D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
51me Année. Samedi Ier Février 1868. flo 5,252.
La motion de MM. Coomans et Le Hardy
de Beaulien, relative a l'abolition de la
conscription, a donné lieu hier, la
Chambre des représentants, un débat
assez étendu sur la question de savoir si
celte proposition serait discutée immédia
tement ou si elle serait ajournée l'époque
où l'on examinera la réforme de la loi sur
la milice. Le ministère a réussi en faire
ajourner le vole. (i
M, Lambert a occupé la fin de la séance
par quelques critiques qu'il a;fonpplées
contre le projet, militaire présenté, par Je
gouvernement, tout en se déclarant cepen
dant partisan d'une sérieuse organisation
défensive.
--
LA SITUATION.
000.000,.I ilanmiintuM loiotY
Nous avons, celte même place», et
différentes reprises, exprimé le douloureux
étonnement, la pénible surprise que nous
causait la situation de l'Eurqpe, après seize
années d'un libre exercice par les gou
vernements, de leur puissance et de leur
volonté. Nous nous sommes demandé quel
était le mol de celte énigme redoutable,
comment il se faisait qu'après une si lon
gue période de liberté, sans nuage, sans
entraves, les gouvernements n'étaient ar
rivés qu'à jeter l'Europe dans uoe cruelle
inquiétude, qu'à la maintenir dans une
perpétuelle angoisse.
Le mot de celte énigme nous ne l'avons
pas trouvé, et le voile qui couvre ce mys
tère s'épaissit chaque jour davantage.
Les ténèbres se font dans les esprits et
dans la brume de l'intelligence troublée,
apparaissent, comme couronnement de
l'œuvre mystérieuse, les sinistres fantômes
de la misère et de la faim.
A cette apparition les plus forts se sont
reculés; l'horreur a figé leur sang, et en
entendant ces milliers de voix qui récla
maient du pain et du travail, les. puissants
se sont tu et ont cessé de demander des
armes.
Car, il faut bien le dire, ce besoin d'ar
mes était insatiable, il passait l'état de
monomanie, de monomanie dangereuse.
On craignaji de donner 600 FRANCS un
instituteur, celui qui donnait nos en
fants le pain de l'âme, et on dépense MILLE
FRANCS par an pour un soldat dont l'en
tretien relire le painducorpsau travailleur.
Les chiffres ont, dit-on, une grande élo
quence, une impitoyable logique, c'est vrai;
or en voici quelques uns qui sont éloquents
au suprême degré, et leur éloquence stu
péfie.
D'après une statistique toute récente, le
total des armées qui sont maintenues sur
pied par des puissanceseuropéenness'élève
de 7,600,000 soldats. Chaque soldat coûte
annuellement 1,000 fr. La dépense totale
par jour est de 20,000,000 de francs par
mois elle atteint Iecbiffrede600,000,000. et
par année le modeste total de 7,200,000,000
de francs
Si ce n'est pas là de la folie, Barême est
faux et nous n'y comprenons plus rien.
Mais c'est de la folie et de la mieux
constatée. Ce qui le prouve, c'est le résultat
que nous signalions au début de cet article,
c'est la misère, c'est la faim.
Nous voulons bien que des cisconstances
indépendantes de la volonté des gouverne
ments soient pour une part dans les mal
heurs qui désolent l'Europe;'mais si les
gouvernements, au lieu de tant travailler
pour la gloire avaient cherchédès l'ori
gine du mal, y porter remède, le fléau
serait inoins intense, lè nombre de ses Vic
times moins grand Ce n'est pas par cent
mille qu'on compterait les affamés et les
morts.
Où sont maintenant les ressources des
gouvernements pour venir en aide tant
de désolation
Nulle part.
De tous côtés, on parle d'emprunt?
Est-ce le denier du pain qu'on va deman
der aux citoyens?
Hélas! non.
Tous les gouvernements se déclarent
impuissants arrêter le double fléau. Et
cependant, ils demandent de l'argent, en
core de l'argent, et ils nous persuadent
que jamais ils n'ont eu si grand désir de
vivre en paix. ohunijnr
La Russie, l'Autriche, la France, la
Prusse, l'Angleterre, l'Italie, la Hongrie,
l'Egypte, l'Espagne, tous affirment et ju
rent que leur vœu le plus ardent, c'est de
voir enfin renaître l'âge d'or, et demandent
de l'argent.
Nous le redisons On a peur.
Cette peur instantanée, elle est unanime
C'est sincèrement qu'on a appelé la paix
son secours, au même instant.
Le premier moment passé, on a exploité
cette peur et la satisfaction générale que
ces mots Que la paix soit avec vous! a fait
éprouver tout le monde.
Aussi voyez Toutes les caisses des tré
sors publics s'ouvrent d'elles mêmes pour
recevoir les souscripteurs aux emprunts.
Mais qui désarme?
Personne.
Nous ne craignons pas de le dire, tant
qu'on ne désarmera pas, nous n'aurons
aucune confiance dans un avenir meilleur,
aucune foi dans les déclarations pacifiques
des gouvernements.
Si la guerre est un fléau la paix armée
en est un autre, plus terrible peut-être; car
elle énerve les âmes et les corps et finit
par abaisser les caractères par l'anxiété et
l'angoisse.
Telle est la destinée qui paraît réservée
l'Europe, alors que la science fait chaque
jour des progrès inouïs alors que les voies
de communication, ce puissant lien entre
les hommes, augmente tous les jours dans
les proportions gigantesques; alors que la
pensée a trouvé sa roule et s'échange en
quelques heures entre tous les points de
l'univers; alors, enfin, que ces gouverne
ments ont pu, pendant plus de seize ans,
sans rencontrer d'obstacle, sans que la
révolution ait nulle part levé la tête, mar
cher dans leur force et dans leur liberté.
Nous le répétons encore pour finir Qut I
est le mot de celle terrible énigme?
LE PROPAGATEUR
FOI CATHOLIQUE. -- CONSTITUTION BELCE.
REVUE POLITIQUE. ioi
La séance d'a»anl-hier an Corps législatif de
France a offert un vif intérêt. A no discours de
M. Tbiers, qoi a défendu la liberté de presse
comme la plas indispensable des libertés néces
saires M. Pinard a répondu sans contredire di
rectement les théories de l'émioent orateurmais
en soutenant que le projet du gouvernement fait
la presse toutes les concessions compatibles avec
l'ordre public. Rappelant les promesses contenues
dans la lettre impériale do ig janvier 1867, le
ministre de l'intérieur a revendiqué pour le pou
voir l'initiative des réformes libérales, qui doivent
être introduites graduellement, de manière
concilier, a-t-il dit le mouvement naturel vers
le progrès avec l'instinct de la conservation.
Des lettres de Civita- Veccbia mentionnées par
la Patrie foot prévoir le prochain rapj;j.iement
d'une seconde portion du corps expéditionnaire
français. Une seule divisiou, commandéè par le
géoéral Dumontresterait sur le territoire ponti
fical, où sa présence suffirait pour prévenir toute
nouvelle agression du côté <Je l'Italie.
Différents bruits circulent sur les intentions do
gouvernement italien. La France a parlé d un
coup d'Etal imminent; d'autres journaux d'une
dissolution de la Chambre. Celte dissolution est
possible, mais elle ne serait que le prologue d'un
acte ou d'une série d'actes bieo autrement graves.
Le premier de ces actes serait l'abdication de
Victor Emmaonçl en faveur du prince Humberl.
On ajoute que l'abdication do Roi et l'avènè-
roeot de son fils seraient accompagnés d'un reraa-
nieuienl, territorial que l'Italie du Sud l'ancien
royaume de Naples, formerait une monarchie dis
tincte, unie par le seul lien fédératif la monarchie
do Nord. Pressentant on soolèvement que les plus
modérés considèrent comme inévitable, de quelque
part qu'il vienne, le gouvernement de Florence
aurait résolu de faire tous ses efforts pour diriger
le mouvement et pour conserver au moins l'union
défaut de l'onité.
Des journaux allemands avaient révoqué en
doute l'authenticité de la réponse faite par le roi
Guillaume de Prusse la députatioo des catho
liques des provinces orientales du royaume. Le
Moniteur prussieo fait justice de ces dénégations
en publiant la réponse do souverain qoi est bieo
telle que les journaux catholiques l'ont rapportée.
Sa Majesté promet formellement de sauvegarder
les intérêts Je ses sujets catholiques, ainsi que la
dignité et l'indépendance du Souverain PoDtife.
L'accord ne s'établit pas entre les deux grands
éléments des délégations autrichiennes. La Nou
velle Presse de Vienne nous apprend que la
fraction cisleitbane, qoi avait invité les délégués
hongrois un banquet dont les apprêts étaient
déjà faits dans un des principaux hôtels de la ca
pitale, a reçu au dernier moment avis que la
délégation hongroise ne croyait pas encore le mo
ment venu de fraterniser avec ses collègues
cisleithans Celte situation ne fait pas augurer
favorablement du résultat des prochaines délibé
rations communes.
Journal du Jeudi