43me Année. Samedi 5 Mai 1860. A° 4.444.
LA PERSÉCUTION.
4 FR. POUR 6 MOIS, 2 50 POUR FOI CATHOLIQUE. CONSTITUTION BELGE. AN, 5 FR. POUR 6 MOIS, l-lo
ÏPB.BS, 5 MAI.
REVUE POLITIQUE.
LE PROPAGATEUR.
POUR LA VILLE 6 FR. PAR AIT, - POUR LE DEIIORS FR. 7-50 PAR
POUR 3 MOIS.
TROIS MOIS.
Il est toujours question, autant et plos que
jamais, de la teDue d'une conférence pour régler
les questions se rattachant a l'annexion de la
Savoie. Beaucoup cependant n'y croient pas. Une
correspondance parisienne dit fort bien Que les
cabinets aient accepté le fait accompli de l'anne
xion de la Savoie et de Nice, qu'ils le reconnaissent
même officiellement par la voie de leurs agents
diplomatiques, cela se comprend,mais qu'ilsaccep-
tent le sot rôle déjugés, dont la mission, connue h
l'avance, ne saurait être que de donner acte, cela
n'est pas admissible. Orle gouvernement fran
çais, tout en exprimant le désir de voir une confé
rence européenne donner son adhésion solennelle
au vœu des populations savoisiennes et niçoises,
trace soigneusement h cette conférence le rôle
qu'elle aura h jouer, en lui signifiant, de la façon
la plus nette, que son opinion ne saurait en rien
modifier la conduite du cabinet des Tuileries.
Déjà le refus du gouvernement français d'abdi
quer ses prétentions h occuper dès avant la signa
ture du protocole, les districts neutralisés par les
traités de i8t5, a suscité un déchaînement univer
sel de l'opinion publique en Angleterre. Le
Morning-Herald s'élève vivement contre la con
férence projetée le Times et le Daily-News
jettent un cri d'alarme, et s'écrient qu'il est temps
de veiller au salut de la Grande-Bretagne. La fièvre
des National clefences a repris.
Cette inquiétude a gagné le Parlement. Lord
Lyndhurst et sir Charles Napier, l'un a la Chambre
des Lords, et l'autre a celle des Communes, ont
interpellé le ministère sur l'état de la marine
anglaise. Selou lord Lyndhurst, la marine française
est plus, forte que la marine anglaise; sir Ch.
Napier demande avec instance que l'on augmente
le corps des gardes côtes: il réclame que la prime
(Suite.) Voir le n» 4>44^ du Propagateur.
L'abbé de Sérigny demeurait donc caché et
jusqu'ici on n'avait pas eu d'éveil sur le lieu de sa
demenre. Quelques âmes pieuses, qui la connais
saient, venaient le trouver de temps en temps.
Tantôt c'était pour un mariage, tantôt pour un
baptême ou pour une confession. Le courageux
ecclésiastique était heureux du zèle de ses frères, et
compromettait sa vie avec joie pour leur sauver
l'éternité. Si j'eusse émigré, pensait-il, je ne leur
serais pas utile; ici, du moins, ils trouvent une
consolation pour soutenir les épreuves qui les
attendent, et la force de les surmonter. La parole
de Dieu les console et les encourage.
Rien u'élait plus touchant que ces mystérieuses
dévotions; ce prêtre et ces chrétiens rassemblés
dans une petite chambre de louage, comme aux
temps des premiers siècles de l'Église, eoteudant la
messe et priant Dieu avec un mystère qui doublait
leur ferveur; communiant pour s'uuir une chère
d'entrée accordée aux volontaires de la marine
royale soit maintenue dans son intégrité.
D'après un bruit fort répaudu, le comte de
Montemolin serait disposé reconnaître désormais
la souveraineté de la reine Isabelle. L'Union, de
Paris, repousse énergiquement cette supposition,
comme indigne du caractère de ce prince et des
principes qu'il représente. Toutefois l'amnistie
générale que vient d'accorder la Reine pour tous
les délits et crimes politiques sembleot confirmer
ces rumeurs généralement accréditées. Mais une
dépêche postérieure de Madrid qui annonce le
départ des deux fils de Don Carlos pour l'étranger,
fait planer encore une certaine incertitude sur
l'incident qui se produit.
Les dépêches arrivées du théâtre de l'insurrec
tion sicilienne signalent la prise de la ville de
Carini par les troupes royales après un combat
opiniâtre,durant lequel la ville a beaucoup souffert.
Le télégraphe ne confirme guère le fait de l'incen
die et du pillage, dont on avait répandu le bruit,
en haine sans doute du jeune Roi.
Oo affirme que Garibaldi est parti ponr la Sicile
ou pour la Calabre. Il ne serait pas impossible que
pressé de toute part et enclin lui-même a reprendre
son existence de condottiere Garibaldi n'eût
résolu de faire un nouveau coup de tête. M. de
Cavour, dit une correspondance, pourrait bien être
du complot, car ce n'est pas pour rien que ce
conspirateur émérite est allé ces jours-ci la
Spezzia et Gênes.
Victor-Emmanuel a fait son entrée Bologne.
Il se confirme que le général de Latnoricière a été
prévenu que les révolutionnaires ont juré sa mort.
M. de Grainont a transmis au gouvernement romain
les dépêches qu'il a reçues cet égard, et le
consul de France Ancône, où est actuellement M.
de Lamoricière, lui a confié qu'on l'informait par
voie officielle que l'arièt avait été rendu par
la Junte. On rapporte la noble et chrétienne
réponse du général. J'en étais sûr. Que la
âme récemment envoyée au ciel par la persécution,
ou pour prier que Dieu sauvât celles qui étaient
encore épargnées. Souvent l'abbé de Sérigny,
appelé près d'un mourant pour l'assister sa der
nière heure, sortait plein de courage, sans réfléchir
que c'était peut-être un piège qu'on lui tendait, et
qu'il allait trouver la mort pour lui-même, au lieu
d'être utile ses frères; mais il ne considérait rien
et quand Valentin le voyait ainsi s'éioigner, il
pleurait en embrassant son maître. Celui-ci, tout
glorieux, lui disait en rentrant
Tu vois bien, mon ami, il ne m'est rien
arrivé, et j'ai peut-être sauvé une âme de plus.
Patience disait Valentin mon pauvre
maître, tout cela n'est pas fini.
Il arrivera ce qui plaira a Dieu; il ue faut pas
craindre tant une chose qui, après tout, doit nous
aniver infailliblement. Si la résignation est néces
saire, c'est bien vis à-vis de la mort, puisqu'elle
est inévitable.
Un jour que l'abbé de Sérigny était, comme de
coutume, occupé son ouvrage, en tenant compa
gnie au vieux Valentin, il vit entrer chez lui nn
jeune homme et une jeune fille, qoi vinrent le
volonté de Dieu soit faite. En tous cas ce qu'il
garde est bien gardé.
Le Pays, journal de l'Empire, annonce, d'après
ses correspondances de TuriD, que la division
d'occupation de l'armée française 'a Rome fait ses
préparatifs de départ et que l'armée pontificale va
être échelonnée de façon pouvoir se réunir facile
ment l'avant-garde des forces napolitaines con
centrées dans les Abruzzes.
Quoiqu'il en soit, le Morning-Posl contient
une dépêche de Paris disant qu'on a des raisons de
croire que les Français évacueront complètement
le territoire romain en juin.
Une feuille impérialiste, le Constitutionnel,
dans un article signé Grandguiliot, attaque l'OEu-
vredo denier de S1-Pierre, non seulement comme
illégale, mais comme une manœuvre politique,
anti-française et anti-dynastique. La dite feuille
admire fort l'extrême longanimité du gouvernement
et la regarde comme inouïe dans l'histoire morale.
Un journal d'une toute autre portée, YUnion de
Paris, lui adresse une généreuse et éloquente répli
que. De quel droit, se demande le journal
catholique, le Constitutionnel vient-il se permettre
de coutrôler les actes de la générosité privée des
fidèles? Est-ce que, par hasard, il se croirait
quelque pouvoir d'inquisition sur nos affections,
sur notre dévouement, sur nos biens et sur nos
bourses? Est-ce que, nous autres Français, citoyens
au même titre apparemment, prêtres, évêques et
laïques, est-ce que nous ne serions pas libres
de disposer comme il nous plaît de nos aumônes et
de nos offrandes? Est-ce que nous aurions a
solliciter le bon plaisir de qui que ce soit en ce bas
monde pour envoyer notre obole, si nous n'avons
que cela, nos millions, si nous en avions, telle ou
telle personne digne de notre respect ou de notre
amour? Est-ce qu'il y aurait, en ce noble et libie
pays de France, je ne dis pas une loi,j'insulte
rais la législation de ma patrie! mais un règle
ment d'administration ou de police qui m'empê
cherait de céder la libéralité de mon cœur et de
donuer ce que je veux, comme je le veux
trouver en le priant de leur donoer la bénédiction
nuptiale. La jeune personne avait peine quinze
ans, le jeune homme dix-huit.
Leur physionomie calme et candide frappa M.
de Sérigny. Il voulut causer quelques moments
avec eux, pour savoir un peu comment ils se trou
vaient ainsi seuls et si abandonnés.
Ils contèrent leur histoire en peu de paroles et
avec une simplicité charmante.
Nos parents, dit Alfred de B***, étaient
intimement unis. Dès le berceau je fus fiancé
Claire, et nous avons été élevés ensemble; nous ne
nous sommes jamais quittés un seul jour. Ayant
perdu son père et sa mère la première année de sa
naissance, Claire a toujours été avec moi, et mou
père l'aimait comme ;on enfant. Il fut, hélas! une
des premières victimes de notre révolution. Ma
mère, en devenant veuve, et menacée elle même
d'être arrêtée, fut obligée d'e'migrer, elle ne pou
vait cous emmener avec elle. Nous fumes confiés
aux soins de la vieille gouvernante de Claire; ma
mère loi recommanda de nous amener près d'elle
aussitôt qu'elle le lui ferait dire, et promit de nous
I donner de ses nouvelles. Mais voilà déjà p'ès d'une