42me Année.
No 4,326.
FOI CATHOLIQUE.
CONSTITUTION BELGE.
7PB.SS, 16 MARS.
TRIBULATIONS D?UN GASTRONOME.
LE PROPAGATEUR
POUR LA VILLE 6 FR. PAR AN,
4 FR. POUR 6 MOIS, 2-50 POUR
TROIS MOIS.
POUR LE DEHORS FR. 7-50 PAR
AN, 5 FR. POUR 6 MOIS, 2-75
POUR 3 MOIS.
REVUE POLITIQUE.
Malgré U note do Moniteur, malgré la retraite
da prince Napoléon les bruits de guerre ont
repris crédit, la Bourse refuse de hausser, et ce qui
paroi un moment une éclatante manifestation des
seotiments pacifiques du gouvernement français est
assez généralement tenu aujourd'hui poor une
tactique, un atermoiement. Je crois, dit une cor
respondance parisienne, que la situation équivoqoe
et contradictoire qui se développe devant nous,
tient deux convictions contraires la première,
c'est que dans l'état d'antagonisme du Piémont et
de l'Autriche, avec les espérances des Italiens
surexcitées, avec les passions enflammées, il est
très-difficile, je ne veux pas dire impossible d'évi
ter la guerre. La seconde, c'est que celui qui tirera
le premier coup de canon assumera une responsa
bilité devant l'Europe, il mettra contre lui des idées
et des intérêts qu'il aurait grand besoin de se con
cilier. Je crois que ce second motif est celui qui
dicte la cooduite actuelle du cabinet des Tuileries,
et qui, en même temps, arrête l'Autriche, quoi
qu'il vaudrait mieux pour elle, au point de vue
financier, brusquer l'événement que de supporter,
pendant six mois ou une année encore, les frais
onéreux d'une paix armée, et qu'il vaudrait mieux
également, au point de vue militaire, crever, par
une offensive rapide, ce nuage noir qui s'assombrit
chaque jour b Turin, et ne point laisser b tous les
éléments révolutionnaires le temps de s'organiser
sur toute la surface de l'Italie. Mais l'Autriche
craint l'opiniou de l'Allemagne et celle de l'An
gleterre, Pour avoir l'Angleterre et l'Allemagne en
sa faveur, il ne faut pas qu'elle soit assaillante, il
faut qu'elle soit assaillie. Le cabinet des Tuileries,
.de son côté,a besoin que l'Autriche se mette devant
I.
En 18..., l'empereur était b l'armée et b trois
cents lieues de Paris. Le prince arcbichaocelier
Cambacérès se trouvait un peu dégagé de celte
main de fer qui pesait sur sa poitrine et comptait,
pour ainsi dire, toutes les pulsations de son cœur;
il respirait b l'aise et pouvait se permettre certaines
démarches, assez simples d'ailleurs, mais que Na
poléon eût peut-être désapprouvées. Il s'agissait
d'aller voir un ancien ami d'enfance, avec lequel
Cambacérès s'était retrouvé sur les bancs de la
Convention, et qui, depuis le consulat, avait quitté
les affaires publiques; un de ces hommes que
l'empereor appelait des idéologues,elavec lesquels
il n'aimait pas que les membres de son gouverne
ment conservassent des rapports. Cambacérès donc
se leva un jour de bon matin, eovoya chercher des
chevaux de poste, les fit atteler un modeste
cabriolet et partit seul pour une petite terre qu'ha
bitait son ami, a quatre lieues au-dessus d'Arpajon.
C'étaient douze lieues b faire, c'est-b-dire vingt-
quatre, parce que le prince archicbancelier voulait
l'opinion de l'Europe et devant celle de la France,
dans la position où s'était placé l'Empereur Nicolas
lors de la guerre de Crimée.
Un autre publiciste français cherche b expliquer
les tendances guerrières que l'on attribue au gou
vernement impérial. La France, dit-il, ne se
contentera jamais de prospérité matérielle, elle
briserait tout si l'on voulait la river obslinémeot b
ce régime exclusif. Au point où l'instroction géné
rale est parvenue, et avec les tendances pratiques
et organiques de l'esprit français, il n'y a plus
moyen de le parquer dans une enceinte trop
étroiteDe l'a ce mécontentement sourd qui se
manifeste toutes les fois qu'il le peut. Ou sait
quelles out été les élections de Paris; on sait quel
antagonisme s'établit dans les municipes et les
départements, entre l'administration et les citoyens.
a II n'y a donc que deux voies b suivre pour le
gouvernement on relâcher le frein trop serré du
pouvoir, et rendre b la France ces libertés, qu'il
réclame pour des nationalités étrangères, mais qu'il
traite ainsi qu'on l'a dit fort spirituellement
comme des objets d'exportation de nul usage pour
dous mêmes; ou faire quelque éclatante diversion
militaire pour détourner le courant des pensées
inquiètes et pour éteindre les passions du jour sous
les passions conquérantes d'une antre époque.
Au moment où la question anstro-sarde préoc
cupe si vivement tous les esprits,la récente dépêche
du comte de Buol au comte d'Appony ne pouvait
manquer d'attirer l'atfeotion générale. Le chef du
cabinet de Vienne y établit b l'évidence les droits
de l'Autriche b couclure des traités avec les Etats
d'Italie, et expose avec netteté d'où sont venues, de
l'Autriche ou de la Sardaigne, et d'où viennent
encore les provocations irritantes et les menaces de
guerre et d'invasion.
Quel peut être cependant le but qui se cache
derrière cette agitation contre les traités aostro-
italiens? U est facile b saisir. Les Etats italiens,
être rendu b Paris b six heures, où l'attendait
d'Aigrefeuille, son convive habituel, et où surtout
il devait trouver un excellent dîuer. ■-*
Il a été physiologiqnement reconnu que la
nature n'a pas réparti sur nous ses dons avec
égalité; il y a des iudividus b qui elle a refusé cette
finesse d'organes saus laquelle les mets les plos
succulents passent inaperçus. La langue et le palais
de ces iufortuués sont mal pourvus des houpes
nerveuses destinées b apprécier les saveurs; elles
n'éveillent chez eux qu'un sentiment obtus et ue
leur donneot qu'une dégustation incomplète. Na-
poléon avait ce malheur, il était irrégulier dans ses
repas, mangeait vile et mal; sa voioulé absolue se
manifestait en cela comme en toute autre chose; il
dînait en dix minutes; dès que l'appétit se faisait
sentir, il fallait qu'il fût satisfait, et son service
était monté de manière qu'en tout lieu et a toute
heure, on pouvait au premier mot, lui préseoler de
la volaille, des côteletes et do café; c'était un grand
homme sans doute, mais qui u'élait pas né pour
manger.
Il n'eu était pas de même de Cambacérès. Celui-
ci, pour nous servir delà définition d'un professeur,
avait aussi complet que possible celui de oos sens
qui .nous met en relation avec les corps rapides, au
notamment ceux qui sont limitrophes de l'Autriche
ou de la Sardaigoe, seraient par Ib complètement
abandonnés b leur sort. A une époque d'agitation
révolutionnaire, livrer b eux-mêmes ces Etats, qui
pour la plupart n'ont pas une puissance suffisante
pour se défendre, ce serait oovrir toutes les portes
aux agitations révolutionnaires et aux convoitises
ambitieuses du Piémont, ce serait compromettre le
repos et la paix de toute la Péninsule et créer un
danger pour les possessions autrichiennes en Italie.
Comment peut-on faire dépendre la paix de l'Eu
rope de la renonciation de l'Autriche b des traités
indispensables, ce semble, au maintien de la tran
quillité publique? Comme le dit b juste litre la
Gazette autrichienne, la révision, non des traités
de l'Autriche, mais des prétentions du Piémont,
voilb la tâche que doit se proposer la France,
si réellement elle vent la tranquillité dans la
Péoinsule. Que la France appuie le conseil que les
hommes d'Etat anglais ont donné avec tant de
franchise et de loyauté au gouvernement sarde. Ce
n'est qne lorsque la Sardaigne sera revenue b
sa position légitime que la paix ne sera plus
douteuse, et que les saturnales qui durent depuis
dix ans en Italie seroui terminées.
A l'occasion du Carême, les premiers pasteurs
des diocèses s'adressent b leurs ouailles pour les
instruire et leur donuer des conseils de salut qu'ils
jugent les plus opportuns.
Cet usage n'est pas du goût de certaines gens,
qui prennent de Ib occasion pour en remontrer aux
Ëvêques comme Gros-Jean b son cnré.
Mgr. i'Ëvêqoe de Gand dépeint avec une élo
quence que la vérité seule peut donner, les profa
nations qui affligent notre chère patrie; il exprime
la crainte que le Dieu de justice ne vienne b punir
les coupables, il exhorte les fidèles b la pénitence, b
la prière, aux bonnes ceovres et lenr indique, pour
qu'ils les évitent les causes des excès dont il se
mnyeo de la sensation qu'ils causent dans l'organe
destiné b les apprécier. C'était au poiût que, pareil
b Lucullus, il pouvait dire, en goûtant b un poisson,
daos quel parage il avait été péché, et en mangeaot
des huîtres, durant quelles phases de la lune elles
avaient été retirées du parc où on les engrassait.
Ce jonr-lb, Cambacérès s'attendait b recevoir
du préfet de Bordeaux une bourriche qui devait
conteuir d'excellentes choses, et entr'autres deux
douzaines de becfigues, oiseaux exqois chez lequel
une légère ainertnrnese mêle b un parfum délicat,
et dont les gourmands ont coutume de dire que, si
nn becfigne était de la grosseur d'un faisan, on le
paierait certainement b l'égal d'un arpent de terre.
C'était l'avis de Cambacérès, qui ponr rien au
monde n'aurait voulu manquer son dîner: d'ailleurs
l'idéologue chez lequel il allait passer quelques
heures n'était pas riche, avait les hoopes nerveuses
du palais aussi peu sensibles que celles de Napoléoo;
l'archichaocelier ferait donc nn mauvais déjeûoer,
boirait du vin détestable, et ponr supporter avec
patience cet inconvénient, il avait besoin de songer
au dîner succulent qui l'attendait b Paris.
Avant de partir, il prit toutes les précautions qne
lui suggérait la prudence; il annonça bien qu'il
serait de retour b l'heure du dîner; mais il ajouta