Les libéraux, bien entendu les vrais libéraux, qu'ils fussent catholiques ou 2 rationalistes, secouèrent lejougdela tyran nie hollandaise, qui comprimait surtout la manifestation des idées et leur développe ment par l'instruction. Ces libéraux de 4830 fondèrent les institutions qui nous régissent et consacrèrent par la Constitu tion la liberté des opinions, la liberté de l'enseignement, et toutes les libertés qui en découlent celle de la presse et celle de s'associer n'importe dans quel but, pourvu qu'il n'eût rien de contraire, ni la morale, ni l'ordre public, ni aux lois. Malheureusement, parmi ces libéraux il y avait des gens de mauvaise foi, qui ne s'étaient mis de la partie que pour profiler des circonstances. Ceux-làdès que le gouvernement fut consolidé, s'empressè rent de virer de bord et tendirent la main auxennemisdenolre indépendance: c'était une fraction d'orangisles, qui n'avaient pas voulu être victimes d'une révolution jus tifiée et qui tachèrent immédiatement après le succès de rallier les plus opiniâtres adhérents du vieux têtu, Guillaume 1". Tels sont les premiers éléments de ce parti libéral-doctrinaire qui a commencé la lutte ouverte contre les catholiques en 4839 et qui est monté par surprise au pouvoir en 4847, pour y remonter par violence en 4857. Durant la lutte, les doctrinaires ont grossi leurs rangs par l'adjonction de toutes les nuances d'opinions démocratiques etde tous les degrés d'ambitions naissantes ou déçues. Promenez vos regards sur le pays, vous rencontrerez partout des gens qui ont tourné le dos l'élan patriotique de 4830 et qui occupent aujourd'hui les places les plus élevées et les plus grassement salariées. Ceux qui étaient trop compromis pour accepter encore des fonctions publiques ou qui ont volontairement décliné des offres plus ou moins séduisantes, dirigent, pour le plus grand bien de l'anticatholicisme orange, les loges de philanthropie et les associations libérales. Aussi ont-ils manœuvré si adroitement et si efficacement que la plupart ont dé- passé le but. Pour s'élever au-dessus des hommes de 4830, ils se sont appuyés sur d'adroits compères qui les secouent et s'élèvent au-dessus d'eux. A cette vue, ils sont désappointés et stupéfaits, et ils s'écrient de telles places ne conviennent pas des gens de cette espèce. Ah vous croyez! Détrompez-vous, s'il vous plaît. Est-ce que, par le temps qui court, les places les plus élevées ne conviennent pas quiconque est assez audacieux et assez fluet pour les saisir? Ecoutez-bien. Ceux qui ont affiché l'exemple d'une dédaigneuse indifférence pour tout ce qui est respectable dans la société, sont mal venus prétendre qu'on les entoure d'égards, de considération et de respect. Tel qui, par exemple, a ren versé un fonctionnaire pour prendre sa place, ne doit pas trouver étrange qu'on lui passe sur le corps pour s'emparer d'un poste vacant. Voilà précisément pourquoi il est bon de se rappeler souvent le pré cepte ne fais pas autrui ce que tu ne voudrais pas que l'on te fît. Mais l'impulsion donnée, où donc nous conduira cette rotation sociale qui lance de bas en haut, avec une rapidité et une violence effrayantes, ces lumières équivo ques servies par d'étourdissantes loquacités et par des appétits insatiables, se pressant, se bousculant, se précipitant, se culbutant, sans cesse et sans fin. On conçoit bien qu'il y ait des repus, mais on ne conçoit pas que tout le monde puisse le devenir. 11 faut donc s'attendre des déceptions, qui engendrent la haine, qui engendre les divisions et l'anarchie. Puisse le corps électoral dissiper les orages qui s'amon- cèlent l'horison de notre beau pays! Lord Derby, répondant b uoe députation com posée du lord-maire de Londres et d'antres mem bres do conseil de la Cité, qni sont allés lui expri mer des voeux pour la neutralité complète de 'Angleterre, a promis cette oentralité. Il a ajouté que la Russie avait déclaré de nouveau qu'il n'existait pas d'alliaoce entre elle et la France. Le Timea contient une lettre de Paris qui pré tend que toutes les puissances, excepté la France et le Piémont, ont reconnu le nouveau Roi de Naples par le télégraphe. Des interpellations ont été adressées au gouver nement grec, dans la Chambre des Dépotés, sur les bruits qui avaient couru concernant la protec tion do pavillon hellénique, que le gouvernement autrichien aurait demandé pour sa marine mar chande. Le ministre des affaires étrangères a nié le fait en alléguant que jamais uoe telle demande n'a été faite par le gouvernement, ni par des sujets autrichiens. Et eo effet il faudrait contester au gouvernement d'Autriche le sens commun pour lui attribuer uoe proposition si ridicule. L'ouverture solenoelle de la session de la Diète saxonne vient d'avoir lieu. Le Roi, en annonçant qu'on demanderait l'assemblée de voter uo cré dit, a dit la guerre menace de mettre en question les traités sur lesquels repose le droit européen. Ce qui me soutient, c'est la conscience d'avoir toujours élevé la voix quand l'exigeaient l'honneor de l'Allemagne et la défense du droit, de même que la certitude que le peuple saxon tout entier paitage ces sentiments. S'il faut en venir b combattre pour la juste cause, j'espère fermement que Dieu sera avec la Saxe et toute l'Allemagne. Des nouvelles de Conslantinople du 18, dont nous recevons un résumé par le télégraphe, signa lent un rapprochement entre la Turquie et la Russie, et annoncent que la Porte a enfin promis d'adhérer au protocole de la Conférence de Paris concernant la reconnaissance du colonel Cooza en qualité d'hospodar de Moldavie et de Valachie. 11 y a toujours uoe grande fermentation dans les provioces chrétiennes de la Turquie, surtout dans celles du bassin de l'Adriatique. Les Monténégrins et leurs voisins de l'Herzegowine se sont emparés deClobuck et montrent des dispositions très hostiles a l'Autriche qu'ils menacent sur la frontière de Dalmatie. -—a- serait donné. Ce n'était pas sans dessein que la veille de Noël avait été choisie pour cette épreuve, inouïe jusqu'alors dans les fastes judiciaires. Faire venir aiosi tous les prisonniers un jour ordioaire, eût été éveiller leurs soupçons, leur suggérer des ruses et mettre b l'aventure le succès de l'expé rience toute nouvelle qui allait être tentée. La veille de Noël, au contraire, il y aurait eu un grand étonnement la conciergerie, si l'ordre ne fût pas arrivé de faire monter tous les détenus au palais; l'usage voulant que la veille des grandes fêtes, MM. de la Grand'Chambre mandassent successive ment devant eux chacun des prisooniers. Quelque fois même, ces magistrats souverains, b l'occasion et pour révérence de la feste (comme on parlait lors), donnaient la liberté b des prisonniers détenus pour des causes légères. Avant tout, il fallait faire comprendre b l'aveugle ce qu'il y avait de sacré dans le ministère dont le ciel semblait l'avoir investi. A la tête du parlement était le président Feu, que sa sagesse et sa gravité avaient fait nommer Caton le Censeur. Gervais, dit-il b 1' 'aveugle d'uo loo solennel et pénétré, Ib, au-dessus de nous, est l'image de l'Homme-Dieu, qui fut mis eo croix et mourut injustement sur de faux témoignages. Jurez par celte image, jurez par Dieu lui-même, qui est présent ici et nous entend, que vous n'affirmerez rien dont vous ne soyez aussi sur que vous l'êtes de votre existence, que voos l'êtes du malheur qui vous prive de voir le soleil. Après ce serment, que le vieillard prêta avec cet accent de l'âme qui ne permet point de mettre eu doute la siucérité d'un te'moin, commença l'ëpreuve qu'avaient imaginée les anciens du parlement. Déjà dix-huit prisonniers avaient comparu et répondu aux questions qu'on leur avait adressé l'aveugle, en les entendant, n'avait fait aucun mouvement de leur côté, eu apercevant cet homme qui leur était inconnu, ils étaient restés indifférents et pai sibles. Ce fut alors qu'un dix-neuvième prisonnier fut iotroduil b son tour: mais, qui dira la stupé faction de celui-ci b la vue de Gervais? Qui peindra le bouleversement soudain de tons ses traits, son visage qui pâlit et se contracte, ses che veux qui se dressent, sa sueur soudaine qui glace son front et sa défaillance subite, qui fut telle qu'il fallut le soutenir et le mener jusqu'à la sellette où encore il ne put s'asseoir qu'aidé par le porte- clefs? Et, altéré qu'il était, lorsqu'il revint un peu b loi, on voyait percer dans ses gestes involontaires, ou le poignant remords d'une âme bourrelée qui se reproche un forfait, ou, peut-être, l'horrible regret d'avoir commis un crime incomplet, de n'avoir pas achevé sou oeuvre. VOTE DE LA LOI CONTRE LA CHARITÉ. Il y a deux ans, jour par jour, les e'meutiers libéraux, exciiès par les discours et les cris séditieux de MM. Frère, Tesch et Rogier, insultaient assom maient et pillaient les défenseurs de la liberté de la charité. Aujourd'hui les mêmes MM. Frère, Tesch et Rogier font succomber cette même liberté sous leurs intrigues. Les présidents et les juges se regardent entre eux dans l'attente de ce qui allait suivre. Mais voilà que, dès les premiers mots que répond Martel aux questions du président Feu, l'aveugle, qui, depuis le commencement de celte scène, ignorée de lui, était demeuré froid et impassible, s'émeut tout b coup et prête l'oreille; il écoute avidement, écoute encore, puisrecole brusquement, en faisant un geste énergique d'horreur et d'effroi, comme pour repousser de ses deux mains un objet qu'il sait près de lui et qui l'épouvante, cherchant b s'enfuir, et s'écriant C'est lui, oui, c'est bien la voix que j'entendis sur les hautenrs d'Argenteuil. Le géolier emmenait Martel (car c'était lui), il l'emmenait plus mort que vif; obéissant en cela au président, qui lui avait enjoint de faire monter un autre prisonnier; mais cet ordre, prononcé très- haut avait été accompagné d'un signe que le géolier comprit; et quelques minutes après, ce fut encore Martel qu'il amena, qu'il fit asseoir une seconde fois sur la sellette, et qni fut interrogé sous un faux nom. De nouvelles questions ame nèrent d'autres réponses; mais aussitôt, secouant la fête d'un air d'iocrédulité Non, s'écria l'aveogle, c'est une feinte, je reconnais la voix qui s'entretint avec moi sur les hauteurs d'Argenteuil. Six fois tous les prisonniers de la conciergerie

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Le Propagateur (1818-1871) | 1859 | | pagina 2