L'équinoxe de printemps a été mar
quée par un temps splendide, mais avec
une brise assez âpre du Nord et de l'Est,
tempérée par Un soleil magnifique.
Les lamentables événements de Paris
orft fait fuir ~de nouveau de cette ville de
notnbréûses familles qui viennent rtîfu-
gier eu Belgique et notamment Bruxelles,
où quelques unes sont arrivées depuis
lundi.
Un crime a été commis lundi soir
Saint-Ghislain. Vers neuf heures la nom
mée Adèle Turiau, surnommée la Fille du
Gueulard, marchande de Volailles très con-
nue Mons a été Assassinée dans son do
micile sur la Grand'place on coupé la
gorge cette malheureusequi a encore
vécu jusqu'à minuit mais sans reprendra
connaissance.
Le parquet s'est rendu ce matin sur les
lieux du crime. (Organe.)
Ceci donnera une idée de la haine
que lès Français ont vouée l'Allemagne.
La scène se passe l'Académie de méde-
cibe, et é'èSt un èaVànt qui parle
M. lè prôfesséur Bébier propose
l'Académie de rayer de la liste de ses mem
bres associés où correspondants étrangers
les noms de ceux qui appartiennent aux
Etats faisant partie de la Confédération de
l'Ailetiiàghe du Nord. Nous hé devons plus,
dit il, avoir rien de commun avec une pa-
rérilé nationèt ribùs devons confondre
dans la même haine les savants dë l'Alle
magne qui ont lâchement et servilement
insulté la nation française. On dit, s'écrie
M. Béhiét, qùe nous Avons èncoHe du sang
germanique dans les Veinés; pouf rhbi, je
ne lé crois pàjs, et si je le cCoyaisje n'hé
siterais pas me faire saigner bla'nc!
Un autre membre, M. Bouley, tout en
s'âssociant aux sentiments de M. Bébiér, a
proposé la radiation dés correspondants
allemands.
Mais que fera l'Académie, s'écrie M.
Bébier, si les correspondants allemands
viennent assister nos séances? On lè
vera la séance, répond quelqu'un. Cela
Serait trop commode, en vérité, objecte M.
Bouley, Içs Allemands seraient capables de
nous faire lever toutes les séances, s
L'Académie a renvoyé la proposition de
M. Béhier l'examen du conseil.
Mardi, vers midi, une grande anima
tion régnait La Villelle, rue de Flandre,
en face de la salle dite de la Marseillaise.
Les grilles étaient fermées. A l'intérieur,
un groupe nombreux de gardes nationaux
causait avec animation; sur le trottoir, des
curieux parlaient bruyamment, gesticu
laient et voulaient fentrer.
Je m'informai des causes de cette émo
tion populaire et de lafermeturede la salle.
On me répondit que c'étaient trois Prus
siens qui venaient d'être arrêtés. Voici
dans quelles circonstances.
On avait su que le chef prussien de la
gare de Pantin devait venir -Paris. On
avait immédiatement envoyé Pantin trois
gamins intelligents, avec mission de sur
veiller le départ du monsieur, et, quand il
entrerait, de venir en avertir. Les gamins
s'étaient acquittés de leur fonction avec
autant d'adressequédezèle, et midi moins
quelques minutes on avait arrêté une voi
ture qui passait rue dè Flandre. Celte voi
ture contenait trois personnes: le chef de
gare de Pantin le chef du bureau des ex
péditions et un ambulancier attaché l'ad
ministration ennemie.
On les fit descendre. Le bureau du co-
mité qui lient journellement séatice dans
ls salle de la Marseillaise se réunit aussitôt,
et, apfès discussion, déclara aux.trois Al
lemands qu'ils étaient de très bonne prise
et qu'ils ne seraient relâchés qu'à deux
conditions la première, qu'ils payeraient
une rançon de dix mille francs; la seconde,
qu'ils nous feraient rendre le capitaine ad-
judant major de la garde nationale détenu
illégalement au fort d'Auhefvilliers.
Les Prussiens ont demandé réfléchir.
Nous tiendrons nos lecteurs au courant
du dénouement de cette capture, qui était
le bruit dû dix neuvième arrondissement.
(Le Rappel.)
Une lettre de Francfort rapporte un
épisode assez piquant du passage par cette
ville du chancelier del'empired'Allemagne,
comte de Bismark, retournant de Versailles
Berlin. Le fameux ministre a été accueilli
comme un triomphateur il a été escorté
sur le parcours de la gare de l'Ouest la
gare de l'Est parla population tout entière
poussant des cris de joie, éclatant en ap
plaudissements et en acclamations
Avant de se remettre en route, le comte
de Bismaik s'attabla dans la salle d'attente
de la gare pour prendre un modeste repas
composé d'une tranche do jambon et d'un
verre de bière La population l'entoura là
encore; et une députation des bourgeois,
s'engageanl dans la salle, s'avança au de
vant du chancelier. Le chef du groupe
tenait 11 main un petit paquet, de forme
raystériètse qu'il agitait avec émotion. Il
s'approcha de l'homme d'Etatjadis si im
populaires Francfort, tant acclamé aujour-
d'hui et lai adressa ses paroles
Excéilencd, nous tous bourgeois de
Francfort, nous prenons la liberté de vous
dire la signification des vivats qui ont salué
votre patsage par notre ville. Nous accla
mons ec vous, monsieur le comte, un
homme qui personnifie l'honneur vengé de
la nation allemande. Nous saluons la paix
glorieuse dont nous vous sommes redeva
bles. Nois poussons un cri de reconnais
sance et en même temps de respect. Et
comme vous avez encore devant vous...
Ici l'orateur parut hésiter; il continua
néaumoiis tout en retirant l'enveloppe de
papier qii entourait le mystérieux objet
qu'il tenait la main
El comme vous avez encore devant
vous un rajet fort long avant d'être rendu
Berlin,nous avons songé vous offrir
quelque chose qui vous fera du bien pen
dant le voyage...
Le conte de Bismark avait écouté en
souriant le discours, naïvement débité de
bourgeon de Francfort. Mais tout diplo
mate consommé qu'il est, il ne put conser
ver son sérieux en voyant apparaître l'objet
qui lui étiit présentéen manière de cadeau.
C'était uc gigantesque saucisson de Franc
fort.
Veuille Dieu que vous nous gouverniez
encore pmdant cinquante ans! ajouta le
bourgeois au saucisson.
Cinquante ansc'est beaucoup
répliqua A. de Bismark, qui avait gracieu
sement accepté le naïf cadeau, je me
eontenterais facilement de quinze ans.
Mais, soy?Z tranquilles, mes amis, tant que
nous vivrons, vous et moi, il n'y aura décidé
ment plus de guerre.
Vous pouvez penser l'enthousiasme que
produisirent ces paroles. Le chancelier de
l'empire salua par là dessus il remonta
dans son coupé, et le train partit au milieu
d'acclamations formidables.
Victor Hugo confondu. On rapporte
propos de la démission de M. Victor
Hugo un mot d'une vérité sanglante dit
au poète dévoyé par un jeune député de
la gauche. Un groupe de représentants
s'étaient rendus près de l'auteur des Odes
et Ballades, pour lui demander de retirer
sa démission. M Hugo s'y refusa etex
primant ses motifs avec emphase, il s'écria
avec un ton ibéairal Savez vous ce qui
manqué à- la France? Il lui manque une
chose...
La simplicité, interrompit froide
ment M Pant Bethmont.
Victor Hugo resta cloué, comme si ce
mol lui eut instantanément enlevé la
parole.
L'éruption du Vésuve présentait le 9
au soir un spectacle magnifique.
La lave sortait eu grande abondance du
nouveau cône qui s'écroule tantôt d'un
côté, tantôt de l'autre, mais qui se reforme
promptemeut avec les matières qui sorleDt
parfois de sa base et parfois de sa cime. Ce
fleuve de feu arrivait jusque sous les ro
chers du mont Somma et on distinguait
une immense fournaise qui flamboyait
vivement dans VÀtrio del Cavallo. Tout ce
feu se réfléchissait dans la mer et élevait
un grand pin de fumée rougeâtre. Le spec
tacle, vu de la Riviera, était splendide.
FRANCE»
Le Gaulois publie ce qui suit en tête de
ses colonnes, en le datant de dimanche, 3
heures du matin
Une seconde édition de Y Avant Garde
donne les affreuses nouvelles que voici
Paris, 17 mars, soir.
L'armée de Paris s'organise rapidement; la plo-
part des régiments seront armés demain. Plusieors
journaux croient que l'autorité «a prendre des me
sures énergiques contre les mesures de Montmartre.
M. Victor Hogo arrivera demain avec le corps
de M. Charles Hogo, ses amis l'atteodront ao che
min de fer.
Le maréchal Mac-Mahon a exprimé la résolution
de rentrer dans la vie privée; il est prêt 1 donner
toot appui possible au gouveruemeut. Il s'occupe
activement de la loi sur la marine marchaode.
Les membres do gouvernement ont quitté le
ministère des affaires étrangères vers dix heures et
se sont transportés b l'École militaire, ainsi qné le
général Vinoy el le général d'Aurelles de Paladioe.
Nous apprenons que des ouvertures qui été faites
par le comité de Montmartre au gouvernement.
M. Emile Labiche, secrétaire général du minis
tère de l'intérieur, mandé a minuit par dépêche da
général Vinoy, s'est rendu immédiatement a l'École
militaire, où des pleins pouvoirs lui ont été donnés
pour faire les concessions les plus larges, eu tant
qu'elles seraient légitimes.
M. Labiche est allé d'abord b la mairie du deu
xième arrondissement où's'étaient rénois dans la
soirée les membres du comité de Montmartre, mais
ces derniers avaient quitté la rue de la Banque,
appelés b la mairie du premier arrondissement par
M. Jules Ferry, qui avait exprimé le désir de leur
remettre ses pouvoirs de maire de Paris.
M. Labiche, accompagné d'on adjoint, se rendit-
immédiatement a la mairiede Saint-Germain-l'Au-
xerrois.
Les concessions réclamées par le comiiédiffèreot
peu de celles proposées dans la journée
i# La nomination de M. Langlois comme général
commandant en chef de le garde nationale.
2* M. Edmond Adam b la préfectore de police.
5* M. Dorian, b la mairie de Paris.
4° Le général Billot, membre de l'Assemblée
nationale,commandant l'armée d-e Paris.
Exécution des généraux Clément Thomas
et Lecomte.
Vers trois benres de l'après-midi, le général
Clément Thomas, ancien commandant supérieur
de la garde nationale a été reconnu en bourgeois
aux abords de la butte Montmartre.
Immédiatement arrêté, il a été conduit au Châ
teau Rouge.
Une heure après environ, après un jugement
sommaire, il a été conduit,avec le général Lecomte
dans un jardin attenant a la butte et fusillé.