D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
50me Année.
Samedi 6 Octobre 1866.
No 5,114.
REVUE POLITIQUE.
Nous nous demandions, l'occasion du
rapport du général Cadorna sur les trou
bles de la Sicile, quand cesseraient ces
accusations, sans cesse renouvelées, cette
guerre incessantedirigées contre les ca
tholiques, mais surtout contre leur auguste
Pontife, le vénérable Pie IX? L'archevêque
catholique de Westminster a le pressenti
ment que nous sommes la veille d'une
crise nouvelle que peut faire éclater la
"convention du 15 septembre. Il vient de
prescrire des prières toute l'Eglise catho»
iique d'Angleterre; il le fait d'accord avec
le clergé d'Irlande qui, de son côte', prescrit
des prières dans le même sens aux fidèles
et dévoués Irlandais.
La lutte électorale, en Hollande, paraît
destinée prendre des proportions que ce
pays ne connaissait plus depuis longtemps.
On annonce que le Roi a le projet de
s'adresser aux électeurs directement dans
un manifeste dont la publication serait
très-prochaine.
L'Autriche ne se montre pas disposée
dissimuler ce que vont être ses tendances
politiques. En nommant le comte Golu-
chowskien Gallicie elle s'éloigne de la
Russie. Si, comme on l'assure, l'empereur
François-Joseph nommait M. de Beust mi
nistre des affaires étrangères, elle ne se rap
procherait pas delà Prusse. M. de Beust est
un ennemi personnel du comte de Bismark.
Patience! Patience! nous comprendrons
peut-être un jour l'empereur Napoléon;
quant présent, il faut se contenter d'ad
mirer l'art profond avec lequel il dérobe
sa pensée aux yeux non pas du vulgaire,
mais des plus sagaces observateurs.
Beaucoup d'incidents en Allemagne qui
SÉBASTIEN GONIEZ
ou
ont leur valeur; une insurrection triom
phante. ensuite étonffée, celle de Palerme;
une autre insurrection militante,maissous
les pas de laquelle la diplomatie cherche
semer des embûches pour la faire avorter,
c'est Lien celle de Candie; un vaste mouve
ment réformiste qui agite toute l'Angle
terre; enfin le voyage du président Johnson
rentrant chez lui Washington, après un
voyage fécond en scènes de tout genre,
telles que l'Amérique seule peut en mon
trer et en supporter; voilà dans son ensem
ble, l'œuvre de cette première semaine
d'octobre. Comme on le voit, il s'agit d'un
contingent considérable; mais on ne doit
pas oublier que nous traversons une année
où les événements les plus inattendus et
les plus foudroyants semblent se déchaîner
pour confondre les prévisions des hommes
les plus clairvoyantsmais pour tromper
aussi les désirs les plus honnêtes et les
plus justes.
Une note prussienne vient d'arriver
Paris pour annoncer que le roi Guillaume
et son premier ministre sont très-satisfaits
de la manière de voir dtk gouvernement
français, de sa conduite au milieu des évé
nements; nous n'en sommes pas surpris.
Ce que la Prusse cherche obtenir de la
France, c'est le temps nécessaire pour
s'affermir dans les conquêtes qu'elle est
en train de réaliser tout annonce que ce
temps ne lui sera pas refusé, quoique,
dans ce moment même des correspondants
bien informés de Paris affirment qu'on
remarque beaucoup de tension dans les
rapports de la France avec la Prusse.
La Prusse ne paraît pas d'ailleurs s'é
mouvoir de cette circonstance; elle s'est
promis de réduire le royaume de Saxe
l'état de province prussienne. Tout annonce
qu'elle va y parvenir.
Dispositions générales. Les 12,15,14
et 15 Octobre, des salves seront tirées
alternativement par l'artillerie de la garde
civique et de l'armée.
Les musées royaux de peinture, d'ar
mures, d'histoire naturelle et d'industrie
seront ouverts au public pendant lesquatre
journées, ainsi que la musée Wiertz.
Tir national. Le tir national anra
lieu du 12 au 21 Octobre.
Trente-cinq cibles seront établies au
champ du tir. Elles seront placées pour
l'infanterie, l'artillerie et la cavalerie de
la garde-civique la distance de 100 mè
tres, et pour les cbasseurs-éclairenrs et
chasseurs-carabiniers, les armes de guerre
et les arquebusiers et carabiniers 225
mètres.
Une cible sera réservée pour le tir
grande distance offert aux tireurs étran
gers.
Exposition des beaux-arts. Les salons
de l'exposition générale des beaux-arts
seront ouverts gratuitement au public
pendant les quatre journées.
Représentations dramatiques. Des
représentations gratuites en langue fla
mande et française seront données du 15
au 15 Octobre.
Jeux populaires. Des jeux et exercices
populaires seront organisés pendant les
quatre journées, sous la direction de l'ad
ministration communale.
Dispositions spéciales. Vendredi 12
Octobre. A dix heures, cortège des
LE PROPAGATEUR
FOI CATHOLIQUE. -- CONSTITUTION BELGE.
LE MULATRE DE MCRILLO, -• LA TÈTE DE LA VIERGE.
L'ESCLAVE DÉLIVRÉ.
Suite. Voir notre numéro de mercredi dernier.
Cordova commença son explication
Selon les ordres qoe vous nous avez donnés,
seoor, personne ne quitte le cabinet de travail qu'il
n'ait mis tous ses objets en ordre, nettoyé ses palet
tes, lavé et séché ses pinceaux, arrangé ses cheva
lets et tourné sa toile sens dessus dessous. Eh bien
seoor Murillo, depuis un mois environ, c'est cer
tainement un mois, si ce n'est pas davantage, de-
pais un mois donc, chaque matin, en arrivant, l'on
trouve sa palette pleine de couleurs, un autre ses
pinceaux sales, et c'a et là sur les canevas l'un trou
ve achevé un bras qu'il avait seulement esquissé
la veille; un autre, l'aogle de son travail, trouve
le démon grinçant des dents cootre le peintre;
d'autres trouvent quelquefois des têtes d'anges
quelquefois on voit les traits d'un vieillard ou d'un
jenoe enfant, ou bieo, très-fréquemment la carica
ture de quelque personne qui est venue au cabinet
de travail la veille, comme vous pouvez voir par
le portrait du chanoine Istenby, que voilà sur la
toile de Saurez. Enfin, senor Murillo, je n'en fini
rais pas, si je voulais raconter toutes les actions
surnaturelles qui se passent chaque soir dans votre
cabioet de peinture.
Est-ce que Gaspard est somnambule? de
manda Villavicemio son maître.
Non; mais quand même il le serait, il D'est
pas croyable qu'il pût mieux travailler la nuit avec
les yeux fermés, que le jour avec les yeux ouverts.
Non, mes jeunes amis; celui qui a produit cette
tête est plus qu'un élève, plus qu'un imitateur.
C'est incorrect, c'est inachevé; néanmoins, le feu
sacré du génie est dans le pinceau. Qaoi qu'il en
soit, il est aisé de nous eo assurer. Sébastien
Ne pensez pas de rien savoir de Sébastien,
senor, dit Villavicemio; il n'eD sait pas pins que
nous; mais non je me trompe, il affirme positive
ment que c'est le lntin.
Nous verrons cela bientôt. Sébastien
Me voici, maître, dit ie petit mulâtre, qui
était accouru au premier appel.
Ne t'ai-je pas ordonné de dormir ici chaque
soir?
Oui, maître.
Et y dors-tu
Oui, maître.
Alors, dis-nons qui c'est qui vient la nuit
dans le cabinet de peinture, on le matin avant qoe
les élèves n'arivent. Qui? réponds-moi.
Personne, maître répliqua le jeuDe mulâtre
dans la plus grande frayeur, et dans sa confusion
arrachant le bonton de sa manche.
Personoe! Tn mens, canaille d'esclave, ta
XXXVI4 ANNIVERSAIRE DE L'INDÉPENDANCE
NATIÔNALE.
mens. N'as-io pas des yeux aussi bien qoe oous?
Et Murillo montrait du doigt la tête de la Vierge.
Personne autre que moi, maître je vous le
jure, dit Sébastien les mains jointes.
Maintenant, écoute, dit Murillo avec un
regard sévère. Je veux savoir qui a peiot cette tête
de la Madona, m'entends-tu aussi bien que tou
tes ces petites figures que ces messieurs trouvent
chaque matin sur leur canevas. Je t'asture que je
suis déterminé le savoir. Maintenant, écorne.
Ce soir, au lieu de dormir, tu veilleras, et si demain
tu n'as pas découvert le coupable, tu recèvras vingt
coups de fouet de la part de mon major domo,
qui ne bat pas l'air, comme tu dois le savoir par
expérience depuis si longtemps. Sooviens-toi de
ce que j'ai dit. Si tu as quelqoe chose dire, dis le,
parle, je t'en donne permission.
Je voulais seulement dire, maître, dit Sébas
tien les yeux pleins de larmes, qoe si toute chose
reste eu ordre ce soir, et qoe s'il n'y a plus rien
sur les canevas de ces messieurs....
C'est une antre chose au lieu de vingt coups
de fouet, tu en recevras trente. C'est assez; main
tenant, messieurs, au travail La leçon commença,
et pendant qu'elle dura, un profond silence fot
observé. Telle était la dévotion de son nom, qo'ii
ne pouvait souffrir qu'un mot profane fût prononcé
par les élèves en sa présence; et, par une parole
profane, le grand maître entendait une parole qor
n'avait pas rapport la peinture.