42me Année.
No 4,296.
pocr la ville i 6 fr. par an,
4 fr. pour 6 mois, 2-50 pour
trois mois.
FOI CATHOLIQUE.
CONSTITUTION BELGE.
pour le dehors fr. 7-50 par
an, 5 fr. pour 6 mois, 2-75
pour 5 mois.
7??.SS, 1" Décembre.
o
il
revue politique.
Les dernières élections ont amené en Prusse
une majorité libérale dans la Chambre des
députés, et presque partout les grands pro
priétaires ont été exclus. De toutes les contrées
de l'Allemagne, la Prusse est celle qui a été le
plus travaillée par les idées nouvelles. Le
protestantisme, ruiné dans ses assises, malgré
les efforts du dernier Roi et de son prédécesseur,
a fait peu peu place un déisme vague et
flottant, derrière lequel se cache un matéria
lisme et un athéisme pratique. Le régent a dit
qu'il imposerait au mouvement des limites
et qu'il ne les laisserait pas dépasser. La réso
lution est bonne mais dans la situation actuelle
des choses trouvera-t-il les éléments de résis
tance nécessaires?
On dément officiellement en Angleterre
l'intention prêtée au gouvernement de renoncer
au protectorat des lies Ioniennes.
Les nouvelles de l'extrême Orient ont der
nièrement mentionné une victoire du général
Milchell sur un corps de 10,000 Hindous.
Aujourd'hui elles annoncent que les troupes
françaises et espagnoles viennent de remporter
de nouveaux avantages dans la Cochinchine.
La ville de Touron et les forts dé Teupon sont
tombés entre les mains des alliés, qui se sont
emparés de deux cent pièces de canon. Les
pertes de l'ennemi ont été considérables. En
Chine, la situation paraît s'améliorer. Il n'y a
pas maintenant jusqu'à Canton qui ne ressente,
dit-on, l'influence du traité de paix.
Nous avons déjà parlé de l'expédition espa
gnole contre la ville de Tampico dans le
Mexique, pour la protection de ses nationaux.
Il convient d'ajouter que cette place est aux
mains de la faction libérale. Au reste, depuis
la défaite de Vidauri, une terreur panique s'est
mise dans les rangs des prétendus libéraux de
sorte que si le gouvernement conservateur du
Mexique suit ses opérations avec vigueur et en
profitant de l'immense avantage qu'il a obtenu,
le résultat de la lutte ne peut être douteux.
Chez nos voisins du midi le grand sujet de
conversation, c'est toujours la condamnation de
M. de Montalembert. Il y a, dit une corres
pondance parisienne, un symptôme qui me
frappe les personnes bien disposées pour le
nouveau pouvoir s'affligent de ce procès, ses
adversaires s'en réjouissent.... Il y a toujours
un grave inconvénient intenter contre un
homme d'une grande renommée, devant la
justice, une accusation qui n'a point d'écho
dans les idées publiques. De pareils procès
coûtent plus au pouvoir qu'ils ne lui rappor
tent..,. Que M. de Montalembert, dont la santé
est fortement délabrée depuis quelques années,
aille passer six mois en prison, c'est un médio
cre avantage pour le pouvoir dont la force n'est
point là, mais dans le vote qui a amené le chef
du gouvernement actuel au pouvoir, dans une
suite non interrompue de succès au dedans et
nu dehors, dans l'habileté qu'il a montrée et
dans les fautes de ses adversaires.
La souscription pour le percement de l'isthme
de Suez continue recevoir de nombreuses
adhésions. Dans ces adhésionsil y en a quel
ques-unes de significatives. C'est ainsi que la
plupart des casernes de Paris, même celles de
la garde impériale, ont souscrit, et que les
officiers qui sont allés verser les fonds, ont dit
hautement qu'ils voulaient honorer dans M. de
Lesseps celle persistance de volonté qui avait
lutté contre la malveillance de l'Angleterre.
Cette démarche confirme de nouveau ce qui a
été dit si souvent sur la difficulté de faire
descendre dans les deux nations la sympathie
qui existe dans les deux gouvernements. La
manière dont les journaux anglais, et en par
ticulier le Times, parlent du procès de M. de
Montalembert, n'est pas de nature beaucoup
réchauffer cette sympathie mutuelle, conseillée
par la raison sans doute, mais chaque instant
combattue par les passions.
On a lail ressortir la violence extrême de la
let ire de M. Devaux. En effet, les grossièretés y
abondent, et le National, qui n'est pas suspect de
partialité, dit
11 n'est guère possible d'être plus vif, nous
allions dire plus violent.
M. De.aux doit au public une épîrre pour van
ter sa modération. La nécessité s'en fait sentir.
M. le chanoine De Haerne, membre de la
Chambre des Représentants, va publier sous peu
un travail très remarquable sur la question de la
charité, et qui servira de complément aux articles
qu'il a éciits sur ce sujet dans le Spectateur.
Connue M. Ducpétiaux, M. De Haerne va aussi
au fond des choses. Il ne se laisse guider, comme
son digne émule, que par les faits et la vérité. C'est
ainsi que l'on procède quand on veut véritablement
servir la saiute cause de la justice et de l'humanité.
M. le cbauoiue De Haerne n'avait jusqu'ici
exposé son système qu'au point de vue de la
statistique et de l'histoire de la charité générale en
Belgique; daus le complément de son œuvre, il
éteud beaucoup sou horizon. Il va nous montrer
dans tous ses développements la charité daus ses
rapports avec l'état social.
Le cabinet va donc subir coup sur coup de
terribles épreuves quaut a sa politique en matière
d'établissements charitables, car la politique nou
velle met de la politique partout et en tout.
Le tribunal correctionnel de Gand a encore eu
juger ces jours-ci divers délits de coalition qui se
sont présentés dans des circonstances assez singu
lières. Plusieurs ouvriers s'étaient promis entre
eux de ne plus travailler le dimauche, conformé
ment aux préceptes de la religion, de l'hygiène et
de l'économie politique. Retenus dans les manu
factures, douze heures par jour, ils ont cru que
vingt-quatre heures de repos leur étaient nécessai
res, et ils ont refusé de s'y rendre le dimauche, les
uns par scrupule religieux, les autres pour réparer
leurs forces, d'autres encore peut être pour s'amu
ser aux champs ou aux cabarets. 11 ne nous appar
tient pas de rechercher le mobile de leur conduite;
le foc intérieur ne peut être sondé; mais, quelles
qu'aient été leurs intentions véritables, nous
n'hésitons pas déclarer que c'est une chose exces
sivement fâcheuse que de voir des citoyens belges,
vivant sous des lois qualifiées les plus libérales du
monde, condamnés l'amende et la prison, pour
avoir usé de la liberté, que le bon sens et la Con
stitution leur accordent, de fêter, en pays chrétieD,
le jour du Seigneur. La question n'est pas de
savoir, nous paraît-il, comment ils entendaient
fêter le dimauche, l'église ou a l'estaminet, en
famille ou la promenade; la vérification du
motif qui les guidait eût nécessité une inquisition
minutieuse, que nous considérons comme incompa
tible avec nos droits civils et politiques ainsi
qu'avec les mœurs de notre patrie et de notre
siècle. Aussi ne sommes nous pas légèrement
étonnés de voir une feuille dite libérale applaudir
des mains et des pieds aux poursuites dirigées
contre les malheureux dont nous prenons la
défense.
Sous un régime de liberté, les coalitions sont
fréquentes, continuelles, générales des candidats
ministres se coalisent pour imposer un programfne
la Couronne; la majorité parlementaire se coalise
pour attaquer avec ensemble la minorité, qui se
coalise pour se défendre; des électeurs se coalisent
pour faire prévaloir certains noms contre d'autres
noms autour desquels se coalisent d'autres groupes
d'électeurs des industriels et des marchands se
coalisent pour maintenir un certain taux le prix
de leurs denrées; les consommateurs sont libres de
se coaliser pour achètera meilleur marché, où bon
leur semble, les produits dont ils ont besoin; mais
les ouvriers ne sont pas libres de louer leurs bras
ou leur intelligence aux conditions qin leur con
viennent! Ils n'ont pas même le droit de s'abstenir
de travailler le dimanche, s'ils sont chrétiens, le
samedi, s'ils sont israélites, le lundi, s'ils veulent
avoir deux jours de repos au lieu d'un En vérité,
nous voyons là une violation flagrante de la logique
et de l'équité, et nous blâmons hautement cet
usage de deux poids et deux mesuresdussions-
nous augmenter encore le nombre des ennemis que
nous nous sommes faits en défendant, toutes les
époques et en toutes les circonstances, les principes
d'égalité et de liberté qui forment notre programme.
Est-ce dire que nous blâmions les tribunaux
de Bruxelles, de Gand, de Liège et d'ailleurs
d'avoir condamné des ouvriers pour les prétendus
délits que nous venons de caractériser? Pas le
tnoios du monde. Ces tribunaux ont appliqué la loi
et ils ont bien fait. Mais nous avons le droit et
nous en usons, de dire, que la loi n'est ni juste ni
logique quand elle punit les coalitions des petits et
des faibles et respecte et favorise les coalitions des
grands et des forts. Nous ue serons pas lu par
ceux que nous défendons, et nous serons critiqués
par la plupart de ceux qui nous lisent; mais cette
circonstauce même prouve que notre plume suit
les inspirations d'une conscience désintéressée et
inébranlable.
En résumé, il faut de deux choses l'une On
que la loi contre les coalitions soit rapportée ou
qu'elle soit appliquée tout le monde, aux patrons
aussi bien qu'aux ouvriers, aux journalistes aussi
bien qu'à leurs modestes collaborateurs des ateliers
décomposition et d'imprimerie.
(Gazette de Bruxelles.)