<43me Annee.
Samedi II Février 1860.
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LE PROPAGATEUR.
POUR LA VILLE 6 FR. PAR AN,
4 FR. POUR 6 MOIS, 2-50 POUR
TROIS MOIS.
FOI CATHOLIQUE. CONSTITUTION BELGE.
POUR LE DEnORS FR. 7-50 PAR
AN, 5 fr. POUR 6 MOIS, 2-75
POUR 3 MOIS.
T 3 S 11 Février.
REVUE POLITIQUE.
Des dépêches de Londres et de Berlin et mi
article du Morning-Post avaient annoncé que
des propositions venaient d'être faites au cabinet
de Vienne par les gouvernements d'Angleterre et
de France, (.'initiative de ces propositions revenait
l'Angleterre qui les avait d'abord soumises h
l'approbation du cabinet des Tuileries.
Les déclarations de lord Russell la Cbambre
des Communes corroborent ces renseignements,
dans leurs parties principales. Lord Cowley a
effectivement soumis la France ces quatre propo
sitions: i* Ni la France ni l'Autriche n'intervien
dront en Italie sans le consentement des autres
puissances; 2* la France après l'arrangement de
la question italienne, retirera ses troupes de Rome
et du reste de l'Italie; aucune puissance européenne
n'interviendra d'une manière quelconque en Vé-
nélie et ne fera de proposition d'aucune sorte con
cernant le gouvernement vénitien; 4* le Piémont
s'abstieudra d'envoyer des troupes dans l'Italie
centrale, jusqu'à ce que ces provinces aient, par
nn nouveau vote, clairement exprimé leurs désirs:
si l'annexion est votée, le Piémont sera libre alors
d'envoyer ses troupes.
La Franced'après les déclarations de lord
Russell, aurait accédé aux trois premières d'entre
ces propositions,en faisant relativement la seconde
des réserves quant au moment de l'évacuatioo. Elle
ne s'était point encore prononcé sur la quatrième.
La réponse officielle du gouvernement autrichien
n'était point encore arrivée, mais déjà le premier
ministre avait clairement fait entendre que l'Autri
che ne saurait reconnaître l'état anormal où se
trouve l'Italie centrale, que cependant elle ne
songeait point intervenir par les armes.
Au reste, en rapprochant les aveux de lord
Russell des renseignements fournis par le Morning-
TJ1T3 TISITS
DANS LES CATACOMBES DE PARIS.
L'un des jours de cette semaine a eu lieu, dans
les catacombes de Paris, la visite périodique et
réglementaire des ingénieurs spéciaux. Cette visite
a pour but de constater la bonne tenue des immen
ses ouvrages de consolidation qui soutiennent les
voûtes de ces cryptes au-dessus desquelles est
bâtie, comme on le sait, une partie du Paris de la
rive gauche.
Quelques personnes sont ordinairement admises
accompagner les ingénieurs dans cette explora
tion. C'est d'ailleurs la seule circonstance où l'accès
des catacombes soit ouvert au public.
Il y a 25 ans elles étaient l'objet d'une curiosité
très-vive et eo quelque sorte le but d'une prome
nade la mode. Des accidents nombreux ont
déterminé l'administration 'a De plus y autoriser de
visites isolées.
On y pénètre par la cour du bâtimeDt d'octroi
Post, ou est fondé croire que le ministre britan
nique ne s'est point mootré explicite sans restric
tion. Ainsi, il ressort de l'article du Post que cette
intervention que les puissances occidentales s'ac
cordent iuterdir, n'est dirigée réellement que
contre l'Autriche. C'est l'adresse de cette dernière
qu'il est dit, que a les deux puissances ont résolu
de s'interposer et de se liguer, afin d'empêcher
tous les efforts qui seraient faits pour opprimer ou
même iulimider les peuples de l'Italie centrale,
Toute intervention diplomatique, d'après la feuille
de Londres, serait d'ailleurs aussi bien interdite
que toute intervention armée. Le Morning-
Post dit encore que les troupes françaises ne
quitteraient Rome qu'après avoir évacué toute
l'Italie, et non pas immédiatement; mais ou arrive
rait pourtant laisser l'Italie tout-à-fait elle-
même.
Le peu d'empressement que manifeste le gou
vernement français, pour accéder la quatrième
proposition du cabinet britannique, se rapporte
probablement ce que ce dernier tient au suffrage
restreint, dans i'éiuissioo du vœu réclamé des
populations de l'Italie centrale, tandis que Napo
léon III préfère le suffrage universel. Il en est
beaucoup cependant qui opinent que l'empereur
des Français cédera eucore sur ce point son allié.
Au reste, les communications transmises par le
cabine: anglais celui de Paris ne s'ariêtent point
aux quatre propositions énoncées par lord Russell.
Le gouvernement britannique a demandé eucore
la France de laisser en tout état de choses la Savoie
elle comté de Nice au Piémont. Suivant une dé
claration de lord Granville a la Chambre Haute, le
cabinet des Tuileries aurait répondu n'avoir pas,
pour le moment, l'intention d'effectuer cette
réuuion. Mais, suivant d'autres rapports, il aurait
été d'avis qu'on ne pouvait préjuger par un enga
gement, les vœux des populations de ces provinces.
Quoiqu'il en soit, la presse officielle française fait
mine de tenir moios a l'annexion, naguère si éner-
giquement réclamée. Il est fort vraisemblable que
de l'ancieone barrière d'Enfer. Avant de franchir
le seuil d'une lourde porte qui laisse voir, en s'ou-
vrant les premières marches d'un escalier étroit
et glissant,on distribue chaque visitenrnne bougie
qu'il devra tenir la main pendant toute l'explo
ration. Un gardien compte ceux qui entrent.
Après être descendu 20 mètres peu près sous
le sol, on s'engage dans une galerie doDt les parois
et la voûte sont revêtues d'une maçonnerie garnie
ça et là de plaques de zinc pour empêcher l'infiltra
tion des eaux. Cette galerie est fort longue et fort
étroite; on ne peut pas y marcher deux de front.
Elle se dirige vers la plaine de Mom Souris, en
faisant plusieurs détours dans lesquels on est guidé
par une large bande noire tracée sur la voûte. Cette
ligne, parlant de l'escalier, aboutit au caveau dans
lequel on a entassé les ossements qui ont été retirés
diverses époques des cimetières que renfermait
autrefois l'enceinte de Paris.
Il y a vingt minutes déjà que l'on chemine dans
les catacombes, quand le gardien s'ariéte la porte
du caveau pour complet nne secoude fois les visi
teurs. Ou causait au début de l'exploration, on
plaisantait même; mais la singularité de la situa-
cette reculade est plutôt simulée que réelle, et ce
en vue de rendre service l'administration Pal—
merston dont l'existence serait très-compromise
pour peu que l'alliance française parût la faire
faiblir dans la question savoyarde.
On a remarqué, ces jours ci, un article du Times
où il est dit que Napoléon III, bien qu'il ait des
hommes et de l'argent, des navires et de l'artillerie,
quoiqu'il dispose, eD un mot, de tout ce qui rend
une puissance formidable sur terre et sur nier, n'a
pas encore conquis la confiance sincère et cordiale
de l'Europe. La feuille anglaise allègue en particu
lier la politique du gouvernement impérial
l'égard de la Savoie, et conseille l'empereur de
travailler l'amélioration de son vaste empire,
plutôt qu'à son extension.
S'il en faut croire les déclarations de lord Russell
la Chambre des Communes, la Prusse aurait déjà
accédé aux propositions faites collectivement par
les puissances occidentales au gouvernement autri
chien. La Russie n'aurait point répondu encore.
Mais, d'autre part, des dépêches rapportent qu'on
parle sérieusement d'un rapprochement entre la
Russie et l'Autriche; on ajoute que les puissances
du nord sont tombées d'accord relativement la
question italienne.
Au milieu des préoccupations, qui agitent ou
attristent le monde catholique, une bonne nouvelle
est dernièrement arrivée d'Afrique. Le drapeau
espagnol flotte sur les murs de Tétonan. Les habi
tants ont accueilli les Espagnols comme des libéra
teurs. L'armée marocaine en déroute, avant
d'abandonner la ville qu'elle ne pouvait défendre,
n'avait plus songé qu'à la piller.
Unecorrespondance de Paris apprécie cependant
les cooséqueoces de la victoire de l'armée espagnole
d'une manière inoins avantageuse au point de vue
catholique. La prise de Télouan est commentée,
dit-elle, Paris, dans le sens d'une consolidation
du ministèreO'DonDell, et par suite, comme faisant
obstacle l'introduction de quelque incident
espagnol dans la question italienne. Le parti
tion, une odeur, que l'on ne respire que là, des
bruits lointains que l'on entend dans les galeries
ténébreuses aboutissant aux divers carrefours
fioissent par produire une certaine impression, pui$
ud silence presque absolu dans les rangs des pro
meneurs.
On entre et on lit, sur un cartouche blanc, ce
vers tiré de l'Odyssée
N'insultez pas aux mânes des morts!
Dans des galeries plus spacieuses, tantôt rectili-
gnes, tantôt circulaires, on marche entre deux
murailles d'ossements humains, de six pieds de
hauteur. Le revêlement extérieur de ces murailles
funèbres est composé de tibias alignés, comme le
bois dans les chantiers. Au sommet, règne un cou
ronnement de crânes qui semblent regarder passer
le visiteur. On lit ça et là des vers de Lemierre, de
Lamartine, de Delille, et de Malfilâtre. Des in
scriptions indiquent de quels cimetières provien
nent les ossements entassésdans les diverses travées.
Il y a, dans uo coin retiré, un monceau énor
me qui attend encore que le funèbre architecte
les mette eo œuvre. On évalue 3 millions le
nombre des cadavres accumulés par les siècles