46rne Année.
Samedi 27 Décembre 1862.
N« 4,720
FOI CATHOLIQUE. -- CONSTITUTION BELGE.
REVUE POLITIQUE.
Le télégraphe apprend de Rome
que le Saint-Père n'a pas officié le
jour de Noël, cause d'une légère
indisposition. Hâtons-nous cepen
dant de rassurer les fidèles. L'indis
position dont souffre le Chef vénéré
de la catholicité n'a pas empêché Sa
Sainteté de recevoir individuellement
les membres du corps diplomatique
accrédité auprès du Saint-Siège.
Le ministre de l'intérieur des États
de l'Église vient de publier une cir
culaire ordonnant aux autorités pro
vinciales de procéder la formation
des listes électorales et autres forma
lités nécessaires pour l'élection des
membres des municipalités. Au mois
de mai prochain la moitié des con
seils municipaux doit être renouvelée
de la sorte. A cette époque, les sujets
du Saint-Père exerceront leur droit
électoral pour la première fois.
Comme les conseils municipaux
élisent les membres des assemblées
provincialesces assemblées aussi
vont deveuir une émanation du suf
frage populaire, de même que les dé
putés la consulte d'Etat pour les
finances, qui sont choisis par le sou
verain parmi les sujets élus par les
magistratures provinciales.
Arrivés h ce point, il ne manque
plus que d'accorder aux députés de
la consulte le vote délibératifpour les
mettre en possession de tous les
avantages des gouvernements repré
sentatifs. Il paraît qu'on arrivera,
sous peu, jusqu'à cette concession
Maintenant que le gouvernement
pontifical a consenti proprio motu,
aux anciennes exigences de la diplo
matie, nous verrons ce que la diplo
matie saura faire pour les droits du
Saint-Père
Une dépèche d'Athènes, du 20
décembre, annonce que les opéra
tions du suffrage universel sont ter
minées, que le résultat est complète
ment favorable au prince Alfred, et
que a l'opinion publique persiste dans
son choix en espérant que le principe
de la souveraineté nationale finira par
surmonter tous les obstacles de la
diplomatie.
Le général Concha a terminé son
discours au sénat de Madrid, en re
prochant M. Calderon Collantes
d'avoir approuvé la conduite du
comte de Reus, et en exprimant
l'opinion que si l'Espagne ne ren
voyait pas ses troupes pour marcher
avec les Français sur Mexico, ce qui
serait ses yeux le meilleur parti
prendre, elle devrait au moinsgarder
l'égard de la France une neutralité
amicale. Le général Prim a répondu
en maintenant ses assertions précé
dentes et en se prononçant aussi pour
la neutralité.
Après une séance tenue mercredi,
et dans laquelle un orateur s'est pro
noncé contre l'intervention au Mexi
que, le Sénat s'est ajourné au 29.
Une bataille sanglante a été livrée
sous les murs de Fredericksburg.
D'après une dépèche de New-York
du i5, les fédéraux ont occupé le
champ de bataille dans la nuit du i3
au i4, mais sans pouvoir enlever
leurs morts et leurs blessés Les per
tes seraient considérables des deux
côtés et la victoire est restée incer
taine. Deux généraux du Nord ont
été tués et cinq blessés; un grand
nombre d'officiers ont été mis hors
de combat. On ignorait les pertes
des confédérés, maïs, sur un point
seulement,ils avaient eu 4oo hommes
faits prisonniers. La bataille devait
être reprise, le i4, par le général
Burnside.
Le Courrier des Etats-Unis a
consacré un second article la polé
mique soulevée dans les journaux
du Nord par le projet de médiation
européenne. La feuille franco-amé
ricaine s'attache démontrer que le
projet de médiation eût servi, par sa
réalisation, la cause de l'Union, bien
plus que le système de temporisation
adopté par le cabinet anglais.
Le congrès de Washington a re
poussé une proposition qui tendait
condamner la proclamation de M.
Lincoln, relatif l'affranchissement
des esclaves. On sait que les députés
récemment élus, dont le vote pourra
modifier la majorité actuelle, ne
siègent pas encore dans l'assemblée.
Nous avons reçu hier les lignes suivantes
avec prière de les insérer dans les colonnes
de notre journal.
Langemarck, 25 Décembre 1862.
Monsieur le Rédacteur
La mort vieot de frapper ici uo de ces rudes
coups qui ruinent subitement le bouheur d'une
famille, portent le deuil dans toute une commune,
et y causent une peite a jamais irréparable. Sa
faux vient de moissonner a l'âge de 58 ans, el
d'enlever la teudresse de sa ccmpague, aux
caresses de son cher enfant, h l'affection de sa
famille, au soutien des pauvres, l'amitié et au
respect de tous les habitants de cette commune le
très noble Seigneur Messire Joseph-Félix-Marie-
Charles-François Vicomte de Patio de Lange-
marck.
Il y a on jour h peine, il vivait au milieu de
nous, brillant de vigueor et de santé; hier encore,
il nous édifiait par ses vertus, oous charmait par
son amabilité et soo heureux caractère; hier eucore,
il était le bonheur de sa maison, et au moment où
je vous écris; o néant des choses humaines! Sa
dépouille mortelle: repose déjà dans l'antique
caveau de ses pères! Cet après-midi s'est faite, au
milieu d'uu concours immense d'amis et de parois
siens, la triste céiéuiouie de son inhumation. Le
deuil était conduit par M. le Barou Giey, beau-père
du regretté vicomte. A 3 heures, le cortège funèbie
que précédaient les Sociétés de Ste Cécile et de
S^Ceorges, et suivait, outre les parents, un groupe
nombreux d'amis et de personnes distinguées,
telles que M. le Séoateur Mazeman, M. le Baron
Vanderstichelen, M. le Conseiller provincial De
Neckere, M. le Jugelweins, etc., quittait le perrrn
do Château pour faire h pas lents, le tour* de
la place et introduire le défunt dans celte même
église, qu'il .avait toujours fréquentée avec taut de
piété et qui devait le recevoir une dernière fois
a«ant que la tombe se fermât h jamais sur lui.
Monsieur le curé et ses vicaires, tout pénétrés de
douleur, chantèrent d'une voix émue les vêpres et
les absoutes, après quoi le cortège se dirigea veis
le caveau en suivant le chemin qui borde le
château. Sur leur passage stationnait une foule
iuuombrable, non pas de curieux. Oh! leur
morue silence, l'abattement de leurs visages, le
respect avec lequel ils se découvraient devant les
restes inanimés de leur Seigneur, leur yeux tougis
de pleurs, et le mouvement de leurs lèvres qui
murmuraient des regrets et des prières, tout ce!a
attestait leur amour et leur douleur, tout cela disait
bien haut qu'ils étaient accourus, uon pour voir
une cérémonie, mais pour saluer encore une fois
leur bieu-aimé Vicomte, et lui rendre un dernier
et suprême hommage. Cette attitude si religieuse
fut maintenue tout l'itinéraire: mais lorsqu'on
découvrit ce froid cercueil et que Monsieur le
Curé acheva ses dernières oraisons, les larmes cou
lèrent avec plus d'abondance et les sanglots écla
tèrent plus librement. Point de discours officiel,
aucun fatras de paroles: Chacun, de la place qu'il
occupait, adressait au défunt son religieux adieu
Noble Seigneur, disaient-ils, repose eu paix dans
le Sein de ton Dieu! Tu nous aimais taut, lu
te vouais notre bonheur uous aussi, nous le
chérissions et nous espérions en toi. Hélas! S'il a
plu h Dieu, qui seul vit toujours, de l'appeler a lui,
qu'il lui plaise encore de consoler ton épouse et la
famille éplorées, et de nons conserver dans la
persouoe de ton jeune eufant, un fils digne de sou
père, mais qui puisse plus longtemps que lui, êue
notre rnaio protectrice et l'idole de uos cœurs.
Je me trompe fort, Monsieur le Rédacteur ou ce
langage si vrai, si siocère, si éloquent a parlé
au cœur des assistants étrangers Eux, comme nous,
savent bieu que ces éloges et ces regrets soDt
l'apauage de la seule vertu; qu'elle seule peut les
LE PBOPiCATEUB
D'YPRES.