45me Année.
Mercredi 29 Janvier 1862.
No 4,625.
FOI CATHOLIQUE. CONSTITUTION BELGE.
REVUE POLITIQUE.
BUREAU
Y près, rue de Lille, lO.
ÉDITION
mercredi et Samedi.
itiasft
LE PROPAGATEUR.
PRIX D'ABONNEMENT
Pour Ypres i S fr. par an.
Pour le Dehors t 9 fr. SB C
par an.
i saif.iioiiifl
TPEtSS, 29 Janvier.
Chaque jour vient accuser plus nettement l'at
titude menaçante de l'Autriche k l'égard de l'Italie.
M. de Rechberg a été amené k donner au sein d'un
comité des explications sur les relations extérieures
de l'empire. Il s'est félicité des bons rapports du
gouvernement avec la France, mais il a laissé
percer beaucoup d'arrière-pensées au sujet de
l'Italie.
Le gouvernement de Turin, a dit le ministre, est
convaincu du désastre aoquel il s'exposerait, s'il
osait attaquer l'Autriche, mais il n'est pas maître
des éléments qui poussent le pays. Il est obligé de
tolérer les enrôlements qui sf font dans les villes,
et n'est nullement certain de ne pas se trouver
engagé dans des circonstances plus fortes que lui.
Dans ooe situation pareille, Il faut toujours s'at
tendre k nn coup de main possible.
M. de Rechberg, ajoute la feuille autrichienne,
s'est ensuite efforcé de tranquilliser le public sur
le sort des_princes détrônés et sur les droits des
parents dé la famille impériale. Il a prorois que,
le jour où'il y aurait lieu de régler définitivement
la question italienne, l'Autriche agirait d'une ma
nière raisonnable et pratique; mais que pour le
moment elle ne pouvait abandonner nucnn point
de ses droits stipulés.
Nous n'avons pas besoin d'insister sur l'impor
tance de ces faits.
Des dépêches d'Amérique viennent nous appor
ter on nouveau témoignage de la profonde aversion
qu'inspire l'Angleterre k un certain nombre de
membres du Congrès. A propos de la discussion
d'un crédit pour l'exposition de Londres, M. Owen
Lotejoy a soutenu que i'Aroérique ne devait point
contribuer k la splendeur de cete fête industrielle.
Nous devons, s'est-il écrié, rester chez nous
jusqu'k ce que nous puissions battre l'Angleterre;
je déteste cette puissance, et je lègue ma haine k
mes fils; quand l'insurrection sera vaincue dous
nous joindrons k la France et k la Russie pour
enlever k la Grande - Bretagne ses possessions
orientales!
Si de tels sentiments, exprimés en un langage
aussi véhément, reçoivent de l'autre côté de l'At
lantique la consécration de la popularité, on peut
affirmer que la paix entre l'Angleterre et les États
du Nord de l'Amérique ne résistera pas longtemps
aux assauts de l'opinion publique.
En affirmant k plusieurs reprises que, dans sod
discours, Napoléon III en toucherait qu'en passant
aux graves questions qui préoccupent le monde
politique, on a fourni des renseignements dont le
public peut aujourd'hui apprécier la valeur. Ce
discours est, en effet, empreint d'oc grand caractère
de réserve.
Ce qui concerne l'Italie ne permet pas de rien
conclure de décisif sur les vicissitudes que pourra
encore traverser la question romaine. Il n'est fait
aucune réflexion, même indirecte, dans le passage
relatif au Mexique, aux projets de révolution
monarchique dont la presse européenne s'entre
tient depuis plusieurs jours. Toutefois, malgré ce
ton général de réserve, le discours impérial exprime
une confiance résolue dans le maintien de la paix.
Nous n'ayons pas besoio de recommander k l'a 11 eo -
tion du lecteur ce qu'a dit Napoléon III dé Ta
guerre civile d'Amérique." La guerre civile qui
désole l'Amérique est venue compromettre grave
ment nos intérêts commèrciaux. Cependant, tant
que les droits des neutres serout respectés, nooi
devons nous borner k faire des voeux pour que ces
dissensions aient bientôt on terme. A bien peser
ces expressions, il ne paraît pas que le gouverne
ment français soit aussi pressé que le souhaiteraient
les amis du Sud d'intervenir dans la querelle. i
Le discours impérial d'est pas moins sobre de
réflexions sur le dedans que sur le dehors. Il y est
fait mention de la Constitution k peu près dans les
mêmes termes dont l'empereur s'est servi le
i,r janvier dans sa réponse au président du Sénatf
Comme le fait remarquer le JoUrrial (i'es Débats,
l'empereur insiste peut-être moins cette' fois'suf
les perfectionnements possibles, et met plus en
relief le dessein de maintenir intactes les bases
fondamentales de la Constitution. Enfin, en
s'élendaut d'une façon très-détaillée sur la situa
tion financière, l'empereur paraît particulièrement
soucieux d'accentuer sa volonté de borner les
dépenses.
OUVERTURE DE LA SESSION LÉGISLATIVE DE FRANCE.
DISCOURS DE L'EMPEREUR,
u Messieurs les sénateurs, messieurs les dépotés,
v L'année qui vient de s'êcûUlêr a vo, malgré
certaines inquiétudes, la paix se consolider. Toutes
les rumeurs propagées k dessein sur des préten
tions imaginaires sont tombées d'elles-mêmes
devant la simple réalité des faits.
Mes relations avec les puissances étrangères
me donnent la plus entière satisfaction, et la visite
de plusieurs souverains a contribué eucore k res
serrer nos liens d'amitié. Le roi de Prusse, en
venant en France, a pu juger par lui-même de
notre désir de nous unir davantage k ud gouver
nement et k un peuple qui marchent d'un pas
calme et sûr vers le progrès.
J'ai reconnu le royaume d'Italie avec la ferme
intention de contribuer par des conseils sympa
thiques et désintéressés k concilier deux causes
dont l'antagonisme trouble partout les esprits et
les consciences.
La guerre civile qui désole l'Amérique est
venue compromettre gravement nos intérêts com
merciaux.
Cependanttant que les droits des neutres
seront respectés, oous devons nous borner k faire
des voeux pour que ces disseutioDs aient bientôt
un terme.
Notre établissement en Cochinchine s'est
consolidé par la valeur de nos soldats et de nos
marins. Les Espaguols, associés k notre entreprise,
trouveront, je l'espère, dans ces contrées le prix
de leur courageux concours. Les Aunamites résis
tent faiblement k notre domination et nous ne
serions en lutte avec personne si au Mexique des
procédés d'un gouvernement sans scrupules ne
dous avaient obligés de nous réunir k l'Espagne et
k l'Angleterre pour protéger nos nationaux et
réprimer des attentats contre l'humanité et le
droit des gens.
Il ne peut sortir de cë conflit rien qni soit de
nature k altérer la confiance dans l'avenir. Libre
de préoccupations, j'ai porté mon attention sur
l'état de Bos finances.
Un exposé sincère dous en a fait connaître la
véritable situation. Je De dirai k ce sujet que quel
ques mots.
Le public s'est ému du chiffre §65 millions
auquel s'est élevée la dette flottantemais cette
dette, en l'arrêtant désormais, n'a rien d'inquiétant,
car elle avait déjk atteint ce chiffre avant i848,
alors que les revenus de la France étaient loin
d'approcher de ce qu'ils sont aujourd'hui. D'ail
leurs, qu'on retranche de çelte somme d'abord les
602 millions qni grevaient l'État k nne époque
antérieure k l'empire, ensuite les 78 millions rem
boursés aux rentiers l'époque de la conversion;
enfin, les 253 millions montant des découverts
qu'ont amenés dans les deux derniers exercices
des expéditions lointaines et qu'il ent été possible
de demander k nn emprunt on verra que depuis
l'établissement de l'empire, grâce, il est vrai, aux
consolidations successivement opérées, les décou
verts ne se sont pas accrus en proportion des
nécessités auxquelles il a fallu pourvoir et des
avantages ohtenns depuis dix ans.
En effet, messieurs, il ne serait pas juste d'ou
blier l'accroissement de dépenses exigé par le
service anDoel des emprunts contractés pour deux
guerres qui n'ont pas été sans gloire.
Les 622 millions employés par le trésor aux
grands travaux d'utilitépublique,indépendamment
des trois cents millions affectés par les Compagnies
k l'achèvement de 6,555 kilomètres de chemins de
fer.
L'exécution du réseau télégraphique.
L'amélioration du sort de presque tous les
serviteurs de l'État.
L'augmentation da bien-être do soldat, les
cadres de l'armée mis en proportion de ce qu'exige,
en temps de paix, la dignité de la France.
i> La transformation de la flotte et de tout
notre matériel d'artillerie.
La réédification de nos édifices religieux et de
nos monuments publics.
Ces dépenses ont imprimé k tons les travanx
utiles sur la surface de l'empire une impulsion
féconde. N'avons-nons pas vu les villes se trans
former,les campagnes s'enrichir par les progrès
de l'agriculture et le commerce extérieur s'élever
de deux milliards 600 millions k cinq milliards 700
millions? Enfin, par le seul accroissement de la
prospérité publique, les revenus de l'État se sont
accrus de plusieurs centaioes de millions.
Cette énuméralion nous montre toute l'éten
due des ressources financières de la Frauce, et,
pourtantquelle que fut l'origine des découverts,
quelque légitimes que fussent les dépenses, il était
prudent de ne plus les augmenter.
Dans ce but, j'ai proposé au Sénat un moveu
radical, qui confère au Corps législatif une plus
grande faculté de contiôle et l'associe de plus en
plus k ma politique mais cette mesure n'était
point, comme il est facile de s'en convaincre, nn
expédient pour alléger ma responsabilité. C'était
uoe réforme spontanée et sérieuse devant nous
forcer k l'économie.
En renonçant au droit d'ouvrir des crédits