43me Année. LE PROPAGATEUR. POUR LA VILLE 6 FR. PAR AN, 4 FR. POUR 6 MOIS, 2-50 POUR TROIS MOIS. FOI CATHOLIQUE. CONSTITUTION BELGE. POUR LE DEHORS FR. 7-50 PAU AN, 5 FR. POUR 6 MOIS, 2-75 POUR 3 MOIS. 7PS.3S, 9 JUIN. REVUE POLITIQUE. La reprise des hostilités en Sicile est démentie. D'après les dernières dépêches l'armistice serait indéfiniment prolongé. Une correspondance particulière de Paris apprécie en ces termes la situation qu'on a faite au jeune roi de Naples. Les événements de Sicile, dit-elle, paraissent malheureusement suivre la voie que je leur ai tracée. On a adopté envers le gouvernement napolitain des procédés si étranges qu'il était bien difficile qu'il n'en fut pas ainsi. Depuis plusieurs années les gouvernements de Piémontde France et d'Angleterre le dénoncent la haine de ses sujets et l'indignation de l'Europe. S'arrogeant, au nom d'un nouveau droit des gens sans doute car l'ancien n'a jamais autorisé de pareilles anomalies, un droit de censure, de contrôle et de réquisitoire contre une monarchie indépendante qui n'a jamais enfreint leur égard les devoirs de bon voisi nage, ils l'insultent, la dénigrent et la dévouent aux dieux infernaux vous me permettrez d'appliquer ce nom la révolution. Puis maintenant que L expédition de l'année dernière a livré la Péninsule entière la révolution elle prépare, son aise, dans les Etats du roi de Piémont, son vassal, une expédition de flibustiers qui va jeter sur la côte de la Sicile Garibaldi et ses bandes. L'argent, les armes, sont fournis par des souscriptions piémontaises, françaises et anglaises. Lord John Russell salue dans le Parlement d'Angleterre cette noble entreprise. Ici, tous nos journaux sémi- officiels ne cachent pas de quel côté sont leurs vœux. Les autres puissances européennes re gardent, se taisent et demeurent immobiles, comme jadis, dans la Terreur, les voisins de ceux qu'on venait chercher pour les conduire la guillotine. Le roi de Naples est seul. Il a contre lui toutes les puissances qui servent la révolution dans l'espoir de s'en servir, jeu dangereux qui pourra devenir fatal ceux qui le jouent. Ceux qui devraient le soutenir l'abandonnent. C'est le cas de le demander Que vouliez- vous qu'il fit contre trois? Qu'il mourût, dira- t on peut être. Oui, je sais qu'il peut noblement mourir, mais savez-vous ce qui achève de mourir avec lui? c'est le droit euro péen. Il n'y a plus que la force, la force hypo crite ou brutale. Le monde est livré la ruse -du renard et la greffe du lion. Le correspondant que nous citons, fait ensuite ressortir tout ce qu il y a d'odieusement contra dictoire dans les reproches d'absolutisme adres ses au roi de Naples et par les organes du gouvernement britannique, dont on connaît la poutique violente et sanguinaire l'égard de l Inde, et par cette fraction nombreuse de la presse française, dont les doctrines prétendues libérales ne s'effarouchent pas de l'ordre de choses en vigueur depuis le coup d'État du 2 décembre, ou même y applaudissent pleinement. Ce qui manque au roi de Naples pour réussir, ce n'est pas ce libéralisme dont VAngleterre et la France parlent beaucoup, sans en user plus que lui. C'est la marine de lune, c'est l'armée de l'autre. Il aurait cinq cent mille fois raison, s'il avait cinq cent mille soldats. Il est faible donc il a tort. En Sardaigne, on continue d'appliquer la liberté des cultes en prèttndant forcer les évêques de chanter un Te Deum pour célébrer la spoliation du Saint- Père. Le courageux archevêque dePise, cardinal Corsi, est toujours Turin. Le gouvernement lui a rendu sa liberté en lui défendant de retourner dans son diocèse. En France, la discussion de la pétition con tre les ordres religieux au Sénat a déjà eu son effet. Les évêques ont été avertis que le gouver nement s'opposait des présent ce que ces ordres fondassent de nouveaux établissements. Un journal allemand assure que le cabinet de Berlin a soumis, il y a une huitaine de jours, aux Etats du littoral un projet de forti fication des côtes, en les invitant faire savoir s ils étaient disposés appuyer ce projet au sein de la Diète. Le Times publie une déclaration adressée par Don Juan aux Cortès espagnols, et où ce prince réclame pour lui-même les droits abdi qués par son frère. Toutefois il déclare qu'il ne permettra aucun appel aux armes pour faire triompher sa cause. Nous empruntons au dernier numéro du Corres pondant l'appréciation suivante de ia situation actuelle de l'Europe Jamais le désir de la paix n'a été plus officielle ment constaté, dans les aspirations des peuples et dans le langage de la diplomatie, et jamais pourtant les bruits de guerre n'ont été si multipliés et si sérieux. L'Angleterre enrôle ses volontaires par milliers et hérisse ses côtes de canons; l'Allemagne fait appel au patriotisme de ses peuples; la Prusse vote 35 millions pour le maintien de ses armées sur le pied de guerre, l'Autriche réorganise ses commandements et forti fie la Vénétie; la Rossie masse ses troupes dans ses provinces méridionales, et la Turquie rassemble ses bataillons; seule la France diminue l'effectif de ses régiments, mais ses voisins songent avec frayeur a ses incalculables ressources et son incontestable supériorité militaire. Contre qui sont dirigés ces armements? Pour qui, avec qui, tous ces canous doivent-ils parler Nul ne le sait. Mais quand on se rappelle avec quelle merveilleuse précision se sont accomplis, l'an dernier, des événements pré parés d'avance dans les conversations intimes des souverains, on se sent disposé croire aux plus grandes éventualités. Des mots, des idées, qui déjà ont mis l'Europe en feu, sont jetés en avant; des alliances semblent se dessiner. D'un côté, c'est la Russie qui, par l'organe du prince Gortschakoff, annonce l'intention de deman der compte au sultan du sort de ses sujets chrétiens et de la non-exécution des promesses de 1856. De l'autre, c'est l'Angleterre, la Prusse et l'Autriche, qui fout entre elles un accord, ayaul dit-on, un double but: t" Maintenir l'intégrité de la Turquie; 2° dans le cas où il serait procédé une enquête sur la situation des chrétiens en Orient, prendre pour base de cette enquête non pas exclusivement les faits articulés par la Russie, mais aussi les rapports des ambassadeurs et des consuls des autres puissances. Quel sera le rôle de la France dans cette oouvelle phase de la question d'Orient? Moins que personne nous ne saurions le dire: bornons-nous rappeler, h ceux qui disposent de ses destinées, le sang naguère répandu en Crimée et le danger que ferait courir au catholi cisme en Orient l'installation de la Russie h Constantinople. C'est au milieu de cette préoccupation univer selle qu'un fait inouï, sinon attendu, est venu encore compliquer la situation et annoncer la chute de l'ancien droit public international. Pendant plusieurs jours l'Europe entière a eu les yeux fixés sur les deux vapeurs qui portaient Gari baldi et la fortune révolutionnaire. Le mystère enveloppait toute cette aventure; les nouvelles les plus contradictoires et les plus invraisemblables se croisaient, accueillies par les uns avec des sympa thies non déguisées, par les autres uvec un étonne- ment mêlé de douleur, laissant tout le monde dans l'incertitude et l'anxiété. Qui soldait cette expédi tion? Où allait-elle, eu Calabre ou en Sicile? On apprenait tout d'uu coup que quinze cents hom mes avaient pris terre Marsala, les vaisseaux auglais avaient-ils favorisé ou non le débarque ment? Garibaldi était-il avec cette bande? Hier la Sicile entière était au pouvoir de l'insurrection aujourd'hui on nous annonce officiellement que la première rencontie avec les troupes royales lui a été fatale et que les insurgés, abordés vigoureuse ment près de Calafimi ont perdu un de leurs chefs, un drapeau et la plus grande partie de leurs baga ges; mais, pendant que nous écrivons ces lignes, les événements marchent avec une rapidité que nous ne pouvons pas suivre, et, quand elles paraî tront, la face des choses aura peut-êtrechangé.Nous n'avons pas de paroles assez sévères pour blâmer cette criminelle expédition, ourdie par les sujets d'un État contre un État voisin et ami, favorisée, sinon par la complicité, du moins par l'incroyable faiblesse des autorités piémontaises allanten pleine paix, sans provocation aucune, semer la guerre et l'anarchie au gré de ses fantaisies ou de ses ambitions. Et au nom de quelle idée? au nom de la nationalité italienne! Mensonge! Les Autrichiens ne régnent pas Naples, comme hier Milan, et aujourd'hui encore Venise. L'insur rection sicilienne est au contraire une réaction locale comme l'esprit italien, et le premier usage qu'elle ferait de la victoire serait de se séparer de la Péninsule pour constituer un État indépendant. Non, la véritable pensée de Garibaldi est conteuue dans sa proclamation aux Romains. Guerre au piètre de Rome et au Bourbon de Naples, s'est-il écrié en rappelant les souvenirs de 1849, et don nant un commentaire éclatant l'ordte du jour du général de Lamoricière, c'est-à-dire guerre l'ordre établi, au droit, au catholicisme, la liberté des peuples. Où allons-nous si de pareilles entreprises peuvent s'accomplir sans que l'Europe s'en émeuve? Les

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Le Propagateur (1818-1871) | 1860 | | pagina 1