42me Année.
Mercredi 29 Décembre 1858.
Kos 4,303 et 4.304.
4 fr. pour 6 mois, 2-50 pour FOI CATHOLIQUE. CONSTITUTION BELGE. an, 5 fr. pour 0 mois, 2-75
UN GENTILHOMME.
L'arrondissement vient de faire une
perte incalculable en la personne de M.
Charles De Patin, Procureur du Roi près
le tribunal de première instance de cette
ville, décédé le 2o de ce mois, neuf
heures du matin, la suite d'une maladie
dont les derniers progrès ont été très-
rapides, et muni des Saints Sacrements de
l'Eglise.
M. Charles De Patin naquit en 1797. Il
fit ses études l'école de droit de Bruxelles;
il fut nommé substitut du Procureur du
Roi Y'pres en 1823, et Procureur du Roi
en I82G.
Homme d'intelligence et de coeur, il
rendit de grands services l'arrondisse
ment. Aimé et respecté de tous ceux qui
avaient des relations avec lui, il jouissait
d'une incontestable autorité; les lumières
de ses pilents et de son expérience se
répandaient et sur les discussions du bar
reau, et sur celles de presque toutes les
commissions administratives.
.M. De Patin était d'une activité sans
bornes, et son décès laisse des vides
partout dans sa famille, au tribunal, dans
la Fabrique de la collégiale de S'-.Marlin,
aux Hospices de .Messines, etc.
Chevalier de l'Ordre de Léopold depuis
une quinzaine d'années, il fut promu, il y
a quelques jours seulement, au grade
d'Officier.
L'enterrement aura lieu le jeudi, 30 dé
ce mois. Ce sera un jour de deuil pour
l'arrondissement tout entier.
pour la ville 6 fr. par a*. pour le dehors fr. 7-50 par
trois mois. pour 5 mois.
T S S 20 Décembre.
revue politique.
Les correspondances de Paris s'entretiennent
encore longuement do procès de M. de Montalem-
bert, et de l'effet prodoit par ce de'bat judiciaire
devenu une lutte politique. Il est douteux que le
pouvoir impérial trouve son compte au résultat
obtenu. Un vif enthousiasme a accueilli le plai
doyer de M. Berryer, affirmant que la liberté poli-,
tique n'avait pas dit son dernier mot en France. Le
défenseur n'a point manqué d'ailleurs de professer
ses opinions d'une manière autrement catégorique
que ne l'avait fait le prévenu lui-même. An reste
M. de Montaientbert a été tenu par le tribunal pour
convaincu d'avoir dit que la législation ne laissait
la faculté de parler que par ordre et par permission
sous la salntaire terreur d'un avertissement d'en
haut, pour peu qu'on ait la témérité de contrarier
les idées de l'autorité, qu'elle rendait impossible la
discussion quotidienne entre des organes dont
quelques-uns seuls auraient le droit de tout dire, et
seraient toujours conduits plus ou moins involon-
tairement a attirer leurs adversaires sur un lerraio
où les attend le bâillon officiel. Le comte de
Montaleiubert est également déclaré coupable
d'avoir comparé les Français, par insinuation,
un troupeau docilemeul indolent tondre et mener
paître sous le silencieux ombrage d'nne énervante
sécurité. Enfin, il a donné entendre que la
France subit une tutelle humiliante et est privée
du règne du droit et de la liberté.
En résumé M. de Montalemberl a paru moins
coupable aux seconds juges qu'aux premiers, car
l'emprisonnement est réduit trois mois, l'amende
restant fixée trois mille francs. De plus, en écar
tant les chefs d'accusation relatifs la personne de
l'Empereur et aux droits qu'il tient du vote univer
sel, les juges ont voulu dit-on, annuler la partie du
jugement qui soumettait M. de Montalemhert la
juridiction administrative et permettait de l'inter—
(Suite. Voir le u° 4,3oa du Propagateur.)
Lord Edouard, je ne vous le désignerai pas
autrement, était un de ces hommes qu'on cherche
vaiuemeut connaître, mais dont on ne peut plus se
détacher une fois qu'on les connaît. Il était sérieux
jusqu'à la tristesse, fier jusqu'au dédain, calme
jusqu'à la froideur, et dénigrant jusqu'à la plus
aveugle injustice. Tout l'orgueil, tons les préjugés
exclusifs de sa naliou semblaient réunis en lui, et il
ne perdait pas une occasion de les manifester, sans
cepeodaot s'écarter jamais des règles de la politesse
la plus accomplie. Il était iuslruiten professant un
profond mépris pour la science, charitable en
paraissaul iuseusible aux misères de l'humanité, et
toujours prêt obliger, même le premier veuu, sans
croire même ses amis.
Une semblable Dature m'aurait promptement
éloigné, si je n'avais découvert sous la couche de
glace qui la recouvrait uue âme généreuse et
aimante, une délicatesse exquise, une noblesse de
sentiments poussée jusqu'à l'exaltation la plus
bei ou de l'exilfer au gré du gouvernement. Ou se
demande encore si Ib grâce octroyée par l'Empereur
continuera avoir sou effet quaut ce second
jugement. Aucuns répondent que la grâce peut
remettre le passé, non l'avenir. Ils font observer
que la peine a été changée par les juges d'appel
comment dès lors soutenir que l'Empereur a voulu
remettre une peine qui n'était pas encore prononcée
et que par conséquent il ne connaissait pas. Quant
M. de Montaleiubert, il a atteint son but; c'était
bien moins du jugement que de la grâce qu'il
appelait.
Le voyage du grand-duc Constantin Paris a,
ces jours derniers, particulièrement attiré l'atten
tion et donné cours mainte hypothèse. Celle
visite du frère du Czar, que l'on peut d'ailleurs
expliquer sans recourir des conjectures outrées,
témoigne au moins de la bonne entente qui règne
entre les deux cours.
Une correspondance parisienne Signale l'ascen
dant de plus en plus marqué que prend sur les
affaires le prince Jérôme Napoléou. On a dit que
l'Empereur, fidèle ses idées de centralisation, a
cru devoir choisir son cousin comme moyPn, pour
le cas où lui-même viendrait manquer, de peur
qu'il ne devint un obstacle. D'ailleurs, imagine-t
on de dire, les accointances bien connues dn prince
avec le parti révolutionnaire deviendraient, dans
le cas d'une régence, une garantie ile sécurité de
plus.
chevaleresque, et un oubli de soi-même presque
fabuleux dans notre époque de sécheresse et
d'égoïsrae. Tous les défauts qu'il n'avait pas, mais
dont il s'était donné l'apparence, venaient de la
lotte constante de ses nobles instincts contre les
idées d'un siècle pour lequel il u'éiait pas fait. Au
milieu de Dotre monde sceptique et railleur, il était
comme nu exilé sans patrie, et, ce qui est plus triste
encore, sans espérance. Avec un grand noui, une
grande fortune, des avantages personnels dont il
avait la conscience sans eu avoir la vanité, il se
croyait destiné au malheur parce qu'il n'avait pas
encore reucootré un être qui pût le comprendre, et
par conséquent qu'il pût aimer. De l'a ce froid
dédain, ce dénigrement amer, cette mélancolie
profondequi éloignaient lespeisonuesqui n'avaient
ni le temps ni la patience de chercher le deviner.
Aussi tous ceux qui se disaient ses amis, parce qu'on
veut toujours être l'ami d'un lord, ne le regardaieut-
ils que comme un bochet pour leur orgueil, et il le
savait parfaitement.
J'avais quelque chose des qualités ou, si vous
l'aimez mieux, des défauts d'Edouard; mais, le
fond de mou caractèie étant plus léger, ce qui était
v
L'énorme scnodale dont l'Université de Garni
vient d'offrir le triste spectacle, ne peut poiaj
passer aussi silencieux que Te voudrait la presse
libérale; il faut qu'il soit montré au pays sous
toutes ses faces affreuses; il faut que dos popula
tions chrétiennes connaissent dans sa hideuse
vérité cette glorification sacrilège rie l'apostasie et
du blasphème, dont la mort d'un jeune impie a
été l'occasion; il faut surtout, que le pays con
naisse ses fruits de mort cet arbre fatal de l'en
seignement rationaliste, eDgraissé de la substance
d'un budget que paie un peuple catholique.
Nous comprenons tout l'intérêt qu'ont se
taire sur ces manifestations les organes du
libéralisme doctrinaire; mais nous avons un inté—
souffrance chez lui n'était que regret chez moi, et
tout en déplorant, dans mes rêves, de n'être pas venu
au monde deux siècles plustôt, je m'étais arrangé de
notre époque, tant bien que mal. J'avais, d'ailleurs,
ce qo'il n'avait plus, une mère tendre et dévouée,
et, ce qu'il n'avait jamais en, une sœur gracieuse et
bonne, qui m'empêchaient toutes deux d'éprouver
le besoiu d'avoir des amis. J'ajouterai que j'étais
l'abri de ce tourment affreux qui saisit les âmes de
ceux auxquels une grande existence ne sert qu'à
faire sentir d'une manière plus cruelle que le bon
heur n'est pas une conséquence de la fortune.
Tel que j'étais, enfio, Edouard n'avait pas tardé
trouver en moi l'homme qui jusqu'alors l'avait le
mieux compris, et nous étions bientôt devenus une
nécessité l'un pour l'autre. Je l'avais même déter
miné venir passer quelques semaines dans ma
famille avant son départ pour l'Angleterre, et ses
chevaux étaient déjà partis avec les miens pour une
terre que ma mère avait alors en Lorraioe, lorsqu'un
évéuemeut, aussi bizarre qu'imprévu, changea tous
mes projets et m'obligea quitter seul les environs
de Plombières.
Edouard était ainsi que moi passionné pour la