que Y Indépendance, doit partager notre curiosité
sur ce point; car il reconnaissait naguères encore
qoe la liberté d'instruction est inséparable de la
liberté d'enseignement; il demandait par quel
moyen pratique on pourrait exécuter une loi sur
l'instruction obligatoire? Noos, nous avons démon
tré qu'une contrainte brutale et tyrannique l'anti
pode de la liberté constitutionnelle, serait inévitable;
l'iustruction obligatoire, disait de son côté YObser-
vateur, serait la destruction de la liberté, la
suppression de l'homme. Personne, disait-il, ne
méconoait la haute utilité de la tempérance au
point de vue social; eh bien! en suivant le
principe de l'iostruction obligatoire, il faudra
faire une loi sur la tempérance. Il est extrêmement
désirable, toujours dans l'intérêt social, que les
classes ouvrières aient des habitudes de pré-
voyance, d'économie, qu'elles ne gaspillent pas
en no jour, daos des réunions bachiques, une
somme qui pourrait suffire a l'entretien de leurs
familles, pendant toute une semaine; il faudra
faire encore une loi pour empêcher cet inconvé-
nient. Et, eo poursuivant ainsi les diverses appli-
cations de cette idée, l'on arrivera h imposer aux
cultivateurs l'osage du draîoage, au public l'usage
des assurances, etc... On tue la liberté, on sup-
prime l'homme.
Ce langage si sensé nous ferait accroire que
VObservateur n'est pas initié aux mystères du
parti autant que sa sœur Y Indépendance, s il
n'avait écrit la phrase suivante qui prouve que
dans les régions du Grand-Orient on en est h la
recherche des moyens dont parlent les feuilles
ministérielles. Le Gouvernement, dit Y Observa-
leur, ne négligera rien pour arriver en respectant
/a liberté, au but que poursuivent les partisans
de l'iostruction obligatoire.
Cette phrase dit plus qu'elle n'est grosse; voil'a
donc comment dans le camp libéral l'on compte
réaliser le vœu émis par le National et consorts.
Les hypocrites! ils reculent devant l'idée de porter
ostensiblement une nouvelle atteinte h l'une de nos
libertés constitutionnelles, mais ils ne désespèrent
pas de rendre celles-ci illusoires poor leurs adver
saires! Qoe de faits oo pourrait citer h l'appui de
cette assertion N'est-il pas désolant de voir fausser
ainsi nos institutions par l'esprit de parti? On ne
veut pas d'une mesure notoirement entachée d'in-
constitutionalité, mais on ne néglige rien pour
arriver au but que poursuivent les partisans de
l'instruction obligatoire on veut paraître rester
A ce nom de Freluquet, les deux gentilshommes
se regardèrent et s'écrièrent simultanément
Comment! c'est ce pauvre Freluquet, du
régiment des gardes, auquel oo faisait faire l'exer
cice et qui nous suivait lorsque nous allions passer
la revue du roi h la plaine des Sablons.
Lui-même, messieurs, répartit le valet de
chambre, et tout caduc que paraît être Freluquet,
il se trémousse encore passablement lorsque je joue
sur mou fifre une des marches du régiment des
gardes.
Pas possible! s'écrièrent les deux officiers.
Si vous voulez bien le permettre, messieurs,
ajouta le vieillard, je vais vous prouver ce que
j'avance.
Le valet de chambre retira presqoe pieusement
de la poche de son habit un fifre presqoe aussi
ancien que lui, et joua avec des variations et des
arpèges l'air fameux Dans les gardes Jrançaises,
j'avais un amoureux.
Aux premières notes du criard instrument
Freluquet se dressa lentement sur ses quatre
pattes, sa queue frémit, ses yeux flamboyèrent; il
aboya d'une voix éteinte et s'efforça de se tenir sur
ses deux pattes de derrière; maisses forces trahireot
bientôt son courage, et il retomba lourdement sur
le riche coussin qui lui servait de niche, en exba-
dans la légalité, et, en méconnaissant l'esprit de
la loi, on se met cheval sur un éclat de droit,
pour courir sus la liberté du pauvre officiellement
secouru, et pour l'empêcher d user d uo droit que
lui donne la loi naturelle, et pour loi enlever la
faculté d'un choix que la loi du 23 Septembre
i843 a sanctionnée elle-même implicitement, en
permettant la commune d'établir ou d adopter
plusieurs écoles, en loi en fesaot presque un devoir,
afin qu'il puisse être satisfait ainsi aux vœux des
parents.
Mais Y Indépendance, tout en admettant le
principe de l'instruction obligatoire, parait douter
qu'on puisse jamais trouver les moyens a em
ployer pour le rendre pratique. Pour le quart
d'heure elle ne sait rien; mais, dit-elle, ce que
ne peuvent pas faire les intelligences d aujour-
d'hui, les intelligences de demain le feront.
Que Y Indépendance se réjouisse! il ne lui faut
plus attendre jusqu'à demain pour se pâmer d'ad
miration devant ces grandes intelligences dont elle
appelle de tous ses vœnx l'apparition dans le
monde! Elles viennent d'éclore, ici Ypres, daos
le terroir libéral fécondé par le détritus d'an
ciennes administrations orangisteset voltairieones,
et échauffé par les rayons directs du Graud Orient
ces intelligences brillent ici de tout l'éclat de
génies transcendants.
Si Y Indépendance n'ajoute pas foi h nos asser
tions, qu'elle vieone h Ypres et» personne et qu'elle
y voie de ses propres yeux ici, en effet, le priocipe
de l'iostruction obligatoire est déjà mis en prati
que, au moins eo partie; cette réforme est déjà
appliquée aux enfants d'une classe de citoyens
d'autant plus digoes de respect qu'ils sont les
deshérités de la fortune.
Et le moyen s'écriera Y Indépendance.
Oh il est des plus durs et certes des moins
libéraux; écoutez plutôt
Il y a quelques mois une école primaire libre
et gratuite a été érigée en notre ville.
Depuis son ouverture, les administrations chari
tables ont menacé les pauvres inscrits sur leurs
listes, de les en rayer, non-seulement s'ils n'en
voient pas leurs enfants l'école, rnuis spéciale
ment s'ils négligent d'euvoyer leurs enfants h
l'école gratuite communaleou, bien encore,
s'ils envoient leurs enfants l'école gratuite libre
déjà cette menace a été exécutée; et les administra
teurs de la charité officielle ont refusé même un
morceau de pain des parents pauvres qui ont
laot uo grognement plaintif. Le cœur du vieux
barbet survivait lui-même.
Des larmes mouillèrent les yeux des officiers; ils
caressèrent l'envi, l'un et l'autre, Freluquet, qui
semblait les regarder comme de vieilles connais
sances.
Dieu me pardonne, messieurs, reprit le valet
de chambre, je crois que Freluquet a aussi bonne
mémoire que moi; il vous reconoait aussi.
Eh quoi mon ami, dit le marquis de Sivry,
auriez-vous aussi servi daos les gardes-françaises?
Oui, M. le marquis, répondit le vieux servi
teur; j'y étais fifre... et l'on m'appelait Fritz.
Quoi! vous êtes ce petit Fritz dont les fre
daines étaient passées en proverbe dans la compa
gnie Colonelle, et qoe les officiers aux gardes
avaieot surnommé le Moncade du Port-au-Blé?
Je suis ce Fritz là, M. le marquis, et je me
rappelle parfaitement les jours de salle de police
que vous m'avez fait l'honneur de m'infliger pour
mon bien.
Les deox officiers se prirent rireet Fritz
partagea leur hilarité.
Noos sommes tous bien changés, mon cher
Fritz, reprit le marquis de Sivry, et j'avoue pour
ma part que je ne t'aurais pas reconnu an premier
abord.
voulu conserver leur droit naturel et leur liberté
daos le choix de l'établissement d'instruction
gratuite poor leurs enfants.
Là dessos, les membres du Conseil communal,
désirant partager avec les administrateurs de la
charité officielle, les lauriers et les honneurs d'une
découverte aussi libérale, ont dans une lettre
publiée leur demande par les journaux de la
localité, approuvé la marche suivie par ces
MM'; ils ont déclaré que sur ce point là, leur
opinion est entièrement conforme celle des
administrations charitables, et de plus que
celles-ci en agissant comme elles le font, usent
d'un droit incontestable et remplissent un
devoir rigoureux.
Et Y Indépendance ne connaît point encore
cette heureuse et très-constitutionnelle décou
verte! Oh! son ignorance, ou tout au moins son
oubli l'égard de nos grands hommes, est d'autant
plus incroyable, qu'elle compte parmi tous ces
MM* là, des frères très-dévoués dont les vues et
les idées ne loi sont pas étrangères.
Si cependant Y Indépendance n'en sait rien,
qu'elle s'empresse de se rendre Ypres; en venant
ici recevoir des lumières, elle ne doit pas craindre
de s'humilier en descendant, pour quelques in
stants, du piédestal élevé qu'elle occupe dans le
monde intelligent; car, notre Hôtel-de-Ville,
comme oo le sait, se trouve encadré tout l'esprit
que possède le Chef constitutionnel de la Nation
dans la personne de notre Conseil communal. (1)
INSTRUCTION OBLIGATOIRE.
Le ministère belge cherche des lumières en
Suissedans cette terre classique de la
liberté;., non pour augmenter la somme de nos
libertés mais bien au contraire pour les restrein
dre. Voici une pièce officielle l'appui de notre
assertion.
On écrit de Berne, le 2 juin
Conformément au désir manifesté par le
ministre de l'intérieur du royaume de Belgique,
le gouvernement fédéral vient d'adresser aux
(i) Si cette phrase parait une énigme VIndépendance et
quelques uns de nos lecteurs, en voici le mot
Dans l'Adresse au Roi, rédigée, votée et signée, il y a un
an, par nos conseillers communaux, on lit Le Conseil Com
munal s'adresse unanimement "Vous, Sire, comme le Chef
Constitutionnel de la Nation
Il a été plus tard décidé de faire encadrer cette pièce
curieuse et d'en orner la salle des délibérations communales.
Honni soit qui mal y pense!
Je vous crois, M. le marquis; mais moi, je
vous aurais toujours reconnu, parce que les yeux
du cœur durent plus longtemps que les yeux de la
tele. Je disais toot l'heure que vous m'aviez tnis
souvent la salle de police parce que je le méritais;
mais je n'ai point oublié que vous avez sauvé le
fifre mauvais sujet et brelteur, en lui ouvrant votre
bourse pour apaiser une famille dont il avait blessé
gravement en duel le soutien... Voilà de ces choses
dont on ne peut pas perdre la mémoire quaud on
vivrait céut ans... Et dans une autre occasion...
Chut! chut chut dit le marquis en mettant
la maio sur la bouche du vieux Fritz, ne parlons
ni les uns ni les autres de nos escapades de jeunesse,
fifres et officiers, gentilshommes et soldats, nous
avoos tous fait des fautes, ;1 n'y faut plus songer.
Tachons seulement, tous tant que nous sommes et
dans quelque condition que le ciel nous ait
naître, de les effacer par les vertus de notre âge
mûr et de notre vieillesse.
Je me tais, M. le marquis; aussi bien le terop5
s'écoule, et je dois aller préveoir M. le duc et Mn°
la duchesse de votre arrivée céans.
Amédée de Bast.
{Vérité.) [Pour être continué.)