D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
49me Année.
Samedi 26 Mai 1866.
N° 5,076.
REVUE POLITIQUE.
L'opinion qui "domine en ce moment
Paris est qu'on parviendra réunir le
congrès, mais qu'on ne parviendra pas
s'entendre.
Le Pays émet cette opinion Dans le
cas où la conférence serait refusée par une
seule des trois puissances en lutte, la
phase des négociations aclaelles serait
forcément close sans que pour cela cepen
dant la diplomatie cessât d'agir en vue de
la paix.
Il faut attendre; mais les événements
de la Roumanie ne vont ils pas, jeter un
sujet de très grave complication de plus
dans celte situation où chaque pas que l'on
fait coule déjà tant d'efforts
On nous annonce de Paris que dix zoua
ves libérés de tout service en France ont
demandé prendre du service en Italie,
que les frais et de leur voyage de France
en Italie 6ont payés par le ministre de la
guerre.
Les nouvelles de la journée nous per
mettent d'établir encore une fois un comp
te de compensation entre les chances de
paix et les chances de guerre.
A l'avoir de la paix, mettons le congrès
qui devient probable. Il est plus probable
aujourd'hui qu'il n'était hier. Parmi les
autorités qui l'affirment se place la France
journal que dirige M. de Lagueronnière.
Il est vrai que ta France se trompe pres
que tous les jours, soit! mais le bon sens
nous dit que si l'on se fait des concessions
dans la rédaction du programme qui doit
servir de pièce d'introduction, on pourrait
bien par ce moyen finir par obtenir l'ad
hésion des trois Etats principalement
engagés.
LE PETIT BUCHERON.
A l'avoir de la paix encore nous portons
le temps que l'on gagne et; que la réflexion
ou que des incidents éclatant l'impro-
visle peuvent favoriser. M. de Bismark,
par exemple. |»eut tomber, et avec lui sa
politique audacieuse, sous la disgrâce de
son souverain.
Et au passif, c'est-à-dire l'avoir de la
guerre, qu'avons-nous? un avertissement
nous arrive de Paris; il est conçu en ter
mes courts mais substantiels M. Drouyn
de Lbuys se décourage.
Or, voici ce qui nous apparaît M.
Drouyn de Lbuys voit le congrès venir,
mais sans espérance d'en retirer le moin
dre fruit.
Ce ministre peut se rappeler aussi les
efforts qu'il fit en 1858 pour empêcher la
rupture qui allait éclater entre la France
et l'Autriche; il voulait la paix, il la veut
encore aujourd'hui. Est-ce que ses espé
rances lui diminueraient au moment où
celles du public semblent renaitre
Si maintenant nous interrogeons l'Alle
magne, que répond-elle? La réponse est
complexe; elle est différente suivant les
lieux d'où elle nous vient; mais, en som
me, nous ne voyons pas que les armements
perdent sur aucun point de leur activité.
Le roi de Wurtemberg ouvre t-il ses
états? il leur annonce la mobilisation de
8onarraéetoutenaffirmant qu'il veutlapaix.
Le roi de Saxe, comme le roi de Wur
temberg veut la paix, car il n'est pas em
porté par la pensée de conquérir la Prusse;
mais il se prépare repousser vigoureuse
ment tous les spoliateurs ou conquérants,
qui convoitent son petit Etat qu'il admi
nistre pourtant merveille.
La Prusse est le seul pays où l'on ait
blâmé la Saxe.
A Vienne, l'on dit que ce n'est pas le
congrès qui terminera la querelle alleman
de, mais une entente directeentrela Prusse
et l'Autriche. Comment obtenir cet accord,
lorsque deux armées de 500 mille hommes
chacune s'interposent entre lès négocia
teurs, avec des canons tout attelés et des
carabines chargées. Essayez donc en pré
sence de pareils témoins de faire des tran
sactions.
De Berlin les nouvelles soDt plus belli
queuses encore. Les membres de la famille
royale, les princesses même, partent pour
le quartier général de l'armée de Silésie.
On fait des ordres du jour et bientôt l'on
fera des manifestes; c'est ce que l'on dit
Berlinquoiqu'on se tienne prêt sous
crire la réunion du congrès.
Une dépêche particulière de Paris an
nonce l'acceptation du congrès par l'Au
triche. D'autre part, on mande de Londres
que l'envoi simultané des invitations offi
cielles par les trois puissances neutres a
eu lieu.
Le Sénat a adopté avant hier, l'unani
mité des voix ou une grande majorité,
les projets de loi allouant des crédits spé
ciaux ou extraordinaires pour l'érection
d'un monument au roi Léopold I", les
funérailles de ce souverain, le recensement
Sénéral du 51 décembre 1866, la création
e quatre nouvelles écoles normales et
l'acceptation du musée Wiertz, ainsi que
le projet de loi approuvant l'acte d'acces
sion du duché de Saxe-Cobourg Gotha
la convention conclue entre la Belgique et
le royaume de Saxe pour la garantie réci
proque de la propriété des œuvres d'art et
d'esprit et des dessins et marques de fa
brique.
PROPAGATEUR
FOI CATHOLIQUE. -- CONSTITUTION BELGE.
Suite. Voir notre numéro de mercredi dernier,
V.
LA CHAFBLLB DE LA MADONE.
«Mon Dieu!., mon Dieu!., dit Antonio aussi
tôt qu'il put parler penseragir ce jeune
homme a-l il raison, et tne faut-il retourner b
Correggio me faut-il n'être toute ma »ie qu'au
misérable bûcheroo I.. Ob mon Dieuque
faire?...
Disant ces mots, il leva les yeux an ciel comme
pour l'implorer, mais la eue du ciel lui était ôtée
par uu grand bâtiment qui s'élevait devant loi
c'était l'église de Saiote-Margueiite. Le son des
cloches appelait les fidèles b l'office divin machi
nalement Antonio se joignit au peuple qui eotrait,
et s'avança dans le lieu saint avec cette crainte
pénible que causent l'isolement et la misère. Il
voyait des eufauts de sou âge s'agenouiller b côté
de leur père, de leur mère, de leur bonne il
voyait leur pète, leur mère, leur bonne faire atten
tion b enx, remarquer l'eodroit où ils allaient poser
leurs geuonx, et les envelopper de leurs regards, de
leurs soins, les empêcher d'être froissés, ou même
de froisser... et lui était seul seul... il aurait pu
être écrasé sur le pavé de l'église, sans qu'aucune
âme se fut inquiétée de loi, sans qu'une voix dou
cement grondeuse loi eût dit Prends donc
garde sans qu'une main peut-être se fût abais
sée sur soo corps pour le relever la seule main
qui se teodit vers lui b son entrée dans l'église,
fut celle du donneur d'eau béoite, il remercia
presque cet homme d'une action qu'il faisait
indistinctement et machinalement pour tous. Uo
autre tourment vint bientôt se joindre au décou
ragement qui depuis le renvoi de l'atelier s'était
emparé de lui; si vous vous rappelés qu'Aulonio
était parti de Correggio avaot le jour, qu'il avait
fait deux lieues b pied, qu'il était midi, que de plus,
par uo sentiment de fierté sévère, il avait refusé
la veille au soir le paio que sa mère loi offrait, et
que depuis, il n'avait rien mangé, rien, vous aurez
une idée de la faim que ce pauvre enfant devait
resseotir.
Hélas, cette faim, il l'éprouvait et il la sentait,
et toutefois la cooscieuce de son abandon le tour
mentait bien davantage... Cette demande horrible
qu'il s'adressait et b laquelle il ne pouvait rien
répondre. Que vais je faire?., où aller?., que
devenir? lui ôlail jusqu'à la pensée que la sonf-
fraoce aiguë qu'il ressemait était celle de la faire
Quelqu'un qui lui aurait demandé: Qu'as-tu?
n'aurait pas reçu cette répoose J'ai faim, mais
bien celle-ci Je suis seul au monde. Un moment
il eut la pensée, et il fallait que l'abattement fût
bien fort pour que cette pensée lui vint, il eut la
pensée, dis-je, de retourner b Correggio; mais
outre cette uoble fierté qui l'empêchait d'aller se
remettre b la charge de soo père, ces paroles de ce
dernier, Il ne gagne pas seulement le pain qu'il
mange, lui ôlait même cette dernière pensée.
Au milieu de ces pensées qui se croisaient et
faisaient bouillonner soo cerveau, le son de l'orgue
se fit eotendre, et cette musique large, suave, porta
comme do baume daus l'âme d'Aotonio, la rafraî
chit, et loi jeta au cœur uo espoir consolant
quand on est enfant, les seosatioos sont si mobiles,
qu'un rien vous affecte, vous accable, qu'on rien
vous ranime.
Prions Dien, se dit Aotonio, il m'inspirera ce
que je dois faire, et levant les yeux pour chercher
une chapelle qui oe fût pas encombrée de ooode,
où il pût prier et pleurer aussi eo paix... il eu vit
une b sa droite, au milieu de laquelle sur un autel
de aurbre blanc, s'élevait une statue de la Madooe.