D'YPRES.
4ttmf Année.
Samedi iiS liais I84M.
i\0 4,740.
LE PROPAGATEUR
-wFOI CATHOLIQUE. CUNSTITU T10X RELUE.
REVUE POLITIQUE.
Suivant les renseignements que nous transmet
le télégraphe, le sort des armes continue b être
défavorable la «aleorense insurrection polonaise.
On assure qu'à la suite d'un conseil de gnerre, tenu
h Varsovie, le 33, il a été décidé que la tactique,
qui vient de donner l'armée russe la victoire
contre Langiewicz, serait modifiée et qu'on forme
rait b l'avenir des colonnes mobiles pour combattre
les bandes insurrectionnelles. On laissera un corps
de huit mille hommes près de la frontière autii-
chienne, pour maintenir le palatinal de Cracovie,
et la force des colonnes destinées b agir isolément
sera fixée !t t ,300 hommes, chaque coloone aura b
sa disposition trois pièces d'artillerie rayées. On a
regardé ce chiffre comme suffisant, parce qoe les
corps d'insurgés, en se fractionnant, ont dimioué
l'effectif de chacun d'eux.
Voici, d'après les récits combinés du Czaa de
Cracovie el de la Presse de Vienne, comment les
choses se seraient passées, lors de l'entrée de
Langiewicz sur le territoire autrichien On s'était
battu près de Zagosc, pendant les journées du 17,
du 18 et du 19; les Russes, très-maltraités, avaient
subi daus la journée du tg un échec qui paraissait
décisif, ils s'étaient enfuis en désordre, en jetant
leurs fusils et abandonnant deux canons. Mais le
camp polonais était épuisé, et le pays, ravagé; on
ne pouvait plus nourrir ni les hommes ni les che
vaux; des renforts arrivèrent aux Busses, qui se
préparaient b revenir b la charge et b cerner les
iosurgés. Langiewicz réunit alors un conseil de
gnerre, lui représente la nécessité de reveuir b la
guerre de partisans, et l'on tomba d'accord que le
dictateur, emmenant avec lui quelques officiers, se
rendrait sur un autre point du royaume de Pologne,
en traversant secrètement le territoire de l'Autriche.
Le remaiiiemeut ministériel de Turin parait
s'être accompli sans trop d'hésitation. M. Peruzzi
n'a pas disputé b M. Minghetti la présidence do
conseil; et pour remplacer M. Pasolini, on a pris le
secrétaire général du ministère des affaires étran
gères, M. Visconti Venosta. Nous comprenons qne
l'heureux négociateur de l'emprunt des 700 mil
lions l'ait emporté sur son concurrent, moins
favorisé par les circonstances. Qui oserait aujour
d'hui se comparer b l'homme qui a eu la fortune de
remplir lescaisses vides du trésor? Mais M. Visconti
Vonesta, cornaient expliquer l'honneur inattendu
qui lui a été accordé de se dire successeur médiat
de M. de Cavour? Sa nomination oous parait un
expédient qui ne se justifie que par deux raisons
M. Viucenti Venosa est milanais, et ou l'avait lb
sous la main.
Loe nouvelle candidature, est proposée pour le
trôoe de Grèce, celle de S. A. R. le prince Guil
laume de Danemark, deuxième fils do prioce Chris-
tian de Danemark et frère de la priocesse de Galles.
Te Times et le BerlinsteTidende, de Copen
hague, annoncent simultanément que cette propo
sition, due b lord J. Russell, est appuyée par la
France et la Russie et acceptée par la famille du
prince. L'aocieune alliance de la France et du
Danemark doit en effet concilier les sympathies de
ce pays une candidature dont le succès mettrait
peut être fio b l'état d'anarchie qui désole la Grèce.
La princesse Marie Dagmar, sœur cadette de la
princesse de Galles, épouserait le czarewitch de
Russie.
La Chambre des représentants s'est occupée,
avant hier, de la discussion des articles du budget
des travaux publics pour l'exercice 1363.
ACTES OFFICIELS.
Uu arrêté royal du 18 mars porte
M. P.-J. 8isscbops, directeur provisoire de la
maison d'arrêt de Fumes, est désigné pour passer
en la même qualité b la maison d'arrêt de Louvain;
M. N.-F. Wackens, directeur de la maison
d'arrêt cellulaire b Courlrai, est nommé, par mesure
d'ordre, en la même qualité b la maison d'arrêt de
Furnes;
M. D.-P.-J. Dewilt, directeur de la maison
d'arrêt cellulaire de Dinaoi, est désigné pour
passer en la même qualité b la maison d'arrêt de
Courtrai.
Par arrêté royal du s5 mars, M. P. F.
Struyve, est nommé échevin b Brielen en rempla
cement de M. C.-L. Merlevede, dout la démissiou
est acceptée.
CHRONIQUE-JUDICIAIRE.
00TJS. D'ASSISES
DE LA FLANDRE-OCCIDENTALE.
AFFAIRE DE LA BANDE ROUGE.
La cause portée mardi dr b la cour d'assises séant
b Bruges, doit, assure -1-on, retenir la cour pendant
trois semaines, et sera placée au rang des causes
célèbres.
Dix accusés qui, depuis longtemps attendent
dans les prisons de Bruges que le jury de leur pro
vince se prononce sur une question de vie ou de mort,
sont prévenus d'être les auteurs ou les complices
des triples assassinats commis b Reoioghelst, sous
Vlamertinghe, le 8 décembre 1861 et b Stadeo,
pendant la uuit du 5 au 6 mars 1863.
Tous ces accusés appartien neul b la classe ouvrière
agricole; leur pbysiooomie plus ou moins grossière,
ne présente rien de particulier sauf peut-être celle
de Lepoutre, au front bas, b la tête large, el dont
le regard effraie, comme celui de Kestelyn.
C'est une chose qui stupéfait, que de voir l'insou
ciance avec laquelle les deux femmes assises sur le
premier banc des accusés, promènent leurs regards
sur le public.
Tous les avocats des accusés ont été désignés
d'office. Néanmoins les principaux accusés soot
défendus par des avocats qui n'appartiennent plus
au jeune barreau.
Le Dimanche 8 Décembre 1861, vers midi, le
fermier Salomé rentrant de la grand'messe, trouva
étendus dans sa demeure, au milieu d'une mare de
sang, les cadavres de sa femme Marie-Thérèse
Debroyne et de son neveu Théophile Salomé,
jeune enfaDt de i5 ans. La femme avait été frappée
avec un de ces lourds tubes de fer dont on se sert
b la campagne pour souffler le feo; l'enfant fut
égorgé avec une faucile servant dans le ménage b
découper le pain. Les instruments de mort, tout
maculés de sang, avaient été abandonnés, l'un daus
la chambre b coucher, b côté du cadavre de Marie
Debruyne, l'autre sur la table de la cuisine, où
gisait le jeune Théophile. Au soufflet adhérait On
long cheveu gris; b la faucile d'autres cheveux de
la nuance de ceux de l'enfant.
Le vol, évidemment avait été le but du double
crime. Au premier abord, cependant, ou ne put
constater que la disparution d'objets de mince
valeur an pistolet, de vieux habits, des côtelettes
de porc et des saucisses. Plos lard, Salomé constate
le vol d'une somme de 160 fr. g6 c.
Les recherches des magistrats instructeurs pour
découvrir les assassius, n'aboutirent pas dans le
principe; ils D'avaient nul indice, quand tout b
coup ils apprirent qu'nne petite fille de b ans,
Emérence Vermeersch, dénonçait son propre père.
C'est mou père, Charles Kestelyn, et mon oncle
Lahousse, disait-elle b un compagnon de jeux,
qui ont tué Thérèse et Théophile. Quand, le
a dimanche b midi, ils sont venus b la maison, ils
a avaient du sang aux mains, du sang sur leurs
habits, do sang b la lame de leurs couteaux, de
l'argent plein leurs poches. Ma mère et Kestelyn
ont lavé les habits et les couteaux; l'argent fut
partagé et ma mère mit notre part dans le bahut.
Malgré les contradictions et les hésitations qui
furent constatées dans celte dénonciation par l'in
struction elle-même, dénonciation faite plusieurs
mois après le crime par cette eufant de cinq ans,
c'est ainsi que Désiré Vermeersch, Lucie Doize,
sa femme, et Lahousse furent arrêtés le 11 Avril.
Quant b Kestelyn il était déjb placé sons la main de
la justice, comme prévenu d'avoir participé b
l'assassinat du fermier Assez, b Staden.
Les accusés ont toujours nié leur culpabilité.
Kestelya est indirectement accusé par sod fils,
qui rapporte qu'il est rentré b midi et demie, par
une fenêtre de derrière chez lui: qu'il avait avec
lui de la viande de porc, qu'il était ensanglanté.
Cette accusation de l'enfant Kestelyn contre son
père sera un des points fondamentaux de l'accusa
tion, comme celle de l'enfant Vermeersch ajou
tons pour résumer impartialement l'acte d'accosa-
tion qu'elle est plus ou moins en contradiction avec
la présence d'un des deux autres accusés du même
crime, Lahousse, b la ferme de sou maître b onze
heures et demie ce maître, demeure b une distance
d'une demi heure.
Charles Kestelyn, Evariste Vandersype, Pierre
Desot, Jean-Baptiste Lepoutre et Marie-Thérèse
Degryse, femme de Charles Vandersype, sont
accusés de l'assassinat commis b Staden, pendant la
nuit du 5 au 6 mars 1863.
La victime était uu vieux fermier, répoté riche
et avare. Il se nommait Assez, et vivait seul avec
une servante. Les assassins pénétrèrent chez lui par
une brèche faite dans la toiture. Assez, éveillé par
le bruit, était levé quand les bandits firent irrup
tion dans sa chambre. Il eut la tête broyée, et sa
servante fat frappée dans son lit, avec une grosse
pièce de bois. Elle implora merci, fut abandonnée
un instant et parvint b s'échapper par la fenêtre.
Dans cette affaire comme dans la précédente,
c'est encore un enfant, Vandersype, qoi, dénonçant
sa mère, détermina l'arrestation des accusés.