44me Année.
Samedi 3 Novembre 1860.
No 4.496.
m
LE PROPAGATEUR
pour la ville 6 fr. par an,
4 fr. pour 6 mois, 2-50 pour
trois mois.
FOI CATHOLIQUE. CONSTITUTION BELGE.
pour le dehors fr. 7-50 par
an, 5 fr. pour 6 mois, 2-75
pour 5 mois.
3 Novembre.
REVUE POLITIQUE.
Il n'y a plus rien de positif sur l'entrée Naples
du roi galant homme. On dit maintenant qu'il «a
se diriger sur Capoue, son inteution étant de
prendre possession de cette place avant de se
rendre dans la Capitale du roi Frauçois II.
I.a Patrie signale un mouvement anliannexio-
uiste très prononcé, qui prend de graudes propor
tions dans les provinces.
La situation des troupes napolitaines et des
troupes piémonlaises devant Gaëte, l'attitude de la
flotte française et celle de l'amiral Persano, donnent
lieu beaucoup -de conjectures et de dépêches
contradictoires.
La Gazelle de Gaëte publie une note dans
laquelle le roi de Naples déclare que s'il doit
succomber sous l'attaque de Garibaldi, des légions
piémonlaises, anglaises et hongroises, ainsi que de
l'armée qui l'ont assailli sans déclaration de guerre,
les droits des princes, l'indépendance et la sécurité
des peuples et des Souverains succomberont avec
lw. v
Le Journal de Rome dénonce les odieux
moyens employés par les révolutionnaires pour
exciter l'agitation dans ce qui reste a l'Eglise de ses
paisibles domaines. Rappelons a celle occasion que
la bande du colonel Masi, entre autres, est payée
sur les fonds du trésor piémnntais, comme les
troupes de Victor-Emmanuel. C'est ce qu'affirme
un correspondant sur l'autorité des révélations
livrées 'a la publicité par le Journal de Rome. La
même feuille dément, de la manière la plus absolue,
le récit de la Lombardia, qui prétendait que le
gouvernement pontifical vendait les trésors des
beaux-arts pour subvenir ses besoins. Nous
répéterons son démenti pour montrer b quelles
sottes calomnies descendent les ennemis dn Pape et
de l'Église, et pour avertir les amateurs plus
curieux que délicats qui seraient tenlés de se laisser
prendre cette piperie.
La Patrie dément la nouvelle qui a été publiée
que le gouvernement autrichien avait prévenu
les grandes puissances qu'il était décidé b adresser
un oltimatumau cabinet de Turin. Desinformations
sérieuses, positives, ajoute ce journal, établissent
que l'Autriche a la ferme intention de se tenir sur
la défensive. Le général Beoedsck a reçu des
instructions dans ce sens.
L'entrevue de Varsovie est toujours la préoccu
pation du moment, mats a toutes les questions que
l'on pose a ce sujet on ne peut obtenir que des
explications ou des réponses évasives. Un person
nage de comédie a pu dire, en parlant d'un conseil
de ministres La séance était secrète, voici ce qui
s'y est passé. Mais le secret des conférences de
Varsovie a été si bien gardé jusqu'ici que per
sonne ne peut satisfaire la curiosité publique.
Suivant les uns, comme la Rœrsenhallela
Gazelle d'Elberfekl et d'autres feuilles alleman
des, les souverains sont tombés complètement d'ac
cord et ont signé une convention. Suivant les
autres, comme le Nord et le Daily News, l'en-
trevnen'aurait abouti a aucun résultat; et ce dernier
attribue l'insuccès de la réunion au refus qu'au
raient opposé la Prusse et l'Autriche au désir de la
Russie de réviser le traité de i85q.
La vérité est que personne ne sait rien, et qu'il
faut attendre b cet égard la lumière des événements.
Les interpellations aux Cortès d'Espague sur la
politique do gouvernement dans la question de
Rome et de Naples ont eu lieu. Le maréchal
O'Donnell a renouvelé la déclaration que l'Espagne,
sous son administration, garderait une complète
neutralité dans les affaires d'Italie. Le député qui
l'ioterpellail ayant émis des doutes sur l'amitié de
l'empereur des Frauçais pour l'Espagne, le chef du
cabinet a protesté contre ces paroles.
Le prince Heori des Pays-Bas a ouvert la session
ordiuaire de l'assemblée des Etats du grand-duché
de Luxembourg. Il a promis, au nom du ministère,
de nouveaux efforts pour assnrer au pays la jouis
sance des libertés que la Constitution lui garantit.
A Constanlinople et b Damas, on peut toujours
se croire b la veille de nouveaux événements. Le
grand-vizir et Riza-Pacha sont décidés b solder
l'armée et les employés par tous les moyens, même
par un emprunt forcé, si c'est nécessaire. Le Sultan
a hérité de cinquante millions de francs, fortune
particulière de la trésorière du sérail.
LA BELGIQUE ET L ITALIE.
(t 793, 1830, 1860.)
Il n'est pas mal dans le pays de gens honnêtes
si l'on veut, dont la bénévole myopie n'a rien
compris aux meoaces contre notre nationalité que
renfermait la révolution unitaire de l'Italie, née du
carbonarisme, égarée au profit de la dictature pié-
montaise, encouragée par la politique impériale,
qui croit s'en servir pour décbi.-er les traités de
i8t5 sur le Rhin, après les avoir fait déchirer sur
les Alpes.
Dupes ou complices, il eu est qui ne craignent
pas d'assimiler notre révolution nationale, libérale
et religieuse de i85o b lq révolution italienne en
chemise rouge, qui ne rougissent pas de comparer
les événements qui se déroulent dans la péninsule
sous les maios ambitieuses de Victor-Emmanuel et
de Napoléon 111, avec les événements de i83o si
purs de tout excès et que le congrès européen de
Londres, dès i85i, s'est empressé de sanctionner.
Il est une page de l'histoire belge qui ressemble
d'une manière frappante b ce qui se passe aujour
d'hui en Italie; cette page, ce n'est pas celle de
i83o, c'est celle de 1793. Eu i85o, la Belgique
n'a auuexé aucun État voisin elle s'est au con
traire désannexée de la Hollande; ce n'est pas au
nom de Vunité qu'elle a fait sa révolotion unité
que la Hollande voulait maintenir, c'est au nom
de la vieille uatioualilé historique et de l'autonomie
belge. L'Italie dirige sa révolutiou contre l'Église
et la Papauté, elle prosciit le clergé, et pas une
voix catholique ne s'est fait entendre b la Chambre
de T utin. La révolutiou belge de i83o a été tolé
rante pour tous et c'est aux mains catholiques, b la
majorité catholique du pays, que surtout elle s'est
confiée. A Turin ou a inauguré la révulniion par la
suspension de la Constitution et par la dictature;
eu t83o, le gouvernement provisoire a remis, dès
le leudemain, tous les pouvoirs dans les mains sages
dn Congrès et c'est la Constitution qui a été le
premier acte de ce mouvement national, qu'aucune
tentative sérieuse d'anarchie n'a souillé. L'union,
l'idée natiouale et traditionnèlle la liberté vraie
et l'ordre out présidé a la révolution de i85o; les
divisions, les luttes fratricides, l'anéantissement des
nationalités autonomes, le despotisme, la dictature
et l'auarchie ne président-ils pas la révolution
italienne? La Belgique de i83o et Plialie de 1860
sont donc deux antithèses politiques.
11 y avait une Italie qui eût ressemblé b notre
Belgique monarchique, libérale, catholique et con-
ser.airice, c'est celle qu'avaient rêvée l'illustre
comte B.iibo et Mauzoni, pour laquelle Sylvio
Pellico a souffert, et au triomphe de laquelle Pie IX,
eo 1846, s'était dévoué. Mais l'Italie de Garibaldi,
de Bertani et de Mazziui, b laquelle M. de Cavour
vient de donner le baiser fraternel du haut de la
tribune piémontaise, c'est l'anarchie couronnée par
le despotisme, pour aboutir b uue guerre générale
dans laquelle nous serons tous enveloppés.
Noos avons une page de notre histoire qui res
semble b celle-lb, c'est, avons-nous dit, celle de
1792 et 1795. Rien n'est plus frappant et le pa
rallèle est complet.
La Belgique, après la bataille de Jemmapes, était
occupée par l'armée de Dumouriez, qui, daus sa
proclamation déclarait vouloir s'interdire toute
influence dans la forme du gouvernement que
les Belges jugeraient convenable de se donner.
L'armée de Dumouriez était accompagnée d'un
comité révolutionnaire composé de réfugiés belges
et chargé de révolutionner nos provinces.
N'est-ce pas exactement ce qui s'est passé a
Parme b Florence et b Bologne an début de la
guerre, et ce qui s'est renouvelé en Sicile, a Naples
et dans les États romains? Partout l'invasion
militaire combinée avec l'action des comités révo
lutionnaires, a précédé, protégé ou excité en Italie,
cotnme en 1792 en Belgique, les annexions et
l'unité révolutionnaire.
La réunion de la Belgique b la l'rance était dé
crétée d'avance b Paris, comme les annexions
étaient décidées b Plombières;.seulement il fallait,
alors comme aujourd'hui, couvrir ces décisions
sons le masque du suffrage des populations. Par le
décret du i5 décembre 1792, il était enjoint aux
généraux français de déclarer an peuple belge
qti'f/s venaient lui apporter paix secours
liberté et fraternité, lui restituer la souveraineté
nationale et le droit imprescriptible et inalié
nable de disposer de lui-même, et le délivrer du
gouvernement des prêtres et des aristocrates.
Des commissaires nationaux se joignirent aux
commissaires de la Convention pour s'abattre sur
la Belgique, se concerter avec les administrations
provisoires et fonder partout des clubs patriotiques
et révolutionnaires. Lorsque ces clubs furent créés
dans nos villes et nos villages, quand les commis
saires et les proconsuls français eureut bien pré
paré le terrain a la réunion, et quand tout fut
disposé pour influencer les élections sans vio
lence au profit de la liberté, de la civilisation
et de l'humanité, comme écrivaient les commis
saires b la Convention, lorsque le travail des in
trigues et des manœuvres fut achevé, la Couveu-
tion fit poser la question de la réunion, ou de
l'annexion, comme on dirait aujourd'hui.
Mais avant de jeter le masque, la Convention
prit une précaution dont le Piémont s'est parfaite
ment souvenu et qu'il a prise b son tour. Les
sociétés populaires, les clubs qui depuis un mois
avaient mis la question de la réunion b leur ordre
du jour, envoyèrent successivement b Paris des
députations chargées de porter b la Convention des
vœux de réunion. C'était au moment où la Con
vention se faisait féliciter par une dêputation du
genre humain.
Ou obtint la même unanimité factice et le même
enthousiasme dérisoire que le Piémont a conquis
depuis un an eu Iialie. La Convention décréta la
'«■union le 1" mars 1793; elle déclara accepter
te vœu librement émis par le peuple souverain
Car nul proclama que le procès-verbal de l'assetn-
blée primaire de Bruxelles aouooce un emhou-
siasme qu'il tenterait vainement d'exprimer;
que le vœu pour la réunion a été unanime; que
les illuminations, les lêres, les salves d'artiflerœ
et le bruit des cloches ont atiesré l'allégresse des
citoyens; jamais, ajoute-1 il, jamais vœu ne fut
j plus libre.
Nous savons aujourd'hui par l'histoire commenl,