41me Année.
Ulercredi 23 Décembre 1857.
N<> 4.198.
A cause de la fête de Noël, le Propagateur
ne paraîtra pas samedi.
Malgré tant de causes réunies qui de
vaient inévitablement amener une victoire
momentanée pour le parti du désordre
dans les élections du 10 décembre, nous
sommes heureux et fiers de constater que
nos Flandres catholiques n'ont point fléchi
sous le joug du despotisme ministériel et
n'ont point cédé au mouvement passager
d'un entraînement. S'élevant au dessus de
la faiblesse du parti qui provoquait tant de
défaillances, nos Flandres ont maintenu
haulelfermeiedrapeau de leur foi antique,
de leur patriotisme éclairé, de leur noble
indépendance. C'est au résultat des élec
tions des Flandres, c'est aux signes les
moins équivoques de l'esprit qui anime ces
provinces, que le pays sera redevable de
la modération relative et de la circonspec
tion, que le ministère de l'émeute sera
forcé d'apporter dans l'exécution des pro
jets fatals de son parti.
Dans la Flandre orientale sur vingt dé
putés élus, treize appartiennent Fesprit
catholique et national. Ils ont été élus dans
les collèges électoraux de Termonde, Alost,
S'-Nicolas, Audenarde et Eecloo, une
immense majorité.
Les sept nominations du seul collège
électoral deGand, appartiennent aux loges
émeutières; et malgré tout, un déplace
ment de cent votes sur plusieurs mille,
amenait le triomphe des catholiques. II y
a donc là, pour la prochaine fois, un écla
tant triomphe attendre, lorsque cette
population catholique aura eu un peu le
temps de se reconnaître.
Dans la Flandre occidentale, les catho
liques ont réélu la barbe du ministère,
leurs anciens députés catholiques au nom-
LE PROPAGATEUR
pour la ville 6 fr. par an,
4 fr. pour 6 mois, 2 50 pour
trois mois.
FOI CATHOLIQUE.
CONSTITUTION BELGE.
pour le dehors fr. 7-50 par
an, 5 fr. pour 6 mois, 2-75
pour 5 mois.
f 2 S 25 Décembre.
revue politique.
La Russie s'attend, d'un jour l'autre,
voir paraître l'ukase prononçant l'abolition du
servage. Cette réforme considérable s'accom
plirait en trois périodes successives. Dans la
première, l'existence politique des paysans sera
reconnue et leurs devoirs vis vis des seigneurs
exactement déterminésdans la seconde, la
libération des serfs sera prononcéedans la
troisièmele droit de propriété leur sera accordé,
la corvée et autres redevances seront remplacées
par un cens fixe et qui pourra être racheté.
Ce progrès politique et socialqui rehausse
l'empire moscovite aux yeux de l'Europe civi
lisée, contraste péniblement avec le fatal mou
vement de recul où notre Belgique est entrée
depuis quelques moiset qui l'a fait la fois
rétrograder dans la voie de la civilisation et
déchoir devant l'opinion publique. Sans doute,
il importe peu aux nations étrangères que ce
soit M. De Decker ou que ce soit M. Prère qui
siège chez nous au banc ministériel La ques
tion n'est pas là, ainsi que le constate judicieu
sement une feuille constitutionnelle française,
dont les appréciations témoignent de ce que
pensent de nous au-delà de nos frontières les
amis de l'ordre et de la liberté. La question
n'est pas là. Elle est toute dans la transforma
tion qui vient de s'opérer en Belgique, Depuis
plus d'un quart de siècle nous f aimions
surtout pour le spectacle qu'elle donnait au
monde, d'un peuple jouissant, au milieu de la
vieille Europe, des libertés les plus étendues
sans mélange d'esprit révolutionnaire.
Depuis dix ans, les choses ont bien changé.
LA COMPAGNIE DES INDES ORIENTALES.
(Soite et fin. Voir le 11° 4i°97 du Propagateur
Elle a exploité le fanatisme des diverses sectes
de l'Orient; elle a brisé les liens de famille,
fourni des armes au (ils contre le père, et les cré
dules Indiens se sont égorgés sons ses yeux, loi
donnant chaque instant le spectacle des plus
affreuses dissentions. Enfin, la base de l'édifice de
la grandeur anglaise dans l'Inde n'est appuyée
que sur des cadavres et des mines. Qu'on lise les
ouvrages des plus illustres historiens de ce pays;
on en verra la preuve chaque page.
Tous les crimes qu'on reprochait la Compagnie
excitèrent, il n'y a pas bien longtemps, une indig
nation géuéiale. On demanda une enquête, on la
commeoca; mais les coupables étaient si élevés en
dignité, si puissants, que la connaissance de leurs
forfaits n'aurait pu qu'infliger une honte éternelle
sur toute la nation. On aima mieux garder le
silence. Pour l'honneur de l'humanité, on publia
que les accusations portées contre la Compagnie
étaient fausses et saos fondement.
Mais cette longue série d'opérations tyrauni-
ques, écrivit en i84i un historien français, lui a
fait des ennemis toujours prêts secouer le joug.
Aujourd'hui, ils n'aspirent qu'à le briser, n'atten
dent qu'une occasion favorable, et voilà pourquoi
l'Aog'ais, tout-puissant en apparence, frémit la
La Belgique a du aux libertés presque sans
limites que ses lois lui accordent, le funeste
privilège de devenir le refuge préféré des
révolutionnaires de tous les pays. Ils y ont
publié leurs livres, leurs journaux; ils ont
professé avec un succès inouï l'art de trans
former en poisons mortels les libertés les plus
sacrées et les plus précieuses. Le vieil esprit
Belge a résisté quelque temps il lutte encore,
mais il perd chaque jour du terrain et le
progrès de Cesprit nouveau, de l'esprit révo
lutionnaire, and social, s'est déjà manifesté en
mainte occasion par les symptômes auxquels il
est facile de le reconnaître.
Vne défiance vague et indéfinieet qui n'a
sa source que dans une ambition égoïste, a
brisé le lien qui naguère encore réunissait
toutes les classes de la société. L'esprit révolu
tionnaire venu du dehors, a divisé cette
Belgique autrefois si unie et trouvant dans
celte union sa prospérité et sa liberté comme sa
force.
La religion et ses ministres ont été en butte
des attaques qui rappellent les plus mauvais
jours de notre histoire.
Les loges maçonniques, devenues le sanc
tuaire et l'instrument de cet esprit nouveau
se sont multipliées; on a profité de l extrême
liberté dont jouit ta presse pour créer des jour
naux qui, rédigés en langue flamandevont
répandre ce poison et la corruption jusqu'au
fond des campagnesoù il se propage plus
lentement et où, malgré ce travail incessant,
l'antique foi se maintient engore.
Foilà le secret de ces défiances dont les
électeurs ruraux sont Vobjet, et de ces accusa
tions odieuses contre le clergé, dont sont remplis
les journaux qui appuient la politique des
nouveaux ministres. La religion est partout, et
elle a toujours été principalement en Belgique
une des grandes forces de l'ordre social; c'est
donc par elle quila fallu commencer l'attaque.
seule présence d'un Européen, d'un Français sur
tout, dans la crainte qu'il ne donne aux princes
indieus des conseils aussi nuisibles l'Angleterre
que pourrait l'être la flotte la plus redoutable.
Le mode de perception des impôts était telle
ment vexatoire il y a encore vingt ou vingt-cinq
ans, qu'il aurait suffi pour ruiner et dépeupler l'Inde.
(I y avaitpar étendue de pays, un Anglais
chargé de la perception. Ce collecteur, chef de la
proviuce ou de l'arrondissement, avait sons ses
ordres un conseil composé de deux collecteurs
aspirants; c'étaient aussi des Européens. A ce
conseil était joint un greffier; puis ajoutez la
suite du collecteur, et ses ordres, des compagnies
de cipayes n'ayant de courage que pour retenir
leurs compatriotes sous le joug et resserrer leurs
fers, deux ou trois Péous par aidée ou village
telles sont les sangsues que l'Angleterre envoyait
et prenait dans l'Inde.
A ce collecteur se joignait un grand Dobachi
auquel on veudait ordinairement la collecte des
impôts. Ce Dobachi devenait un homme fort
important, car, pour parvenir ce poste, il avait
avancé beanconp d'argent, et cet argent ne pouvait
manquer de lui revenir avec de gros intérêts.
C'était lui qui donnait bail la collecte des diffé
rentes aidées.
Les Malabares qui il en cédait le droit vou
laient s'enrichir. Aussi impitoyables que les Anglais,
ils tourmentaient leurs concitoyens, et s'il arrivait
que l'aldéen se plaignit, le Dobacbi étouffait la
plainte et disait qu'elle n'était pas fondée. Comme
il parlait les deux langues, et qu'il était intéressé
dans la recette, il avait grand soin que tien n'écla
tât et que tout s'arrangeât sans bruit.
Les f'éons étaient chargés de poursuivre quicon
que cherchait ne pas payer l'impôt au chef
malabare. C'étaient autant de petits tyrans associés
au chef de chaque collecte. Il y en avait deux au
moins par chaque aidée. Ils recevaient aussi du
gouvernement anglais une solde comme chefs de
police des villages et, sous ce double rapport, ils*'
étaient aux ordres du collecteur de leur ariondis-.
semenl.
D'après ce rapide exposé, que l'on juge du
nombre de mains qui devaient presser la grappe
avant qu'elle rapportât au liésor pu.Mic ce qu'il
en exigeait.
Les cipayes, sur lesquels oo fait en ce moment
tomber tous les reproches, c'est la population
intime de l'Inde, c'est la race brune ou cuivrée.
Ou l'asservissait, pendant que l'on abolissait l'es
clavage de la race noire. Depuis deux ceot cin
quante-sept ans, cette race brune a été l'instrument
aveugle des volontés de la Compagnie. Elle a
anéanti des générations entières et, sou tour, elle
a vu tomber des générations entières des sieus.
(Courrier de Paris.) Ch. d'Arge..