42me Année.
N° 4,275.
LE PROPAGATEUR
POUR LA VILLE 6 FR. PAR API,
4 FR. POUR 6 MOIS, 2-50 POCR
TROIS MOIS.
FOI CATHOLIQUE. CONSTITUTION BELGE.
POUR LE DEHORS FR. 7-50 PAR
AS, 5 FR. POUR 6 MOIS, 2-75
POUR 5 MOIS.
7 PP. as, 18 Septembre.
revue politique.
L'Angleterre surveille toujours avec une
jalousie inquiète le développement maritime
des autres nations. Elle n'a donc pu voir sans
humeur la cession terme) du port de Eilla-
franca que la Sardaigne vient de faire la
Russie. Les feuilles hostiles au cabinet Derby
s'écrient que jamais sous l'administration de
lord P aimer ston pareille chose ne se fut réalisée,
que la présence des paquebots russes dans la
Méditerranée est une menace pour l'Europe
une atteinte aux droits de Angleterre. C'est
sur ce terrain que l'opposition compte battre en
brèche le ministère, c'est t incident quelle se
promet d'exploiter Couverture du Parlement.
D'ailleurs, la prospérité croissante de la
Russie ne laisse pas que d'inspirer un cuisant
dépit a la mercantile Angleterre. Elle ne saurait
de sang-froid voir le colosse du Mord menacer
d'une concurrence écrasante ses propres rela
tions commerciales avec te Céleste-Empire, et
recueillir les principaux fruits d'une expédi
tion laquelle il n'point participé. Ainsi l'on
présume que le réseau des chemins de fer russe
serait poussé jusqu'à la frontière de la Chine
par la Sibérie orientale. Par cette extension
donnée ses voies ferrées, la Russie se trou
verait maîtresse du commerce du Céleste-
Empire avec C Occident.
L'Angleterre se félicite moins que jamais du
résultat de la pose du cable transatlantique qui
la devait relier au Nouveau - Monde. Il paraît
constant, d'après les expériences faites, que la
défectuosité du cable s'étend au moins 2 ou
3oo milles de la côte. Au delà de cette distance,
tout est encore doute et incertitude. S'il arrivait
que l'avarie existât dans les parties les plus
profondes de la mer, on devrait tenir le télé
graphe pour échoué. Il ne serait pas possible,
en effet, de retirer la portion du fil submergé
des profondeurs immenses. A quelques milles
de la côte, le fil peut être relevé mais quand il
est une profondeur de i ou 3 milles au dessous
de la surface, la longueur excessive du câble
qui se trouverait suspendu et la résistance que
t eau opposerait son soulèvement produi
raient sur ce fil un effort beaucoup trop consi
dérable pour qu'il pût y résister.
L'idée appliquer l'Algérie le système
libre échangiste ne semble pas éloigné des vues
du gouvernement impérial, nonobstant les
nombreux démentis d'une partie de la presse.
Par contre le voyage du prince Napoléon en
Afrique devient plus que jamais problématique
tout au moins renvoyé aux Calendes grecques.
La fêle de l'enfance imaginée par M. Rogier
approche et nous sommes la veille de la grande
exhibition d'écoliers qui doit se faire Bruxelles.
Le pays a déjà tant ri de cette lubie ministérielle,
1<re quand le jour de la mise en scène sera venu,
°n voudra se détourner a peine pour voir passer
armée de gamins ramassée daus les écoles officiel
les. Notre iDtention n'est point de dous occuper
aujourd'hui de celte solennelle sottise. Nous ver
rons ce qu'il en faudra dire après qu'elle aura été
promenée par les rues de la capitale. Mais a propos
des dépenses qu'entraînera la réalisation de cette
conception saugrenue nons nous permettrons de
risquer une timide observation sur une question
importante qui touche h l'enseignement du peuple
et que le ministère semble comprendre très-peu.
Il existe dans tout le pays et dans les Flandres
en particulier Un très-grand nombre d'écoles
gratuites qui se tiennent le dimanche, et où l'en
fant du peuple reçoit une instruction appropriée h
ses besoins. Ces écoles, créées et dirigées par le
clergé, sont un des moyens de civilisation les plus
efficaces que l'on puisse mettre en œuvre, et le
bien qu'elles opèrent est incalculable. Demandez h
tout homme qui s'occupe des questions d'éduca
tion populaire ce que vaut une bonne école domi
nicale, il vous répondra, en constatant la différence
énorme qui se remarque entre une commune dotée
d'une pareille institution et une autre commune
qui en est malheureusement privée.
Depuis de longues années déjà le gouvernement,
sous les différents mioistères qui se sont succédé,
semblait comprendre, lui aussi, qu'il y avait là
une bonne œuvre soutenir; dans un grand nom
bre de localités il venait an secours des écoles
dominicales en leur accordant un modique subside,
qui était au moins ou encouragement et une mar
que de sympathie.
Si léger que fût le secours ainsi accordé sur les
fonds du budget, il venait cependant fort propos.
Les directeurs des écoles dominicales convien
nent tous qu'il est impossible de faire prospérer
celte œuvre charitable, sans recourir 'a des distri
butions régulières de récompenses qui entretien
nent l'émulation parmi les élèves et les instituteurs,
et qui sont un puissant attrait pour faire fréquenter
les écoles. Mais ces distributions sont toujours
coûteuses et bien de fois la charité la plus ingé
nieuse trouve peine le moyen d'en couvrir les
frais. Les hommes dévoués qui dirigent les écoles
d'adultes, se trouvaient heureux du concours que
leur prêtait le gouvernement, de l'argent dépeusé
pour une pareille œuvre n'était pointtout le
monde en conviendra, un argent perdu.
Mais malheureusement cet argeut tombait dans
des mains cléricales, et comme ces mains sont
nécessairement suspectes et qu'il faut leur enlever
toute gestion d'argent possible, il paraît que le
cabinet des porte-pavés ne veut plus tolérer un
abus aussi criant de l'influence cléricale. On nous
assure, et nous le croyons sans peine, qu'un grand
nombre de requêtes adressées au gouvernement
par des ecclésiastiques dirigeant les écoles de
l'espèce, ont reçu pour toute réponse un avis qu'il
n'y a pas d'argent.
Depuis plusieurs années déjà les agents de la
politique doctrinaire intrus en 1847 et conservés
malgré cette originemontraient uu mauvais
vouloir manifeste l'égard de tonte demande
semblable. Aujourd'hui que la cléropbobie est plus
que jamais de mode et que la haine du prêtre est
personnifiée dans les hommes du pouvoir, on ne se
gene plus le moins du moode pour renvoyer sans
façon toutes les requêtes qui se font en faveur
d'une école dominicale quelconque.
Et pourquoi pas? A quoi servent, pour les
hommes qui nous gouvernent, ces écoles rétro
grades où l'on apprend connaître Dieu et rem
plir les devoirs de la vie chrétienne? Qu'importe
qu'on y apprenne encore autre chose, la lecture,
l'écriture, le calcul? On se plaît répéter que le
peuple doit apprendre lire et écrire, mais
n'est-ce pas la condition que le prêtre ne s'en
mêle point et que le catéchisme n'y figure pour
rien?
Voilà ces grands hommes dans leur naturel. Ils
ont de l'argent et beaucoup d'argent pour des jeux
et des fêtes où le peuple se démoralise, pour des
pamphlets qui le corrompent, pour des processions
appelées faire concurrence, on l'a dit, aux fêtes
religieuses, mais ils n'en n'ont point dès qu'il y a
quelque bien faire, par un prêtre, l'enfant du
pauvre et de l'ouvrier. Et cependant ils feront des
phrases sonores sur l'ignorance des masses ils
dresseront des statistiques sur les conscrits et les
prisonniers qui manquent d'instruction, ils écri
ront d'absurdes réclames en faveur de l'instruction
obligatoire, ils gaspilleront les fonds du budget en
bourses innombrables destinées peupler des
écoles délaissées et fournir de l'ouvrage et de
l'argent des maîtres imposés; mais pour les
écoles domiuicales, il n'y a point d'argent on a
vu le bout de l'oreille cléricale, dès lors tout est
dit, et la sentence est portée.
Sait-on cependant ce que c'est qu'une école
dominicale? Sait-on combien elle mérite les en
couragements et l'appui de tous les amis du
peuple, quelque parti politique qu'ils appar
tiennent? Nous en connaissons, nous, et en grand
nombre dans nos populeuses communes flamandes;
nous pourrions en nommer plus qu'on ne soup
çonne dans certaines régions, et où chaque diman
che un millier de jeunes gens de l'un et de l'autre
sexe, reçoivent une instruction appropriée leurs
besoins, entretiennent et développent les notions
élémentaires reçues l'école pendant les années de
l'enfance, et deviennent des hommes, vertueux
et instruits dans tout ce qui peut être utile dans
leur état. Les feuilles libérales écrivent de belles
tirades sur l'amour du peuple. Dans les écoles
dominicales du clergé, vous trouverez, village par
village, trente, quarante, cinquante maîtres et
maîtresses qui par pur dévouement sacrifient cha
que dimanche leurs heures de liberté et pratiquent
cet amour dont d'autres ne savent que parler et
écrire.
Et cependant, c'est pour ces utiles institutions
qni font tant de bien parmi les enfants du peuple,
c'est pour ces écoles, les seules où l'ouvrier puisse
s'instruire quelque peu, c'est pour une œuvre si
éminemment civilisatrice, que des hommes qui se
prétendent les amis du peuple n'ont poiut d'argent
Quand donc le pays intelligent ouvriia-t-il
les yeux? Quand verra l - il combien est misérable
cette politique de saltimbanque qui ne sait que
faire du spectacle et battre la grosse caisse pour
faire entrer les badauds?
Ou bien, serions-nous dans les jours de triste
décadence où tout ce qui est utile languit et suc
combe, tandis que les plaisirs de la foule sont la
seule préoccupation du pouvoir? Est-ce que le
libéralisme triomphant voudrait réapprendre au