La femme vivait encore. Si elle avait pu parler, elle ne m'aurait pas dénoncé. J'ai vu le fils Barroo qui la lavait. Rentré chez moi, je me suis félicité de n'être pas sorti du matin. Ma voisine m'a donné son attestation. Hier j'ai entendu lire le contraire. C'est faux, et mes oreilles ont entendu d'autres mensonges. La vérité se fera jour. On a dit que j'étais abasourdi. Ce n'est point. L'après-midi, je suis allé la Patente boire deux verres de bierre. M. le président a Kestelyn. D. Quelle e'iail votre opiuion an sujet de voi? R. Je ue l'ai jamais dit personne. D. Vous avez fait naître des soupçons sur Sa lomé? R. Non, c'est un mensonge. D. Nous verroos cela plus tard. R. Faut-il parler de la trouvaille du pistolet D. Certainement. R. Ma femme l'a vu enfoncé a demi dans la glace. Elle a cru d'abord que c était la cassette d'une petite. Elle a brisé la glace et elle a enlevé le pistolet. Eu rentrant le samedi soir, mon fils m'a dit que sa mère avait trouvé un pis tolet. A»ant de m'occuper de toutaotre cbose, mon premier mot a élé de dire que je l'apporterais le lendemain au bourgmestre. C'est ce que j'ai fait, après la messe. Le lundi, les gendarmes sont revenus chez tnoi. Le chef a examiné mes habits, mes souliers, a retourné toute la maison, puis est parti sans riea dire. Le mardi, ils sont revenus et m'ont arrêté. Deux m'out conduit Ypres; trois autres, accompagnés du garde champêtre, ont été visiter ma maison de fond en comble. 11 n'y ont trouvé que la misère. D. Commeut pouviez-vous boire de la bière et du genièvre? R. J'en buvais quand je gagnais un pourboire. D. Cependant vous exigiez de votre femme un franc tous les dimanches. R. Ce n'est pas vrai. Je u'avais pas un liard de mou salaire. Tout ren trait au ménage. Je suis donc allé chez le juge d'instruction qui m'a relâché. D. Vous étiez témoin? R. Non, accusé. M" Maertens. Il était accusé et incarcéré. M. le président. L'instruction alors se dirigea sur deux mendiants soupçonnés. Kestelyn. J'ai élé confronté avec eux. Mainte nant je demanderai si l'on a bien agi avec moi, de «l'arrêter pour me relâcher ensuite. D. Avez-vous fini de donner l'emploi de votre temps? R. Vous ne me croyez donc pas? D. Noo, certainement; vous forgez des histoires. Que direz-vous en répouse aux effrayantes révéla tions de votre iunoceut enfant? Edouard a été en voyé par vous la messe. Il vous a vu sortir par une issue dérobée, afin d'échapper aux regards des voisins. Messieurs les jurés, examinez s'il vous plaît le plan de la demeure de Kestelyn. Elle est englobée dans un pâté de quatre maisons. Vous avez tourné l'angle d'où mur sans fenêtre? R. Et la maison de Bossaert qui est douze pas de là, pou- tais-je l'échapper M. le président. Certainement, vous alliez de l'autre câté. M° Coppielers. C'est par là cependant qu'il faut passer pour se rendre chez Salomé. L'accusé (s'exptimant avec de grands gestes et une grande assurance.) Noos éclaicirons tout cela. M. le président. Votre fils Edouard affirme que vous êtes sorti par la fenêtre de derrière et rentré par le même chemin, portant un paquet contenant de la viande de porc. Vous étiez ensanglanté L'accusé. Est-il possible! D. Qu'avez-vous mangé ce jour-là? R. Sur mon âme et conscience, j'ai bu du café et maDgé des tartines, ou bien des pommes de terre. D. Vous n'aviez pas de pommes de terre la maison. R. J'en avais. Mon fils n'a presque rien eu, parce qu'il est rentré tard de la messe. Edouard est un menteur. Il me disait que chaque fois que Henri Carton venait la maison, il loi donnait un sou. Cela me donnait réfléchir. Je sortais de prison. Ce son, pour faire sortir mon enfant, me donnait penser. J'ai su que cela n'était pas vrai. J'ai battu Edouard. D. Mais votre autre fils a déclaré qu'il avait eu de la viande discrétioo? R. C'était du veau mort-né donné par le fermier. M. l'avocat général. Voilà du nouveau. M' Maertens. Du tout, il s'agit d'un autre dimanche. Toutes les révélations u'ont pas été faites eo même temps. M. l'avocat général. Edouard a parlé le lende main du crime. M. le président. Edouard a dit qu'il avait été battu pour avoir mangé de la saucisse sur la rue R. Comment pouvez vous croire cela Ou a fait dire Edouard ce qu'on a voulu. D. Mais que direz vous de la déclaration de la petite Veriueersch? R. Rien, si ce n'est que la révélation a éié faite Barroo, le premier soup çonné. D. Il n'a jamais été soupçonné. R. Je sais bieu que si, moi. Il a été appelé devant le juge d'instruction. Les défenseurs de C accusé affirment le fait. D. Emérence Vermeetsch a déclaré que l'on avait volé de l'argent avant que l'on eût coostalé la disparition d'une somme d'argeot chez Salomé. R. Quand elle a dit cela, j'étais arrêté. D. Non. Le meurtte deStaden n'avait pas encore eu lieu. Eméience a parlé le 10 décembre. R. Alors, pourquoi a t- on tardé ru'arrêter D. On instruisait. M. l'avocat général répète la révélation d'Emérence au colporteur. L'accusé. L'enfant ne m'a pas désigné. M. l'avocat général. Non, pas alors. Emérence Veriueersch a parlé du vol d'argent avant qu'elle eût eu des relations avec Barroo. Le défenseur. Elle a répété ce que l'on disait dans le public. M. le président. C'est de la plaidoirie, cela. Plus d'interruption. (A l'accusé.) Vous avez donc donné, selon vous, l'emploi de votre temps pendant la matioée du meurtre. Malheureusement il existe contre vous un témoin, le sieur Pioette. Que direz- vous de votre entretien avec lui? Ecoutez un peu. D. Ecoutez d'abord ce que vous disiez Pinette. Vous lui avez avoué que vous êtes parti dans la matinée du meurtre, et vous vous êtes félicité de n'avoir pas passé alors devant la demeure de Salomé? R. Je le nie. D. Malheureusement encore pour vous, vous avez parlé devant d'autres témoins. Ceux-ci vous ont vu causer avec Pinette. Us étaieot éloignés et n'ont rien entendu; mais Pinette leur a rapporté toute la conversation. Vous n'aviez pas voulu m'indiquer ces témoins. Je les ai découverts. R. Je lésai nommés moi-même. D. Noo, non. Ce serait coosigné au procès- verbal. M' Coppielers. L'accusé voos a dit que les témoins étaient portée de l'entendre pendant qu'il causait avec Pinette. M. le président. Vous plaiderez cela. (A l'ac cusé.) N'est-il pas étrange que vous trouviez le pistolet, taudis que vous êtes accusé d'avoir volé le pistolet. R. Celui qui a trouvé les habille ments est aussi un homme. D. C'est très-simple. Les effets ont été trouvés d'abord. Cela vous a donné l'éveil. R. S'il eo est ainsi, je n'ai plus rien dite. Je n'ai qu'à retourner ma place. Je ne parlerai plus. (Il s'en va. Le gendarme le ramène.) D. Vous devier avoir le pistolet et voos avez cru bieu faire en le restituant. N'étiez-vous pas le capi taine? R. Cela est facile dire. Je ne suis capi taine d'aucune bande. M' Maertens. Cette qualification donnée au prisonnier par un gardien de la prison est une indignité. M. l'avocat général. Qae parle-t-on d'in dignité propos d'une qualification que l'accusé s'est donnée lui-même M' Maertens. Il n'y a pas de capitaine, parce qu'il n'y a pas de bande. M. le président. Je n'entends plus être inter rompu. (Un débat s'engage entre l'accusé et M, l'avocat géuéral. L'accusé prétend que M. l'avocat général lui a déclaré que Lahousse l'accusait M, l'avocat général nie qu'il ait produit cette assertion. Il dit que c'est Kestelyn, au cootraire, qui soup çonnait Lahousse de l'accuser. Celui-ci nourrissait contre lui des pensées de vengeance propos de relations que Kestelyn aurait eues avec la femme de Lahousse.) M. le président. Pourquoi le pistolet a-t-il été chargé? R. Je n'en sais rien. Ce n'est pas moi qui l'ai caché. Ce n'est pas ma femme non plus. Nous l'aurions, non pas mis sur la glace, mais jeté dessous. Tout retombe sur ma tête; ce n'est pas assez de me charger de trente-six vols. Je ne répondrai plus. (Se frappant la poitrine.) Je suis innocent; mais il m'importe peu de mourir. Je porterai sans regret ma tête sur la guillotine. Je mourrai avec tant de plaisir Vous voyez bien que je n'ai pas peur. Ma conscience me rend bon té moignage. Après ma mort, moi, martyr, j'irai en paradis. (On rit.) Riez, cela m'est bien égal. M. le président. Je défends toute manifestation sous peine d'expulsion. M. l'avocat général. Kestelyo, voos déclarez être rentré chez vous le dimanche neuf heures trois quarts et avoir travaillé jusqu'au quart avaot midi. Etes-vous sorti ensuite? -- R. Non, j'ai maogé d'abord. D. Vous vous êtes promené ensuite R. Oui. D. Vous avez élé chez Salomé, vous avez vu les victimes? -- R. Oui. D. Avec qui avez-vous causé ensuite? R, Avec un ouvrier dont j'ai oublié le nom, Rosalie Perts, Virginie Hogaerts et Marie Nottebaers. D. N'avez-vous pas dit alors que vous étiez heureux de n'être pas sorti le matin R. Si. D. Vous avez déclaré qu'après le meurtre vous aviez mangé du veau mort-né? R. Oui. D. Qui vous l'a donné? R. Koen, mon maître, etsa femme. M. le président. Vous avez dit que vous étiez allé confesse et que le prêtre, en prison, voos a défendu de faire des aveux? -- R. Je n'ai pas été confesse. Cela nous est défendu. Je ne puis faire mes Pâques. Mais voici la vérité. Je mourais de faim. On m'a promis de me donner manger si je parlais. J'ai demandé au confesseur si je pouvais tn'nccuser n'étant pas coupable. L'aumônier a dit non, et sur son ordre, j'ai persisté nier. M. I avocat général. Vous mouriez de fait». N'aviez-vous pas le régime de la prison R. Si, mais j'avais été nourri une table abondante chez mon paysan. D. Et chez vous, d'après votre déclaration, vous n'aviez que des pommes de terre. R. Je ne mangeais chez moi que le dimanche. M. le président. Allez votre place. -- Faites rentrer la femme Kestelyn. M. le président. Femme Kestelyn, racontez ce qui s'est passé le dimanche 8 décembre. R. Mon mari est revenu de la messe vers neuf heures; nous avons dîné midi. Vers deux heures, mon mari est sorti, il est rentré trois heures. Il oousa dit que la femme Salomé avait été assassinée, et rien de plus. D. N'avez-vous pas mangé de la viande ce jour- là R. Non, tuais du café. D. Et des pommes de terre? R. Je n'en avais pas. D. Vous entendez, Kestelyn. Vous avez cepen dant prétendu que vous n'aviez pas de pommes de terre. Kestelyn. Des pommes de terre, cela n'est pas de la viande. D'ailleurs, monsieur le président, que répondrez-voos si l'on vous demande ce que vous avez mangé il y a quatre mois (Sur l'interpellation de M. le président, la femme Kestelyn raconte l'incident de la trouvaille du pistolet de la même manière que la racontée son mari.) D. Quelle était l'épaisseur de la glace daos la quelle était engagé le pistolet R. Je ne saurais le dire. J ai donné deux forts coups de sabot pour briser la glace. D. Où était votre autre pied. Sur !a terre? R. J'avais les deux pieds sur la glace.

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Le Propagateur (1818-1871) | 1863 | | pagina 2