43me Année.
Samedi 20 Août 1859.
N<> 4,371.
DONA CLARA (1522).
FOI CATHOLIQUE. CONSTITUTION BELGE.
LE PROPAGATEUR
POUR LA VILLE 6 FR. PAR AN,
A FR. POUR 6 MOIS, 2-50 POUR
TROIS MOIS.
POUR LE DEHORS FR. 7-50 PAR
AN5 FR. POUR 6 MOIS, 2-75
POUR 3 MOIS.
TPB.BS, 20 AOÛT.
REVUE POLITIQUE.
Le doute continue planer sor les résolutions des
puissaoces au sujet des princes dépossédés d'Italie.
Les feuilles ministérielles britanniques dénient aux
monarques signataires du traité de Villafranca le
droit d'ioterteoir daos la Péninsule contrairement
aux vœux du parti rétulutionnaire, et la Patrie,
organe sémi-officie! du gouvernement français,
iosioue que, tout au moins, on ne ferait point
usage de la force. Elle a trouvé un moyen terme
Le gouvernement français a reconnu le grand-
duc de Toscane Villafranca, c'est pour cela qu'il
a reçu sou envoyé; mais le reconnaitre, ce n'est
pas s'engager k le rétablir sur le trôoe. Ainsi on
reconnaîtrait Victor-Emmanuel comme roi de
Piémont et de Lombardie, et on ne le reconnaîtrait
pas comme souverain de Modène, de Toscane et de
Parme, qu'il posséderait malgré la France. Ainsi la
Franceaprès avoir versé son sang k flots pour
arrondir les États du roi de Piémont, confesserait
son impuissance en face de la cupidité ambitieuse
de son allié.
Les fauteurs de désordres se prévalent de cette
inertie au moins apparente et les bons se sentent
paralysés oo faiblissent. Il est incontestable tonte-
fois que le gouvernement français se préoccupe
sérieusemeot de la situation de l'Italie. Il organise
une nouvelle armée dans la Péninsule sous le com
mandement du maréchal Vaillant, et dans laquelle
le cinquième corps d'armée entre tout entier avec
les troisièmes divisions de chacun des autres corps.
Elle porte le nom d'armée d'occupation provisoire.
Il est évident, observe un correspondant du
Journal de Bruxelles, que sa présence est moti
vée k la fois par la situation difficile et troublée de
l'Italie et par la nécessité d'appuyer sur les canons
(Suite. Voir le n" 4,3jo do Propagateur.)
II.
LA LIGUE.
Lelendemaio en effet, la révolte avait éclaté, et
s'était répandue comme une flamme dans toutes
les communes de Castille. Les Cortès assemblées
dans la Galice avaient offert k l'empereur Charles-
Quint un doo gratuit de 900,000 ducats, sans
qu'aucune satisfaction leur fut accordée, relative
ment aux griefs, aux violalious des franchises dont
elles se plaignaient; l'affluence des courtisaos
flamands autour du monarque leur compatriote
offensait aussi la fierté espagnole. Les bourgeois de
Tolède, qui se regardaient comme les gardiens des
libertés communales de la Castille, coururent aux
armes, et s'emparèrent des portes et du château
de la ville. Ils établirent oue sorte de gouverne
ment populaire, composé de députés de chaque
paroisse de la ville, et levèrent des troupes pour se
défendre. Don Juan de Padilla était l'âme du
mouvement insurrectionnel; ses talents et l'éléva
tion de ses pensées faisaient de lui un chef de parti
de nos soldats les déterminations que prendra le
cabinet des Tuileries.
Quelle sera cette détermination? C'est ce qu'il
est difficile de dire. On voit se dessiner clairement
le plan des révolutionnaires et do cabinet piéroon-
tais. Ils ont voulu d'abord produire un effet moral
d'opinion, en provoquant dans les trois duebés on
vole contre les anciennes dynasties. On sait com
bien ces sortes de démonstrations sont faciles k
obtenir quand on a en main le pouvoir, et surtout
quand 00 terrifie les honnêtes gens qui craignent
toujours le I ruit et la violence.
Faire voter ceux dont on est sûr, écarter du
scrutin ceux dont on doute, et au besoin changer
le résultat do scrutin quand on n'en est pas content,
rien n'est plus facile pour les faiseurs de tours de
gobelet, si nombreux dans les rangs des révola-
tiounaires. I! n'y aurait qu'une manière de mettre
obstacle k cet escamotage, c'est de faire occuper les
trois duchés par les troupes françaises. Mais les
passions révolutionnaires italiennes et l'intrigue
piémootaise viennent d'imaginer une combinaison
qui rendra cette occupation plus difficile. Garibaldi
doone sa démission de général au service du Pié
mont, et il vient prendre le commandement des
forces révolutionnaires des trois duchés.
a Ainsi, la politique française va rencontrer en
Italie le même obstacle que l'armée française a
rencontré k Rome en i848, Garibaldi. Certes, si
le gouvernement français voulait employer la force,
il viendrait facilement k bout de cet obstacle. Mais
après la guerre qu'il vient de faire côlek côte avec
Garibaldi, veut-il, peut-il employer les baïonnettes
pour faire prévaloir les arrangements qu'il a pris k
Villafranca avec l'Autriche?
Le Journal de Rome annonce officiellement la
retraite do cardinal Antonelli et son remplacement
k la présidence do conseil par le cardinal di Pietri.
L'amnistie que l'Empereur Napoléon vient
redoutable; on rôle médiocre ne devait pas lui
suffire il était fait pour être ou triomphateur ou
victime. A la tête d'une poignée d'hommes, il
délivre Ségovie, investie par les troupes de Cbarles-
Quiot; et marchant sur Tordésillas, il s'empare de
la personne de la reine Jeanne, mère de l'empereur,
pauvre fautôme de reine, dont les douleurs d'un
précoce veuvage avaient aliéné la raison. Les res
pects que lui offrirent les chefs de la Sainte- Ligue
(nom qu'on avait donné k la confédération des
communes de Castille) parurent un instant la rap
peler k elle-même; elle sortit de sa longue léthar
gie, se souviot qu'elle était reine, qu'aucun acte
public ne lui avait enlevé ses droits k la souverai
neté, et elle promit au conjurés de se mettre k la
tète des affaires. Mais cette faible lueur s'éteiguit
bientôt; la sombre tristesse qui l'oppressait depuis
tant d'anoées reprit son empire; et, pendaut que le
peuple applaudissait encore k la guérison miracu
leuse de la fille d'Isabelle- la-Catholique, la pauvre
reine était restée dans cette seconde et plus triste
enfauce dont on l'avait crue délivrée. Padilla se
rendit k Valladolid, s'empara des sceaux du roy
aume et des archives publiques, et ne tarda pas k se
mettre en campagne k la tête de vingt mille hom
mes. Mais la division se mit au sein des méconteotst
d'accorder est pleine et entière toutes les person
nes condamnées ponr délits ou pour crimes politi
ques et celles qui ont été l'objet de mesures de
sûreté générale sont admises k en profiter. On ne
sait encore comment 1e décret d'amnistie recevra
son application, mais on pense qoe tous les exilés
pourront rentrer librement dans les villes et les
localités qu'ils habitaient avant leur condamnation
ou avant leur exclusion de France.Les avertis
sements donnés aux journaux sont considérés
comme noo avenus.
Il paraît qu'il a paru de bonne guerre k certaines
feuilles françaises de trouver beaucoop k redire au
projet du gouvernement belge de renforcer les
fortifications d'Anvers. Une correspondance pari
sienne blâme k juste titre cette immiscion peu
loyale dans les affaires d'aulroi. C'est une ques
tion exclusivement belge. Une puissance neutre a
toujours le droit de protéger sa neutralité. Cette
polémiqueajoute la même correspondancea
causé de nouvelles alarmes en Angleterre, et le
Times, rappelant le mot de Napoléon I", Anvers
est un pistolet chargé dont le canon est sur le
cœur de VAngleterre, ajoute, non sans quelque
raison C'est pour cela que l'Angleterre n'est
pas fâchée de voir Léopold s'assurer de la posses
sion de la crosse.
La Chambre des Représentants a continué
mercredi la discussion sur le projet de loi relatif
aux fortifications d'Anvers.
M. le général Cbazal a terminé l'exposé qa'il
avait coromeocé la veille. Il a dit que les forteresses
de Diest et de Termonde seront cooservées, et que
d'autres points fortifiés seront maintenus afin de
ne pas abandonner le pays.
M. le ministre de la guerre a ensuite exposé les
motifs qui avaient déterminé la commission k
adopter la grande enceinte; il est entré dans des
détails sur le système d'après lequel les fortifica-
le commandement de cette petite armée, seul espoir
de la Ligue, fut enlevé k Padilla, et confié k on
jeune bomme, don Pédro, qu'une rancune person
nelle animait contre l'empereur. De ce jour datè
rent les malheurs de ce partiintéressant malgré
ses fautes, et qui montre l'union, très rare dans les
temps anciens, de la noblesse et du peuple pour
la défense des libertés communes k tous.
Don Alvar de Mouroy était accouru des premiers
sous la bannière des mécontents, et il semblait
retrouver l'ardeur et l'énergie de ses jeunes années;
pendant que sa fille, que la douleur rendait pré
voyante, pleurait d'avance les malheurs de sa
maison et la ruine de ses propres espérances. Dona
Clara était fiancée k un de ses parents, don Eorique,
dernier héritier des titres de celte ancienne famille;
elle avait craint qu'Enrique ne partageât la rébel
lion de don Alvar. Mais bientôt son coeur éprouvé
subit une peine plus amère; car elle apprit que son
jeune parent, fidèle au souverain qui avait reçu ses
serments, réunissait ses vassaux; qu'à leur tête il
marchait contre les troupes de la Ligue et que
bientôt peut-être son père et celui qu'elle regar
dait comme sou époux se trouveraient en présence.
Ce fut une grande angoisse pour ce cœur aimant,
où venait chaque jour s'imprimer une nouvelle