43me Année.
BEAUTÉ ET LAIDEUR.
No 4,461.
LE PROPAGATEUR.
pour la ville 6 fr. par a!*,
4 fr. pour 6 mois, 2-50 pour
trois mois.
FOI CATHOLIQUE. CONSTITUTION BELGE.
pour le dehors fr. 7-50 par
an, 5 fr. pour 6 mois, 2-75
pour 5 mois.
7??.32S, 4 Juillet.
REVUE POLITIQUE.
C'est toujours sur le royaume de Naples que tous
les yeux se portent avec le plus d'intérêt. François
II se borneia-t-il a concéder, avec un nouveau
ministère, des institutions constitutionnelles? Il ne
paraît pas qu'il puisse, aller au-delà, saos abdiquer
son nom et son autorité. Néanmoins on parle
encore d'une alliance entre Naples et le Piémont.
C'est avec uoe profonde tristesse que nous verrions
le jeune roi de Naples faiblir devant ses malheurs
et consentira demander,en quelqoesorte, l'alliance
de ceux qui vieuneut de violer sans pudeur, pour
travailler sa ruine toutes les lois du droit des gens.
Suivant le Constitutionnel et le Morning-Posl,
Garibaldi, en apprenant que le roi de Naples
prépare une constitution, aurait senti la nécessité
de brusquer une solution en Sicile, et il se serait
converti tout coup l'avis de ceux qui veulent
faire voter immédiatement l'annexion la Sar-
daigne.
Tous les instants du flibustier ne sont pas, sem-
ble-t-il, absorbés par l'organisation provisoire de
sa conquête, non plus que par les difficultés du
dehors; il lui tardait d'obéir au mandat des sociétés
secrètes en sévissant contre les ordres monastiques.
Les Jésuites et les Rédeinpiorisles ont mérité,
comme d'ordinaire, l'honneur d'être les premiers
sacrifiés. Leurs corporations sont dissoutes, les
religieux expulsés et leurs biens confisqués.
Dans l'intériear même du Piémont, la per
sécution religieuse prend chaque jour de plus
détestables précautions. L'arrestaiiou du cardinal
Baluffi, archevêque d'Imola eu est un triste exem
ple. Mgr Ratta, vicaire-général de Bologne, le
P. Barbiari, ont été frappés de plusieurs années de
prisoo et de fortes amendes.
D'ailleurs, la révolution triomphante est intrai-
Deux femmes se rencontraient souvent dans le
monde. L'une, madame de Lesville, était célèbre
par sa ravissante beauté, la giâce de sou esprit, et
par une foule d'autres avantages qui la faisaient
aimer et chérir dé tous. Simple, bonne, spirituelle,
pleine de vertus et d'indulgence, elle semblait être
venue au monde dans un de ces jours où la nature
n'est que douceur et merveilles, où tout est d'ac
cord, tout sympathise de beau et de lumineux.
L'autre, nommée madame de Blagnac, était
riche aussi, jeune et grande dame aussi, mais d'une
laideur repoussante. Contrefaite, la peau jaune et
marquée de petite vérole, les yeux moitié myopes
et a moitié droits, un son de voix rauque et désa
gréable le disgracieux était au complet.
A cette laideur outrée, elle joignait une aigreur
de caractère, causée par ce malheur de naissance, et
qu'elle portait constamment dans ses relatious avec
le moude. Elle u'était pas méchante cependant,
mais elle n'avait pas d'amis; elle les souhaitait trop
pour les avoir. Le coeur se lie au cœur par sympa
thie, et non par complaisance. On plaignait la
table. Les bruits d'alliance avec Naples ont soulevé
les virulentes diatribes démagogiques de la presse
piémontaise et de vives interpellations dans la
Chambre des députés.
Le gouvernement sarde, ayant demandé un
nouvel emprunt de i5o millions, Guerazzi, moine
défroqué, l'un des chefs de file de la Chambre,
a consenti voter l'impôt demandé, mais la
condition qu'on en ferait l'instrument de la
politique, a-t-il dit, qui nous a menés Milan, a
Bologne et Florence; et qui doit nous conduire
Palerme, Naples, Rome et Venise. I! faut marcher
avant tout.
Et afin de ne laisser aucun doute sur sa pensée,
Guerazzi a continué ainsi L'ennemi, c'est l'Au
triche qui intrigue Rome; c'est un capitaine qui
ordonne la croisade au nom du catholicisme; c'est
un roi qui demande uoe alliance, et un pape qui
nous excommunie et se dispose nous attaquer.
M. Minghette, organe du parti modéré, a
répondu. Il leud au même but que Guerazzi, mais
ce n'est pas en cassant ainsi les vitres qu'on arrive
sou but, Il faut agir avec calme, avec prudence,
avec adresse.
La royauté napolitaine, dit un journal conser
vateur, est évidemment condamnée a une mort
certaioe, et, en atlendautf tous les outrages.
Toutes les perfidies imaginables sont accumulées
contre elle, part même les trahisons et les
défectious qui ont paralysé la défense des ports de
la Sicile. Ce sont des gouvernements monarchiques
qui sont complices des coups portés la monarchie
sur le trône de Naples.
L'Angleterre serait sans rivale sous ce rapport si
le gouvernement piémootais n'existait pas. On
connaît les réclamations aussi impertinentes qu'ini
ques de celui-ci, lorsqu'il devrait des excuses
publiques, au nom du droit des gens méconnu, s'il
y avait encore un reste de moralité et de pudeur
dans le monde diplomatique. Si, dans l'ordre pro-
i
pauvre femme sans penser l'aimer. On ne l'abor
dait jamais pour soi; ou ne lui parlait que par
politesse. Elle avait d'ailleurs un Ah! vous
voilà ou Vous n'avez donc rien de mieux
faire? qui déconcertait tellement les malheureux
embarqués dans sa conversation, qu'on n'arrivait
elle que poussé daus ses derniers retranchements.
Alors elle accusait sa laideur de la solitude et de
l'indifférence qui l'entouraient, tandis qu'elle ne
devait cet isolement qu'à l'aigreur de son caractère
et au mécontentement perpétuel qu'elle avait des
autres et d'elle-même. Mais comme elle était bonne,
et qu'elle ne comprenait pas la haine, elle pleurait
en ne conservant d'autre souvenir de cet abandon,
sinon qu'elle était horriblement laide, et ne devait
en vouloir personne de ce malheur; le reste de la
leçon lui échappait.
Madame de Lesville était son but d'ambition.
Chaque fois qu'elle la voyait entrer dans un salon,
quand elle entendait les éloges qui partaient de
tous côtés, son pauvre cœur se gonflait de larmes.
L'excessive bontéet le charmant esprit de Blanche
de Lesville l'avaient amené deviner depuis long
temps les tortures secrètes de madame Blagnac, et
rarement elle la rencontrait sans causer avec elle
longtemps par intérêt.
videntiel, la peine du talion existe pour les gou
vernements, les monarchies d'Angleterre et de
Sardaigne ne doivent-elles pas trembler d'être
mesurées l'aune dont elles se sont servies envers
la monarchie des Deux-Siciles?
Ce qui est alarmant ce ne sont pas les modifica
tions géographiques que les États subissent, mais
la manière dont elles se font, mais surtout le
principe eu vertu duquel elles s'accomplissent.
Quand on adopte ce programme chasser le
Bourbon qui règne Naples et le prêtre qui règne
Rome, on se flatte de renverser la monarchie et
d'anéantir l'Eglise. On proclame ce principe le
peuple peut tout faire et il est dispensé d'avoir
raison.
Du reste, le pcnple ici est uu être abstrait dont
la révolution fait ce qu'elle veut saus qu'il s'en
doute, souvent même coutre ses instincts, contre ses
goûts, contre ses intérêts. La révolution et la
liberté n'ont rien de commun. Le peuple, au nom
de qui on fait tout et oc ose tous les attentats, en
est la première victime, avant comme depois l'in
vention du suffrage universel.
Nous ne savons ce qui sortira des projets de
constitution et de réformes dont il est question la
cour de Naples. Mais ce que nous savons fort bien,
c'est qu'à Naples, comme Rome, les réformes
seront, pour les prétendus amis du peuple, un
levier pour battre en brèche la monarchie. La
constitution octroyée sera le champ de bataille où
l'on s'efforcera de tuer la royauté soit que le Roi
reste dans les termes de la Constitution, soit qu'il
essaie, en sortant, d'échapper ses ennemis. Déjà
d'un bout de l'Europe l'autre, les révolutionnaires
de toute nature, les intelligents comme les autres,
répètent Il est trop tard. Ce qu'il leur faut, c'est
le triomphe absolu de la révolution Après la
Sicile, Naples; après Naples, Rome; après Rome,
Venise; après venise, tout. Ce sont ici les
étapes de la révolution triomphante, marquées par
Nous devinons bien vite celui dont nous sommes
l'objet. Caroline sut gré Blanche du sien celle-ci
l'aima de l'avoir devinée. Une intimité réelle et
sincère s'établit donc entre ces deux femmes, si
différentes en tous points, et si loin de se ressembler
dans la vie. On s'étonuait de ce rapprochement. Le
monde a toujours une victime et une idole. Leur
union l'étonna sans la comprendre.
Blancheétait pieuseetsainte. Mariée depuis qua
tre ans un homme qui ne l'aimait pas, objet de la
vénération de tous, et n'aimaDt que son mari, gar
dant sur ses malheurs un silence absolu, et n'ayant
conservé le souvenir de son bonheur perdu que
pour pardoooer la perte celui qui en était cause,
elle paraissait heureuse aux yeux des autres et
même ceux de M. de Lesville: ne montrant
jamais qu'un visage doux et calme, toujours piêt
sourire et ue prenant de couleur sombre que devant
le malheur d'autrui, le monde était trompé par sa
résignation, qui lui tenait lieu de bouheur.
Un jour, madame de Blagnac était venue la voir.
Celle-ci lui dit avec l'effusion du cœur: Que vous
êtes heureuse d'être si jolie! Heureuse! reprit
Blanche avec amertume, et croyez-vous que le
bouheur consiste uniquement l'être?
Oh dit Caroline, si vous saviez quelle cruelle