43me Année.
Samedi 16 Juin 1860.
Ko 4,4156.
LE PROPAGATEUR.
POUR LA VILLE 6 FR. PAR AN,
4 FR. POUR 6 MOIS, 2 50 POUR
TROIS MOIS.
FOI CATHOLIQUE. CONSTITUTION BELGE.
POUR LE DEHORS FR. 7-50 PAR
AN, 5 FR. POUR 6 MOIS, 2-75
POUR 3 MOIS.
TPK3JB, 16 JUIN.
REVUE POLITIQUE.
Une correspondance d'Italie donne une rela
tion de la prise de Palerme puisée une
source digne de foi. Nous en extrayons .les dé
tails suivants Du côté de Garibaldi, l'atta
que a eu un caractère d'allrocité infernale. Du
côté des troupes, ta résistance a été terrible.
Comme le cruel condottiere s'était mis en
relation avec les habitants, ceux-ci ont suivi ses
instructions pas pas. Au jour de la Pentecôte
on vit un grand nombre de fenêtres des rues
principales se murer comme par enchantement
des meurtrières furent disposées dans ces murs
improvisés. Les autres fenêtres furent recou
vertes avec des matelas ou des balles de laine.
Dans plusieurs maisons on disposa des gout
tières qui s'avancèrent assez avant dans la
rue et d'où les femmes versèrent des flots d'eau
bouillante et de poix fondue sur les troupes. Les
insurgés, gens de toute condition, guidés par
les garibaldiens et la plupart ivres ressem
blaient des démons de haine et de fureur
On ne peut nier que les bâtiments anglais
n'aient puissamment coopéré aux actes de la
rébellion.
La résistance des troupes a été terrible. Elles
se sont battues héroïquement et ont fait, sans
recourir aux inventions de Garibaldiun
ravage effrayant parmi les insurgés. La mi
traille moissonnait ceux-ci par centaines. Un
millier de furieux s'étaient réunis dans la
cathédrale d'où ils inquiétaient l'armée, lia
fallu ouvrir le feu sur ce magnifique édifice
du XII' siècle et dont quatre-vingt colonnes
de granit oriental soutiennent la voûte. La
coupole s'est écroulée écrasant la plupart des
insurgés tandis que les autres, sortant par les
portes sont venus mourir sur les baïonnettes
des soldats. Plusieurs palais où étaient entassés
des objets d'art et des meubles précieux sont
incendiés. Le Collegio massirno des Jésuites avec
sa riche bibliothèque est aussi devenu la proie
des flammes. Qu'importe Garibaldi? Pa
lerme, surnommée la felice, l'heureuse, est em
plie de sang et de ruines. Ses jeunes hommes,
sa noblesse sont tombés au nom d'un roi étran
ger qui n'a pas, on ne peut nous empêcher de
le dire, une seule des vertus de leur roi légitime!
Qu'importe encore a Garibaldi? Cet homme a
soif de carnage et d'aventures.
A côté de ces maux il faut déplorer l'effet
produit sur le moral des troupes par l'armis
tice. La plupart des régiments et de leurs chefs
jurent que si Lanza n'avait pas demandé cet
armisticela valeur, la fidélitéjointes
l'exaspération dans laquelle les soldats royaux
étaient entrés la suite de leurs pertes, auraient
radicalement comprimé l'émeute. De là au cri
de trahison il n'y a qu'un pas, et le caractère
italien est ainsi fait qu'il trouve rarement une
autre explication ses revers, ou ses décep
tions.... On a prétendu que quelques régiments
étaient passes du coté des insurgés. C'est faux.
Il y a eu seulement quelques régiments qui,
manquant la discipline, se sont donnés au
général Bosco en prétextant qu'ils n'avaient
point confiance en Lanza mais en lui.
Il est d ailleurs utile de remarquer que
l'armistice conclu par Lanza n'a été que de
heures La prolongation n'est poinlde son fait.
Z,e Constitutionnel fait du récit de l'expédition
garibaldienne, une véritable épopée.
Suit un réquisitoire violent contre le gouver
nement de Naples. On croirait entendre un
écho des injures dont retentit la tribune du
Parlement anglais. Le tout se termine par une
prédiction du triomphe définitif de Garibaldi,
et l'apologie de l'occupation par les Anglais du
fort de Castellamare, pour le cas où elle aurait
eu lieu.
Le gouvernement anglais avait bien le droit
d'occuper Castellamare s'il ne ta pas fait, le
Constitutionnel le remercie de sa générosité.
La Patrie consacre un article lyrique la
fête du xi juin, la fêle de l'annexion. Elle
trouve propos de répéter ce sujet L'Em
pereur n'a fait la guerre d'Italie que pour une
idée, pour une noble idée.
Nous voudrions le croire; mais est-il possi
ble que se souvenant de la brochure, de la lettre
au Saint-Père, cette lettre dont M. de Cavour
disait, au Sénat sarde, qu'elle est, pour la na
tionalité italienne, tout aussi importante que la
victoire de Solferino, se souvenant des articles
des journaux officieuxest-il possible que
l'Europe ne se demande pas quelle idée obéit
l'Empereur en laissant sa presse officieuse
chanter des hymnes Garibaldi?
Le langage du Constitutionnel s'accorde assez
bienavec une nouvelle que nous apporte l'Agence
Renier, d'après laquelle l'empereur Napoléon,
tout en autorisant M. de Martino venir
Paris, n'aurait pas négligé d'informer la cour
de Naples que son gouvernement ne pourrait
prendre de décision que de concert avec le ca
binet de Londres
La Patrie annonce le départ de deux mille
volontaires de Gênes pour la Sicile. Le gouver
nement piémonlais n'a donc pas encore pu
empêcher cette nouvelle expédition. Du reste,
d'après une dépêche de Naples, les deux bâti
ments qui portaient ces renforts ont été capturés
par la marine napolitaine.
On attend avec anxiété, dans toute l'Alle
magne, l'entrevue du prince de Prusse avec
l'Empereur des Français; en Autriche, on s'en
inquiète très vivement, et /'Ost-Deutsche-Post
exprime ainsi ces inquiétudes
a Dans des temps ordinaires, nous ne ver
rions aucun danger dans une entrevue entre
Empereur des Français et le prince- régent
de Prusse. Mais que penser de l'entrevue de
Baden Baden laquelle assisteront encore
d'autres princes allemands? En se rendant
Baden-Baden, Napoléon 111 arrive avec un
programme tracé l'avance, tandis que les
princes allemands n'ont pas encore combiné le
leur, ou, s'ils en ont combiné un, il équivaut
la négation du programme napoléonien Si, par
malheur,nous nous trompions, sile programme
des princes allemands devait être plus ou
moins conforme celui de Napoléon III, alors
les dangers de l'Allemagne seraient encore
plus graves que s'il y avait opposition entre les
deux programmes-
Une correspondance de Berlin assure que le
cabinet prussien aurait adressé ce sujet une
communication toutes les cours allemandes,
dans le but de dissiper les appréhensions que
celle entrevue pourrait faire concevoir, et d'in
viter divers princes se rendre Bade pour y
assister eux mêmes.
Au moins si nous y voyons assister des
princes allemands très-intéressés ce que le
prince régent ne prêle point une oreille com
plaisante des propositions que l Empereur
aurait pu lui fairede faciliter l agrandissement
de la Prusse en Allemagne aux dépens des
petits princes et moyennant l'abandon la
France soit de la rive gauche du Rhin jusqu'à
la Moselle, soit même des anciennes frontières
de i8i4 ce sera, pour le repos de l'Europe,
une inappréciable garantie.
ijl fT"i)
Sous le titre La Situation on lit dans la
Gazette de Liège
Nous croyons avoir été des premiers !i signaler
l'incroyable attitude prise par la presse libérale
belge dans les affaires de Sicile, el a faire voir les
passions anti-patriotiquesque cette presse doit
faire fermenter dans le pays, pour le cas où la
contagion annexionniste qui gagne partout eu
Europe, viendrait b s'étendre, par un événement
«pélconque, b la Belgique. Mais nous n'avons pas
dit, b beaucoup près, tout ce que nous pourrions
dire b ce sujet. Nous ajouterons aujourd'hui quel
ques considérations pour fortifier celles que nous
avons déjà présentées, espérant toujours que le bon
sens belge finira par l'emporter sur les folies
libérales de nos journaux plus ou moins juifs,
étrangers, britanniques, maçonniques, carbonari,
garibaldiens, ou, pour tout dire en un mot, révo
lutionnaires.
Uo fait qui nous a consolé s'est passé dernière
ment b Courtrai le baes d'un hôtel a eu le bon
esprit patriotique d'éconduire quelques têtes
chaudes françai&gj^nnnexionnistes quand même,
au sujet de la Belgique, absolument comme le sont
tous nos journaux libéraux vis-b-vis de tous les
pays étrangers, plus ou moins susceptibles d'anne
xion b un empire ou b un royaume quelconque.
Mais b quoi bon, dit-on, ce vieux esprit fla
mand, lorsqu'une presse passionnée vient tous les
jours défendre des principes qui tendent évidem
ment b détruire ce patriotisme séculaire, en soute
nant tantôt uo Kossuth, tantôt un Garibaldi, qui
n'ont d'autre but que celui de détruire ce qui
existe, sans savoir ce qu'ils vont mettre b la place?
N'est-il pas évident que, si demain les bandes
d'un Delecluse se préseutaieot de nouveau b un
Risquons-Tout quelconque, elles invoqueraient,
vis-b-vis de nos populations, les idées qu'on fait
valoir tous les jours dans notre presse échevelée et
ne manqueraient pas, en répandant l'or et en pro
mettant des places, qui font presque tout aujour
d'hui, de s'attacher b se créer des partisans qui
n'auraient qu'b reprendre, en sous-œuvre, les
tirades garibaldiennes qu'on lit chaque jour dans
nos journaux?
On n'a pas b craindre pour le moment, dit-on,
une explosion révolutionnaire en Belgique. Nous
sommes parfaitement de cet avis; les machines
infernales seront mises au repos, anssi longtemps
que les grandes puissances laisseront faire on ap
puieront les conspirations garibaldiennes; mais
cela pourrait-il continuer, sans que ces puissances
se sentent menacées elles-mêmes? Nous voulons
bien que le whighisme anglais, qui évidemment
domine aujourd'hui le monde, ne poussera pas
l'esprit révolutionnaire, ou, comme disait Canning,
ne déchaînera pas les vents d'Eole au point
de compromettre la sécurité du royaume-uni, seul
pays b l'abri des révolutions, parce qu'il vit de
toutes celles qui se font ailleurs; mais nous sommes
persuadés que la révolution socialiste fera le tour
I