44rne Année.
^medi 13 Octobre 1860.
N° 4.490.
r\
I
LE PROPAGATEUR
pour la ville 6 fr. par an,
4 fr. pour 6 mois, 2-50 pour
trois mois.
FOI CATHOLIQUE.
CONSTITUTION BELGE.
pour le dehors fr. 7-50 par
an, 5 fr. pour G mois, 2-75
pour 3 mois.
72 G 13 Octobre.
DE LA RÉORGANISATION DE L'ARMÉE PONTIFICALE
ET DE LA MISSION Dl' GÉNÉRAL LAMORICIÈRE.
Un publiciste libéral estimé, M. Forcade, vient
de laire paraître dans la Revue des Deux-Mondes,
publication pen suspecte de partialité pour les inté
rêts catholiques, uo remarquable travail où il
apprécie, avec une haute raison, la mission vrai
ment libérale, vraiment française que remplissait le
général de Lamoricière en formant une armée au
Pape, le succès qui avait couronné ses efforts, les
lâches embûches qui ont détruit son œuvre, et en
même temps les obligations d'honneur imposées k
la France par la présence de ses soldats dans la
capitale d'un royaume dont les provinces étaient
victimes de la plus inique des iovasions.
Le cadre de ce journal ne nous permet d'en
reproduire qu'un fragment ayant trait la mission
si généreusement remplie par l'illustre général.
Avec les conditions qui étaient faites k la
défense du Pape, il n'y a dans le combat de Cas-
telfidardo et dans la reddition d'Ancône rien qui
puisse entamer la réputation militaire du général
Lamoricière et des Français qui le secondaient. Le
général n'avait jamais dû s'attendre k être attaqué
par l'armée du Piémont. On a la mémoire si coorte
et l'on réfléchit si peu eo ce temps-ci, qu'il n'est
peut-être pas inutile de rappeler l'objet et le carac
tère de la mission que le général Lamoricière avait
acceptée. Un des reproches les plus graves que l'on
fit au gouvernement pontifical était de ne pouvoir
se soutenir par ses propres forces, d'emprunter
pour sa défense les troupes de puissances étran
gères, et de mettre ainsi la main de l'étranger, la
main de l'Autriche et de la France, dans les affaires
de l'Italie.
C'était une situation fausse pour la Papauté,
dont au fond elle compromettait l'indépendance
politique, fausse surtout pour les puissances qui
prêtaient leurs troupes au Pape, et auxquelles leur
intervention dans les Etats romains suscitait d'inex
tricables embarras.
La force qu'il s'agissait1 d'organiser dans les
Etats .pontificaux ne pouvait, en aucun cas, être
agressive; elle devait simplement suffire la pro
tection de l'ordre intérieur et opposer tout au plus
une barrière a quelque irruption désordonnée de
corps francs, car il est bien évident que le Pape ne
saurait faire la guerre a des puissances militaires, k
des gouvernements réguliers, et personne ne sup-
IIISTOIRE DE THEODELINDE,
reine de lombardie.
(Suite et fie.) Voir le n° 4,489 du Propagateur.
A la porte de la ville était une foule de jeunes
personues portant des guirlandes de fleurs et des
bouquets. Elles présentent leur hommage k Théo-
deliude, et les fleurs effeuillées que les plus jeunes
d'entr'elles portent dans des coi beilles sont lancées
par leurs maios et retombent sur la princesse
^Èn formant une pluie émaillée des plus douces
couleurs. Quelques unes de ces jeunes filles portent
des vases où brûlent des parfums exquis; d'autres
tiennent dans leurs mains des corbeilles de ces
dragées de miel dont les Lombards furent les
inventeuts; et, dans le même temps, un chœur de
musiciens fait retentir les airs de louanges de
la triste Théodeliude, dont les regards distraits
posait qu'a l'époque où nous vivons, il existât,
même en Italie, une puissance qui pût être tentée
par la gloire de faire la guerre au Pape.
Voilk la tentative qui fut essayée au commence
ment de cette année..... Si l'entreprise avait réussi,
si une petite armée pontificale eût pu se former, la
France eût rappelé sa garnison de Rome.
D'ailleurs la création d'une armée romaine eût
été déjà la plus grande des réformes dans les Etats
pontificaux elle eût rendu les autres compatibles
et avec la dignité du Saiut-Siége recouvrant son
initiative indépendante, et avec la conservation de
l'ordre dans les États de l'Eglise. Ce qui prouve
qu'un tel projet ne reposait poiot sur des données
aussi illusoires que certaines personnes le préten
dent, c'est la colère qu'il a excité chez les partisans
de l'unité immédiate de l'Italie, c'est la hâte qu'a
mise le Piémont k la traverser et k l'anéantir par la
force. On n'a pas voulu laisser au général Lamo
ricière le temps de faire l'éducation militaire de ses
recrues.
Le général qui avait même des forces insuffi
santes pour garder tous les points du territoire
menacés par des expéditions de corps francs, a été
attaqué k l'improviste par une armée régulière de
cinquante mille hommes. Au toaineut où cette atta
que s'est produite, nous avons cru que le gouver
nement romain déclinerai! la lutte. Le Pape est le
seul souverain qui puisse céder sans déshonuenr k
la violence extérieure.
Il semble que le gouvernement pontifical se soit
attendu k être secouru. Celte illusion, que parta
geait évidemment le général Lamoricière, explique
ce qui s'est passé. L'année dernière, lorsque les
Autrichiens prirent le parti de couper court aux
longues négociations qui ont préludé k la dernière
guerre et d'eovoyer un ultimatum k Turin ils
donnèrent trois jours au Piémont pour se décider,
et le ministère anglais faisant un effort suprême
en faveur de la paix, obtint d'eux une prolonga
tion de répit. Le malheureux Pape et son brave
général n'ont pas même eu le bénéfice d'un aver
tissement préalable et d'un délai de quelque vingt-
quatre heures. Le Piémont n'a pas même eu pour
la France la déférence que l'Autriche montra
envers l'Angleterre. L'invasion n'a pas même at
tendu la réponse du gouvernement pontifical a
l'ultimatum do cabinet de Turin.
Le général Lamoricière a dû déployer une pro
digieuse activité pour jeter quelques troupes dans
Ancôoe et réunir les quelques milliers de recrues
qu il a lancés avec une impétuosité désespérée
cherchent vainement le jeune ambassadeur parmi
les seigneurs qui se présentent successivement
auprès de son char.
Enfin le cortège arrive près du palais royal les
cris de Vive Théodelinde l Vive Autharis!
parlent de tous les points de la ville.
La princesse est conduite dans la salle du trône.
La, elle ne peut cacher sa surprise de voir les
signes sacrés du christianisme. Depuis sa conversion,
Autharis avait douné l'ordre de préparer la céré-
moniedu couronnement selon les usages des princes
chrétiens.
Mais, surprise! Théodelinde voit sur le troue
le guerrier qui lui a sauvé la vie et l'honneur Elle
n'ose en croire ses yeux. Elle voit celui dont l'image
remplit sou cœur ve«;r au-devant d'elle et la
couduire sous le dais royal eo lui doonant le nom
d'époose. Ne suis-je point sous l'influence d'un
songe? Cléphoé, Autharis, dit-elle, le roi, l'ambas
sadeur ne sont-ils que la même personne? Ah!
contre les fortes positions piémontaises deCastelfi-
dardo. Avec des soldats coosommés, cette attaque
eût réussi peut être, mais n'aurait abouti qu'à pro
longer de quelques jours la résistance d'Ancôue.
Une diversion qu'il avait ordonnée k la garnison
d'Ancône ne s'est pas effectuée ses bataillons
italiens ne l'ont pas secondé.
Il a pu percer avec un millier d'hommes, l'armée
victorieuse; mais le plus grand nombre de ceux
qu'il eût voulu entraîner avec lui, la plupart de ces
braves volontaires franco-belges surtout, qui ont
si dignement soutenu dans cette journée l'honneur
de leur race, de ces mercenaires qui ont si bien
répondu k l'ouverture de l'ennemi par leur cheva
leresque héroïsme, étaient détruits ou prison
niers
r-iiQB<Kii.n-
Z/Ami de la Religion, après avoir considéré
avec un mélange de douleur et d'indignation
les tristes conditions faites au Souverain- Pon
tife par la traîlreuse agression du gouvernement
Piémonlais. termine en ces termes
C'est en considérant l'auguste et patient
opprimé de la Ville Eternelle que nous éprou
vonsquel que soit l'avenir, une invincible
confiance.
La Papauté demeure en réserve pour tout
sauver; elle renouvelle ses forces au sein des
épreuves, et l'adversité lui conquiert des armes,
qui, naguères, la trouvant trop mêlée aux
puissants du monde, se défilaient d'elle. Ah!
nous connaissons des hommes qui, tout boule
versés de ce qui se passe, se sont reconnus, par
un même élan, honnêtes gens et chrétiens Nous
en connaissons qui ont senti leur foi sortir toute
vivante de leur indignation! Combien se sont
dit alors, comme le cenlenier au pied du Cal
vaire Dans cette œuvre de ténèbres, où toutes
les infamies sont concentrées, où le baiser de
Judas s'unit aux crachats d'une populace
égarée et au coup de lance du soldat brutal, il
y a quelque grand mystère qui confond, il y a
quelque chose qui n'est pas de Chomme! Pour
que l'injustice se soit portée ces extrémités
inouïes, il faut qu'il y ait là, devant elle,
l'image du Juste I Pour que Satan se soit rendu
ce point visible, il faut qu'il y ait la le
Vicaire de Dieu v
Les destinées du pouvoir temporel lui même
ne nous inquiètent pas; il pourra subir des
transformations sous l'action de Dieu qui tra
vaille toujours au centre des confusions humai -
prince!... Ah! jeune guerrier!... quelle est l'agita
tion de mon cœur!... Chère Théodelinde,
Cléphoé est mon ami j'ai pris son nom pour faire
cette ambassade durant laquelle je voulais vous
connaître avant de devenir votre époux. Oh com
bien je me félicite de ce stratagème, puisqu'il m'a
donné plus tôt le sentiment de mon bonheur.
Puis-je croire, Théodelinde, que vous excuserez
inoD déguisement.
Les regards de la princesse exprimèrent les
sentiments qui succédaient dans son âiue k la
mélancolie. Ses attraits, uo instant obscurcis, bril-
lèrent alors comme la rose qu'une douce rosée
ranime après un soleil brûlant. La fête de l'hymen
parut être celle du bonheur. Théodeliude fut pour
les Lombards un ange de douceur et de paix qui les
conduisit aisément eux autels de Jésus; et la Lom-
bardie écrivit dans ses fastes les plus glorieux le
règne d'Authaiiset de Théodelinde.