D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
51«ie Année. Mercredi 15 Juillet 1868. No 5,299.
REVUE POLITIQUE.
L'AVEUGLE D'ARGENTEUIL.
L'Indépendance croit savoir que M. Brial-
mont, lieutenant colonel au corps d'état*
major, vient d'être chargé par le Roi de
la direction de la division des opérations
militaires, qui vient d'être créée au minis
tère de la guerre selon le voeu de la com
mission d'organisation militaire.
Nous apprenons que M. ADLER, cé
dant aux sollicitations de sa clientèle,
viendra un jour tous les mois, Ypres.
C'est une heureuse nouvelle pour notre
ville, car la réputation, le talent et l'estime
générale dont il jouit depuis longues années
sont un gagede confiance pour les personnes
qui ont recours son art. N'oublions pas
qu'il est le seul dentiste dans toute la Bel
gique qui a été couronné d'une mention
honorable de la faculté de médecine.
M. ADLER, a déjà produit plusieurs ou
vrages remarquables, entr'autres l'osléo-
légie, traité sur l'art dentaire, en vente
chez les principaux libraires de Bruxelles.
Avant-hier est pieusement décédé
Louvain Monsieur Joseph-Charles Ghis-
lain Baron Van Grave, ancien inspecteur
des eaux el forêts II était Dé Bruxelles
le 13 novembre 1789.
M. le Baron Van Grave avait longtemps
habité la ville tl'Ypres où il jouissait de
l'estime générale.
Y PUE S.
Avant-hier, vers les 4 h. de relevée, un
apprenti attaché la fabrique Barbier-Mu-
lier, prenait son repas au bord de l'eau,
quand il reçut sur la tête une lourde pierre
qui le culbuta dans l'élément liquide et lui
causa une grande perte de sang. La che
mise du hlesséétait littéralement imprégnée
de sang. Conduit au bureau de police,
l'apprenti fut autorisé être transféré
l'hôpital.
Le tribunal de police correctionnelle
aura connaître vendredi prochain, de 17
contraventions au règlement interdisant
la divagation de chiens, non munis d'une
muselière.
Depuis dimanche dr nous sommes sous
l'influence de chaleurs sénégaliennes qui
paraissent devoir se maintenir quelque
temps encore, malgré les subits revire
ments de température que nous avons
constaté ces jours derniers.
Le Lieutenant Géuéral Goethals, accom
pagné de deux aides de camp est arrivé
hier en celte ville, pour inspecter le 10* de
ligne.
Les suites du déraillement qui a eu lieu
la semaine dernière, quatre kilomètres
d'Ostende, ont été pins terribles que nous
l'avions cru d'abord. Le chef du train, dont
les blessures paraissaient ne pas être bien
graves, estmortdans la nuit de mardi, la
LE PBOPAGATEUB
FOI CATHOLIQUE. - CONSTITUTION BELGE.
Il paraît que la publication récemment Jaile
Rome de la bulle d'indiclion du concile œcu
ménique va être suivie d'une Jormalité diplo
matique. Le cardinal Antonelli adresserait aux
gouvernements représentés près du Saint Siège
une lettre close pour demander de ne mettre
aucun obstacle au voyage des èvêques Rome
et de leur faciliter les moyens de répondre
fappel du Souverain-Pontife. On voudrait
espérer pour l'honneur des États chrétiens
qu'aucun d'eux ne repoussera une demande si
naturelle.
En France, on infère du discours prononcé il
y a trois fours au Corps législatif par M. Ba-
roche que le gouvernement aurait la pensée et le
désir de se faire représenter au futur concile.
Nous ignorons dit ce propos /'Union si la
cour de Rome exaucera ce vœu, et si les autres
puissances catholiques manifesteront la même
intention.
Les provinces pontificales continuent, comme
la capitale elle-même, jouir du calme le plus
complet.
Si le télégraphe de Madrid n'est plus com
plètement muet, nous n'en sommes guère plus
avancéscar la communication qu'il nous
transmet ne nous apprend aucun fait nouveau
relativement a la conspiration militaire. Il est
certain que le duc de Monlpensier sur lequel
on fait peser de graves soupçons, a quitté f Es -
pagne, mais les renseignements ne s'accordent
pas sur la direction qu'il a prise; les uns le
font partir pour l'Angleterre, tandis que les
autres le font voyager en Portugal. Peut être
a-t il, en effet, traversé ce dernier pays pour
aller s'embarquer Lisbonne.
La Patrie de Paris a sur la conspiration des
détails moins vagues, qui lui viennent sans
doute de source diplomatique. D'après ce jour
nal, la population espagnole est restée absolu
ment étrangère au mouvement, qui est Vœuvre
de quelques généraux et anciens ministres.
A Barcelone, où les insurrections trouvaient
autrefois leur premier appui, l'indifférence a
été complète. A Madrid, les habitants sont las-
ANECDOTE NORMANDE DD XVI* SIÈCLE.
(Suite. Voir notre dernier numéro
C'était dans ce sanctuaire auguste, qne la veille
de Noël, an matin, MM. de la Grand'Cbambre et
de la Tournelle étaient rénnis a l'extraordinaire.
Mais cette fois il avaient revêtu leurs robes noires,
et k leur attitude triste et peosive on pouvait pres
sentir qu'ils allaient remplir un raioistère de ri
gueur. Par toute la ville on s'interrogeait avec
curiosité sur ce qui pouvait se passer au parlement
dans le secret du conseil. L'assassinat du marchand
de Lucques, l'arrestation du conpable présumé, la
découverte du cadavre de la victime, le témoignage
inespéré reodn Argenteuil par unaveugle, étaient
un texte inépuisable d'entretiens et de conjectures
pour une foule immense qui se pressait dans la
cour et dans tontes les avenues du palais; et chacun
se disait que le jour était venu sans doute, où en
fin toutes les indécisions allaient cesser, le jour
qui devait rendre la liberté un innocent ou en
voyer un monstre k i'échafatid.
Au parlement, après de longs débats, on s'était
décidé k entendre l'a«eogle d'Argeoteuil. Gervais
sés d'agitations révolutionnaires eldu préjudice
qu'elles leur causent. Ils se soucient fort peu de
se soulever pour faire le succès de telles ou
tel/es ambitions personnelles. Le maréchal Es
par lero, sollicité d'entrer dans la conspiration,
avait refusé depuis plus d'un mois de s'y asso
cier. En Andalousie, où l'on avait établi le
foyer de ce complot militaire et politique,
aucun mouvement n'a eu lieu. Les mesures
promptes et fermes du gouvernement ont pré
venu toute manifestation.
Le mouvement de transformation de la Tur
quie s'accentue d'une façon remarquable. Des
élections municipales viennent d'avoir lieu
dans les principales villes chaque électeur
avait le sentiment de ses devoirs les choix se
sont faits avec beaucoup d'intelligence, et rien
n'est venu troubler les opérations électorales.
NÉCROLOGIE.
avait paro devant les chambres assemblées. Sa dé
position, naïve et circonstanciée, avait fait une im
pression profonde; mais des doutes préoccupaient
les esprits. Quelle apparence d'apparence d'aller
mettre la vie d'un homme k la merci des réminis
cences fugitives d'un mandiant aveugle qui n'avait
pu qu'entendre? Était-il possible que cet homme
fût assez sûr de son ouïe, de sa mémoire pour re
connaître une voix qui n'avait retenti qu'ooe seule
fois k ses oreilles? Il fallait l'éprouver, il fallait
faire monter successivement tons les prisonniers de
la conciergerie an palais, et avec eox Martel. Si,
après les avoir entendus parler, l'aveugle, sponta
nément et sans faillir, sans hésiter une seule fois,
distinguait toujours et reconnaissait constamment
la voix qui naguère l'avait tant frappée, ce dernier
indice, rénni h tous les autres, ne permettrait plus
d'iocertitode et enfin un grand exemple serait
donné. Ce n'était pas sans dessein que la veille de
Noël avait été choisie pour cette épreuve, inouïe
jusqu'alors dans les vastes judiciaires. Faire venir
ainsi tous les prisonniers un jour ordinaire, eut été
éveiller leurs soopçons leur suggérer des roses et
et mettre k l'aventure le succès de l'expérience
tonte nouvelle qui allait être teotée. La veille de
Noël, au contraire, il y aorait eu grand étonnement
k la conciergerie, si l'ordre ne fut pas arrivé de faire
NOUVELLES DIVERSES.
monter tons les délenos an palais; l'nsage voulant
qne la veille des grandes fêtes, MM. de la Grand'
Cbambre mandassent.soccessivement devant eux
cbacon des prisonniers. Quelquefois même, ces
roagistratssonverains, k l'occasion el pour révérence
de ta fesle (comme on parlait lors), donnaient la
liberté k des prisonniers détenus pour des causes
légères.
Avant tout, il fallait faire comprendre k l'aveu
gle ce qu'il y avait de sacré dans le ministère dont
le ciel semblait l'avoir investi. A la tète du Parle
ment était le président Feu, qne si sagesse et sa
gravité avait fait nommer Caton le Censeur.
Gervais, dit-il k l'aveugle d'nn ton solennel
et pénétré, Ik, an-dessos de nous, est l'homme-
Dieu, qui fnt mis en croix et mourut injustement
sur de faux témoignages. Jurez par cette'imape,
jurez par Dieu lui-même, qui est présent ici et
nous atleod, qne vous n'affirmerez rien dont vous
ne soyez aussi sûr qne vous l'êtes de votre existence
qne vous l'êtes du malheur qui vous prive de voir
le soleil. Après ce serment, que le -ieillard prêt»
avec cet accent de l'âme qui ne pe'tuet point de
mettre en doute la sincérité du témoin, commença
l'épreuve qu'avaient imaginée les ancrions du pur -
leoient. Déjà dix-huit prisonniers avaient corn pain
el répondu aux questions qu'on leur avait adressé