ÉTAT-CIVIL D'YPRES,
moi expliquer cela. Il était présent
toutes les visites; tout a été retourné.
Comment se fait il qu'alors la tache de
saDg n'ait pas été trouvée?
Keslelyn. Cette nouvelle charge est un
scandale. S'il y a sang sur ce linge, c'est
qu'on l'y a mis depuis mon arrestation. Si
je me défends, c'est pour deux causes:
pour mes enfants et pour ma justification,
mais non pour ma vie. Mon plus vif désir
est de mourir.
D. Je ferai remarquer MM. les jurés
que les experts ont déclaré que les taches
ne provenaient pas de sang humain, mais
bien d'une matière fécale ne résistant pas
au lavage.
M. le juge d'instruction est rappelé.
D. Que vous a déclaré Mélanie Cleen-
werk, le témoin qui n'a pu se rendre
l'audience? R Elle a déclaré que la
femme Vermeersch a changé de couleur
quand elle lui demanda s'il était vrai que
les gendarmes avaient inspecté les vêle
ments de son mari dans le paquet lessive.
Le témoin Rosalie Leleu est rappelé.
M' Soenens. Le témoin doit se rappeler
qu'après la conversation qui a eu lieu chez
elle, au sujet du meurtre, la femme Doize
est retournée chez elle pour acheter du
beurre? R. Non. Quand je lui ai dit que
les gendarmes avaient inspecté le pantalon
de son marielle rougit au point que les
larmes lui sortirent des yeux. Elle sortit
sans rien acheter. Elle n'a plus mis le pied
chez moi Un autre jour qu'accompagnée
de son mari, elle passait devant ma porte,
elle détourna la tête avec confusion.
71* témoin, Pierre Snoeck25 ans,
ouvrier agricole Ardoye.
Le jour du crime, vers onze heures et
demie, revenant de Poperinghe, je rencon-
irai Keslelyn un paquet sous le bras. Il
suivait la direction qui conduit de la ferme
de Salomé vers sa demeure.
D. Keslelyn vous parla? R. Il me re
procha de n'être point entré dans un ser
vice qu'il m'avait indiqué précédemment
et me menaça. Je m'enfuis.
D. Avait-il un bâton? R. Non.
D. Le paquet qu'il portait était apparent?
R. Non, caché sous sa blouse.
L'accusé Keslelyn. Il prétend m'avoir vu
avant midi? R. Oui.
Keslelyn. Alors vous êtes un menteur.
72' témoin, Sophie Hoeyaert50 ans,
femme Mononcourt, couturière Vlamer-
tinghe.
Vers la fin de septembre de l'année der
nière, je fis deux camisoles pour le petit
Keslelyn. Dans l'étoffe il y avait une tache
noirâtre. On distinguait l'empreinte de
quatre doigts. C'est la main de mon père,
s'ecria le petit. Mauvais garnement, re
prit la mère, ne dites pas de mensonges
ou vous recevrez trois ou quatre claques.
Je ne me tairai pas, parce que je dis la
vérité, reprit l'enfant.
D. Qu'en dites vous, Kestelyn? R.
(Avec humeur.) Rien du tout. Je neparlerai
plus.
M. Detcourjuré. Est-ce que les taches
couvraient toute l'étoffe? R. Non, un
coin seulement. Une partie de la tache est
tombée dans la manche; le reste a disparu
dans les rognures.
D. Est-ce que l'étoffe avait été lavée
avant la livraison? - r. C'était visible.
Lenfant déclarait d'ailleurs que la mère
avait lavé la taie aussitôt après que son
pere l'eut tachée.
M* Maertens. Je demande que le témoin
Snoeck soit rappelé.
D. Quand avez-vous parlé pour la pre-
mièrefoisde votre rencontre avecKestelyn,
le 8 décembre 1861? R- Hier, au maré-
chal-des logis.
.Ve Maertens. Un article du Code d'in
struction criminelle, 516, permet au prési
dent de prendre des dispositions pour
empêcher les conversations, les rapports
entre témoins.
M. l'avocat général. Nous n'avons pas
158 places différentes.
M' Maertens. On pourrait les séparer
par catégories. Voici d'ailleurs l'article
516:
Le président prendra des disposi
tions, s'il en est besoin, pour empêcher les
témoins de conférer entre eux du délit et
de l'accusé avant leur déposition.
75' témoin, Charles Goubé, 50 ans, gar
dien de prison Ypres. Keslelyn me
demanda s'il était vrai que Lahousse et
Vermeersch avaiel avoué. Je répondis que
c'était certain. Ces N... d... D... de lâches,
dit-il. Faut il avoir été soldat pour reculer
ainsi, leurs têtes rouleiont leurs pieds
avant la mienne; c'est la femme de l'un
d'eux qui a caché le pistolet, c'est la femme
Vermeersch qui a fait le guet. Un autre
jour, il demanda des détails sur une exécu
tion, disant qu'il n'espérait plus conserver
sa vie. Il me dit aussi que Desot, malgré
toutes ses révélations, ne pourrait jamais
espérer une commutation de peine.
Keslelyn. Cela n'est pas. Un jour il me dit
que Vermeersch et Lahousse m'accusaient
d'avoir disparu après le meurtre avec
l'argent, sans vouloir le partager avec mes
complices. Il m'a donné du pain et du
tabac tous les jours pendant six mois,
pour me faire taire et pour le laisser
mentir l'audience.
M. le président. Kestelyn, je vous engage
dans votre propre intérêt vous conduire
avec plus de décence. (A. Desot.) Vous
avez avoué, dans le principe, que vous
étiez complice du crime de Keninghelst.
Pourquoi, depuis lors, avez-vous retiré vos
aveux? R. J'ai avoué, non parce que
c'était vrai, mais pour être délivré de la
torture du secret.
J7. le chef du jury. Je désirerais que le
témoin Coubé recommençât sa déposition.
Goubé, qui parle avec une volubilité
peu intelligible, recommence sa déposition.
11 ajoute
Kestelyn m'a dit qu'il était curieux de
savoir qui prétendait l'avoir vu rentrer
par sa fenêtre. C'est Desot, ajouta-t-il, qui
est entré le premier chez Salomé. Je l'ai
forcé coups de bâton. On me reconnaît
pour capitaine. Commecapilaine,je périrai.
Si je meurs seuls, jeserai exécuté Bruges.
Alors, profitant du privilège accordé aux
condamnés, je demanderai une bouteille
de vin et ce sera pour vous. Si nous
sommes exécutés plusieurs, l'affaire se
passera Bruges, parce qu'il n'y a pas
assez de soldats Ypres pour faire le
service de l'échafaud.
Kestelyn. Demandez lui quel jour j'ai été
Poperinghe? R. Je n'en sais rien. A
propos de Poperinghe, il m'a dit qu'en y
allant il a rencontré une des femmes près
du puits où le pistolet a été censément
trouvé.
M. l'avocat général. Vous avez donné du
pain l'accusé? R. Oui.
D. Pourquoi? R. 11 se plaignait de la
faim et, sur l'ordre formel du directeur, je
lui donnais de jour autre des rations
supplémentaires.
74' témoin, Benjamin Mosco, 50 ans,
commis-voyageur Lille. J'étais gendarme,
le 11 décembre, Je fus chargé d'escorter
les accusés Bruges. Au moment du
départ, la foule voyant Kesldyn, s'écria
a Voilà le capitaine. Kestelyn sourit la
foule et porta la main au cou, faisant
le geste de le trancher. Croyez vous, lui
demnndai-je, que vous serez condamné
mort? Oui, nie dit il, parce que celui-là,
avec sa longue barbe (désignant Lahousse)
m'accuse d'avoir fait le guetparce que je
n'ai pas voulu lui donner sa part de l'ar
gent volé dont j'étais porteur. En
arrivant Bruges, son bonnet tomba. Il
s'écria: Comment! est-ce que ma tête
serait déjà abattue?
Kestelyn. reconnaît avoir dit en plaisan
tant ce que rapporte l'ex gendarme.
D. Lahousse, serait-il vrai que vous
n'avez pas reçu votre part de Kestelyn?
R. Je ne connais pas cet homme. Je ne
sais ce qu'il veut dire.
75* témoin, Anne Verpiele, 59 ans, fem
me Lagie,Vlamertinghe. J'ai vu partir
Lucie Doize quand elle s'est rendue chez
Monkerhey pour acheter du lait. C'était
l'heure de la grand'messe. Je ne l'ai pas vu
revenir. Cejour-là jen'ai pas vu Vermeersch
et Lahousse, que je remarquais tous les
dimanches.
M. le chef du jury. Où est située la
demeure de cette femme? R. Près de
Jean Barroo, entre deux bouquets de bois.
D. Ainsi vous remarquiez tous les di
manches Vermeersch et Lahousse? R.
Oui, ils passaient en sifflant. C'est pourquoi
je fus surprise de ne pas les voir. Mon
mari qui j'en parlai, me dit qu'il avait vu
Vermeersch dans le bois, se rendant chez
ses parents.
D. Où était Lucie Doize quand vous
l'avez vue? R. Dans le bois de Kuoc-
kaert.
D. Vous avez eu plusieurs conversations
avec la femme Salomé peu de temps avant
le meurtre. R. Un an avant le meurtre,
elle me dit qu'elle était poursuivie et que
même, pendant la messe Vlamertinghe,
on avait coupé un fragment de son man
teau. Il est vrai de dire que, depuis la mort
de ses enfants, elle battait souvent la cam
pagne. J'appris plus tard que la prétendue
coupure était simplement un défaut dans
l'étoffe.
(l'audience continue.)
DU 4 AVRIL AU 10 INCLUS.
Naissances 13. Sexe masc. 7, idem fe'm. 5.
Un mort-né du sexe masculin.
Mariages. Ommeslag, Louis, journalier, et
Swingedouw, Barbe, dentellière. Vanaerde,
Auguste, dentiste, et Aerts, Rosalie, tailleuse.
décès. Deckmyn, Rosalie, 48 aus, jour
nalière, épouse de Pierre Verscboore, rue des
Riches Claires. Vereenooghe, Jacques, 85 ans,
journalier, époux de Barbe Derycke, rue de Menin.
Vaudaele, Jacques, 78 ans, journalier, veuf
d'Amélie Liefoogbe, rue de Menin. Breyoe,
Pierre, 66 ans, vacher, veuf de Colette Vanysakker,
rue des Aumôniers. Deturck, Eugène, 3i aDs,
journalier, célibataire, rue de Menin. Careyn,
Cathérine, 70 ans, journalière, épouse de Pierre
Grave, rue de Menin. Vandaele, Godeliève, 49
ans, dentellière, célibataire, rue de Menin.
Warlop, Pierre, 73 ans, journalier, époux de
Marie Duroez, rue dite Bellewaertstraet. Dume-
lie, Marie, 85 ans, sans profession, célibataire, rue
de l'Hôpital-S'-Jean. Van Beylen, Marie, 36
ans, dentellière, célibataire, rue de Menin.
Enfants au-dessous de 7 ans 5. - Sexé
mas. i, sexe fém. 3.