pétitions porter proces-
sionnellement au Roi, etc.
La séance finie, MM. les députés, au nombre de
cent environ s'apprêtaient regagner leur logis,
quand des cris et des vociférations de tout genre ont
éclaté aux abords du palais de la Nation l'une et
l'autre issue étaient apostés quelques hommes
chargés de crier la foule les noms des députés qui
sortaient. Les députés libéraux étaient salués d'ac
clamations enthousiastes et de mille chapeaux agités
dans l'air. Les députés conservateurs, au contraire,
étaient entourés, hués, siffles, insultés; avec uo
bruit assourdissaut. Ils ont eu toutes les peines du
monde gagner la rue de la Loi et le Parc. Bien
qu'ils n'aient sollicité la protection de personne, ils
ont été, quelques-uns du moins, spontanément
accompagnés de membres de la gauche qui sup
pliaient les tapageurs de cesser lenrs insultes contre
les élus de la nation.
Parmi les cris proférés dans ces tristes saturnales