41me Année.
Samedi 10 Avril 1858.
Ao 4,229.
LE PROPAGA
POUR LA VILLE 6 FR. PAR Alt,
4 FR. POUR G MOIS, 2-50 POUR
TROIS MOIS.
FOI CATHOLIQUE. CONSTITUTION BELGE.
POUR LE DEHORS FR. 7-50 PAR
AN, 5 FR. POUR 6 MOIS, 2-75
POUR 5 MOIS.
Trï.aS, 10 AVRIL.
REVUE POLITIQUE.
Le procès Bernard, prévenu de complot contre
la »ie de l'Empereur, et les affaires Truclove et
Tchernewski, accuses d'avoir publié des libelles
outrageants contre le même souverain, se poursui
vent actuellement devant le jury britannique:
L'intérêt qui s'y rattache est d'autant plus vif et
plus légitime que les résultats de ces poursuites
témoigneront de l'efficacité ou de l'impuissance de
la législation actuelle de l'Angleterre pour protéger
la personne des Souverains étrangers et doouer
satisfaction la France.
Sur ces entrefaites une manifestation hideuse a
eu lieu Londres. Dans un meeting très nombreux,
dit-on, l'éloge d'Orsini a été accueilli avec enthou
siasme, et le président, M. Jos-Cowen, s'est glorifié
d'avoir été honoré de l'amitié de ce malheureux
condamné, et cela aux applaudissements réitérés
du public présent. Un libraire bien connu, du nom
de Holyoake, s'est déclaré prêt publier toute
brochure quelconque sur le tyrannicide, disant que
pour la défense de la liberté de discussion, il ne
reste d'autre moyen que de multiplier les cas de ce
genre, en donnant au gouvernement tant de procès
faire qu'il lui soit impossible de les diriger, et par
là mettre un terme sa politique. Déjà, dit une
correspondance de Londres, nous avons sous les
yeux trois prospectus différents de trois éditeurs,
auoonçant chacun une brochure dans le sens de
celles déjà annoncées par Holyoake.
A Delhi se poursuit un procès d'un tout autre
geDre; celui da vieux Roi, prévenu d'avoir voulu
reprendre sa couronne, d'avoir fouieDté cet effet
la révolte, d'avoir pris part, au moins par ses
ordres, au massacre, plus ou moins authentique des
Européens.
La Porte paraît un peu revenue de son attitude
belliqueuse l'égard du Monténégro. Elle espère,
dit-on, en finir rapidement avec l'Herzegovine,
mais n'ira pas chercher le vladica de Monténégro
dans ses montagnes. Les forces du corps expédi
tionnaire ne permettaient pas de tenter une entre
prise aussi longue et difficile.
Tandis que les Puissances Occidentales en sont
se montrer les dents de l'une l'autre côté de la
Manche et que leurs efforts combinés dans les
parages constamment hostiles de l'extrême Orient
n'aboutissent rien de décisif et de marquant, la
Russie, elle, s'étend et se consolide sur les rivages
de 1 Océan Pacifique, menace l'Empire Chinois
I est et au nord, onvre son commerce et son
industrie les vastes débouchés du Nouveau Monde,
en même temps qu'elle en fait refluer les richesses
dans ses propres provinces d'Asie, naguère encore
si déshéritées des biens de la nature et de la
civilisation. En effet le gouvernement de Saint-
Pétersbourg vient de recevoir du gouverneur des
possessions russes sur le fleuve Amour un rapport
des pins favorables sur la situation militaire et
commerciale de ce vaste territoire, définitivement
annexé l'empire.
Les grands travaux de fortification de Nicolaïeff,
destinés devenir le cas échéant, le centre d'opéra
tions contre la Chine, n'ont pas été interrompus par
l'hiver. Des batteries formidables ont été élevées'a
l'embouchure du fleuve Amour, de façon en
défendre l'entrée aux flottes ennemies.
Le commerce a pris, l'année dernière, un grand
développement. Déjà on service régulier de bateaux
vapeur fonctionne entre Nicolaïeff et San Fran
cisco. Le trajet, une fois bien connu, pourra se faire
eu moins de quinze jours. En outre, la découverte
dans l'île Sagalier d'une mine de charbon de terre
d'une très-bonne qualité ne contribuera pas peu
développer la navigation de la Russie dans l'Océan
Pacifique.
Mais tandis que s'ouvrent pour l'empire Mosco
vite des sources nouvelles de prospérité matérielle
les manœuvres du parti révolutioooaire, (au moins
s'il faut s'en rapporter aux appréhensions du
correspondant particulier du Journal de Bruxel
les,) menacent de compromettre le bien-être, la
sécurité et l'avenir d'un pays que l'on croyait
l'abri de pareils orages. La question de l'abolition
du servage a tout la fois semé une vive agitation
parmi les classes inférieures, mécontenté uue por
tion notable de la noblesse, répaodu l'inquiétude
chez les petits propriétaires placés sous la menace
de la ruioe, enfin inspiré une partie du clergé
grec lui-même, jusqu'ici courbé si bas sous la
férule du maître, des idées d'indépendance qui ne
laissent pas que d'être généreuses. Et pour contenir
dans leur lit ces flots de passions contraires entre
elles, mais qui toutes battent et mènent les marches
du trône, un empereur bon, clément, voulant
sincèrement le bien de ses sujets,alors qu'il faudrait
un maître ne reculant ni devant l'impopularité ni
devant l'ingratitude. Ajoutez cela la corruption
morale et le scepticisme religieux des hautes classes,
l'ignorance du petit peuple, la servilité et l'abjec
tion où git le clergé schismatique.
Nous avons publié, il y a huit jours, un
article sous le titre de Logique progressiste, afin
de faire ressortir toute l'absurdité des raison
nements de nos contradicteurs ceux-ci ont
répondu comme de coutume, en travestissant
nos idées et nos parolesen se servant de gros
mots au lieu de raisons.
Afin de laisser juger nos lecteurs par eux-
mêmes, nous reproduisons notre article, et sa
suite nous publions les réponses du Progrès.
LOGIQUE PROGRESSISTE.
Il nous faut du nouveau, n'en fut-il plus au monde!
Telle est la volonté des hommes du libéralisme;
et malgré que le monde se fasse vieux, n'allez pas
croire qu'ils ne trouveront rien de nouveau soos le
soleil. Ils ont la bosse de l'invention ces Messieurs.
A peine la politique unioniste avait-elle dix-huit
ans, qu'elle était devenue vieille aux yeux des libé
raux; ils découvrirent alors la politique nouvelle
dont ils nous vantaient l'admirable fécondité... elle
n'a cependant produit que la désunion et n'a servi
que les intérêts des hommes dont l'influence avait
cessé avec le régime hollandais.
Dix années plus tard, voilà qu'ils ont trouvé une
logique nouvelle logique progressistevers
le passé, puisqu'elle doit nous raïueuer «ers le beau
temps de l'autocratie ministérielle et de l'arbitraire
communal.
Vous hommes qui comptez cinq lustres, écoutez
il vous souviendra d'avoir encore entendu de pareils
raisonnements; vous jeunes gens, prêtez l'oreille,
c'est du nouveau pour vous!.... Oyez plutôt!
Si le Conseil communal s'avise un jourde
décréter qu'il sera... boucher... et qu'il exposera
dans uoe salle de l'Hôtel-de-Ville, vendre du
bœuf, du veau, voire même du porc.... alors tout
fonctionnaire communal, écbeviu ou autre, aura
le droit, le devoir même, de forcer ses subal
ternes, ses employés, sous peine de perte de place
ou d'emploi, d'aller fournir sa marmite, moyen
nant écus, l'échoppe communaleparce
que le Conseil communal en se décrétant bou
cher aurait bien entendu que son échoppe fut
fréquentée et quelle eut des chalandssinon
pourquoi l'aurait-il organisée?
Econtez eucore
S'il prenait envie au Conseil provincial d'établir
aux chefs-lieux de province et d'arrondissement
un magasin d'engrais artificiel, et s'il se constituait
ainsi en concurrence avec les marchands de
guano alors tout fonctionnaire de la pro
vince, le commissaire d'arrondissement p. ex.,
aurait le droit et le devoir de forcer ses employés
et ses subalternes, bourgmestres, écbevins et
secrétaires surtout, sous peine de perdre leur place
ou leur emploi.... d'eograisser leurs terres avec la
marchandise achetée beaux deniers comptants,
dans les dépôts établis de par la province....parce
que le Conseil provincial en décrétant l'établis
sement de ses magasinsaurait bien entendu
qu'Us fussent fréquentés... sinon pourquoi les
aurait-il organisés?
Et encore
L'État possède par ci, par là, quelques terrains.
Supposez que MM. les ministres, aient l'idée de
faire voter par leurs dociles moutons une loi qui
leur donne la faculté de bâtir pour compte de
l'État, et d'élever sur plusieurs points du pays, des
hôtels, des maisons de différentes dimensions et
d'apparence différentedans ce cas, MM. les
ministres et tous les fonctionnaires des différents
départements, auraient le droit et le devoir de
forcer leurs employés et leurs subalternes, sous
peine de perte de place ou d'emploi, d'aller,
moyennant loyer dûment payé, se caser dans les
demeures appartenant l'Étatparce que
celui-ci en les élevant, aurait bien entendu
qu elles fussent habitées.... sinon pourquoi les
aurait-on bâties?
Mais s'écrie-t-on, ce serait absurde, ce serait
arbitraire! ce serait porter atteinte la liberté
individuelle; ni la Commune, ni la Province, ni
l'État n'ont le droit d'imposer un fonctionnaire,
appartînt-il au dernier échelon de la hiérarchie,
d'approvisionner son pot-au-feu, ses frais,
d'acheter sa marchandise avec ses propres écus,
d'aller se loger avec sa famille moyennant loyer,
là où il plaît leurs chefs de l'envoyer; tout Belge
est libre; sa qualité de fonctionnaire, d'employé,
de subalterne ne lui enlève pas sa liberté. Le
fonctionnaire doit remplir le service qu'on exige
de lui; la Commune, la Province, l'État le lui
paye, car tonte peine vaut salaire; mais il est libre
au fonctionnaire, l'employé d'employer son
salaire comme il l'entend.